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Jours tranquilles à Paris
5 avril 2017

Laurence Haïm, de la Maison-Blanche à Emmanuel Macron

PORTRAIT - Après huit ans à la Maison-Blanche pour Canal+, Laurence Haïm écrit une nouvelle saison de sa vie comme porte-parole d'Emmanuel Macron.

"La dernière fois que vous avez pleuré, c'était quand?" En ce mois de juin 2015, Laurence Haïm, correspondante historique de Canal+ et d'iTélé aux Etats-Unis, tente une interview "à l'américaine" d'Emmanuel Macron, alors en visite de l'autre côté de l'Atlantique. Gros plan sur le jeune visage du ministre de l'Economie qui balaie la question sortez-vos-kleenex d'un plissement de fossettes. La nouvelle porte-parole du candidat Macron y répond volontiers : "La dernière fois que j'ai pleuré, c'est en quittant la maison où je passais mes week-ends, à Fire Island, près de New York." Celle que Barack Obama surnommait "The Frenchie" a pourtant dit adieu sans regret à ses roses et à ses colocataires américains du dimanche pour un CDD de quatre mois au sein de la start-up En marche! Comme Carrie Mathison, l'héroïne de sa série préférée, Homeland, Laurence Haïm est autant réputée pour ses humeurs en dents de requin (les squales la passionnent) que pour sa capacité à sauter à pieds joints dans une nouvelle vie plus trépidante.

"Aux Etats-Unis, elle a appris à être un outsider"

Après Laurence assistante de Christine Ockrent sur RTL, Laurence apprentie reporter télé auprès d'Hervé Chabalier à l'agence Capa, Laura (son surnom américain) correspondante de guerre missionnée par le célèbre journaliste de CBS Dan Rather, Laura embedded à la Maison-Blanche pour faire vivre en direct l'ère Obama, voici Laurence Haïm face aux micros pour Emmanuel Macron. "Lors de l'interview à New York, j'avais été frappée par son ambition. Il a une lumière dans les yeux." Attirée par cette flamme et forcée de chercher du travail après avoir été virée sans ménagement d'iTélé pour cause de soutien aux grévistes, elle s'invite le 23 décembre à 17 heures dans le bureau d'Emmanuel Macron. Celui-ci lui propose illico un job de porte-parole.

"C'est tout elle. Elle met le pied dans la porte. Aux Etats-Unis, elle a appris à être un outsider", admire Bernard Zekri. L'ancien directeur de la rédaction d'iTélé, aujourd'hui à Radio Nova, raconte volontiers les mille et une fois où celle qui n'était pas "la plus surdouée" de sa génération, mais certainement "la plus opiniâtre", l'a "bluffé". Faute de visa pour Bagdad au début de la guerre en mars 2003, elle campe sur une chaise dans l'ambassade d'Irak en Jordanie jusqu'à faire flancher un employé qui lui délivre le sésame. "Bagdad, sur le papier, elle n'avait rien à y faire, poursuit Zekri. Mais l'Histoire ne peut pas se dérouler sans qu'elle en soit le témoin."

«Laurence fait partie de ceux qui écrivent eux-mêmes leur propre histoire. D'ailleurs, on l'appelle Laurence H. Sa vie est comme une série»

Une fois passée la ligne de démarcation entre la presse et la communication, Laurence Haïm a essuyé les réactions sévères de plusieurs proches. "What the fuck?", l'a tancée une figure du petit écran quand ses copains américains la félicitaient de cette prise de risque. Pourtant journaliste dans l'âme, Bernard Zekri applaudit des deux mains : "Laurence fait partie de ceux qui écrivent eux-mêmes leur propre histoire. D'ailleurs, on l'appelle Laurence H. Sa vie est comme une série. Va-t-elle réussir à faire son trou chez Macron? A-t-elle choisi le bon canasson?"

Dans le premier épisode de cette nouvelle saison, début janvier, Laurence H. fait un saut à Washington. Femme sans enfants, aux amours non cohabitantes, elle liquide sa vie d'avant, à l'américaine, en quelques jours. Un exploit en pleine "guerre des déménageurs", qui a vu les 6.000 personnes de l'administration Obama faire leurs cartons à toute vitesse pour céder la place aux collaborateurs de Trump arrivant dans l'autre sens. Cette transhumance au couteau a fini de la persuader qu'il était grand temps de quitter une ville où, "comme disait Truman, pour avoir un ami il faut avoir un chien". Elle, avait pris un chat, Monday, avec lequel elle a emménagé dans un studio du 17e arrondissement de Paris.

