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Jours tranquilles à Paris
23 juin 2018

Portrait : François Pinault, le collectionneur

pinault

Par Raphaëlle Bacqué - Le Monde

L’ancien PDG du groupe de luxe Kering est un amateur d’art contemporain aussi passionné qu’influent. En attendant l’ouverture de son musée à la Bourse de commerce de Paris, en 2019, une partie de sa collection s’expose à Rennes.

Il n’a fallu que quelques dizaines de minutes pour quitter les beaux quartiers de Manhattan, où François Pinault possède un vaste appartement littéralement tapissé de tableaux. La berline noire a remonté Lexington Avenue vers le nord, glissant jusqu’aux rues plus pauvres de Harlem. On jurerait que le quartier n’abrite que des entrepôts, mais il y a là, nichée dans une usine de quatre étages, une galerie où le milliardaire a rendez-vous.

Une formidable visibilité

En descendant sur le trottoir, il a cette phrase : « Si je n’avais pas aimé l’art, je serais resté dans ma Bretagne. » Comme si ces quelques miles entre deux mondes mesuraient cet autre chemin invisible, de la ferme de son enfance à Trévérien à l’univers restreint des plus grands collectionneurs d’art contemporain.

La veille, Caroline Bourgeois, son élégante conseillère, est venue en repérage et convenir de cette visite privée alors que la galerie n’est pas encore ouverte au public. C’est là que la Gavin Brown’s Enterprise expose les sculptures, photos et vidéos d’Arthur Jafa, un de ces artistes afro-américains qui nourrissent les nouvelles méditations de l’« Amérique noire ». Jafa est là, justement, timide et discret. Presque pétrifié par la présence de cet acheteur français dont la fortune et les « musées » à Venise et à la Bourse de commerce de Paris, à l’automne 2019, peuvent offrir une formidable visibilité.

« S’IL S’INTÉRESSE À UN ARTISTE, IL Y A DE BONNES CHANCES POUR QUE TOUT LE MARCHÉ S’Y INTÉRESSE ENSUITE. » ALAIN SEBAN, ANCIEN PATRON DU CENTRE POMPIDOU

« Vous me direz ce qu’il a acheté », a réclamé, quelques jours auparavant, l’air dégagé, un marchand d’art français apprenant ce voyage à New York au beau moment des foires et des ventes dans les galeries privées. « S’il s’intéresse à un artiste, il y a de bonnes chances pour que tout le marché s’y intéresse ensuite », nous a prévenus Alain Seban, l’ancien président du Centre Pompidou, à Paris et à Metz. Le patron de la galerie le sait, bien sûr. Il se tient en retrait, cependant, sans obséquiosité inutile devant cette petite silhouette qui promène partout son regard bleu laser sans rien laisser deviner.

Dans la première salle, les deux énormes photos d’un spectaculaire travesti noir, torse nu et jupe à panier, qui ont valu à Jafa la critique élogieuse du New York Times, ont à peine retenu l’attention du collectionneur. « Les œuvres qui vous attrapent tout de suite, il faut s’en méfier », remarque François Pinault, comme s’il avait succombé autrefois aux facilités du débutant.

Homme d’affaires averti

Il laisse aussi les énormes roues de tracteur ceintes de chaînes et décorées de bandanas qui occupent tout un étage. Il en connaît manifestement la valeur réclamée par le galeriste : « Les prix sont parfois pour les couillons. » L’amateur pointu n’a pas effacé, chez lui, l’homme d’affaires averti…

Dans la pénombre d’une salle, une vidéo projetée sur un mur diffuse les images de la messe d’un pasteur noir, puis d’un concert, dans les années 1970, du chanteur de soul Al Green. On jurerait qu’il s’agit là des rushs d’un documentaire. Mais c’est pour cette vidéo que François Pinault est venu. « Il ne faut pas rejeter ce que l’on ne comprend pas. Il faut y penser la nuit… puis se décider vite », dit-il gentiment pour répondre au scepticisme. Demain, il reviendra l’acheter, ainsi qu’une grande photo devant laquelle il s’est longuement arrêté : un homme paraît s’y jeter dans le vide, le visage extatique.

Personne n’a parlé d’argent. Le businessman connaît déjà les prix, transmis la veille par Caroline Bourgeois. Pinault Collection, détenue par la holding familiale Financière Pinault, négociera comme à son habitude une remise d’au moins 20 %. Trente minutes à Harlem, le revoilà parti. Trois jours auparavant, il a acheté une œuvre de l’artiste minimaliste Liz Deschenes, dont il possède déjà des installations, et un tableau de Julie Mehretu, à qui il a rendu visite dans son atelier de Manhattan. Et encore deux nus de la peintre sud-africaine Marlene Dumas, l’une des plus chères aujourd’hui, qu’il veut nous montrer.

Il achète « vite, bon et beaucoup »

Cette fois, il a fait son choix avant même de s’envoler pour New York, à partir des photos envoyées par la galerie David Zwirner, qui représente l’artiste. On file jusque dans le quartier de Chelsea, à l’ouest de Manhattan, où elle est exposée. Là, parmi la cinquantaine de tableaux accrochés sur de grands murs blancs, il désigne deux grandes toiles verticales. Une femme enceinte, levant les mains au-dessus d’un corps aux couleurs délavées semble se cogner contre une vitre invisible.

L’autre nu, un homme, sexe pendant entre deux jambes brunes, se tient droit comme pour une inspection. C’est à la fois violent et dépouillé. « Ce n’est jamais facile, ces corps bruts, dans une époque où le politiquement correct est en passe de gagner, mais je crois que j’ai pris les plus beaux tableaux de l’exposition », se félicite-t-il. Quatre autres toiles de Dumas ont été choisies parmi sa collection pour « Debout ! », la nouvelle exposition hors-les-murs qui s’ouvre le 23 juin à Rennes, la ville de ses débuts.

« LA RÉALITÉ, C’EST QUE, POUR ÊTRE UN BON ENTREPRENEUR, IL NE FAUT PAS AIMER L’ARGENT, MAIS MISER SUR L’AUDACE ET SAVOIR SE METTRE EN DANGER. » FRANÇOIS PINAULT

Depuis la France, vingt connaisseurs nous ont décrit cette façon étourdissante d’acheter « vite, bon et beaucoup ». Peu de revente : 130 à peine depuis l’an 2000 pour 3 000 achats. À 81 ans, l’ancien entrepreneur a gardé ce sens de la manœuvre foudroyante et cette volonté de maîtrise qui le poussait autrefois à racheter par surprise fournisseurs et grossistes pour mieux dominer la filière du bois qui a fait le début de sa fortune.

« Ma mère me disait : “Tu n’en as pas assez comme ça ?” C’était une vieille paysanne, elle ne comprenait pas. Mais la réalité, c’est que, pour être un bon entrepreneur, il ne faut pas aimer l’argent, mais miser sur l’audace et savoir se mettre en danger », assure-t-il.

Troisième patrimoine français

Aucun de ses collaborateurs n’ose évoquer le budget dépensé ces derniers jours à New York. Lui répond sans fard à la question : « On approche des vingt millions d’euros. » C’est une bonne moyenne. En 2016, son année faste, il avait acquis 118 œuvres pour près de 182 millions d’euros. « Sans comparaison possible avec nous, reconnaît Fabrice Hergott, le président du Musée d’art moderne de la Ville de Paris. Entre la subvention de la Mairie et l’aide des amis du musée, notre budget d’acquisition est d’un peu moins d’un million par an… » Avec 27 milliards de dollars, la fortune Pinault est classée au troisième rang des plus gros patrimoines français par Forbes et au trentième rang mondial.

