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Jours tranquilles à Paris
19 juillet 2018

Télécoms : le gouvernement pousse la 5 G

Par Sandrine Cassini - Le Monde

Les déclarations des pouvoirs publics sont loin de ravir les opérateurs, qui veulent des engagements plus concrets.

Voitures autonomes, opérations chirurgicales à distance, usines 4.0 : le gouvernement rêve de voir les promesses de la 5G, la norme de téléphonie mobile qui succédera à la 4G, se réaliser le plus vite possible. Lundi 16 juillet, le secrétaire d’Etat auprès du premier ministre chargé du numérique, Mounir Mahjoubi, et son homologue au ministère de l’économie, Delphine Gény-Stephann, ont donné le coup d’envoi à « une feuille de route » destinée à accompagner au mieux l’émergence de cette nouvelle technologie, qui promet des débits 10 fois supérieurs à ceux de la 4G et une réactivité (latence) multipliée par 10, donc quasi immédiate. « Avec la 5G, nous réinventons un modèle d’affaires, commercial. Mobilité, transports, lieux d’hyperlogistique, telles sont quelques-unes des grosses attentes de la technologie », a déclaré M. Mahjoubi.

Principal chantier : l’attribution de nouvelles licences de téléphonie mobile, localisées dans les fréquences de 3,5 gigahertz et de 26 gigahertz. Une consultation auprès des différents acteurs sera lancée dès l’automne, pour une attribution dès 2020. Une grande ville française devrait être couverte en 2020, et les principaux axes de transport en 2025.

Pour le moment, le gouvernement ne sait pas encore s’il est prêt à renoncer à un processus d’enchères financières. C’est pourtant le modèle pour lequel il a opté en négociant en début d’année avec les opérateurs télécoms un « new deal », les engageant à accélérer la couverture du territoire en 4G et à en finir avec les zones blanches. Pour les inciter à remettre la main au portefeuille, le gouvernement a accepté de renouveler leurs licences actuelles pour une décennie. « Nous ne sommes pas forcément dans les mêmes logiques que pour la 4G. Ces licences [5G] pourront être partitionnées. Ces processus seront ouverts et d’autres modèles pourront émerger », a estimé Mme Gény-Stephann.

Faire venir des industriels

Avec la 5G, le gouvernement espère visiblement faire venir des industriels, qui pourraient prétendre à une partie des fréquences pour mettre en place des réseaux privés dans un hôpital, une usine, etc. Autant de déclarations loin de ravir les opérateurs, qui auraient déjà souhaité être fixés sur la question des enchères. « Nous aurions aimé être encouragés en matière de modèle économique », lance Michel Combot, directeur général de la Fédération française des télécoms (FFT), qui avertit que le rythme d’investissement des opérateurs sera soumis à la capacité de la 5G à générer de nouveaux revenus.

Quant à l’idée de céder des fractions de fréquences à des industriels, elle ne leur plaît guère. « C’est opposé à l’attribution de larges bandes de fréquences. On voit déjà la difficulté d’avoir des bandes propres », poursuit M. Combot, qui se réfère aux licences Wimax, une technologie qui n’a jamais vu le jour. Propriété de Vincent Bolloré, elles occupent une partie du spectre sans être utilisées.

Pourtant, le gouvernement appelle tous les acteurs à multiplier les expérimentations. « C’est maintenant : il faut que l’on ait des projets qui inspirent et qui donnent à tous le regard de ce qui va se passer ensuite. Sinon on va prendre un an ou plus de retard », a averti M. Mahjoubi.

A la recherche d’un modèle économique

Pour l’instant, les opérateurs traditionnels tels qu’Orange ou Bouygues Telecom se sont portés candidats sur les expérimentations, lesquelles ont moins séduit les industriels. « Notre métier n’est pas la communication », s’est justifié un porte-parole de Peugeot, invité lundi 16 juillet à témoigner à Bercy devant les responsables du gouvernement.

Un seul duo d’industriels s’est pour l’instant déclaré candidat à un test grandeur nature, celui constitué par l’équipementier Nokia et l’institut de recherche Vedecom pour les véhicules autonomes sur le plateau de Saclay. « Nous avons aussi de très bonnes discussions avec la SNCF », a voulu positiver Sébastien Soriano, le président de l’Arcep, l’autorité qui régule les télécoms. La France n’est pas une exception : partout dans le monde, la 5G se cherche, et aucun modèle économique n’a encore émergé.

En attendant, la FFT met en garde le gouvernement sur sa feuille de route 5G. « Les ministères de l’écologie, du transport, et du logement ne sont pas autour de la table. Or, il faut que le gouvernement soit aligné », explique Michel Combot, qui prend pour exemple les mésaventures vécues sur le « new deal » à l’occasion de la loi ELAN sur le logement, censée simplifier les procédures administratives, pourtant indispensables à d’implantation des 5 000 nouveaux pylônes qui reçoivent les antennes de téléphonie mobile nécessaires à la mise en œuvre du plan. « Nous n’avons aucune assurance de la position du gouvernement sur le projet de loi ELAN, qui est revenu sur ses positions. Avec la 5G, on nous demande de déployer de nouvelles antennes, mais en zone dense, c’est devenu quasiment impossible. » Comme toujours, le diable est dans les détails.

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