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Jours tranquilles à Paris
26 novembre 2019

Enquête - « China Cables » : révélations sur le fonctionnement des camps d’internement des Ouïgours

Par Harold Thibault, Brice Pedroletti

Des directives internes à l’Etat-Parti chinois obtenues par l’ICIJ et 17 médias, dont « Le Monde », jettent une lumière inédite sur la politique de répression systématique et de détention de masse menée par Pékin au Xinjiang.

Rétention arbitraire, conditions de détention extrêmes, autocritiques et lavage de cerveau… Une série de directives révélant le fonctionnement des camps d’internement des Ouïgours au Xinjiang et attribuées à l’Etat-Parti chinois, jettent une lumière inédite, car décrite de l’intérieur du régime, sur la politique de répression systématique et d’internement de masse menée par Pékin. Elles ont été obtenues par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et sont dévoilées par dix-sept médias internationaux dont Le Monde.

Les « China Cables », sur lesquels ont également travaillé la BBC, le Guardian, la Süddeutsche Zeitung, El Pais ou encore les agences Associated Press et Kyodo, confirment le caractère hautement coercitif des camps d’enfermement de la population ouïgoure, mis en place depuis 2017, et ce en contradiction directe avec le discours public de la Chine sur ce qu’elle nomme « centres de formation et d’éducation ». Au moins un million de Ouïgours, sur une population totale de 11,5 millions, et d’autres membres de minorités musulmanes auraient été internés les trois dernières années, selon le décompte d’ONG repris par l’ONU.

Parmi ces documents, classés secrets et dont plusieurs experts de la région du Xinjiang et linguistes, contactés par l’ICIJ attestent l’authenticité, figure une longue liste d’instructions administratives. En tête des directives, datées de 2017, figure le nom de Zhu Hailun, le numéro deux du Parti communiste de la région autonome ouïgoure du Xinjiang. Ce dernier dirige la Commission politique et légale, l’organe exécutif suprême en matière de sécurité pour la région.

Réponse à la menace terroriste

Les directives détaillent le fonctionnement des centres de rétention construits pour accueillir des centaines de milliers de membres des minorités musulmanes de la région du Xinjiang, dans l’extrême ouest chinois. Quatre autres circulaires, également à en-tête de M. Zhu, expliquent la mise en place d’une base de données de surveillance de la population, qui se veut exhaustive et qui fait remonter, chaque semaine, des dizaines de milliers de noms de personnes jugées « suspectes ». Ces personnes peuvent donc être interpellées, du seul fait qu’elles ont voyagé à l’étranger ou simplement utilisé une application de partage de fichiers.

Contacté par l’ICIJ et le Guardian, au nom de tous les médias partenaires, le gouvernement chinois a qualifié les documents de « pure invention » et de « fake news ». Il note que la région « était devenue un champ de bataille – des milliers d’incidents terroristes se sont produits au Xinjiang entre les années 1990 et 2016, et des milliers de personnes innocentes ont été tuées. Donc il y a une demande énorme chez les habitants du Xinjiang pour que le gouvernement prenne des mesures résolues pour régler le problème ».

Le communiqué souligne que « depuis que les mesures ont été prises ces trois dernières années, il n’y a pas eu un seul incident terroriste » et soutient que la liberté de religion est pleinement respectée. « Ces mesures ont été efficaces. Le Xinjiang est bien plus sûr. L’an dernier, le tourisme a progressé de 40 %, et le PIB local a augmenté de plus de 6 %. »

Ce réseau de « centres d’éducation et de formation », selon l’appellation officielle, constitue le cœur de la politique d’internement à grande échelle lancée en 2016 par la Chine. Ces camps sont la réponse du régime à la menace terroriste à laquelle il est alors confronté. Près d’une centaine de ces « centres », fraîchement construits et ayant donné lieu à des appels d’offres publics, ont été géolocalisés en 2018, les barbelés et miradors étant visibles sur Google Earth. La plupart sont gigantesques, d’une capacité pouvant aller jusqu’à 20 000 personnes.