« Évitons de mettre trop d’euros et de dollars sous les œuvres d’art », nous textote l’ancien ministre de la culture Jean-Jacques Aillagon, devenu le directeur général de Pinault Collection, craignant les vindictes de l’époque. François Pinault n’ignore pas le choc que peut susciter une telle dépense pour des œuvres que le public ne comprend pas.

« À mes débuts, moi aussi cela me gênait de dépenser trop d’argent pour un tableau, mais faire une affaire, dans le marché de l’art, c’est faire une mauvaise affaire. Il faut surpayer un chef-d’œuvre, il vaudra plus cher un jour », dit-il, installé pour le déjeuner dans un restaurant non loin de Christie’s, dont le rachat en 1998 a fait de lui le parrain de l’art contemporain.

« Le Tapie du bois »

Sa première acquisition, en 1972, est à la fois prudente et enracinée. Il a choisi une toile de Paul Sérusier, un post-impressionniste de l’école de Pont-Aven. « Cette femme dans une cour de ferme me rappelait ma grand-mère. J’ai toujours le tableau chez moi, et je le contemple chaque matin en prenant mon petit-déjeuner. » Deux ans plus tôt, en 1970, il s’est remarié avec Maryvonne Campbell, une antiquaire de Rennes qui l’a emmené pour la première fois dans les salles de vente.

Sa première femme, Louise Gautier, mère de ses trois premiers enfants (dont François-Henri, aujourd’hui à la tête de Kering, ex-Pinault-Printemps-Redoute et PPR), était la fille du marchand de bois fournisseur de la scierie de son père. La seconde aime les meubles du XVIIIe siècle et lui laisse entrapercevoir, avec l’art, la possibilité d’un ailleurs.

Tout homme est double. Au tournant des années 1980, le businessman étouffe encore le collectionneur. « Le Tapie du bois » ou même « le dépouilleur d’épaves », c’est ainsi que le qualifient ses biographes Pierre-Angel Gay et Caroline Monnot (François Pinault milliardaire. Les secrets d’une incroyable fortune, Éd. Balland, 1999), tant il s’est mis à racheter des entreprises en difficulté, les démantèle et dessine son empire.

C’est pourtant à la même époque qu’il commence vraiment à s’intéresser à l’art. À Saint-Tropez, où il s’est acheté une maison, il a rencontré dans le bel atelier du peintre catalan Antoni Clavé, l’historien de l’art Pierre Daix et son épouse, Françoise London. Daix est un ancien résistant et déporté. Françoise est la fille d’Artur et Lise London, le couple des procès de Prague racontés dans L’Aveu, adapté par Costa-Gavras. La guerre, le totalitarisme, le courage, voilà de quoi impressionner cet homme d’affaires, engagé en Algérie en 1956, à 20 ans à peine, dans ce conflit qui lui a laissé ses pires souvenirs mais lui a ouvert les yeux sur un autre monde.

L’apprentissage de l’art

« Je voudrais voir Mauthausen », demande François Pinault à Pierre Daix, qui porte, tatoué sur le bras, le numéro 59807, son matricule de déporté. Les deux hommes partent ensemble pour l’ancien camp de concentration. En revenant d’Autriche, ils s’arrêtent à Lucerne pour voir la collection Rosengart et ses Paul Klee. L’art comme remède à l’horreur. Bientôt, Daix lui présentera César, Zao Wou-Ki, Pol Bury, Soulages. Mais Pinault est encore un peu timoré. « Mon mari lui disait : “Mais achète Zao Wou-Ki !”, se souvient Françoise London. François ne comprenait pas sa peinture. »

Une grande amitié est née cependant. « Ma mère communiste disait que François était de droite mais que c’était un homme bien », sourit Françoise. L’été, le critique d’art – intime de Picasso jusqu’à la mort de ce dernier – et l’entrepreneur font du vélo dans le Lot ou à Saint-Tropez. L’hiver, ils courent les expositions.

« HUIT MILLIONS DE DOLLARS, C’ÉTAIT UNE SOMME. JE ME SUIS DÉCIDÉ EN DEUX HEURES. MES COLLABORATEURS M’ONT PRIS POUR UN FOU. » FRANÇOIS PINAULT

Après Sérusier, le capitaine d’industrie a voulu poursuivre sur sa lancée, mais il a vite compris que les chefs-d’œuvre de l’école de Pont-Aven ont été peints par Gauguin. Encore inatteignable pour lui. Marc Blondeau, un ancien de chez Sotheby’s, lui conseille de se diriger vers plus contemporain. Il y va à petits pas. Cubistes, surréalistes, l’école américaine d’après guerre.

À l’automne 1990, New York annonce la vente de deux grands hollandais : un Van Gogh, le Portrait du docteur Gachet, un Mondrian, Tableau losangique II. Blondeau conseille d’acheter le pionnier de l’abstraction. « Huit millions de dollars, c’était une somme, sourit Pinault. Je me suis décidé en deux heures. Mes collaborateurs m’ont pris pour un fou. » Cette fois, il a fixé son ambition.

La galeriste Chantal Crousel le voit, dans ces années-là, encore entouré de conseillers mais « intense, sérieux, discret et animé du désir d’apprendre ». Dans son monde, l’art est à la fois un signe extérieur de richesse et un vernis destiné à donner un peu de lustre à l’argent. La plupart des patrons autour de lui vivent dans des décors qui se ressemblent, achetant les mêmes meubles signés Jean Prouvé et Charlotte Perriand pour mieux les assortir à des tableaux contemporains qu’on croirait issus des mêmes ateliers.

« Lui osait pousser la porte vers des mondes inconnus », se souvient Chantal Crousel. Déjà avant qu’il n’ouvre, en 2006, à Venise, le Palazzo Grassi puis la Pointe de la douane, pour exposer au public sa collection, ses visiteurs peuvent mesurer l’éclectisme de ses choix privés. « Jusqu’à un mètre cinquante de haut s’impose le goût de son épouse, Maryvonne, pour les meubles du XVIIIe, décrit drôlement un proche. Au-dessus, c’est François. Kandinsky côtoie Borremans, Stingel voisine avec Signac. »

La transmission, synonyme de libération

Tous les six mois, il fait modifier les accrochages de ses différentes demeures : à Los Angeles et à Dinard, dans son appartement new-yorkais et son château de la Mormaire, à Grosrouvre (Yvelines), dans sa villa de Saint-Tropez et son hôtel particulier de la rue du Bac à Paris.

La transmission de son groupe à son aîné François-Henri, en 2005, a achevé de le libérer. Lui-même avait eu des relations difficiles avec son père. Du jour au lendemain, il a vidé son bureau et laissé les manettes de l’entreprise, transformée au mitan des années 1990 en l’un des plus puissants et florissants groupes de luxe. Depuis qu’il n’est plus aux affaires, on lui parle moins de son art de la défiscalisation qui lui évita longtemps de payer l’impôt sur la fortune.

« MACRON NE COMPREND PAS LES PETITES GENS, GLISSE-T-IL. J’AI PEUR QU’IL MÈNE LA FRANCE VERS UN SYSTÈME QUI OUBLIE LES PLUS MODESTES… »

« Je ne crée pas de fondation parce qu’il n’y a aucune raison de faire payer la collection au contribuable », a déclaré Pinault dans les journaux, comme une pique à la Fondation d’entreprise Louis Vuitton. « Cela lui permet surtout de pouvoir vendre comme il le souhaite et de garder l’opacité sur les contours de sa collection », souligne un directeur de musée.

Chaque année, la holding familiale abonde le budget de ses filiales Pinault Collection (pour Palazzo Grassi) et Collection Pinault Paris (pour la Bourse de commerce) en fonction de ses acquisitions. En contrepartie, on y fait porter les pertes, ce qui permet de réduire l’impôt sur les sociétés de Financière Pinault.

