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Jours tranquilles à Paris
16 mars 2018

Amoco. Les Bretons marqués à jamais - 16 mars 1978

Le 16 mars 1978, la coque de l'Amoco Cadiz se déchirait sur les rochers de Portsall. Alain Quivoron, patron de la SNSM du port et Jean-Jacques Le Lann, président de la station de sauvetage, se souviennent avec précision des journées qui ont suivi le naufrage. Ces deux Portsallais avaient 18 ans à l'époque et étaient littéralement bouleversés de découvrir leur littoral souillé de la sorte.

« Je m'en souviens comme si c'était hier. J'étais à l'école de Maistrance, à Brest. C'était le vendredi 17 mars. L'Amoco s'était échoué la veille vers 22 h. Au petit matin, une très forte odeur de gazole flottait sur la ville. Ça sentait jusqu'à Crozon, raconte Alain Quivoron, dans les locaux de la SNSM à Portsall, à quelques centaines de mètres des lieux du naufrage. Ce jour-là, de nombreuses personnes sont allées vérifier que leur cuve à fuel ne fuyait pas. Mais non, c'était l'Amoco qui perdait sa cargaison ».

Alain raconte qu'il est arrivé en soirée à Portsall et qu'il s'est rendu immédiatement sur le port pour se rendre compte de visu de l'ampleur de la catastrophe. « La mer était couleur chocolat au lait. J'ai pris une poignée de gravillons et je l'ai jetée sur la nappe. Les cailloux restaient en surface. C'était impressionnant ».

Un laissez-passer pour les habitants

Toute la journée, les radios et les télés ont relayé l'information. Dans les heures et les jours qui ont suivi, de trop nombreux curieux arrivaient à Portsall. Il faut dire que la proue du supertanker qui sortait de l'eau offrait un spectacle saisissant.

« C'était comme une immense cathédrale qui sortait des flots, poursuit Alain Quivoron. Très vite, les autorités ont donné aux habitants des laissez-passer pour écarter celles et ceux dont la présence gênait les opérations de nettoyage. L'armée de Terre avait établi des barrages et gérait la situation ».

Alain Quivoron dit qu'au début, tout le monde pensait que les stigmates de la catastrophe resteraient à jamais gravés sur la côte. « On ne s'est pas découragé pour autant. Très vite, on s'est mis au boulot. Comme c'était le début des vacances scolaires, les jeunes de la commune ont retroussé leurs manches. Mon père, qui était entraîneur de foot, avait constitué une équipe avec ses joueurs. J'en faisais partie. On a commencé à nettoyer la plage de Porz ar Vilin Vraz », juste en face du pétrolier agonisant.

Les huîtres à l'abri dans le Cotentin

La tâche était rude. Surtout qu'à chaque marée, le pétrole venait à nouveau souiller les zones nettoyées la veille. « On avait des bidons de 200 litres. On les remplissait à l'aide de seaux avec lesquels on raclait la surface. Le système D. Et ça marchait ». Jean-Jacques Le Lann écoute religieusement. Lui se trouvait à Cherbourg (Manche) quand la catastrophe s'est produite. « J'étais dans la Marine nationale. On a appris ça à la radio, à 7 h du matin. J'étais sidéré. Quelques heures plus tard, j'étais rentré. Contrairement à Alain, je n'ai pas participé au nettoyage des plages. On a été réquisitionné pour mettre à l'abri, dans le Cotentin, les poches d'huîtres des abers qui risquaient d'être recouvertes de pétrole ». Jean-Jacques est persuadé que c'est la mer d'Iroise qui a fait une très grande part du travail de nettoyage. « Elle est d'une force inouïe. Quelques mois plus tard, on ne voyait presque plus rien. Juste quelques petites irisations en creusant le sable ».

Un mal pour un bien

Alain et Jean-Jacques n'ont jamais plongé sur l'épave. « En revanche, on la voit très bien au sondeur quand on passe au-dessus. La remontée est très impressionnante ». Les deux hommes sont persuadés que cet épisode de l'Amoco a été un mal pour un bien. « Le choc a été tel qu'en termes de sécurité maritime tout s'est mis en place rapidement. Il était grand temps ».

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