Une quête d'absolu et d'excellence

Après plus de vingt ans aux Etats-Unis, Laurence Haïm ne reconnaît plus le pays de son enfance. "Je ne pensais pas qu'il était si écorché. En colère, gagné par l'anxiété." La potion libérale et pro-européenne concoctée par le leader d'En marche! constituera-t-elle un antidote à cette crise? Elle veut le croire comme elle croit à ces valeurs.

Ce vendredi 17 mars, à trois jours de la confrontation à cinq candidats, la porte-parole distillait de vraies-fausses confidences d'avant-match à BFMTV. "François Bayrou lui a recommandé de faire la sieste, Emmanuel Macron entend ce que François Bayrou lui a dit. Il arrivera reposé et prêt pour ce débat." Sourire complice à la caméra, enthousiasme communicatif. Oubliés les débuts hésitants dans C à Vous sur France 5, l'ex-caméléon de l'info apprivoise son nouveau terrain de jeu. D'interviews en séances de brainstorming, de déplacements de campagne officiels en escapades buissonnières aux côtés des "vraies gens", Laurence Haïm assure retrouver "la dynamique, le goût pour la réflexion et la bienveillance" de la première campagne d'Obama.

«Je ne sais pas mentir. C'est culturel : en Amérique, le mensonge est criminel»

Mardi 14 mars au QG d'En marche!, le député européen et ancien patron de Radio France, Jean-Marie Cavada, centriste converti au macronisme, la félicite en la croisant dans un couloir. "Ce n'est pas facile de franchir la barrière, je suis bien placé pour le savoir. Tu t'en sors bien. Les journalistes me disent que tu es toujours très agréable avec eux." Les consoeurs ou rédacteurs en chef qui ont connu ses colères homériques en concluront qu'elle a enfin appris, à 50 ans et après avoir perdu ses parents, à gérer ses frustrations. Ses amis – ils la décrivent généreuse et enjouée – pensent plutôt qu'elle a trouvé une place à sa mesure après de longs mois de doutes.

Mais sa nature franche et directe, confortée par vingt ans de journalisme sans complaisance à l'anglo-saxonne, s'accommodera-t-elle du langage encagé produit par les communicants? "J'essaie de retranscrire le message le plus honnêtement possible, insiste-t-elle. Je ne sais pas mentir. C'est culturel : en Amérique, le mensonge est criminel."

Il y a des années, son amie Alexandra Boulat lui avait lancé dans un clin d'œil : "Qu'est-ce qu'on va faire quand on sera grandes?" La photojournaliste est morte quelque temps plus tard, en 2007, avant d'avoir pu vieillir. Laurence Haïm a choisi de ne jamais renoncer à sa quête d'absolu et d'excellence. Ses proches, à qui elle avait prédit la première victoire d'Obama puis celle de Trump, l'imaginent déjà sous les ors de l'Elysée. Elle jure que si l'aventure d'En marche! s'arrête, elle pourrait aller vivre auprès des singes au Costa Rica. Après la politique, une autre jungle.

Anne-Laure Barret - Le Journal du Dimanche

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1 avril 2017

1er avril...

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31 mars 2017

Jean Luc Mélenchon

29 mars 2017

Affaire Fillon : soupçons d’emplois fictifs - Penelope Fillon mise en examen

L’épouse du candidat de la droite était convoquée par les juges d’instruction mardi. Elle a été mise en examen, notamment pour « complicité et recel de détournement de fonds publics ».

Après François Fillon, c’est au tour de son épouse, Penelope, d’être mise en examen, mardi 28 mars, par les juges d’instruction pour « complicité et recel de détournement de fonds publics, complicité et recel d’abus de bien sociaux et recel d’escroquerie aggravée ».

« Les magistrats instructeurs ont décidé de mettre en examen Penelope Fillon, dans la logique d’une enquête et d’une instruction conduites exclusivement à charge, au mépris de la séparation des pouvoirs et de la présomption d’innocence, dans des délais de rapidité hors norme. Lorsque cette affaire sera examinée dans la sérénité et le respect des principes de droit, je maintiens que l’innocence de Penelope et de François Fillon sera reconnue », s’est insurgé l’avocat de Mme Fillon, Me Pierre Cornut-Gentille, dans un communiqué diffusé par l’équipe du candidat à la présidentielle.

Les magistrats, saisis par le parquet national financier à la fin de février, ont cherché à savoir si Mme Fillon avait bien travaillé lorsqu’elle était employée par son époux, puis par le suppléant de ce dernier, Marc Joulaud, comme assistante parlementaire entre 1986 et 2013. Ce dernier a d’ailleurs également été mis en examen vendredi.