En 2001, peu de temps avant de confier la direction de son groupe à son fils, Financière Pinault a fait l’objet d’une donation au profit des enfants Pinault, moyennant une transaction avec le fisc. « À l’époque, la filiale Pinault Collection ne valait rien, expliquait l’hebdomadaire Challenges fin mars. Ce n’est qu’après la donation que ses stocks ont grossi et que son capital social a été porté à 273 millions. »

On en est au café quand François Pinault aborde un terrain qu’il n’a jamais tout à fait délaissé : la politique. « Macron ne comprend pas les petites gens, glisse-t-il. J’ai peur qu’il mène la France vers un système qui oublie les plus modestes… » En 2012, Pinault avait confié voter François Hollande contre Nicolas Sarkozy, dont il n’apprécie ni les manières, ni la proximité avec son rival Bernard Arnault, ni les trahisons passées contre son ami Chirac. Manifestement, il fréquente moins les Macron. Toujours, il a usé de ses réseaux politiques pour ses affaires. Se peut-il qu’il ait pris ses distances ?

« MAIS ON NE POUVAIT PAS LAISSER UN CHINOIS RAFLER UN FLEURON DE LA BOURGOGNE. » FRANÇOIS PINAULT, QUI A RACHETÉ LE CLOS DE TART

Magie des géographies du pouvoir, François Pinault croise justement sur le trottoir François Henrot, le numéro deux de la banque Rothschild et père de l’artiste Camille Henrot dont Pinault possède plusieurs œuvres. Le bras droit de David de Rothschild est celui qui, en 2008, repéra le jeune Macron et, bluffé par son brio, en fit un associé de la banque. Salutations chaleureuses dans la lumière du printemps new-yorkais. Éloge du nouveau président de la République par Henrot. François Pinault se contente de sourire aimablement.

L’année dernière, c’est pourtant Henrot qui a appelé pour lui l’Élysée et Bercy. Pinault avait appris que le Clos de Tart, grand cru fameux de Bourgogne, était à vendre. Bien placé au rang des acheteurs, Jack Ma. Le médiatique propriétaire d’Alibaba, l’Amazon chinois, pèse sept milliards de plus que François Pinault. « Mais on ne pouvait pas laisser un Chinois rafler un fleuron de la Bourgogne », souligne le Français. À sa demande, Henrot a fait valoir l’argument auprès du secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, et du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, qui ont eux-mêmes pesé sur la famille Mommessin, propriétaire du Clos de Tart… Pinault l’a emporté.

Chirac et Pinault, faits l’un pour l’autre

L’homme connaît pourtant la valeur des amitiés désintéressées. Juste avant de partir à New York, il est passé voir Jacques Chirac rue de Tournon, dans l’ancien hôtel particulier qu’il a mis à disposition de l’ancien président et de son épouse. C’est là qu’en 1995 la CX de Chirac, suivie par une armada de photographes, avait déposé Bernadette, pour fêter sa victoire.

Des années durant, Chirac et Pinault furent amis, passant des soirées à Saint-Tropez à siroter des bières pendant que Maryvonne et Bernadette sortaient dîner chez des amis. « Ils étaient faits pour s’entendre, ce sont deux grands Français enracinés dans leur terre et totalement ouverts sur le monde », souligne Claude Chirac.

Combien viennent encore visiter l’ancien chef de l’Etat, depuis que la maladie l’a plongé dans ce flottement brumeux où il ne reconnaît plus ceux qui autrefois emplissaient sa vie ? Une main, les cinq doigts écartés, a montré sa fille lorsqu’on le lui a demandé. Mais « monsieur Pinault », comme elle persiste à l’appeler, « se comporte comme un frère, plus présent lorsque la tempête se lève que lorsqu’il fait grand beau, dit-elle. Il aura été infiniment plus préoccupé à mesure que la situation est devenue plus difficile ».

Lorsque l’ami Pierre Daix est tombé malade, il s’en est occupé pareillement, dépêchant auprès de lui Jean-Pierre Tarot, le médecin qui accompagna jusqu’à la mort François Mitterrand, devenu un intime des Pinault.

Propriétaire de Christie’s

On revient à pied vers Christie’s. Ce soir-là, la grande salle des ventes orchestre la dispersion de la collection Rockefeller et l’on comprend mieux, en regardant ceux qui se pressent pour assister aux enchères, l’un des secrets de la puissance de François Pinault sur le marché de l’art.

Des acheteurs chinois, américains, japonais, européens ont fait le déplacement ou sont déjà en ligne avec les jeunes commissaires-priseurs. Françoise Bettencourt et son mari Jean-Pierre Meyers se sont installés discrètement au cinquième rang. Le marchand d’art Guy Wildenstein, toujours aux prises avec la justice française pour fraude fiscale et blanchiment, passe de groupe en groupe.

Mais ce sont les patrons de la nouvelle économie, ces nouveaux venus sur le marché de l’art contemporain, qui intriguent le collectionneur. « Et Xavier Niel, il achète ? », a-t-il demandé tout à l’heure d’un air dégagé à propos du patron de Free, actionnaire avec Matthieu Pigasse du groupe Le Monde. Dans la petite foule des acheteurs potentiels, Jeff Bezos, ami de François-Henri, son fils aîné, est venu accompagné de ses art advisers.

Depuis que le patron d’Amazon s’est avisé d’investir un peu de son immense fortune dans la peinture, les conseillers qui gravitent désormais autour des milliardaires de la nouvelle économie lui font acheter à tour de bras de la peinture américaine d’après guerre. « J’ai dit à François-Henri de lui conseiller d’acheter plus ouvert. Il ne faut pas acheter avec les oreilles des autres », soupire François Pinault.

« LA SEULE CHOSE QUI L’OBSÈDE EST LA TRACE QU’IL LAISSERA DANS L’HISTOIRE DE L’ART. » LE MARCHAND D’ART KAMEL MENNOUR

Dans un petit box, en hauteur, à l’abri des regards derrière une vitre dépolie, le collectionneur observe la vente. À la demande de son fils, il a accueilli à ses côtés un autre patron de la Silicon Valley dont il veut taire le nom. Le nouveau milliardaire n’ose pas enchérir. « Vas-y maintenant ! », intime Pinault en assurant : « Si tu n’en veux plus, demain, je te le rachète. »

Le conformisme bourgeois, le souci des convenances, l’absence de passion sincère, c’est tout ce que Pinault méprise. Lors des vernissages, il peut arriver parmi ses invités flanqué de la direction du Point, l’hebdomadaire dont il est propriétaire, mais il préfère dîner en compagnie des artistes. Pas de mondanités.

Le marchand d’art Kamel Mennour, pour sa première transaction – une œuvre d’Adel Abdessemed –, l’avait conduit dans un kebab, seul troquet au pied de l’atelier de l’artiste, dans le 18e arrondissement de Paris. « J’aurais pu l’emmener au Ritz, cela aurait été pareil. La seule chose qui l’obsède est la trace qu’il laissera dans l’histoire de l’art. »

Parrain d’artistes

Bien des jeunes artistes lui doivent leur lancement sur le marché. La plasticienne Tatiana Trouvé se souvient encore de l’avoir vu arriver, accompagné de son chauffeur jusqu’à cet entrepôt de la Sernam, qui lui servait d’atelier à Pantin, où même les taxis refusaient de se rendre. « Je n’étais pas encore connue, et j’étais intimidée. Il a tout regardé, avec son regard de glace, sans exprimer aucune émotion, comme un joueur de poker. Je n’ai su qu’après qu’il avait aimé mon travail lorsqu’il m’a passé commande d’une installation pour Venise. Cela m’a portée. »

L’ancien patron connaît les hommes. Gare à ceux qui se relâchent, ils se verront délaissés. « Jeff Koons se perd dans les cocktails », cingle Pinault qui, après avoir acheté 1,5 million son Split Rocker, une tête de jouet à bascule, recouverte de fleurs, l’a revendu plusieurs dizaines de millions.