« Changer une population entière »

Les « China Cables » donnent des détails sur les critères d’internement de la population qui est déterminé grâce à un système de fichage ultra-détaillé. La « plate-forme intégrée des opérations conjointes » selon son nom administratif, sert à trier et faire ressortir des noms de personnes « suspectes » – 24 412 sur une seule semaine, dans quatre préfectures du sud-ouest du Xinjiang en juin 2017, dont les deux tiers ont été placés en « centre de formation ». Pour le chercheur allemand et spécialiste reconnu de la question ouïgoure Adrian Zenz, le réseau des camps « est là pour endoctriner presque toute une minorité ethnique et changer une population entière ».

Adressée à toutes les villes et préfectures de la région, la première circulaire liste en 26 points les « instructions pour renforcer et standardiser le fonctionnement » de ces centres. Elle est typique des documents du Parti communiste, remplis de jargon, et confirme le caractère extrêmement coercitif de ces camps, qui constituent « une mesure stratégique, critique et de long terme » dans le combat contre le terrorisme. Leur fonctionnement est « hautement sensible » : il est ordonné de « renforcer chez le personnel la conscience de [les] garder secrets » et d’interdire d’y faire entrer tout matériel d’enregistrement vidéo, téléphones ou appareils photo.

La circulaire détaille les mesures de prévention des évasions par un fonctionnement typiquement carcéral. Il faut, préconise le document, « améliorer l’installation de postes de police à l’entrée principale », mettre en place des « enceintes parfaitement étanches ». Et aussi s’assurer du système de « double fermeture » des portes des dortoirs, des couloirs et des étages – un procédé qui dans le jargon carcéral chinois implique deux clés détenues par deux gardes différents.

Il faut encore s’assurer que les détenus, qualifiés d’« étudiants » car en phase de rééducation, « ne s’échappent pas durant les cours, le traitement médical, les visites familiales ». Tout « étudiant » qui quitte le centre pour une raison ou une autre « doit être accompagné par du personnel qui le contrôle et le surveille ». Au chapitre « prévention des troubles », les responsables des centres sont incités à « repérer et remédier à toute violation de comportement », et les officiers du renseignement, à s’assurer que « personne ne se ligue pour créer des problèmes ».

Une « surveillance vidéo complète des dortoirs et des classes sans aucun angle mort doit être assurée ». Le centre doit être subdivisé en une « zone très stricte », une « zone stricte » et une « zone normale ». Chaque détenu sera « affecté à l’une de ces zones après une sélection ».

La suite du document donne des consignes en matière de prévention des séismes, des incendies et des maladies – avec le souci d’éviter tout incident et toute « mort anormale ». Il est strictement interdit à la police de « pénétrer dans les zones d’études avec des armes ». Les contacts avec la famille sont encouragés « au téléphone une fois par semaine et par vidéo une fois par mois ».

Des témoins par dizaines

La plupart de ces instructions ont été corroborées par certains des détenus qui ont été libérés, ont gagné l’étranger et ont choisi de parler. Mais dans la réalité, les pratiques vont bien au-delà de ce qui est prescrit officiellement. Sayragul Sauytbay, une directrice d’école chinoise d’ethnie kazakhe, qui a été internée au motif que son mari et ses enfants étaient au Kazakhstan, a été choisie comme enseignante – une possibilité explicitement mentionnée dans la circulaire, qui préconise, en raison de la pénurie de professeurs, d’en choisir parmi les détenus.

Le centre dans lequel elle est restée quatre mois début 2018 ne permettait aucune visite des familles, ni aucun appel vocal ou vidéo : « Si des proches venaient s’enquérir à votre sujet, ils étaient eux aussi détenus. Et vous ne les voyiez pas. C’était la règle dans ce centre », explique-t-elle. Les policiers en armes étaient présents partout : ils venaient régulièrement chercher des étudiants dans sa classe pour les interroger.

