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Jours tranquilles à Paris
2 mars 2017

Je suis bordélique, et alors ?

Une étude menée en 2014 révèle que les environnements brouillons favorisent l’émergence de nouvelles idées.

Oui, on peut s’épanouir dans le bazar. Un livre qui vient de paraître réhabilite tous ceux que le rangement hérisse.

Par   Audrey Renault

Amis désordonnés, le temps est venu de déculpabiliser. Des chercheurs de Yale (Etats-Unis) viennent de révéler que le cortex cingulaire antérieur, la zone de notre cerveau associée à la douleur, est stimulé lorsque nous nous débarrassons des objets qui nous entourent. Lors de votre prochaine crise de rangement, réfléchissez-y donc à deux fois avant de balancer cette vieille pile de magazines lus il y a des années mais qui végètent sur un coin de table ou ce vieux pull que, certes, vous ne mettez plus, mais qui vous rappelle des vacances au ski. Pour la Canadienne Jennifer McCartney, aucune raison de s’imposer la corvée masochiste du rangement. Son best-seller outre-Atlantique « De la joie d’être bordélique » (Ed. Mazarine, 10 €) a débarqué la semaine dernière dans les librairies françaises. Une contre-attaque bienvenue face à la doxa de l’organisation que nous rabâchent en chœur coachs de vie et gourous du développement personnel.

« Si votre désordre ne menace pas votre santé, votre sécurité ou celles de ceux qui vous entourent, alors il n’y a pas de quoi en faire un drame », assure le psychologue-psychothérapeute Emeric Languérand. « Et puis, qu’est-ce qu’être bordélique ? Une pile de vêtements sur une chaise peut vous paraître un vrai fouillis alors que votre ami s’y retrouvera parfaitement. Tout est une question de vision des choses. Certains peuvent d’ailleurs être très organisés au bureau mais incroyablement bordéliques dès qu’ils arrivent chez eux », explique-t-il.

Plus créatifs ?

Une étude de 2014, menée par la docteure en psychologie Kathleen Vohs de l’université du Minnesota (Etats-Unis), révèle que les environnements ordonnés encouragent ce qui est conventionnel là où un paysage plus chaotique stimule l’émergence de nouvelles idées. Les personnes qui vivent entourées de bazar seraient ainsi plus créatives, voire plus intelligentes. « Si un bureau en désordre est le signe d’un esprit désordonné, alors de quoi un bureau vide est-il le signe ? » s’amusait Albert Einstein, connu pour ses plans de travail en chantier. Emeric Languérand nuance  : « Il n’existe aucun lien entre organisation brouillonne et esprit supérieur. La créativité ne découle pas du désordre, c’est l’inverse. Chez les grands chercheurs ou artistes, c’est le génie productif qui prend le pas sur l’ordre domestique », explique-t-il en prenant pour exemple Pablo Picasso qui, se consacrant à son art, ne prenait pas le temps de ranger. Une fois sa maison envahie par son foutoir créatif au-delà du supportable, il la vendait, en rachetait une autre et recommençait son petit manège. Aucune raison donc de vous flageller pour quelques malheureuses chaussettes qui traînent.

Et chez les enfants ?

Si les adultes peuvent gérer leur propre bazar, pour les enfants et les ados, c’est une tout autre affaire. Ce sont les parents qui font face aux champs de bataille laissés par leur progéniture. A l’image de Pascal qui se désole du « foutoir » de Léa, 13 ans : « Sa mère et moi passons notre temps à nous battre pour qu’elle mette un peu d’ordre. Pas par souci d’autorité, c’est plus pour la préparer au monde du travail ou à la vie à deux. » Une bonne initiative, selon le docteur Emeric Languérand : « Ranger sa chambre est l’occasion de comprendre que la réalité n’est pas toujours négociable. Si des parents peuvent tolérer un désordre, employeurs ou conjoints ne seront pas forcément aussi conciliants. » Léa, elle, assume : « Ranger, je considère que c’est une perte de temps. Mais, dès que je ne m’y retrouve plus, je trie et nettoie. » Pour Emeric Languérand, mieux vaut pourtant ranger au fur et à mesure pour « intégrer dans son quotidien des tâches qui ne sont pas des sources de plaisir. C’est un début d’apprentissage de la nécessité de tenir compte des autres ».

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