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Jours tranquilles à Paris
9 janvier 2018

1514. Les funérailles d'Anne de Bretagne

Épuisée par les grossesses et les drames, Anne de Bretagne s'éteint le 9 janvier 1514.

Ses funérailles durent trente-neuf jours et demeurent parmi les plus grandioses et les plus coûteuses des souverains français.

En ce début d'année 1514, la reine de France se meurt, épuisée par une quinzaine de grossesses en vingt ans. Seules deux de ses enfants, Claude et Renée, ont survécu. Son mari, Louis XII, est absent. Il est allé combattre les Anglais et Maximilien d'Autriche dans le nord du royaume, après avoir été expulsé d'Italie. Un véritable lien d'affection unit cependant la duchesse souveraine de Bretagne, deux fois reine de France, et Louis d'Orléans qui a d'ailleurs combattu en 1487, à Saint-Aubin-du-Cormier, dans l'armée du duc François II contre les Français.

Anne de Bretagne décède le 9 janvier, vers 6 heures du matin, dans la chambre du donjon de Blois, alors résidence des souverains français. Ses obsèques vont durer trente-neuf jours. Dans une étude monumentale, Jacques Santrot a étudié cet événement politique, symbolique et culturel sans précédent. Nous disposons de nombreux documents sur ces obsèques qui restent exceptionnelles par leur coût, sans doute l'un des plus importants de l'Histoire de France, c'est-à-dire entre 44.000 et 60.000 livres de l'époque. La principale dépense concerne les bougies et les cierges. Pour Anne de Bretagne, on brûle, en effet, des tonnes de cire...

Embaumement royal

Après son trépas, la reine est soumise à une toilette mortuaire et aux différentes étapes de son embaumement. La dépouille est ainsi éviscérée et plusieurs organes, parmi ceux les plus rapidement dégradables, sont prélevés. Conformément au souhait d'Anne, le coeur est également mis à part, afin qu'il soit rapporté à Nantes. Au sixième jour, Anne de Bretagne est transférée dans la salle d'honneur de Blois, en habit d'apparat. Pendant plusieurs jours, tous les grands du royaume viennent lui rendre hommage. Ce n'est que le 17 janvier que le corps de la reine est placé dans son cercueil de plomb, afin que sa dépouille soit transférée jusqu'à la nécropole royale de Saint-Denis. Plusieurs centaines d'offices religieux sont donnés pendant 74 jours. Selon Jacques Santrot, « cette inflation de messes est due à la hantise du salut individuel et à une croyance de plus en plus forte au purgatoire ».

Cortège impressionnant

Le 18 janvier, près de 1.700 pleurants accompagnent Anne de Bretagne jusqu'à la collégiale Saint-Sauveur de Blois, suivis des grands du royaume et des officiers de la reine. Le cortège qui s'ébranle ensuite vers Paris est grandiose, avec un absent de marque, le roi. Malgré son attachement réel à son épouse, comme ses prédécesseurs depuis le XIVesiècle, il ne peut plus assister à des obsèques afin de protéger son intégrité physique.

Tout au long du parcours, les officiers bretons sont particulièrement mis en valeur. Il s'agit d'un acte politique et symbolique, afin de consolider le processus d'union du duché au royaume. D'autant que cette union est loin d'être acquise en cas de remariage du roi et de naissance d'un héritier mâle. Les Anglais ne s'y tromperont pas en envoyant une jeune et fougueuse princesse épouser Louis XII, mais ce dernier décède avant de lui donner un enfant...

Le convoi mortuaire d'Anne de Bretagne quitte Blois et remonte vers le nord. Chaque soir, des cités l'accueillent, à leurs frais. Les cérémonies les plus fastueuses ont lieu le 14 février, lorsque la dépouille royale entre dans Paris et fait une station à Notre-Dame. Entre 12 et 13.000 personnes se pressent sur le trajet.

Le 16 février, Anne de Bretagne arrive enfin à Saint-Denis, dans la nécropole des rois de France. Par la suite, son gendre, François Ier, fera réaliser un tombeau monumental en son honneur et celui de Louis XII.

Ces funérailles exceptionnelles, leur faste et leur symbolique illustrent la volonté de la couronne française de favoriser le processus d'annexion d'une principauté alors prospère, dont l'importante flotte maritime allait constituer un atout certain. Quant à Anne de Bretagne, elle devient désormais l'un des grands personnages de l'Histoire de France.

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