Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
1 juillet 2018

Simone Veil

 

Un an après sa mort, Simone Veil fera son entrée au Panthéon, dimanche 1er juillet. Un honneur très rare : elle devient seulement la cinquième femme à y entrer. Elle reposera aux côtés de son époux, Antoine Veil. Un événement à suivre sur franceinfo. Simone Veil a marqué l'histoire de la France. Son témoignage des horreurs de la Shoah, son combat pour le droit à l'avortement, son entrée à l'Académie française : Simone Veil était une femme au parcours hors du commun. Franceinfo revient sur les moments forts de la vie de Simone Veil. . . #simoneveil #pantheon #veil



90 Likes, 2 Comments - @franceinfo on Instagram: "Un an après sa mort, Simone Veil fera son entrée au Panthéon, dimanche 1er juillet. Un honneur très..."

 

Dans les rues, « Merci Simone » s’affiche, « parce qu’on doit tous beaucoup » à Simone Veil

Par Charlotte Chabas - Le Monde

Dans les rues des grandes villes, et surtout à Paris, les portraits de Simone Veil, qui rentre au Panthéon dimanche, fleurissent depuis plusieurs mois sur les murs.

Sur WhatsApp, leur groupe s’appelle « Opération Simone ». A 23 heures tapantes, en ce vendredi soir, les trois membres qui le composent se retrouvent dans une ruelle du 13e arrondissement de Paris. L’escouade se salue par une bise sonore, puis une râlerie immédiate : « On avait dit discret pour la tenue », rappelle Laura à l’une de ses comparses, dans une robe rouge brique à motif perroquets. Mathilde, 26 ans, hausse les épaules : « Au moins si on se fait arrêter, j’aurais la classe au commissariat ».

Le risque est pour le moins faible, mais les trois jeunes femmes rient quand même de se sentir les jambes « un peu flageolantes », au moment de tirer du sac à dos les objets du forfait. Huit tubes de papier, une brosse à chaussures empruntée à la grand-mère de Marie, et un mélange visqueux d’eau et de farine, transporté dans une bouteille en plastique sans étiquette. « Allez, force et féminisme », lance Laura avant d’enduire la brosse de cette colle improvisée.

La première affiche est déroulée, et le visage de Simone Veil, couleur zinzolin sur un fond jaune poussin, contemple soudain les noctambules du quartier. Sous les traits familiers et sereins, deux mots : « Merci Simone ». « Bon, celle-là, on ne l’a pas trop loupée », se félicitent les trois jeunes femmes.

C’est que les complices n’en sont pas leur premier coup. Déjà avant le 8 mars, qui marque la Journée des droits des femmes, les trois amies avaient mené plusieurs commandos nocturnes. « Le week-end dernier, je suis rentrée à Nantes dans ma famille, et j’ai embarqué mon petit frère qui était ravi de l’aventure », raconte Mathilde, qui travaille dans le marketing pour une grosse entreprise de cosmétiques.

#MerciSimone

Dans les rues des grandes villes, et surtout à Paris, les portraits de Simone Veil fleurissent depuis plusieurs mois sur les murs. Sur les réseaux sociaux – Instagram en premier lieu – le hashtag #MerciSimone est devenu l’hommage rendu par la rue à cette figure des droits des femmes, qui fait avec son mari son entrée au Panthéon dimanche 1er juillet, un an après son décès.

Derrière l’histoire de ces affiches, il y a trois amis : Julia Pietri, Eléonore et Duy-Thien – qui préfèrent pour leur part garder l’anonymat. Après la mort de celle qui a porté la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG), ces trois trentenaires parisiens cherchent « un moyen d’exprimer [leur] respect et [leur] reconnaissance ».

Graphiste, Duy-Thien compose alors un portrait pop façon Andy Warhol minimaliste, à partir de trois photos distinctes de Simone Veil. L’une adolescente, rescapée de la Shoah, l’autre à son foyer, auprès de ses trois fils, la dernière en femme politique, plus âgée. « Trois périodes de sa vie, un portrait intemporel qui rassemble aussi toutes les valeurs et les symboles qu’elle incarne », explique Julia Pietri.