Le collectionneur peut en revanche soutenir un artiste contre le marché. Surtout s’il en possède déjà plusieurs œuvres. En 2013, il rend ainsi visite à Damien Hirst, dans le Gloucestershire, où l’artiste millionnaire possède un immense atelier, juste à côté d’une fonderie, et un manoir façon Downton Abbey. Le bad boy de l’art contemporain s’est discrédité en inondant le marché de spot paintings qui frisent la supercherie. Partout, les experts sifflent que Hirst est « fini ». On le dit déprimé.

« Il pensait avoir tout dit, se souvient Pinault. Alors, je l’ai secoué : “Arrête de te foutre du monde, termines-en avec ce besoin de revanche sur les bourgeois !” » Le collectionneur offre une aide inédite. Pour 6,5 millions d’euros, il assurera la logistique et avancera les 55 millions nécessaires à la production du projet qui doit remettre Hirst en selle : réinventer le trésor imaginaire d’un vaisseau qui aurait été oublié sous les flots.

3 000 m2 réaménagés par Tadao Ando

Pendant des mois, des centaines de personnes travaillent sous la direction de l’artiste autour de gigantesques sculptures et installations. De la cinquantaine d’œuvres imaginées au départ, on passe vite à 250, entièrement nouvelles, sans aucune des boîtes de formol et autres animaux découpés qui avaient fait autrefois la renommée de Hirst. « Tous les mois, le projet semblait exploser dans une autre direction, se souvient Martin Béthenod, le directeur des lieux d’exposition vénitiens et de la Bourse de commerce. Mais François Pinault, qui voyait régulièrement les maquettes et se rendait dans les ateliers, a suivi. »

Résultat : une extraordinaire exposition, « Trésors de l’épave de L’Incroyable », 380 000 visiteurs dans chacun des deux musées vénitiens . Et de très nombreuses œuvres vendues par la galerie Gagosian, François Pinault se réservant pour lui-même plusieurs pièces.

« Where are we going ? » questionnait la première exposition du Palazzo Grassi. « Ouverture », c’est le nom qu’a déjà choisi François Pinault pour l’exposition d’inauguration des 3 000 mètres carrés de la Bourse de commerce de Paris entièrement réaménagée par Tadeo Ando, l’architecte japonais qui imagine ses musées. Pour la première fois, il en sera lui-même le curateur et réfléchit déjà à ce qu’il montrera de ses goûts.

« Il a des obsessions, un penchant pour le minimalisme, qui marque sa réflexion sur les vanités et, en même temps, une manière de refuser de se plier à ce goût et de le mettre au défi en optant pour les exubérances d’un Damien Hirst », remarque Martin Béthenod. « Tout nouvel accrochage est le portrait du collectionneur », confirme Pinault sans dévoiler ce qu’il choisira.

La peur du néant

Ensuite ? « Il faudra trouver un nouveau projet, dit-il déjà, peut-être un nouveau lieu d’exposition, à Shanghaï… » Le collectionneur n’a pas relâché ce rythme effréné qui est sa marque. Autour de lui, chacun se livre à des psychanalyses faciles sur cet appétit, symptôme de sa peur du néant. « J’ai longtemps craint la mort, répond-il. Ce n’est plus le cas. Mais je voudrais laisser quelque chose… »

Les artistes comprennent cela d’instinct. La radiographie colorisée du crâne de l’homme d’affaires, intitulée Monsieur François Pinault, c’est le portrait qu’avait osé le Polonais Piotr Uklanski en 2003, comme un rappel de sa condition humaine. L’artiste italien Maurizio Cattelan, qui joue volontiers les fous du roi pour son mécène, a mis un doigt supplémentaire sur ses angoisses existentielles.

À sa demande, Pinault a acheté une concession, dans le ravissant cimetière de Grosrouvre, à deux pas de son château de la Mormaire. Là où sont enterrés l’acteur Jean Rochefort et Lucien Herr, le légendaire bibliothécaire de Normale-Sup. La famille Pinault a détesté le projet imaginé par l’Italien. Le collectionneur, lui, en a souri. Sur la pierre funéraire dessinée par Cattelan, on lit seulement deux mots : « Why me ? »

« Debout ! » Collection Pinault au Couvent des Jacobins et au Musée des Beaux-Arts, à Rennes, du 23 juin au 9 septembre. https://www.tourisme-rennes.com/fr/exposition-pinault

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23 juin 2018

Street Art - Les Frigos

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Donald Trump

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23 juin 2018

21 ARTISTES EXPOSÉS À RENNES

TOUT SAVOIR SUR LES ARTISTES DE L'EXPOSITION D'ART CONTEMPORAIN DEBOUT !

Du 23 juin au 9 septembre, Rennes accueille « Debout ! » une exposition de la Collection Pinault. 21 artistes et 45 œuvres d’art contemporain sont à voir au Couvent des Jacobins et au Musée des Beaux-Arts.

BIOGRAPHIES DES ARTISTES EXPOSÉS À RENNES

ADEL ABDESSEMED

Né en 1971 à Constantine, en Algérie, Adel Abdessemed vit et travaille actuellement à Paris. Un grand nombre de ses œuvres, évocations immédiates de la terreur et de la guerre, constituent une anthologie d’images de violence et font souvent polémique, essuyant parfois la censure. Fils barbelés, dynamite et résine de cannabis y côtoient le marbre, le bronze et le fusain pour dénoncer la cruauté du monde. Le MAC’s du Grand-Hornu en Belgique et le MAC de Lyon lui consacrent des expositions personnelles en 2018, comme ont pu le faire le musée des Beaux-Arts de Montréal en 2017, l’Arab Museum of Modern Art de Doha (Qatar) en 2013 ou le Centre Pompidou à Paris en 2012. Ses œuvres ont aussi été présentées à la Punta della Dogana à l’occasion des expositions « Prima Materia » (2013-2015), « Éloge du doute » (2011-2013) et « Mapping the Studio » (2009-2011), ainsi qu’au Palazzo Grassi lors de « Paroles des images » (2012-2013).

LUCAS ARRUDA

Lucas Arruda est né en 1983 à São Paulo, au Brésil, où il vit et travaille toujours. Réalisés de mémoire, ses brumeux paysages ont la touche nerveuse et rêche et pourtant ils irradient de sérénité. La lumière les inspire, et elle en éclot, dessinant sur l’horizon bas une promesse de nouveau. Ses petits tableaux, ravivant la classique quête du sublime en peinture, ont été exposés en Amérique latine, aux États-Unis et en Europe tout au long des dix dernières années, comme par exemple lors de la Biennale de Coimbra au Portugal en 2017, ou de celle d’Asunción au Paraguay en 2015, ainsi que dans les galeries Mendes Wood DM à São Paulo et David Zwirner à Londres et à New York. Ils figurent aussi dans les collections du J. Paul Getty Museum de Los Angeles, de la Pinacothèque de São Paulo et de la Rubell Family à Miami. De septembre 2017 à juin 2018, l’artiste est accueilli dans la résidence de la collection Pinault à Lens.