Lors de son audition par la police judiciaire, Penelope Fillon a détaillé son activité auprès de son époux : « Je lui préparais des fiches », « il m’arrivait de le représenter » dans des manifestations culturelles, a-t-elle entre autres affirmé, selon des informations du Monde.

Soupçons d’emploi fictif à « La Revue des deux mondes »

Le Journal du dimanche a également publié, dimanche, son système de défense dans les locaux du groupe d’intervention régional à Versailles. Sur l’emploi auprès de son mari, elle affirme qu’elle s’occupait du « courrier arrivant à [notre] domicile », des « demandes d’administrés, problèmes personnels de gens en difficulté, sollicitations diverses ». Elle aurait également rédigé des « fiches et des mémos » pour M. Fillon concernant des manifestations locales.

Des soupçons d’emploi fictif pèsent également sur ses missions au sein de La Revue des deux mondes entre mai 2012 et décembre 2013. Pour Michel Crépu, qui dirigeait à l’époque la revue littéraire, l’épouse de François Fillon « a bien signé deux ou peut-être trois notes de lecture », mais « à aucun moment (…) je n’ai eu la moindre trace de ce qui pourrait ressembler à un travail de conseiller littéraire ». Selon le propriétaire de la revue et proche de M. Fillon, Marc Ladreit de Lacharrière, l’épouse de l’ancien premier ministre avait également un rôle de conseillère auprès de lui.

28 mars 2017

AVANT-APRES : après le slogan, Fillon change son affiche de campagne

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28 mars 2017

Sondages diaboliques par Laurent Joffrin - Libération

Les experts – qui ne se trompent jamais… – en sont sûrs : un mois avant le scrutin du premier tour, vient le temps de la cristallisation. Les convictions s’affirment, les choix se stabilisent, les préférences s’arrêtent. C’est en tout cas ce qui s’est passé lors des deux dernières présidentielles. Un mois avant le scrutin de 2007, il était clair que le duel final opposerait Sarkozy et Royal, avec une victoire finale pour Sarkozy.

Un mois avant celui de 2012, Sarkozy et Hollande tenaient la corde, et Hollande devait l’emporter au second tour. Toutes prévisions qui se sont vérifiées dans les urnes. Si l’on reproduit le schéma en 2017, Macron et Le Pen sont donc au deuxième tour et Macron gagne haut la main. L’ennui, c’est que cette fois la cristallisation est fragile… comme le cristal.

Dans la plupart des enquêtes, c’est un fait que Macron et Le Pen sont autour de 25%, Fillon au-dessous de 20% et les deux candidats de gauche entre 10 et 14%. Pliée, la présidentielle ? C’est là que le sol peut se dérober sous les pieds du commentateur paresseux. Dans un sondage des Echos, par exemple, Macron est à 24% et Fillon à 20%. Malgré les coups de boutoir des affaires, le candidat LR réunit toujours un cinquième des intentions de vote, perinde ac cadaver.

L’électorat de droite est donc toujours là, souvent furieux contre son champion, certes, mais aussi terrorisé à l’idée que Macron, ce bébé Hollande, puisse l’emporter. Quatre points d’écart : en un mois d’une campagne au canon, Fillon peut revenir. D’autant que Macron est celui qui compte le plus d’indécis dans son magot d’intentions de vote. Deux ou trois gaffes, une fatigue de fin de campagne, un débat raté et le candidat d’En marche se retrouve… en marche arrière.

On dira que la mécanique du vote utile joue comme une assurance pour Macron. Si Fillon menace de se rétablir, on peut penser qu’une partie des électeurs de gauche, inquiets d’un deuxième tour droite-extrême-droite, voleront à son secours. Peut-être. Mais peut-être pas, surtout si Hamon et Mélenchon le pilonnent sur le thème du social-libéralisme honni. La cristallisation est donc incertaine. Et avec le cristal, on fait des boules. Leur fiabilité est bien connue. Laurent Joffrin

28 mars 2017

40% des Français prêts à voter blanc

Les Français ne sont pas satisfaits de l'offre politique et souhaitent le faire savoir. Selon un sondage réalisé par Ipsos pour le think tank Synopia et dévoilé ce matin par L'Opinion, 40% des électeurs seraient prêts à voter blanc si celui-ci était reconnu. Ils étaient seulement 26% en 2014. "Aujourd'hui, une pétition en faveur du vote blanc a déjà recueilli 230 000 signatures, c'est la première fois qu'une telle démarche a autant de succès", explique au quotidien Olivier Durand, de l'Association pour la reconnaissance du vote blanc.

28 mars 2017

La présidentielle sur un coup de dés

Par Gérard Courtois, éditorialiste - Le Monde

On vote souvent contre ou par défaut. Et cette mécanique menace d’être plus puissante que jamais cette année, estime notre éditorialiste Gérard Courtois, dans sa chronique hebdomadaire.