Les trois amis décident de coller leur portrait improvisé dans le 11e arrondissement de Paris, avec ce slogan « simple et efficace, qui résumait tout ce qu’on voulait dire » : « Merci Simone ». Quarante-huit heures plus tard, l’affiche est saccagée. « Ça nous a choqués », se souvient Julia Pietri, qui se fixe alors un nouvel objectif : « En mettre plein. Partout. »

« Simone Veil, ça parle à tant de gens »

Depuis, le groupe essaime et s’est même constitué en association loi 1901. Sur leur site, le collectif Merci Simone a mis en libre accès les visuels, et propose à prix quasi coûtant les affiches déjà imprimées, ainsi que des pulls et T-shirts. Le peu de bénéfices réalisés est reversé à des associations féministes.

« Partagez… Transmettez… Affichez… » est le mantra du collectif, qui s’avoue « surpris du succès, sans l’être vraiment dans le fond ». Pourquoi ? « Parce que Simone Veil, ça parle à tant de gens, et le mythe de ce qu’elle incarne a dépassé la personne », reprend Julia Pietri, qui avait lu son autobiographie, Une Vie, avant sa mort.

Dans les rues du quartier de la Butte aux Cailles, la conversation s’engage entre des passants et les trois colleuses d’affiches de la soirée. « Mais pourquoi vous faites ça ? », interroge un jeune homme qui passe à vélo, passablement aviné. « Parce qu’on lui doit tous beaucoup », répond immédiatement Marie, qui précise que Simone Veil est « un emblème de l’émancipation des femmes, mais pas seulement ». « C’est une figure de réconciliation, celle d’un féminisme inclusif qui ne cherche pas la vengeance contre les hommes, une défenseuse de la grande Europe alors qu’elle avait vécu les pires démonstrations de l’horreur humaine ». Sonné, le jeune vingtenaire s’éloigne en promettant de « se renseigner ».

« C’était mal de soutenir une meurtrière »

Quelques minutes plus tard, les voilà à se défendre auprès d’un couple de libraires qui les accuse de « suivre la mode » et de « glorifier quelqu’un dont elles n’ont jamais lu les textes ». « C’est vrai, on n’est peut-être pas les plus calées en histoire du féminisme, consent Laura, qui travaille dans un cabinet de notariat. Mais est-ce qu’il faut s’interdire d’agir sous prétexte qu’on n’a pas un doctorat en patriarcat ? »

Bien sûr que ça l’énerve de voir des grandes marques surfer sur cette soudaine popularité et détourner l’image de Simone Veil à des fins commerciales, dans la droite lignée du « femwashing » – sur le même modèle que le « greenwashing » ou « écoblanchiment » en matière d’environnement, ces enseignes cherchent ainsi à faire la démonstration de leur engagement à agir pour la parité. Mais « qui ça embête que pour moi, Simone Veil puisse être une inspiration à être une meilleure personne, une femme plus équilibrée ? », s’interroge-t-elle.

C’est surtout pour ça, « pour les réactions, les dialogues et les échanges », que les trois jeunes filles aiment faire cette « mini-désobéissance civile ». Pêle-mêle, dans leurs souvenirs, il y a des gens de l’âge de leurs parents qui viennent les féliciter et leur dire « merci pour elle ». Les enfants qui s’accrochent aux bras de leurs parents pour demander « C’est qui Simone ? ». Les groupes de filles, parfois très jeunes, qui viennent demander « comment on fait pour contribuer ». Quelquefois les insultes aussi. « On m’a dit une fois que c’était mal de soutenir une meurtrière », se souvient Mathilde.

« Ce qui est impressionnant, c’est de voir la rue se réapproprier son histoire et son héritage », explique Julia Pietri. Sur les quais de Seine, au marqueur noir, un passant avait écrit sous une affiche « merci pour les millions de morts de l’IVG ». Le lendemain, un autre avait barré les derniers mots, puis réécrit en dessous « millions de femmes sauvées ». « Quand on voit nos affiches vandalisées par des gens remettant en cause le droit à l’IVG ou taguées de croix gammées, on se dit surtout que rien n’est acquis et qu’il faut toujours rester vigilants », rappelle Julia Pietri, qui se félicite que « coller une affiche, c’est une porte ouverte au militantisme. »

Publicité
Commentaires
Publicité