BERLINDE DE BRUYCKERE

Née en 1964 à Gand, en Belgique, où elle vit et travaille toujours, Berlinde De Bruyckere s’attache à représenter la souffrance. Ses dessins mais surtout ses sculptures sont en cela saisissants. Cuir et crin de cheval, cire, laine, bois, résine et métal composent des corps, bien souvent sans tête, noueux et tortueux, des fagots de membres évoquant des arbres desséchés, une peau translucide, béante, ouvrant sur une chair meurtrie. Ces vanités ont été récemment présentées à la Kunsthal d’Aarhus en 2017, à la National Gallery of Iceland à Reykjavik, ainsi qu’au Leopold Museum à Vienne en 2016, au musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg, au Kunsthaus de Bregenz et au Gemeentemuseum à La Haye en 2015 et au S.M.A.K. à Gand en 2014. En 2013, l’artiste occupait le pavillon belge de la 55e Biennale de Venise.

MAURIZIO CATTELAN

Né en 1960 à Padoue, en Italie, Maurizio Cattelan vit et travaille à New York. Il aime provoquer son public : ses œuvres oscillent constamment entre réalité et fiction, paradoxe et transgression, humour et macabre pour mieux interroger normes et hiérarchies. Parmi ses expositions personnelles majeures peuvent être citées celle à la Monnaie de Paris en 2016-2017, à la Fondation Beyeler à Bâle en 2013, au Guggenheim Museum à New York en 2011, à la Tate Modern à Londres en 2007 et au musée du Louvre et musée d’Art moderne de la ville de Paris en 2004. Son travail a aussi été présenté à la Punta della Dogana et au Palazzo Grassi à l’occasion des expositions « Dancing with myself » (2018), « Éloge du doute » (2011-2013), « Le Monde vous appartient » (2011-2012), « Mapping the Studio » (2009-2011), « Italics » (2008-2009), « Une sélection post-pop » (2006-2007) et « Where Are We Going ? » (2006).

JAKE ET DINOS CHAPMAN

Jake et Dinos Chapman, respectivement nés en 1966 et 1962 à Cheltenham au Royaume-Uni, vivent et travaillent à Londres. Horreur, monstruosité et provocation se mêlent dans les peintures, sculptures ou gravures qui peuplent leurs installations monumentales et autres vitrines muséales. Ils n’ont peur de rien, pas même d’intervenir dans les œuvres des autres, ajoutant des détails clownesques à une série d’eaux-fortes de Goya ou décorant d’arcs-en-ciel des aquarelles peintes par Hitler. Le grand public les a découverts en 1994 à la Biennale de Venise dans l’exposition dédiée aux « Young British Artists » et, depuis, ces trublions ont été exposés dans les plus grandes institutions, dont le musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg en 2012, la Serpentine Gallery à Londres en 2013, la Tate Britain à Londres en 2003, 2007, 2010 et 2013, au musée du Louvre-Lens en 2014, au Magasin III à Stockholm en 2016 et à Arter à Istanbul en 2017. Ils ont fait partie des nommés pour le Turner Prize en 2003.

FRANÇOIS CURLET

François Curlet, né en 1967 à Paris, vit et œuvre entre Paris et Bruxelles depuis bientôt trente ans, et désormais aussi à Piacé. Définissant sa pratique comme étant à l’art conceptuel ce que le western spaghetti est au western traditionnel, ce féru de culture populaire (bande dessinée, publicité…) s’amuse du design, de la surconsommation et des ruses du marketing dans des objets à l’ironie affichée. En 2018, le MAC’s du Grand-Hornu lui consacre une exposition personnelle d’envergure, comme ont pu le faire auparavant le Palais de Tokyo à Paris en 2013 ou Le Plateau – Frac Île-de-France à Paris et l’IAC à Villeurbane en 2007. Ses pièces ont aussi été incluses dans de nombreuses expositions collectives comme au Whitney Museum à New York et à BOZAR à Bruxelles, en 2016. En 2014, il présentait deux projets dans le cadre de Play Time – Les Ateliers de Rennes, au musée des Beaux-Arts de Rennes et à la halle de la Courrouze.

MARLENE DUMAS

Née en 1953 au Cap, en Afrique du Sud, Marlene Dumas vit et travaille à Amsterdam. La mort, les questions de genre, les thématiques raciales, la culpabilité, la violence et la tendresse sont les thèmes qu’exploite dans ses toiles celle qui est considérée comme l’une des peintres contemporaines les plus importantes, alliant la sphère intime aux sujets sociopolitiques comme à ceux issus de l’histoire de l’art. Sa plus récente rétrospective « Marlene Dumas – The Image as Burden » a été accueillie par le Stedelijk Museum à Amsterdam en 2014, puis à la Fondation Beyeler à Bâle et à la Tate Modern à Londres en 2015. Ses œuvres, présentes dans les collections des plus grands musées, ont également été présentées à la Punta della Dogana lors des expositions « Prima Materia » (2013-2015) et « Mapping the Studio » (2009-2011), et au Palazzo Grassi pour « Le Monde vous appartient » (2011-2012) et « Sequence 1 » (2007).

VINCENT GICQUEL

Né en 1974 en Normandie, Vincent Gicquel vit et travaille à Bordeaux, après avoir passé un certain nombre d’années entre Dinan et Saint-Malo. Dans ses tableaux, l’on rencontre des humanoïdes semblant surpris de leur condition. Nous regardant comme pour partager avec nous un étonnement semblable à celui d’Ève prenant conscience de sa nudité, ces êtres sexués et pour autant pas franchement sexuels, plutôt perdus, nous offrent le constat de leur désarroi. Leurs actes saisis dans des saynètes absurdes ne semblent voués qu’à exister, sans rien vers quoi tendre, en une inexorable répétition sisyphéenne. Les toiles qui les dépeignent sont régulièrement présentées depuis 2009 par la galerie parisienne Cortex Athletico ; la galerie berlinoise carlier | gebauer en a inclus certaines dans l’exposition « One Long Changing Body » au printemps 2018.

DUANE HANSON

Né en 1925 à Alexandria (Minnesota) et mort en 1996 à Boca Raton (Floride), Duane Hanson est considéré comme le chef de file de l’hyperréalisme. Prenant la classe moyenne américaine pour modèle, il moule directement ses sujets pour en produire d’impressionnants « duplicata », ainsi un enfant assoupi en poussette, un artiste méditant sur son sort, une retraitée avachie sur son stand à un vide-grenier, un livreur fatigué, une femme de ménage obèse et noire, de corpulents touristes affublés de casquettes et appareils photo au cou, sans oublier sa fameuse Supermarket Lady, poussant son caddie débordant, bigoudis dépassant de son fichu, peuplent son œuvre qui a notamment été exposé au Nouveau Musée national de Monaco en 2016, à la Serpentine Gallery à Londres en 2015, au Kunsthaus de Zürich en 2003, à la Schirn Kunsthalle à Francfort en 2001 et est présent dans les collections de nombreux musées dont le Whitney Museum à New York.

THOMAS HOUSEAGO

Né en 1972 à Leeds, en Angleterre, Thomas Houseago vit et travaille actuellement à Los Angeles. Ses sculptures allient matériaux traditionnels (bois, plâtre, argile et bronze) et moins courants (câbles d’acier, toile et ciment). Souvent grossièrement ébauchées de manière à évoquer leur processus de fabrication, leurs formes humaines alternant plats et volumes procurent une impression de vulnérabilité mais aussi de puissance. Les plus récentes expositions personnelles de l’artiste ont eu lieu à la Gagosian Gallery (Los Angeles, 2017 ; Hong Kong, 2016 ; New York, 2015), au Rockefeller Center à New York et au Consortium de Dijon en 2015, ainsi qu’au Gemeentemuseum à La Haye en 2014. Ses œuvres ont aussi été incluses dans les expositions « Éloge du doute » (2011-2013) à la Punta della Dogana et « Le Monde vous appartient » (2011-2012) au Palazzo Grassi.

