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Jours tranquilles à Paris
5 décembre 2018

A Vannes, le succès du street art réveille les décombres

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Ouvert en septembre dernier, Dédale est un lieu éphémère, à mi-chemin entre une exposition street art et un café populaire, qui ne désemplit pas depuis deux mois. Immersion au cœur de cet ancien bâtiment administratif, reconverti en spot branché.

A quelques battements d’ailes du golfe du Morbihan, Vannes se veut sage et discrète. Maison à pans de bois, spécialités bretonnes à tous les coins de rue et chevelures écumes qui battent le pavé. Une ville d’histoire plus que d’art. Mais depuis son ouverture en septembre dernier, un lieu artistique éphémère dédié au street art casse les codes de la petite cité bourgeoise. Installé face au port dans un ancien centre administratif de la DDE, Dédale propose une immersion dans un labyrinthe de pièces calfeutrées, repeintes du sol au plafond, où l’on passe sans transition d’un univers à un autre. Au risque de s’y perdre.

La Tour Paris 13 exportée en Bretagne

Au rez-de-chaussée du bâtiment, une trentaine d’artistes majoritairement français plus quelques internationaux s’est approprié les anciens bureaux. On déambule entre les volutes 3D en papier recyclé de Matthieu Dagorn, on pénètre dans une salle éclairée à la lumière noire qui révèle la gestuelle effusive de Soem héritée de la calligraphie urbaine. Plus loin, le langage cinétique et monochrome de l’Outsider nous percute. A l’étage supérieur, les formes méandreuses et abstraites de Legz courent sur les murs, mangent le plafond d’un couloir étroit et oppressant façon Shining. « Je voulais que les artistes s’emparent du lieu en créant des œuvres in situ sur le thème de l’immersion, qu’elles procurent des sensations au public », rapporte Laurent Sanchez, à l’initiative du projet.

Dédale Café, Vannes.

Cet entrepreneur dans l’aéronautique est un passionné de graffiti. Vannetais depuis près de vingt-ans, il a crée l’association L’Art prend la rue ! qui chapeaute plusieurs projets d’art urbain dans la ville. Alors quand l’édile lui a proposé de transformer ce bâtiment voué à la destruction en « Tour Paris 13 », il n’a pas hésité longtemps. Mieux, il a fait des ajustements pour « éviter des files d’attente interminables ». Les visites, toujours complètes, sont gratuites et uniquement sur réservation. Ce repaire est à la fois un lieu d’exposition, un bar populaire et un terrain vague au troisième étage où les amateurs peuvent s’essayer à la création.

Bisounours et gorilles

Dédale n’échappe pas aux marronniers de l’art urbain : bisounours, tigres, gorilles, abeilles qui font des fuck à Montsanto et autres chatoyants fonds marins. Laurent Sanchez assume. « Le projet représente la diversité du street art. Il ne faut pas être dogmatique. » Certes. Mais on reste un peu perplexe face à ce mélange des genres entre œuvre immersive et peinture décorative.

La Fleuj à Dédale, Vannes.

En revanche, la programmation permet de belles découvertes en faisant la part belle aux artistes locaux, méconnus sur la scène parisienne. Elle s’est faite grâce « au bouche-à-oreille, sur les conseils des premiers artistes invités tels que Brez, Dino ou Bims qui ont à leur tour suggérer d’autres noms ». Dédale a le mérite de ne pas seulement miser sur les têtes d’affiche. On retient par exemple Greky dont l’abstraction découle du graffiti, La Fleuj et son univers érotico-porno fait de créatures mutantes au doigté explorateur. Une approche de la sexualité crue qui fait du bien face au street art tarte à la crème qui sévit de nos jours.

En prendre plein la vue

Depuis son lancement, l’exposition connaît un succès sans appel. La réussite du projet tient beaucoup au fait que ce lieu alternatif vient combler une attente de l’aveu de nombre de visiteurs grisés « d’en prendre plein la vue ».

« Vannes est une ville de vieux, tranche une mère de famille. La plupart des habitants ont les moyens d’aller chercher la culture ailleurs, à Paris ou à l’étranger. Nous, on a besoin que l’art vienne à nous, que ça bouge. »

Les Vannetais se sont pleinement approprié cette friche urbaine, symbole de renouveau, ainsi que le Dédale Café, pris d’assaut à longueur de journée. Avec sa terrasse donnant sur le port et son mobilier venant de chez Emmaüs, ce bar branché est devenu le spot incontournable de la ville. De quoi faire grincer des dents les cafetiers voisins qui voient d’un mauvais œil cette éphémère concurrence. Ils vont devoir s’y habituer. Le bâtiment ne sera pas détruit avant 2020 et l’association L’Art prend la rue prévoit une nouvelle cuvée d’artistes pour investir le deuxième étage, pour le moment fermé au public.

A VOIR : 8, rue du Commerce, 56000 Vannes. Entrée gratuite sur réservation. Fermé le lundi.

Horaires : 14h-19h (18h le dimanche).

Le Dédale Café est ouvert 7/7, de 14h à 21h.

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