Tursunay Ziavdun, une Ouïgoure libérée en décembre 2018 après onze mois d’internement dans un centre de formation et d’éducation de Künes (ouest du Xinjiang), explique que les détenus de la zone dite « très stricte » étaient en uniforme rouge, ceux de la « zone stricte » en jaune, et ceux de la zone « normale » en bleu : « Les uniformes rouges sont enchaînés quand ils sont emmenés dehors ou à des interrogatoires, chaque fois accompagnés par deux policiers en armes », explique-t-elle par vidéo depuis le Kazakhstan où elle a rejoint son mari.

Comme Sayragul Sauytbay, Mme Ziavdun confirme que les salles de classes, qui contenaient une quarantaine de personnes, étaient entourées d’une grille qui séparait le professeur des « étudiants » et que des gardes en armes veillaient. Elle pouvait toutefois parler par vidéo à ses proches une fois par mois.

Les détenus sont soumis à une « éducation idéologique », explique la circulaire. Ils doivent par ailleurs étudier le mandarin, les lois chinoises et acquérir certaines compétences professionnelles. Orinbek Koksebek, un Kazakh de Chine qui avait pris la nationalité du Kazakhstan et a été interné après être revenu en Chine, a raconté en 2018 au Monde avoir dû apprendre par cœur trois chansons communistes parce qu’il parlait très mal le chinois. Toute une partie des cours portaient sur la « pensée de Xi Jinping et le XIXe congrès », explique Sayragul Sauytbay.

Une chambre de torture

La circulaire mentionne l’importance de « la repentance et de l’aveu » des étudiants afin qu’ils comprennent « le caractère illégal, criminel et dangereux de leur comportement passé ». « Cela s’appelait l’autoréflexion. Il fallait penser à ce que l’on avait pu faire de mal, à nos fautes, en mettant les mains sur le mur, pendant deux heures. Puis, après, il fallait l’écrire et le donner au professeur. Personne n’était coupable de quoi que ce soit. Mais tout le monde était forcé de trouver quelque chose, des fautes qui n’avaient pas été commises. Et ils étaient punis », poursuit Mme Sauytbay. Les témoignages confirment que tout acte religieux est entièrement proscrit : une parole, une prière, peut envoyer en détention.

Le document secret mentionne des punitions pour ceux « qui ne comprennent pas, ont des attitudes négatives ou ont des velléités de résistance ». Ils doivent être soumis à des méthodes appropriées de type « tous contre un », pour s’assurer d’être « transformés par l’éducation ». Toute une rubrique porte également sur la discipline, le comportement et les manières, qui non seulement sont extrêmement strictes, mais donnent lieu à des évaluations, selon un système complexe de points.

En l’absence de toute possibilité de recours pour les détenus et leur famille, le système est d’une perversité extrême, un mélange de camp militaire et de prison secrète. A son arrivée en camp, Orinbek Koksebek a été enchaîné aux pieds pendant sept jours. Il a été envoyé à six reprises au cachot. Sayragul Sauytbay a décrit l’existence d’une « chambre noire », une salle de torture dans le camp où elle a travaillé. Mme Sauytbay a été battue sur le corps et la tête avec une matraque électrique en caoutchouc dur – puis privée de nourriture pendant deux jours.

La chambre de torture comportait la classique « chaise du tigre » chinoise – qui maintient le prisonnier avec une barre de fer au-dessus des cuisses – mais celle-ci envoyait des chocs électriques. Plusieurs types d’instruments étaient à portée de main : une sorte de baïonnette, un bâton muni d’un fil de fer à l’extrémité, un tabouret avec des pics. De nombreux détenus font par ailleurs état de viols de jeunes femmes par les gardes.