PIERRE HUYGHE

Né à Paris en 1962, Pierre Huyghe vit et travaille à New York. Dès les années 1990, œuvres et expositions tendent à se confondre dans sa pratique sous des formes diverses, telles qu’un voyage, un jardin ou un calendrier. Ce qui l’intéresse, « c’est de construire des situations qui ont lieu dans le réel » et, pour cela, il dit « travailler l’espace comme un organisme ». Le temps, le vivant et l’expérience sont les maîtres-mots de cet œuvre qui a notamment été présenté au musée Guggenheim de Bilbao en 2017, au Metropolitan Museum of Art à New York en 2015, au Ludwig Museum à Cologne et au LACMA à Los Angeles en 2014, au Centre Pompidou en 2013 et au Museo Reina Sofía à Madrid en 2010, et a reçu plusieurs prix dont celui de la Biennale de Venise pour le pavillon français en 2001, le Hugo Boss Prize en 2002 et le Roswitha Haftmann Prize en 2013. Les expositions « Éloge du doute » (2011-2013) et « Accrochage » (2016) à la Punta della Dogana ont aussi inclus certaines de ses pièces.

BERTRAND LAVIER

Bertrand Lavier, né en 1949 à Châtillon-sur-Seine, vit et travaille à Paris. Depuis maintenant presque cinquante ans, il remet en cause les genres et catégories artistiques pour critiquer non seulement les poncifs de l’art mais, plus généralement, la production en série des objets de consommation comme de ceux de valeur, en évitant de s’attacher à toute esthétique. Sous leur air provocateur, ses gestes visent à « montrer autrement les choses que les gens ne voient même plus ». Les œuvres qui en résultent ont notamment été présentées au Kunstmuseum de Lucerne en 2017, à la Monnaie de Paris et au Palais de Tokyo en 2016, à la Fondation Vincent Van Gogh à Arles en 2014-2015 et au Centre Pompidou lors d’une grande rétrospective en 2012-2013 ; elles ont fait partie des expositions « L’Illusion des lumières » au Palazzo Grassi en 2014 et « Slip of the Tongue » à la Punta Della Dogana en 2015.

JEAN-LUC MOULÈNE

Né en 1955 à Reims, Jean-Luc Moulène vit et travaille à Paris. Sa critique radicale des représentations esthétisantes s’est longtemps exprimée principalement par la photographie, mais c’est aujourd’hui via la tension entre corps et objet que ses œuvres interrogent les rapports entre espace commun et espace individuel. Ses récentes expositions personnelles ont eu lieu à la Fondation Hermès à Bruxelles en 2018, à la Sécession à Vienne en 2017, au Centre Georges Pompidou à Paris en 2016 et à la Villa Medicis à Rome en 2015. Il a aussi notamment participé à la Biennale de Taipei en 2016, à la Biennale internationale du design de Saint-Etienne en 2015, à la Biennale de Busan en 2014, à la Biennale de Venise en 2003, à celle de São Paulo en 2002 et à la documenta X à Cassel en 1997, et ses œuvres ont été présentées plusieurs fois à la Punta della Dogana à l’occasion des expositions « Accrochage » en 2016 et « Slip of the Tongue » en 2015.

PAULO NAZARETH

Né en 1977 dans l’État du Minas Gerais au Brésil, Paulo Nazareth vit et travaille de par le monde. En perpétuel transit, il explore les tenants et les aboutissants de ses racines africaines, européennes et indigènes (Borum) mêlées par des marches de plusieurs années, comme lorsqu’il rallie New York depuis le Brésil de 2009 à 2012. « Les Borum étaient un peuple de marcheurs… Je marche pour savoir », dit-il. Il documente ses voyages par des objets, des dessins ou des vidéos empreints d’humour, bien qu’ils soulèvent des questions liées aux inégalités raciales. À l’été 2018, son travail sera présenté au MMK de Francfort, comme il l’a été notamment à la Triennale de La Nouvelle-Orléans et au Musée de Lisbonne en 2017, lors des biennales de Venise et de Lyon ainsi qu’au New Museum (New York) en 2013, et dans l’exposition « Dancing with Myself » (2016-2017 au Museum Folkwang à Essen, puis à la Punta della Dogana d’avril à décembre 2018), qui mêle des œuvres de la collection Pinault et de celle du musée allemand.

CHARLES RAY

Né en 1953 à Chicago, Charles Ray vit et travaille à Los Angeles. Figuratives et formellement traditionnelles, rappelant par endroits la statuaire antique, ses sculptures sont toujours technologiquement innovantes. L’artiste dit comprendre « le corps comme un lieu, une structure – la surface d’un corps étant moins une image qu’un déclencheur d’événements sculpturaux. » Le Kunstmuseum de Bâle en 2014 et l’Art Institute de Chicago en 2015 ont présenté les plus importantes rétrospectives de son travail, qui a été plus récemment exposé à la George Economou Collection à Athènes et à l’American Academy de Rome en 2017. Ses œuvres ont aussi fait partie des expositions « Accrochage » (2016), « Éloge du doute » (2011-2013) et « Mapping the studio » (2009-2011) à la Punta della Dogana ; « Le Monde vous appartient » (2011-2012), « Une sélection post-pop » (2006-2007) et « Where Are We Going ? » (2006) au Palazzo Grassi.

THOMAS SCHÜTTE

Né en 1954 à Oldenburg, en Allemagne, Thomas Schütte vit et travaille à Düsseldorf. Même si elles n’ont pas toujours de dimension narrative, ses œuvres révèlent un intérêt pour la figuration et la condition humaine, abordant des sujets tels que le pouvoir, la mémoire ou l’insuffisance de l’art face à ces questions. En 2016, il a inauguré sa propre fondation, dédiée à ses sculptures, dont le bâtiment, situé près de Düsseldorf, a été réalisé d’après l’une d’elles. En 2018, le MoMA (New York) lui consacre une exposition personnelle, comme ont pu le faire le Moderna Museet (Stockholm) en 2016 ou la Fondation Beyeler (Bâle) et le Kunstmuseum de Lucerne en 2013. Ses œuvres ont fait partie des expositions « Accrochage » (2016), « Prima Materia » (2013-2014), « Éloge du doute » (2011-2013) et « Mapping the Studio » (2009-2011) à la Punta della Dogana ; « Le Monde vous appartient » (2011-2012) et « Une sélection post-pop » (2006-2007) au Palazzo Grassi.

HENRY TAYLOR

Né en Californie en 1958, Henry Taylor vit et travaille à Los Angeles. Scènes de la vie quotidienne, portraits d’inconnus comme de célébrités – Jay-Z, Drake, ses voisins, un couple en visite chez les Obama, des victimes des violences policières, des sans-abris, des mendiants, des activistes et même des galeristes – bénéficient d’une égalité de traitement, des ses mêmes aplats vivement colorés, de sa touche épaisse et décidée. Ses tons francs dessinent les contours de la société telle qu’elle est, avec ses privilégiés et ceux qui le sont moins, pointant particulièrement la place des Noirs en son sein. Ses tableaux ont notamment été exposés sur la High Line à New York, à la Whitney Biennial de New York, et à l’ICA de Boston en 2017, au SMAK à Gand, à l’Astrup Fearnley Museet à Oslo et au MAC à Lyon en 2016, ainsi qu’au MoCA à Los Angeles, au Carnegie Museum of Art à Pittsburgh et au MoMA à New York en 2013.