Sans doute faudra-t-il se faire une raison. Constater qu’aucun des candidats ne parvient jusqu’à présent à présenter un projet assez mobilisateur ni à imposer un thème assez saillant pour cristalliser le débat national. Et admettre, par conséquent, que l’élection présidentielle risque de se jouer sur un coup de dés, ou plus exactement sur des millions de coups de dés, lancés par des électeurs déboussolés au terme d’une campagne aussi nébuleuse qu’indigente.

Cette part d’indécision et de hasard n’abolit pas, pour autant, toute logique électorale. Comme toujours, il entrera dans le choix des Français une bonne dose de rejet. L’on vote bien souvent contre ou par défaut plutôt que pour et par conviction. Au train où l’on va, cette mécanique menace d’être plus puissante que jamais.

A gauche, les uns voteront en priorité pour faire barrage à Marine Le Pen et à son projet nationaliste et dangereusement protectionniste, tandis que les autres voudront d’abord écarter François Fillon et sanctionner son comportement personnel plus encore que la médecine de cheval qu’il propose au pays. A droite, peu se soucient du socialiste Benoît Hamon de plus en plus évanescent et de l’insoumis Jean-Luc Mélenchon de plus en plus entreprenant ; cette bagarre-là, à leurs yeux, est l’affaire de la gauche. En revanche, beaucoup voudront tenter de stopper l’OPA tous azimuts lancée par Emmanuel Macron, en qui ils voient un trop habile suppôt du hollandisme honni.

Quatre personnalités rivalisent

Comme toujours, également, la personnalité des candidats pèsera dans le choix final. L’ancien premier ministre Edouard Balladur nous faisait remarquer récemment qu’il serait temps de renoncer à l’adage selon lequel la présidentielle est « la rencontre entre un homme et un peuple », puisqu’aucun des successeurs du général de Gaulle ne parvint réellement à incarner cette dimension de la fonction. Il n’empêche, il s’agit bien de choisir un homme ou une femme pour ses mérites supposés.

Quoi qu’on pense de leur projet, ils sont quatre, sur ce terrain, à pouvoir rivaliser. En posant au « combattant balafré » et en faisant feu de tout bois pour tenter d’occulter les affaires qui l’accablent, François Fillon veut croire que les Français lui reconnaîtront une exceptionnelle capacité de résistance à l’épreuve. Pugnace jusqu’à la brutalité, sûre d’elle-même jusqu’à l’arrogance, Marine Le Pen n’en dégage pas moins une indéniable force de conviction capable d’entraîner ceux que la politique a fini par écœurer ou révulser. Jean-Luc Mélenchon a su ajouter la truculence à l’imprécation, les bons mots aux grandes envolées et c’est un atout que de mettre les rieurs de son côté. Par son audace transgressive, son optimisme assumé, sa jeunesse même, Emmanuel Macron démontre depuis des mois sa capacité de séduction. Pardon enfin pour Benoît Hamon, mais en dépit de sa bonne foi, il paraît un peu perdu sur ce ring.

Une élection, pourtant, ne saurait se réduire à des choix négatifs ou épidermiques, à un concours de rejet ou de beauté. Même en l’absence de controverse majeure, elle se solde toujours par un arbitrage des Français entre leurs inquiétudes et leurs attentes. Le scrutin de 2002 est, à cet égard, très instructif. Comme aujourd’hui, la campagne avait été, cette année-là, médiocre et confuse. Le président sortant de l’époque, Jacques Chirac, et le premier ministre sortant, Lionel Jospin, enfermés dans leur détestation réciproque après cinq ans de cohabitation, n’avaient pas su élever le débat.

Probité, sécurité, nouveauté

Les électeurs n’en avaient pas moins tranché, au bout du compte, en fonction de trois préoccupations qui résonnent singulièrement quinze ans plus tard. D’abord la probité. Jacques Chirac était alors harcelé par des affaires de financement politique et d’abus de biens sociaux plus encore que ne l’est François Fillon : les caisses de la Mairie de Paris alimentaient allègrement celles de son parti, le RPR, ses frais de voyages personnels ou ses frais de bouche défrayaient méchamment la chronique. C’est au point que l’austère Jospin crut possible de le disqualifier sur ce seul slogan vertueux : « Présider autrement ». L’on sait que cela ne suffit point. Voilà qui peut laisser quelque espoir à l’actuel candidat des Républicains.