Une « formation professionnelle » pour les plus méritants

La circulaire établit également les conditions qui permettent à un « étudiant » de « compléter » son éducation : celle-ci doit durer « au moins un an » et ne s’applique qu’à ceux qui ont intégré la « zone normale ». Ensuite, plusieurs conditions simultanées doivent être réunies : le « problème » qui a donné lieu à l’« éducation » doit avoir été résorbé, les notes de « transformation idéologique », de « résultats scolaires », d’« obéissance » et de « discipline » répondre aux niveaux exigés.

Ces données sont ensuite « entrées dans la plate-forme intégrée des opérations conjointes » : « si celle-ci ne détecte pas de nouveau problème », alors le dossier est transmis aux bureaux de la formation et de l’éducation des divers échelons régionaux. « Ce sont des critères incroyablement stricts », note le chercheur Adrian Zenz, qui a été parmi les premiers à confirmer l’existence des centres d’éducation et leur caractère coercitif en épluchant les appels d’offres et les budgets officiels des localités du Xinjiang.

Tous les étudiants qui « complètent leur formation », précise le document chinois, sont alors orientés vers une « session intensive de renforcement des compétences » de trois à six mois. Les préfectures sont encouragées à mettre en place des centres permettant « le placement des étudiants ». Des dizaines d’entreprises de l’intérieur de la Chine reçoivent des subventions pour s’installer dans des parcs industriels et recruter cette main-d’œuvre locale forcée.

Environ 20 % de la population adulte ouïgoure et kazakhe

Aucune statistique ne permet de savoir quel pourcentage d’« étudiants » ont été transférés vers de la formation professionnelle, libérés, ou condamnés à des peines carcérales à purger sur place – ou en prison, ou sous d’autres formes de détention. Les données officielles chinoises montrent toutefois que les arrestations au Xinjiang ont été multipliées par huit rien qu’entre 2016 et 2017 – pour atteindre 21 % du total de l’ensemble de la Chine. « Plusieurs centaines de milliers de personnes ont été la cible de poursuites judiciaires ces deux dernières années et demie au Xinjiang », explique le chercheur Gene Bunin, créateur d’une base de données des victimes du Xinjiang, qui répertorie les cas connus de personnes disparues.

« On sait qu’il y a eu des libérations importantes des centres de formation et d’éducation. Le problème toutefois, c’est que ceux qui sont libérés et renvoyés chez eux sont loin d’être libres : ils sont sous des formes variées de contrôle, de résidence surveillée, se voient imposer des restrictions pour se déplacer de ville en ville. Beaucoup sont en piteux état psychologique et physique, ils vivent dans la peur d’être de nouveaux détenus », explique-t-il.

Dans un nouveau rapport rendu public ce dimanche 24 novembre et intitulé « Laver les cerveaux, purifier les cœurs », le chercheur Adrian Zenz en étudiant les documents administratifs de plusieurs localités du Xinjiang a identifié quels individus étaient classés comme « détenus pour rééducation », « arrêtés » ou « en train de purger une peine ». Il s’agit d’une majorité d’hommes (six fois plus que de femmes), âgés de 25 à 50 ans. Ce « qui confirme, écrit M. Zenz, que la campagne de rééducation et d’internement vise clairement les figures d’autorité, et non pas seulement la jeune génération censée avoir besoin de “formation”, comme le prétend Pékin ». Dans ses conclusions, M. Zenz incite à réévaluer le nombre de personnes qui ont été internées au Xinjiang à 1,8 million, soit environ 20 % de la population adulte ouïgoure et kazakhe.

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25 novembre 2019

A Hongkong, les électeurs infligent un brutal désaveu au gouvernement local et à Pékin

hong victoire

Par Florence de Changy, Hongkong, correspondance

Avec un taux de participation record de 71 % (contre 47 % en 2015), l’opposition a raflé la majorité des sièges dans 17 des 18 conseils de district, démontrant le soutien de la population au mouvement de protestation en cours.