TATIANA TROUVÉ

Née en 1968 à Cosenza, en Italie, Tatiana Trouvé vit et travaille à Paris. Selon elle, le processus artistique autant que nos histoires personnelles sont parsemés de micro-événements habituellement oubliés qui influencent le cours des choses ; elle tente d’en rendre tangible la mémoire. Au printemps 2018, elle bénéficie d’une exposition d’envergure à la Villa Médicis à Rome ; en 2017, son travail a notamment été présenté à la Triennale de Yokohama, à la Biennale d’Istanbul, à la Biennale de Buenos Aires ainsi qu’au Palais de Tokyo et à la Monnaie de Paris. Parmi ses expositions personnelles, rappelons celles qui ont eu lieu au Red Brick Museum de Pékin en 2016, à Central Park à New York et à la Biennale de Lyon en 2015, au Mamco à Genève, au Kunstmuseum de Bonn, au Museion de Bolzano, et au Schinkel Pavillon à Berlin en 2014. En 2011-2012, elle a réalisé une œuvre in situ pour l’exposition « Éloge du doute » à la Punta della Dogana.

DARÍO VILLALBA

Né en 1939 à Saint-Sébastien en Espagne, Darío Villalba vit et travaille à Madrid. C’est dans les années 1960 qu’il met au point la technique qu’il dénomme « encapsulage », un mixte de photographie, de peinture, de sculpture et d’installation qui lui est particulier. Photos augmentées de détails peints, émulsion photographique sur toile, les genres se mélangent pour tirer le portrait de ceux que l’on préfère généralement ne pas voir : prostituées, malades mentaux ou vieillards, marginaux. Son travail a été notamment présenté à la Biennale de Lyon en 2017, au Musée Reina Sofía de Madrid en 2007, au musée d’Art moderne de la ville de Paris en 1987, au MoMa à New York en 1984, à la Biennale de Venise en 1970 ainsi qu’à celle de São Paulo en 1973, et s’est vu honorer de la médaille d’or du mérite des beaux-arts remise par le roi d’Espagne en 2002.

DANH VO

Né en 1975 au Vietnam, Danh Vo, de nationalité danoise, réside et travaille actuellement à Mexico City et à Berlin. Son œuvre, à la croisée de l’histoire universelle et de son histoire personnelle, explore la question de l’identité au travers des circonstances qui la forgent, comme la dissémination des idéologies. Les plus prestigieuses institutions lui ont dédié des expositions comme le Guggenheim Museum de New York en 2018 et 2013, la National Gallery de Singapour en 2017, le Museo Reina Sofía à Madrid en 2015-2016, le Museum Ludwig à Cologne en 2015, le Museo Jumex à Mexico en 2014-2015 et le musée d’Art moderne de la ville de Paris en 2013. Il a représenté le Danemark à la Biennale de Venise en 2015 et y était présenté à l’Arsenal en 2013. En 2012, il s’est vu remettre le Hugo Boss Prize. Il a aussi été commissaire de plusieurs expositions dont « Slip of the tongue » à la Punta della Dogana à Venise, en 2015, en collaboration avec Caroline Bourgeois.

LYNETTE YIADOM-BOAKYE

Lynette Yiadom-Boakye est née  977 à Londres, où elle vit et travaille. Souvent considérés comme des portraits, ses tableaux sont, selon elle, des « suggestions de personnes », car ils dépeignent des personnages fictionnels ; et si leur peau est invariablement noire, c’est parce que celle de leur auteure l’est aussi : « C’est un geste politique. Nous sommes habitués à regarder des portraits de Blancs dans la peinture. » De nombreuses institutions lui ont consacré des expositions personnelles comme le New Museum (New York) en 2017, la Kunsthalle de Bâle en 2016, la Haus der Kunst (Munich) et la Serpentine Gallery (Londres) en 2015. Son travail a aussi fait partie du British Art Show 8 (2015-2017), de la Biennale de Sharjah et de celle de Göteborg en 2015, de la Biennale de Venise en 2013, de la Triennale du New Museum (New York) et de la Biennale de Lyon en 2012 ; il a été récompensé du Pinchuk Foundation Future Generation Prize en 2012 et a fait partie de la sélection du Turner Prize en 2013.

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22 juin 2018

Au théâtre ce soir..."KIKI de Montparnasse"

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L'extraordinaire parcours de la célèbre Kiki de Montparnasse, muse des années folles, relaté dans un spectacle musical et joyeux.

L'histoire de Kiki de Montparnasse évoque l'exubérance des années folles et le parcours incroyable de cette star emblématique d'une époque haute en couleurs. Elle fut muse et modèle pour les grands peintres de l'Ecole de Paris, témoin de l'éclosion de Modigliani, Soutine, Fujita, Utrillo, Desnos, Cocteau, Man Ray et tant d'autres...

Kiki fut aussi peintre, chanteuse et "amuseuse" de cabaret, toujours animée d'une irrépressible envie de "donner de la gaieté aux gens".

Nommé aux Molières du Spectacle Musical 2016

Auteur : Hervé Devolder, Milena Marinelli

Artistes : Milena Marinelli, Hervé Devolder ou Daniel Glet ou Patrick Villanueva

Metteur en scène : Hervé Devolder

22 juin 2018

Le baron Empain, dont l’enlèvement défraya la chronique en 1978, est mort

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Ci-dessus : le Baron Edouard-Jean Empain tient une conférence de presse, le 7 septembre 1978, au siège du Groupe Empain. Photo Gabriel Duval. AFP

Edouard-Jean Empain, ancien PDG du groupe Empain-Schneider, s’était retiré des affaires peu après son rapt. Il est mort jeudi à l’âge de 80 ans.

Le baron Edouard-Jean Empain, homme d’affaires belge, dont l’enlèvement en France en 1978 défraya la chronique, est mort jeudi 21 juin à l’âge de 80 ans, ont rapporté les médias belges. Selon le quotidien économique L’Echo, qui l’avait encore interviewé en 2014, l’ancien PDG du groupe Empain-Schneider, retiré des affaires depuis les années 1980, vivait à Monaco avec sa compagne.

Edouard-Jean Empain était le petit-fils d’Edouard Empain, anobli par le roi des Belges Léopold II en 1907, qui avait bâti à partir de la fin du XIXe siècle un empire industriel, à l’origine notamment du réseau ferroviaire congolais et de la construction du métro parisien.

Un enlèvement retentissant en 1978

Edouard-Jean Empain, devenu PDG du groupe Empain-Schneider en 1971, fut enlevé devant son domicile, à Paris, le 23 janvier 1978. Il fut séquestré et torturé dans un petit pavillon de Savigny-sur-Orge, en région parisienne, et ne fut libéré qu’au bout de soixante-trois jours de captivité, lors d’une remise de rançon ratée, assortie de l’arrestation d’un ravisseur.

Le retentissement de l’affaire fut notamment dû au fait que ses ravisseurs, « des petites frappes », selon les dires du baron, interviewé en octobre 2014 par L’Echo, pour faire pression sur sa famille, lui tranchèrent une phalange d’un auriculaire.

Après sa libération, Edouard-Jean Empain s’était rapidement retiré des affaires, nourrissant de l’amertume sur le fait de ne pas avoir suscité d’empathie pendant ce rapt, au motif qu’il aurait « dérangé » l’establishment en France. « J’avais plein d’amis qui étaient prêts à payer [la rançon], mais comme il ne fallait pas que je revienne, il ne fallait surtout pas payer », déclarait-il en 2014.

Dans cet entretien à L’Echo, il avait aussi dit qu’à l’époque, le roi Baudouin était prêt à payer pour le libérer en raison de « ce que la couronne belge devait à la famille Empain ». Le roi l’avait fait savoir à son entreprise, mais celle-ci n’avait pas donné suite, selon le baron.