Ensuite la sécurité. Car Chirac avait trouvé la parade. Sans relâche ni vergogne, pendant des mois, il avait dénoncé le supposé laxisme du gouvernement socialiste face à la délinquance et attisé toutes les peurs du moment. Or on sait que les questions liées à l’insécurité restent une inquiétude multiforme qui taraude les Français : pour plus de 80 % d’entre eux (à égalité avec le chômage, le pouvoir d’achat ou l’avenir de la protection sociale), le terrorisme et la criminalité sont aujourd’hui des sujets de préoccupation majeurs – et des thèmes de prédilection de la candidate du Front national.

Enfin la nouveauté. Déjà lassés de la succession au pouvoir des mêmes hommes et des mêmes partis, les électeurs avaient cherché fortune ailleurs, du côté de Jean-Pierre Chevènement, puis des trotskistes Arlette Laguiller et Olivier Besancenot ou encore de l’écologiste Noël Mamère et la radicale Christiane Taubira, avant de qualifier, le 21 avril 2002, Jean-Marie Le Pen pour le second tour. Au total, les deux candidats du PS et du RPR n’avaient totalisé que 35 % des voix. Leurs héritiers actuels (Fillon et Hamon) sont crédités de moins de 30 % des intentions de vote et menacés d’être tous deux écartés du second tour par un coup de balai sans précédent.

Ajoutons que, perplexes et désabusés, bon nombre de Français ne firent leur choix – et la différence – que dans les dernières semaines et même les tout derniers jours avant le premier tour de 2002. C’est, à l’évidence, ce qui nous attend cette année. Et comme chacun sait, quand l’histoire se répète, il arrive que ce soit en ricanant.

27 mars 2017

«Avec Fillon, on assiste à l’exhibition d’un orgueil» Chrisine Angot

Trois jours après son passage mouvementé dans «l’Emission politique», sur France 2, où elle faisait face au candidat LR, Christine Angot a accepté de recevoir «Libération» chez elle pour refaire le match.

«Avec Fillon, on assiste à l’exhibition d’un orgueil»

Par Alexandra Schwartzbrod — 26 mars 2017 à 19:06

Trois jours après son passage mouvementé dans «l’Emission politique», sur France 2, où elle faisait face au candidat LR, Christine Angot a accepté de recevoir «Libération» chez elle pour refaire le match.

 «Avec Fillon, on assiste à l’exhibition d’un orgueil»

Au lendemain du face-à-face houleux sur France 2 entre François Fillon et la romancière Christine Angot, nous avons sollicité celle qui est aussi chroniqueuse à Libération. Elle nous a rappelée samedi puis reçue chez elle dimanche matin, dans un appartement du Nord parisien baigné de soleil. Vêtue de noir, son fameux bracelet au poignet (lire ci-contre), elle semblait sûre d’elle, considérant comme «dingue» l’accusation portée contre elle par beaucoup d’avoir involontairement renforcé le candidat LR. Est-ce un hasard si, non loin du canapé où nous prenons place, traîne un exemplaire de la Nausée de Jean-Paul Sartre ?

Avez-vous proposé à France 2 d’intervenir ?

Non, jamais je n’aurais proposé un truc pareil. France 2 a téléphoné à un ami, une semaine avant l’émission. Ma première réaction a été de dire non. Ça me paraissait trop dur, mais en même temps j’avais envie d’accepter car je savais que je serais à la fois seule et pas seule. Un écrivain, c’est toujours une expression par lui-même, et en même temps on sait qu’on n’est pas seul. Je ne réfléchis jamais sur le moment. Je réfléchis après. Sinon je ne le fais pas. Mon texte était écrit à la virgule près. Les trois premières phrases me sont venues au dernier moment.

Vous aviez déjà croisé François Fillon ?

Non, jamais.

Vous ne regrettez pas d’y être allée ?

Non. Dans ce que j’ai dit, je n’ai rien inventé. C’est ce que les gens ressentent, je le sais. Je voulais mettre des mots sur un état d’esprit. En revanche, je n’ai aucun sens de la repartie. Et j’avais face à moi un professionnel du débat. Le débat, c’est une prise de pouvoir, par la rhétorique, de l’un sur l’autre, une partie de tennis où tout ce qui compte, c’est de marquer des points. Quand il a dit «je constate que vous n’avez pas rendu le bracelet», j’aurais dû répondre «oui, mais je n’ai pas rendu le service» qu’on attendait de moi en échange.

L’équipe de France 2 avait-elle lu le texte ?

Non, personne. Je l’avais juste fait lire à mon compagnon et à un ami.

Vous n’aviez pas envisagé que Fillon ait envie de réagir ?