Les élections pour les conseillers des dix-huit districts de Hongkong, qui ont eu lieu dimanche 24 novembre, ont rendu un jugement sans appel de défiance et de désapprobation au gouvernement dirigé par Carrie Lam. Avec un taux de participation record (71 % contre 47 % lors du même scrutin en 2015), l’opposition a raflé la majorité des sièges dans 17 des 18 conseils de district, ce qui lui confère automatiquement 117 voix de plus (sur 1 200) au comité qui élit le chef de l’exécutif.

C’est la première fois que les Hongkongais se servent de ces élections, généralement négligées en raison de leur faible impact politique, comme d’un référendum d’expression populaire. La chef de l’exécutif, Carrie Lam, officiellement soutenue par Pékin, est tenue responsable de la crise actuelle, qui a démarré au printemps autour d’un projet de loi d’extradition, mais qui s’est aggravée de mois en mois, malgré la suspension (mi-juin), puis l’abandon (en septembre) de ce texte.

Soutien massif aux « cinq demandes » des manifestants

Ainsi, malgré l’aggravation de la situation politique et économique, et la radicalisation des modes opératoires des manifestants, les Hongkongais ont choisi de condamner l’immobilisme du gouvernement et la brutalité policière. Ils ont apporté un soutien massif aux « cinq demandes » des manifestants parmi lesquelles la plus urgente est la mise en place d’une commission d’enquête indépendante dans la brutalité policière et la plus importante est la demande du suffrage universel pour les élections législatives et l’élection du chef de l’exécutif.

« Les Hongkongais n’ont pas voté pour résoudre les problèmes de toilettes publiques ou de sangliers qui défoncent les poubelles. Ils ont voté pour redire haut et fort leur attachement à leurs libertés fondamentales et leur soutien collectif aux manifestants qui sont montés au front depuis six mois pour les défendre », estime le financier militant Ed Chin.

L’obtention de 117 voix de plus au comité électoral pour le chef de l’exécutif va considérablement augmenter l’influence de l’opposition dans le choix du prochain leader de Hongkong. « Sur les 1 200 voix, elle en a déjà 350. En en gagnant 117 de plus avec les conseillers de district, elle s’approche de la majorité. Cette nouvelle configuration va faire de Li Ka-shing [le plus influent milliardaire hongkongais] le décideur lors des prochaines élections. Or, Pékin s’est fâché avec lui », observe le professeur de droit Benny Tai, condamné au printemps à seize mois de prison pour son rôle dans le mouvement des parapluies en 2014, mais actuellement en liberté provisoire.

C’est la première fois que l’opposition, qui a longtemps pris le parti de laisser le camp pro-Pékin gagner ces élections, avait réussi à proposer des prétendants pour chacun des 452 sièges en lice. Et à l’exception notoire de Joshua Wong, leader emblématique de la contestation étudiante, tous les candidats ont eu le droit de se présenter. Parmi les victoires ou défaites symboliques, le député le plus controversé du camp pro-Pékin, Junius Ho, a perdu son mandat de conseiller de district, de même que le député modéré du camp pro-Pékin, Michael Tien. La chef de file du DAB, le plus grand parti pro-Pékin au sein du Parlement, Starry Lee, a sauvé son siège de justesse.

Forte présence policière, nombre limité d’incidents

Les rumeurs selon lesquelles le gouvernement risquait d’interrompre les élections à 10 h 30 ont incité les électeurs à aller voter le plus tôt possible. Avant même l’ouverture des bureaux de vote à 7 h 30 dimanche matin, des queues s’étaient formées. Les élections se sont finalement bien déroulées, avec une forte présence policière mais un nombre limité d’incidents.

La radio publique RTHK et plusieurs médias locaux ont toutefois reporté diverses irrégularités. Notamment des électeurs qui se sont vu expliquer en arrivant au bureau de vote qu’ils avaient déjà voté. En outre, le « front uni » pro-Pékin a la réputation d’offrir des sorties et des petits cadeaux aux personnes âgées hébergées dans les hospices et d’organiser leur participation aux élections en leur indiquant pour qui voter.

