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Jours tranquilles à Paris
1 octobre 2017

Paris : le musée Yves-Saint-Laurent ouvre ses portes ce dimanche

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Ce Dimanche, l'ancienne maison de couture du créateur expose ses vêtements, ses carnets d'esquisses et objets personnels.

On semble presque les apercevoir, les génies du lieu. Yves Saint Laurent, disparu en 2008, et Pierre Bergé, son compagnon et associé de toute une vie, qui avait tant voulu, et conçu, ce musée, décédé le 8 septembre, à quelques semaines de l'inauguration. Le musée Yves-Saint-Laurent ouvre ses portes dimanche, par une journée gratuite à Paris, dans l'ancienne maison de couture du créateur.

Bergé, on entrevoit, saisi, la plaque de son bureau historique au détour d'une salle. Saint Laurent, on entre dans son antre, bureau-studio reconstitué à l'identique, à son emplacement même : le grand miroir d'essayage, ses lunettes — les vraies — posées sur son petit bureau, une photo de Catherine Deneuve, ses crayons à papier et de couleurs, les dessins qu'il semble avoir crayonnés à l'instant même et qui ont la fulgurance d'esquisses de Matisse. On savait Saint Laurent très grand dessinateur, et les couleurs irradient. De la feuille au tulle, il épure : les dizaines de vêtements présentés — sélection qui tournera parmi des milliers de pièces — tendent souvent au noir et blanc. Comme les grands photographes.

Le pouvoir aux femmes

M comme mode et musée. Dès 1982, Yves Saint Laurent appose la lettre M, ou parfois « Musée », sur des pièces qu'il ne veut pas vendre mais conserver pour la postérité. « Avant lui, les prototypes de vêtements étaient donnés aux mannequins ou vendus aux clientes. Il n'y avait pas du tout d'aspect patrimonial dans la mode », souligne Olivier Flaviano, le directeur du musée Yves-Saint-Laurent Paris (un autre issu de la même Fondation, ouvre le 16 octobre à Marrakech, où le créateur aimait résider).

L'histoire de la mode et des femmes : « Elles ont toutes porté, même sans le savoir, du Yves Saint Laurent. Sans lui, on ne vendrait pas autant de cabans, de trench-coat, dans les enseignes les plus grand public, ajoute le directeur. C'est son héritage le plus formidable. Comme disait Pierre Bergé, Chanel a libéré la femme, Yves Saint Laurent lui a donné le pouvoir. »

Le couturier voyait bien plus loin qu'un défilé automne- hiver : « J'aimerais que, dans cent ans, on étudie mes robes et mes dessins », disait-il. C'est bien parti : l'établissement inauguré par la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, avant-hier, a reçu le label Musée de France, qui rend ses collections inaliénables. On ne peut plus les vendre ni les disperser. Sa robe Mondrian fétiche est désormais aussi éternelle que le tableau du peintre dont elle s'inspire.

"Il était tordant"

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 - Paule Monory et Yves Saint Laurent, en 2002, dans le studio du créateur. © Paule Monory

Elle était chargée de la « bible » d'Yves Saint Laurent. Ce « livre de collection », où le moindre détail -- références des tissus choisis, des couleurs, boutons, opérations à réaliser, prix -- de chaque vêtement était scrupuleusement noté. Paule Monory, assistante studio de « M. Saint Laurent », a travaillé à ses côtés de 1979 à 2002, jusqu'à la retraite du couturier. Elle était l'une des cinq ou six personnes présentes quotidiennement à ses côtés dans son bureau reconstitué au musée. Elle raconte.

Ce bureau du musée est fidèle à l'atmosphère que vous avez connue ?

Paule Monory. Oui, on voit bien cette économie de moyens. M. Saint Laurent aurait pu avoir tous les plus beaux bureaux du monde mais, vous avez vu, c'est tout simple.

C'était une ruche ?

Une ruche silencieuse. M. Saint Laurent faisait quatre collections par an avec le prêt-à-porter. Au minimum. Un défilé, ça revenait vite. Il travaillait d'abord chez lui, à Marrakech ou à Deauville, puis il arrivait avec un ensemble de croquis et les distribuait aux chefs d'ateliers, aux tailleurs... Chacun repartait avec son dessin. Vous avez vu aussi le grand miroir, on faisait des essayages avec un mannequin, d'abord en utilisant de la toile puis, seulement après, les tissus définitifs, pour économiser. Quand il faisait une critique, c'était au premier coup d'oeil, le chef d'atelier comprenait tout de suite et repartait. On recommençait les essayages plus tard. C'était un bazar vivant, éternellement en transformation.

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Comment était-il ?

Au début, il fallait montrer patte blanche. M. Saint Laurent était très intime avec Anne-Marie Munoz, la directrice du studio, et Loulou de la Falaise (mannequin puis créatrice de bijoux), très inspirante, très gaie, et énorme travailleuse, contrairement à l'image qui est parfois donnée d'elle. Entre eux trois, c'était différent, ils se voyaient beaucoup, étaient amis depuis très longtemps. Elles le faisaient rire et lui aussi était tordant. Moi, j'étais l'une des assistantes, c'était un monde que je ne connaissais pas. Mais on était comme une famille resserrée, avec ses histoires, ses secrets. M. Saint Laurent essayait les chapeaux, hilare, comme nous.

Ce n'est pas l'image qu'on a de lui...

L'ambiance était sévère, avec une haute concentration, mais il savait reconnaître le travail des gens. Il nous amenait à des moments inoubliables, les salles debout lors des défilés, des rappels incroyables. Toute cette gloire-là retombait un peu sur nous. Il était émouvant, et intense. On l'adorait, en fait.

Pratique

Musée Yves-Saint-Laurent, 5 avenue Marceau (Paris XVIe), gratuit demain de 9h à 19h. Nombre de visiteurs limité. Puis à partir de mardi, entre 11h et 19h, de 7 à 10 €, Museeyslparis.com.

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 - Le bureau du célèbre couturier français a été recréé à l'identique. © Luc Castel

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