Si on commence à se concentrer sur ce que va faire l’autre, on ne fait plus ce qu’on a à faire. Dans la première version de mon texte, je rapportais des propos entendus dans le métro qui étaient très drôles mais pas tendres pour Fillon. Je les ai enlevés parce que justement ç’aurait été ironique et blessant. J’aurais eu les rieurs de mon côté, je ne voulais pas ça.

On vous a reproché d’être agressive…

Moi, agressive ? Ce qui était violent était la situation que je décrivais ! Pas moi. Allez voir les gens quand ils sont devant leur télé ! Ecoutez-les ! J’ai juste fait en sorte que ce qu’on prend pour du silence ne soit pas du vide. Alors que lui, Fillon, quand il est poussé vers son vide, il ne dit rien, il renverse la situation. Quand il est accusé, il accuse Hollande. Il rend les costumes, et hop c’est effacé. Alors beaucoup de gens ont l’impression d’être pris pour des imbéciles. Marine Le Pen s’appuie sur ce sentiment.

Vous avez évoqué le symbole de la Revue des deux mondes…

Cette revue porte bien son nom. Il y a bien deux mondes, oui, et une grande fracture au milieu en ce moment, comme en Espagne au moment de Franco ou en Allemagne juste avant le plébiscite de Hitler. Pas une fracture gauche-droite, bobos-pas bobos, capital culturel ou pas. Bien sûr qu’un groupe déteste l’autre et réciproquement. On n’arrive plus à parler ensemble. Mais le problème, c’est que l’un de ces mondes refuse le réel, au nom d’un passé rêvé, et souhaite dominer et abolir ce réel en abolissant la parole de l’autre et ce qu’il vit. Il y a quelques années, ces deux mondes pouvaient se parler. Aujourd’hui, c’est fini.

La réaction du public vous a déstabilisée ?

Quand j’ai entendu quelqu’un crier «c’est une honte !», j’ai pensé «ils sont gonflés, elle est de mon côté, la honte ?» Fillon dit «vous me condamnez», je ne le condamne pas, je dis ce qu’on est des millions à ressentir, c’est tout. Combien de messages j’ai reçus qui me disent «vous avez parlé pour nous», et qui ne viennent pas seulement d’artistes, loin de là.

Vous vous êtes quand même énervée à la fin…

Non, je ne me suis pas énervée. Bien sûr que Fillon a le droit à la présomption d’innocence. Mais les journalistes ont le droit d’enquêter et les gens ont le droit de penser. Même si ça le dérange. Ceux qui prétendent que la justice est manipulée, ou que les journalistes sont malhonnêtes, très bien, mais ils ne peuvent pas entrer dans nos têtes. Vu la violence que j’ai reçue ce soir-là sur le plateau, non, je ne me suis pas énervée. Je n’ai pas dit qu’il était malhonnête, j’ai dit que sa parole l’était. On voit, on entend quand ça sonne faux.

Cet argument ne tient pas au plan juridique…

Non, bien sûr. Mais le plan juridique n’empêche pas les gens d’être sensibles à ce qu’ils voient, ils ont cinq sens. Je ne reproche rien à personne, j’ai juste une sensibilité. Avec Fillon, on assiste à l’exhibition d’un orgueil, c’est ça qu’on voit. Il parle d’un homme qui s’est suicidé en vrai, Bérégovoy, pour se protéger lui. Bien sûr que c’est légal de dire ça, mais c’est indécent. C’est pourquoi on ne peut pas parler avec quelqu’un comme ça. Il dit «je suis blessé», c’est nous qui sommes blessés !

Cela fait un moment que vous vous frottez au politique…

En 2012, Télérama m’avait proposé de faire le portrait de Marine Le Pen, j’avais un trac dingue. Puis je l’ai fait. Ce qui m’intéresse, c’est d’essayer de montrer la personne. Ensuite, le Point m’a appelée pour refaire un portrait d’elle, je n’ai pas voulu. Ils m’ont proposé de suivre Hollande. C’était au moment du Bourget. Je n’ai pas les compétences des journalistes politiques qui suivent ces gens-là depuis des années. L’an dernier, j’ai fait un portrait de Sarkozy pour Libé, puis de Bruno Le Maire pour l’Obs. Et j’aime bien, avant, être en contact avec le journaliste qui suit le politique en question. J’aime énormément, car c’est la rencontre de deux manières de faire. Ces journalistes ont été très généreux avec moi, ils ont la passion de ce qu’ils voient, du fait. Alors que ma passion, ce n’est pas exactement ça. Moi, ma passion, c’est «comment dire ce qui est». Et «ce qui est», ça ne s’arrête pas aux faits. C’est ce que l’on perçoit d’une personne dans l’ensemble, son affectivité par exemple, mais sans explication psychologique, sans surplomb, le lien que la personne politique crée avec nous, comment on peut décrire ce lien. Les politiques, ça les intéresse le lien. Ils ne s’en foutent pas de nous. Quand Hollande dit «j’aime les gens», je suis sûre que c’est vrai. Sarkozy aussi. Marine Le Pen, elle aime les gens mais pas tous. Elle aime ceux du Front national, vraiment. Les autres non. Elle les drague, c’est pas pareil.