Pendant que les Hongkongais se rendaient aux urnes, quelques manifestants irréductibles (les estimations de leur nombre varient d’une poignée à une vingtaine) étaient encore assiégés par la police au sein de l’Université polytechnique de Hongkong (PolyU). Selon les visiteurs du site qui ont pu en rencontrer quelques-uns, leur état de santé s’est dégradé, tout comme leur condition psychologique. Mais ils ne veulent toujours pas se rendre à la police.

Le siège de PolyU, qui a commencé il y a plus de huit jours, est l’un des plus violents épisodes du mouvement de révolte actuel. Elu conseiller de district dimanche, Jimmy Sham Tsz-kit, le délégué du Front civil des droits de l’homme (qui organise la plupart des grandes marches de Hongkong), a proposé que l’ensemble des conseillers prodémocratie réclament, ensemble, que la police laisse sortir librement tous les derniers occupants.

Parmi les très nombreux jeunes élus, le leader étudiant du mouvement des parapluies, Lester Shum, a appelé les Hongkongais à continuer le combat, estimant : « La bataille est encore loin d’être gagnée. » Les Hongkongais ont parlé, ils attendent à présent la réaction de leur gouvernement. Carrie Lam a simplement déclaré, lundi, qu’elle « écoutera humblement les opinions des citoyens et y réfléchira de manière sérieuse ».

24 novembre 2019

A Hongkong, participation record aux élections locales

Le territoire semi-autonome vote ce dimanche. Un scrutin que le mouvement prodémocratie espère transformer en message de défiance envers le gouvernement soutenu par Pékin.

Après la mobilisation dans la rue, la mobilisation se poursuit dans les urnes. La participation aux élections locales hongkongaises a dépassé les 70 %, a annoncé la commission, électorale, confirmant une mobilisation record des électeurs pour ce scrutin local après six mois d’un mouvement de contestation sans précédent dans l’ex-colonie britannique.

Environ 2,94 millions d’électeurs ont voté sur 4,13 millions d’inscrits, soit une participation bien supérieure aux 47 % du précédent scrutin de 2015.

Les Hongkongais doivent élire 452 conseillers dans 18 districts, lors de ce qui est le scrutin le plus direct organisé sur le territoire semi-autonome. Et d’habitude, la participation est relativement faible.

Pause dans les grandes manifestations

La campagne électorale a été l’occasion d’une pause dans les grandes manifestations et les affrontements violents entre police et contestataires, offrant un répit à une ville dont le fonctionnement quotidien est perturbé depuis près de six mois.

Les mouvements pour la démocratie à Hongkong ont encouragé les citoyens à se rendre aux urnes et à suspendre leurs actions. Sur l’immense forum Internet LiHKG, nombreux ont été les appels à « ne pas mettre en danger l’élection ».

Ce scrutin pour élire des conseils de districts suscite normalement peu de passions, dominé par des candidats alliés au gouvernement prochinois et s’affrontant sur des questions de collecte des déchets ou d’urbanisme. Le contexte a complètement changé, et leurs adversaires prodémocratie comptent montrer à la chef du gouvernement Carrie Lam qu’ils ont le soutien populaire.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  « Nos étudiants se battent pour le seul avenir possible » : à Hongkong, les universités à la pointe de la contestation

400 000 nouveaux électeurs

Le fait que 400 000 nouveaux électeurs se soient inscrits a été interprété comme un signe positif pour le camp prodémocratie. L’exécutif a prévenu qu’il veillerait au bon déroulement de l’élection, en déployant les forces de l’ordre dans la rue et à proximité des bureaux de vote. « Si vous suscitez un chaos gigantesque ou que vous vous adonnez à des actions illicites, ce sera difficile d’organiser une élection juste, affirmait samedi son numéro deux, Matthew Cheung. C’est un véritable exercice démocratique. Je veux vraiment que les gens l’aient à cœur. »

La crise politique avait démarré en juin par des protestations contre un projet de loi permettant d’extrader les justiciables hongkongais vers la Chine continentale. Si ce projet a été retiré, elles se sont muées en vaste mouvement prodémocratie qui dénonce la violence de la répression policière sur le territoire.

