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Jours tranquilles à Paris
3 juin 2017

La Russie n’appliquera pas l’accord sur le climat avant 2020

Par Isabelle Mandraud, Moscou, correspondante

Le président Vladimir Poutine, qui refuse de « juger » son homologue Donald Trump, salue le texte né de la COP21 mais attend des précisions « techniques ».

Au lendemain de l’annonce par Donald Trump du retrait américain de l’accord de Paris sur le climat, et tandis que les réactions indignées dans le monde entier continuaient à pleuvoir, Vladimir Poutine s’est plu à jouer le rôle de modérateur.

« Cet accord, a déclaré le président russe, ne doit entrer en vigueur qu’à partir de 2021, nous avons encore le temps… » Et de fredonner Don’t Worry, Be Happy de Bobby McFerrin, comme si de rien n’était, après qu’à ses côtés, le premier ministre indien, Narendra Modi, eut rappelé l’engagement de l’Inde au « nom des générations futures ».

C’est un Vladimir Poutine sûr de lui qui est apparu, vendredi 2 juin, au Forum économique de Saint-Pétersbourg, le Davos russe. « Repos ! », s’est même permis le chef du Kremlin alors que la salle bondée, composée de chefs d’entreprise et de diplomates s’était levée à son arrivée. « Welcome » ont traduit les interprètes.

La salve de critiques internationales qui s’est abattue sur Washington n’est pas pour déplaire au chef du Kremlin. « L’accord de Paris est un bon document qui a pour but de résoudre un des problèmes majeurs de notre époque », a-t-il souligné. Mais sur le fond, la Russie qui reste l’un des derniers grands pays à ne pas avoir ratifié le texte qu’elle avait approuvé en décembre 2015, s’interroge.

Ne pas se précipiter

« Il est clair que sans la participation des Etats-Unis, l’accord de Paris ne sera pas opérationnel, parce que c’est l’un des pays les plus grands émetteurs [de gaz à effet de serre] », confiait dans les couloirs Sergueï Beloussov, conseiller économique du président, cité par l’agence Tass.

« La Russie prévoit de ratifier [cet] accord, même si la décision finale de le ratifier ou non, sera prise au plus tôt en janvier 2019 », a fait valoir, de son côté le ministre des ressources naturelles et de l’écologie, Sergueï Donskoï.

« Nous devons, a poursuivi ce dernier, d’abord prendre en compte les stratégies climatiques des pays des BRICS [organisation qui regroupe, outre la Russie, l’Afrique du Sud, le Brésil et l’Indeet la Chine], de l’Union européenne, de la Norvège, du Japon, de la République de Corée et d’autres dans le domaine du développement à faible teneur en carbone. Leur mise en œuvre, dans ces pays, peut amener à des restrictions d’importations de certaines productions en raison de leur niveau élevé d’émission de gaz à effet de serre, ce qui établirait de fait un “protectionnisme carbone” ».

Entre la détermination des uns et le « niet » américain, Moscou, qui s’est engagé à réduire de 70 % ses émissions d’ici à 2030 par rapport à 1990, juge prudent de ne pas se précipiter. « Nous voulons attendre que les règles de distribution des ressources et autres points techniques très importants soient définis », a indiqué M. Poutine, en soulevant l’obstacle financier de sa mise en œuvre. « Les Etats-Unis, a-t-il souligné, se sont engagés à investir 100 milliards de dollars pour venir en aide aux pays en voie de développement. »

Marges de manoeuvre

Ces arguments en main, M. Poutine s’est refusé à « juger le président Obama, pardon, le président Trump parce que le président Obama a pris cette décision et que le président actuel pense qu’elle n’a pas été assez réfléchie ».

A l’opposé des Européens qui refusent de renégocier quoi que ce soit, le chef du Kremlin estime qu’il existe des marges de manœuvre, « même si on ne peut pas faire machine arrière ». « Il faut créer les conditions d’un travail en commun constructif », a-t-il insisté, car si un pays comme les Etats-Unis, parmi les plus grands émetteurs de la planète, n’en sont pas, « on ne pourra pas, dans ce cas-là, conclure ni signer aucun accord ».

Interrogé par la journaliste américaine de NBC, Megyn Kelly, bête noire de Donald Trump, M. Poutine n’a pas boudé son plaisir non plus lorsqu’il s’est agi de réfuter les accusations d’ingérence russe aux Etats-Unis, ou de dénoncer les sanctions s’autorisant, ici aussi, une référence d’Outre-Atlantique. « Les rumeurs sur ma mort ont été très exagérées », a-t-il ironisé en citant l’écrivain et essayiste Marc Twain.

Isabelle Mandraud, Moscou, correspondant

UE-Chine : l’unanimité sur le climat minée par les questions commerciales Ils veulent sauver les accords de Paris sur le climat, sont au diapason dans leur critique de la décision de Donald Trump mais… pour la deuxième année consécutive, l’Union européenne (UE) et la Chine se sont quittés sans accord écrit. Ils se sont longuement empoignés, vendredi 3 juin, sur des questions commerciales, ce qui a empêché la signature d’un texte par les deux parties. La question du statut d’économie de marché de la Chine a été le principal point d’achoppement. Bruxelles refuse d’accorder ce statut à Pékin en raison du dumping auquel se livre la Chine dans divers domaines, dont l’acier, où elle alimente d’importantes surcapacités. Acquérir le statut d’économie de marché permettrait à la Chine d’échapper aux droits antidumping qui peuvent actuellement lui être imposés. Des discussions se poursuivent au sein de l’Organisation mondiale du commerce, saisie par Pékin.

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