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Mort d'Edouard-Jean Empain : son histoire vue par «Libé»

Il était «le baron kidnappé amputé d’un doigt». Edouard-Jean Empain, décédé jeudi à l’âge de 80 ans, avait été enlevé en plein jour devant son domicile situé avenue Foch dans le XVIe arrondissement de Paris le 23 janvier 1978. Les huit ravisseurs voulaient viser un patron du CAC 40. Après avoir pensé à Serge Dassault et Liliane Bettencourt, leur choix s’était finalement porté sur ce petit-fils du créateur d’une dynastie industrielle d’origine belge, anobli par le roi Léopold II en 1907. «Le capital, l’atome, l’aristocratie financière : le baron représentait beaucoup de choses», relevait Libération au lendemain de l’enlèvement.

L’affaire fait grand bruit : son groupe Empain-Schneider pèse 20 milliards de francs, 150 000 employés, 300 sociétés dont des fleurons comme Framatome (nucléaire), Creusot-Loire (métallurgie) ou Spie Batignolles (BTP). Durant 63 jours, il est séquestré et torturé dans un petit pavillon de Savigny-sur-Orge, dans l’Essonne, en banlieue parisienne. La rançon demandée est colossale : 80 millions de francs. «Jamais les enchères n’avaient été placées aussi haut en France pour l’enlèvement d’un possédant de capital», soulignait Libération à l’époque. Les ravisseurs envoient à sa famille l’auriculaire du baron pour prouver leur détermination. Les négociations s’arrêtent, reprennent, la remise de l’argent est reportée…

Embuscade et libération

Le 22 mars, rendez-vous est pris avec les ravisseurs sur une autoroute près d’Arcueil, à hauteur d’une borne téléphonique, pour la remise de rançon. Mais la police en profite pour tendre une embuscade. Commence alors un jeu de piste qui durera deux jours et qui se transforme en course-poursuite à travers Paris. L’un des ravisseurs est tué, l’autre blessé ainsi que deux policiers. Alain Caillol, arrêté et blessé lors de la remise de rançon avortée, finit par demander à ses complices de relâcher leur otage. Le 26 mars, on trouve le baron Empain hagard, errant dans une ruelle d’Ivry, relâché par ses ravisseurs. «Muni d’un billet de dix francs que lui avaient donné ses ravisseurs, il partait à pied jusqu’au métro», détaillait Libération le 28 mars. Il avait perdu 20 kg, et l’auriculaire gauche.

Après sa libération, Edouard-Jean Empain s’était rapidement retiré des affaires en 1981. Il estimait ne pas avoir suscité d’empathie pendant ce rapt spectaculaire, au motif qu’il aurait «dérangé» l’establishment en France. Amer, il ressassait les accusations d'«auto-enlèvement» visant à combler ses dettes de jeu. «J’avais plein d’amis qui étaient prêts à payer [la rançon], mais comme il ne fallait pas que je revienne, il ne fallait surtout pas payer», déclarait-il en 2014 dans un entretien à L’Echo. Il avait aussi affirmé qu’à l’époque, le roi des Belges était prêt à passer à la caisse pour le libérer en raison du passé de la famille Empain.

Dans un article sur le récit de sa séquestration par le baron, Libération ironisait sur sa position victimaire : «Outre les chaînes qu’il portait au cou, aux poignets et aux pieds, c’est surtout, semble-t-il, ses conditions d’alimentation qui l’ont fait souffrir : il n’était, paraît-il, nourri que de sandwiches et de haricots à peine réchauffés ! "Ce fut, dit-il, la période la plus terrible". Car la deuxième prison, un silo à grains ou une ferme, où il était resté une semaine, était, estime-t-il, plus confortable. On lui a donné de quoi se laver et une brosse à dents. Il avait également un poste à transistor et la télévision. Bref, un souvenir pas trop désagréable, s’il n’avait encore eu à subir la nourriture. C’est là en effet, qu’alors qu’il déteste les gâteaux, on l’aurait un jour obligé à manger un moka !»

Tout est pardonné

Le baron était resté proche d’un de ses geôliers, Alain Caillol. Dans le portrait de Libération qui lui était consacré, le cerveau de l’enlèvement racontait à 70 ans la complicité née entre les deux hommes. Pendant sa captivité, le PDG aurait réussi à susciter la sympathie, voire à prendre l’ascendant psychologique. Alain Caillol en était venu à saluer «cet homme sans vice et d’un courage exceptionnel, qui ne méritait pas ça. On s’est trompés de cible». Celui qui parle de «syndrome de Stockholm inversé» dans un ouvrage consacré cette histoire a fini par s’identifier au PDG : «On a eu un peu la même enfance, solitaire, les mêmes collèges de gosses de riches.»

Alain Caillol racontait avoir tiré à la courte paille pour désigner celui qui couperait le petit doigt du baron au massicot. Avec trois autres ravisseurs et au bout d’un mois de négociations infructueuses, ils jouent à un autre jeu de hasard pour déterminer s’ils épargnent sa vie ou non. Malgré tout, Edouard-Jean Empain disait tout pardonner. «Il a un certain remords, en tout cas, un regret, et ne me considère pas comme un sale type», avait-il raconté à Libération. LIBERATION

22 juin 2018

Nipple

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22 juin 2018

La série Fashion Eye des Éditions Louis Vuitton présente Jeanloup Sieff, Paris.

Nous étions voisins avec Jeanloup. Lui, rue Ampère, moi à 800 mètres : porte d’Asnières. AMP 13… c’était son numéro de téléphone, il me l’avait donné il y a 50 ans lors de notre première rencontre. Les numéros de téléphone portaient alors les noms de votre quartier. Il adorait Paris, jeune, il avait sillonné le monde, moins par la suite. Une maison de campagne Les Petites Dalles en Normandie qu’il adorait mais surtout Paris : son studio était magique !

Il avait un rythme immuable : tous les matins quoique fussent les conditions, il allait prendre son petit déjeuner au Flore! Il y a un passage formidable dans le texte du livre écrit par Patrick Remy, ces phrases retrouvées de Jeanloup. Sa terrasse préférée : celle du café de Flore. « J’y viens souvent prendre mon petit-déjeuner, vers huit heures du matin, quand la journée est encore vierge. Le samedi j’achète des livres à La Hune et fais mon marché rue de Seine. J’aime bien avoir des habitudes ! »

Le décor est toujours là. Sauf La Hune, déménagée puis fermée. Parfois infidèle, il va quelques mètres plus loin, aux Deux Magots. Qu’importe la limonade, ce sont les femmes le plus important sur une terrasse parisienne. « Le Flore étant fermé pour les vacances, je me retrouve à la terrasse des Deux Magots. Je vis avec toutes les femmes qui passent, des amours complètes et brèves. Quand je les aperçois, au loin, et que leur silhouette me plaît, c’est immédiatement le début de notre idylle. Plus elles s’approchent, et plus je les aime. À dix mètres, c’est la passion, à six, la jalousie douloureuse, à quatre, je n’en puis plus, ce sont déjà les déchirements de la rupture, et lorsqu’elles me croisent, enfin délivré et détendu, je peux leur sourire calmement, elles sont devenues des amies, et nous pouvons échanger le clin d’oeil complice de ceux qui ont partagé bien des choses ensemble et qui se souviennent. » Les femmes et Paris : bien sûr !

Jean-Jacques Naudet

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Des clowns mélancoliques

Pour l’exposition Encore un jour banane pour le poisson-rêve, l’artiste et réalisateur Clément Cogitore, en collaboration avec les créations d’une vingtaine d’artisans d’art, nous embarque dans un réel voyage initiatique. Tel un conte, nous sommes invités à découvrir à travers 7 espaces – Léviathan, Chambre de la prémonition, Récréation… – des mondes fantasmés mais aussi des territoires bien connus de l’univers enfantin. L’idée ? Tenter de déterminer comment l’émerveillement, l’imagination, les peurs des enfants se construisent en fonction des contextes. Des œuvres qui dégagent une puissance émotionnelle forte, à l’image de cette immense salle où se déploie une centaine de clowns désolés.

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