Les acheteurs se bousculent pour reprendre le cinéma La Pagode
Moins d’un mois après sa dernière séance, le 10 novembre, La Pagode, unique cinéma du 7e arrondissement de Paris – il est situé rue de Babylone –, serait déjà à vendre. Elisabeth Dauchy, la propriétaire, dément cependant avoir donné un mandat de vente à la banque Martin Maurel. A l’en croire, il s’agit d’une « confusion » née de sa volonté de « restructurer ses actifs ». Un préalable, « avant d’emprunter pour faire des travaux ». Début novembre, elle avait affirmé qu’elle souhaitait que La Pagode « reste le cinéma mythique qu’il a toujours été ». Pour l’instant, Mme Dauchy assure « qu’elle n’y a pas mis les pieds depuis deux ans et qu’elle n’a pas encore récupéré les clefs ».
Malgré ces dénégations, une prochaine cession de ce bâtiment – il a été édifié en 1896 sur le modèle d’une pagode avant d’être transformé en cinéma en 1931 – excite les convoitises. Plusieurs candidats au rachat sont sur les rangs.
En tête de liste, on trouve le tandem constitué par le groupe Madar, spécialisé dans l’immobilier de bureaux et d’entreprises, et le metteur en scène Bernard Murat, un proche du président de la République. Leur ambition est de conserver son caractère culturel à La Pagode, qui demeurerait une salle de spectacles. D’autres acheteurs potentiels auraient fait part de leur intérêt, parmi lesquels la productrice Sophie Dulac et Marin Karmitz, producteur de cinéma et exploitant du réseau de salles de cinéma MK2. De bonne source, on fait savoir que ce dernier aurait été reçu par le chef de l’Etat « pour pousser son dossier ». Enfin, de grands groupes tels Vivendi ou Pathé auraient déjà approché Mme Dauchy pour racheter La Pagode.
Des murs en mauvais état
Le prix de vente de la mythique salle de cinéma parisienne, spécialisée dans les films d’art et d’essai, pourrait avoisiner, selon nos informations, les 30 millions d’euros. Toutefois, le futur propriétaire devra remettre la main à la poche. Plusieurs autres millions seront nécessaires pour rendre tout son lustre à La Pagode, par ailleurs classée monument historique.
Il y a « beaucoup de travaux à faire », reconnaît la propriétaire. Le bâtiment est en assez mauvais état. Un filet était ainsi tendu sous le plafond pour protéger les spectateurs. Le cinéma avait pâti de la bataille judiciaire entre l’exploitant des lieux et Mme Dauchy. Le 30 octobre, la cour d’appel de Paris avait mis fin à un long conflit de trois ans entre la société Cinéma La Pagode, exploitant de la salle depuis quinze ans, et le propriétaire des murs la SCI Foch Dauphine, dont Mme Dauchy est la dirigeante. In fine, le tribunal avait prononcé l’expulsion de l’exploitant.
Plus qu’un cinéma, qui avait notamment fait les beaux jours de la Nouvelle Vague, La Pagode, bordée par un jardin japonais, s’était muée ces dernières années en un lieu culturel. Il attirait chaque année un peu plus de 100 000 spectateurs. Article de Guy Dutheil.