Vous ne regrettez pas non plus votre dernière phrase concernant France 2 ?

Les journalistes sont très polis, attentifs à ménager les uns et les autres pour préserver l’objectivité, ou son apparence. Pujadas a posé des questions claires ce soir-là. Mais quand les réponses indécentes arrivent, un journaliste ne peut pas dire «c’est dégoûtant». Contrairement à ce que disent les politiques, les journalistes ne disent pas ce qu’ils ressentent, voilà ce que j’ai voulu dire. Moi, dans cette affaire, j’avais quoi à gagner à part des coups ? J’ai refusé qu’on affiche la couverture de mon dernier livre comme France 2 le proposait, car le sujet n’était pas là, je croyais à ce que je faisais, c’est tout. C’est mon travail de traduire un sentiment collectif, et je crois que ça a soulagé des gens. Si tu sens que ce que tu dis est légitime, il n’y a pas besoin de courage.

Alexandra Schwartzbrod - Libération

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Christine Angot

26 mars 2017

Affaire Fillon - Ce que contient le livre « Bienvenue Place Beauvau », cité par Fillon

Par Franck Johannès

L’ouvrage, évoqué par le candidat jeudi pour dénoncer un « scandale d’Etat », met en lien des événements souvent déjà connus, pour construire une machine à soupçons.

Le livre Bienvenue Place Beauvau, police : les secrets inavouables d’un quinquennat, d’Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé (Robert Laffont, 246 pages, 19,50 euros) s’inscrit dans la lignée d’un précédent ouvrage des trois mêmes auteurs, chez le même éditeur, L’espion du Président : au cœur de la police politique de Sarkozy (2012), dont il reprend d’ailleurs plusieurs passages.

Les auteurs – deux d’entre eux travaillent au Canard enchaîné, Olivia Recasens est journaliste indépendante –, mettent systématiquement en lien des événements, souvent déjà connus, pour construire une machine à soupçons, qui n’est jamais très loin des théories conspirationnistes et qui fait douter qu’il puisse exister un seul policier républicain.

Le livre a naturellement plu à l’hebdomadaire Valeurs actuelles, qui en a fait sa « une », jeudi 23 mars, et en a publié « les bonnes feuilles », sans doute une première pour Le Canard enchaîné.

François Hollande a-t-il mis en place un cabinet noir ?

« Le retour aux affaires de ces [policiers] chiraquiens [par François Hollande] nourrit bien évidemment le soupçon sarkozyste de l’existence d’un cabinet noir, relèvent les auteurs. Il n’est pas possible d’en apporter la preuve formelle. Comme il n’est pas possible de prouver le contraire ! Mais l’addition d’indices troubles et de témoignages étonnants interroge. Plusieurs observateurs bien placés dans l’appareil policier nous ont ainsi décrit par le menu l’existence d’une structure clandestine, aux ramifications complexes, et dont le rayon d’action ne serait pas cantonné au seul renseignement territorial. »

La plupart des citations de policiers sont anonymes et très accusatoires, les rares fonctionnaires à être cités nommément se contentent de propos anodins, d’autres, et le moyen est très discutable, pensaient qu’ils participaient à un déjeuner informel et se retrouvent cités avec la mention « entretien avec l’auteur ». C’était déjà le cas pour l’ouvrage précédent, consacré au chef du contre-espionnage, Bernard Squarcini, enregistré à son insu.

Le poids du ministère de l’intérieur

Les auteurs relèvent avec raison que le ministère de l’intérieur est au cœur de l’appareil d’Etat, « la présidentielle se joue à l’intérieur », notent les journalistes, et nombre d’« anciens premiers flics de France » se sont « tous servis du tremplin de la place Beauvau pour atterrir sur le trottoir d’en face, à l’Elysée ». Le livre a été écrit avant les mésaventures de Bruno Le Roux.

Les auteurs s’attachent dans un premier chapitre à expliquer comment la gauche au pouvoir a recruté des policiers pour « désarkozyser » le ministère de l’intérieur.

Les policiers rendent évidemment compte à leur hiérarchie, et donc au ministre, mais les mécanismes sont moins sommaires que ne l’expose le livre, qui évoque une police tenue en laisse. Le directeur des affaires criminelles et des grâces à la chancellerie est accusé de faire remonter toutes les affaires sensibles au président parce qu’il « a partagé la même chambrée que François Hollande et Michel Sapin lors de leur service militaire ».

Les amis de Manuel Valls

« Sarkozy, je le surveille, je sais tout ce qu’il fait », aurait dit François Hollande devant dix-neuf députés socialistes en février 2014, dont pas un n’est cité.

Le chapitre suivant assure que le président faisait surveiller Manuel Valls « pour brider les ambitions de son premier ministre ». Pour preuve, le chef de cabinet de Valls a été photographié avec le patron d’un cercle de jeux. Mais c’est aussitôt pour expliquer que ce patron était suivi depuis trois ans par les douanes.

L’ouvrage s’attarde sur deux amis bien connus de l’ancien chef du gouvernement – Alain Bauer, insubmersible conseiller police sous tous les quinquennats et ancien grand maître du Grand Orient de France (« le Raspoutine de l’intérieur », pour les auteurs), et Stéphane Fouks, vice-président d’Havas. Leurs relations ont été racontées à de très nombreuses reprises dans la presse.

La police des polices

Un chapitre entier est ensuite consacré à l’ascension du général de gendarmerie Denis Favier : François Mitterrand avait une confiance telle dans la gendarmerie qu’il avait monté une cellule semi-clandestine à l’origine de nombre de scandales ; Nicolas Sarkozy avait au contraire privilégié les policiers. Avec François Hollande, la gendarmerie a pris sa revanche, dans l’éternelle guerre police-gendarmerie.

Parmi « les secrets inavouables » mais déjà publiés du quinquennat, figure en bonne place l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), présentée comme « une machine de guerre », qui a fait le ménage chez les fonctionnaires les plus douteux.

Les lecteurs familiers des affaires de police n’apprendront rien, pas plus que dans le chapitre consacré à la séculaire rivalité entre la préfecture de police de Paris et la place Beauvau. Les auteurs égrènent les affaires qui ont valu aux policiers de premier rang d’être écartés, de la Pasqua connection aux affaires de stupéfiants

L’autre espion du président

Autre passage obligé, les rivalités entre la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), mise en place par Nicolas Sarkozy, et la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), dont le patron, le diplomate Bernard Bajolet, est effectivement un proche du président et ne s’en est jamais caché.

Que François Hollande choisisse, en ces périodes de terrorisme, un homme en qui il a entièrement confiance pour diriger les services secrets est-il tellement scandaleux ? Même s’il a fallu discrètement prolonger son mandat.

Le dernier chapitre est consacré au Front national, sachant qu’un policier sur deux a voté pour Marine Le Pen en 2012. Les auteurs assurent que le préfet Christian Lambert, qui a débuté comme gardien de la paix avant de diriger le RAID – l’unité d’intervention de la police nationale – et de gravir tous les échelons – Nicolas Sarkozy l’avait pris en affection –, aurait proposé ses services au parti frontiste, par l’intermédiaire du député du Gard Gilbert Collard.

Le passage illustre à merveille les ambiguïtés du livre : « Cette rencontre nous a été racontée par plusieurs témoins. Christian Lambert ne nous l’a pas confirmée. En revanche, lorsque nous avons interrogé Gilbert Collard à ce propos, il nous a répondu : “Vous êtes bien renseignés. Mais vous comprendrez que je ne peux vous confirmer cette information. Ni l’infirmer.” »

Franck Johannès

Affaire Fillon : mise en examen et colère présidentielle François Hollande a de nouveau réagi, vendredi matin 24 mars, aux accusations de François Fillon, qui avait affirmé la veille sur France 2 que les fuites concernant ses déboires judiciaires émanaient d’un « cabinet noir » à l’Elysée. « Je ne veux pas rentrer dans le débat électoral, je ne suis pas candidat, mais il y a une dignité, une responsabilité à respecter. Je pense que M. Fillon est au-delà maintenant, ou en-deçà », a déclaré le chef de l’Etat sur France Info. « Vous savez ma position, ça a toujours été l’indépendance de la justice, le respect de la présomption d’innocence et ne jamais interférer », a-t-il assuré, ajoutant : « Je crois que c’est très différent de mes prédécesseurs. » Par ailleurs, l’ex-suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale, Marc Joulaud, a été à son tour mis en examen, vendredi, pour « détournement de fonds publics en lien avec un emploi fictif ou surévalué ». L’actuel maire LR de Sablé-sur-Sarthe avait succédé à l’Assemblée nationale à M. Fillon comme député de la Sarthe. Il avait salarié l’épouse de ce dernier comme assistante parlementaire de 2002 à 2007.

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