Contrairement aux conseillers de district, les membres du corps législatif sont élus par un mélange de scrutin universel et de désignation par des groupes d’intérêt économique remplis de fidèles à Pékin. De même, le chef de gouvernement est choisi par un comité de personnalités favorables à la domination chinoise. D’après les analystes, les candidats prodémocratie devraient progresser dans les suffrages, mais rester loin de la majorité des 452 sièges en jeu.

Dans des tracts intitulés « Comment voter », des groupes prodémocratie ont conseillé aux électeurs de se présenter tôt, d’avoir tous leurs papiers, d’éviter « les hauts noirs et les masques » (tenue associée aux manifestants) et de respecter strictement les règles au moment de déposer leur bulletin dans l’urne.

24 novembre 2019

L’Unesco surveille Venise sous les eaux

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Depuis le 12 novembre, les Vénitiens et les touristes vivent les pieds dans l’eau dans de nombreux endroits dans la cité des doges. 

Les Vénitiens vivent les pieds dans l’eau depuis le 12 novembre, après la deuxième plus grande aqua alta (marée haute) en un siècle. Un malheur n’arrivant jamais seul… la ville risque de perdre son statut de patrimoine mondial.

L’Unesco lui a offert cette protection en 1987 et surveille de près, depuis, l’état de cette ville. Il y a deux ans, au terme d’une enquête menée par ses services, l’agence onusienne menaçait de l’inclure dans sa « liste noire ».

Elle reprochait déjà aux dirigeants de la ville italienne de ne pas lutter plus activement contre le « surtourisme » et contre la montée des eaux. Venise n’avait évité le déclassement qu’après de longues heures de négociations.

« La situation est dramatique»

Le 13 novembre, l’Unesco a fait savoir qu’elle suivait toujours de près l’état de conservation du site. Elle se penche en priorité sur la menace récurrente de la montée des eaux. « Les inondations déstabilisent les bâtiments et favorisent l’érosion, mais aussi l’introduction d’espèces qui attaquent le bois sur lequel Venise est construite, a expliqué Mechtild Rössler, directrice du Centre du patrimoine mondial, à la chaîne Euronews. Cela a des impacts sur l’écosystème de la lagune, donc c’est une myriade de problèmes qui doivent être traités. »

Mais le risque de submersion n’est pas la seule menace dans le viseur de l’Unesco. « Les dommages causés par un flux constant de navires de croisières et ses effets négatifs » et « une mauvaise gestion » le sont tout autant, affirme la directrice Mechtild Rössler, qui a prévu d’envoyer une mission, pour examen, dès janvier, sur le site : « Aujourd’hui, la situation à Venise est dramatique. »

Les hautes marées qui ont inondé la ville au début du mois ont fait de nombreux dégâts. Le gouvernement italien a décrété l’état de catastrophe naturelle il y a quelques jours, pour débloquer des financements d’urgence. « L’avenir de Venise est en jeu, on ne peut plus vivre comme ça. Il faut la certitude de pouvoir habiter ici. C’est aussi notre crédibilité internationale qui est en jeu », avait alors alerté le maire de la ville Luigi Brugnaro.

Dans la cité des Doges, les habitants s’affairaient au grand ménage des matelas humides et des appareils ménagers hors d’usage, ce week-end. Le montant total des dégâts pourrait atteindre un milliard d’euros. Christelle GUIBERT.

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24 novembre 2019

Elections locales à Hongkong : un espoir pour les militants prodémocratie

Le territoire semi-autonome vote ce dimanche. Un scrutin que le mouvement prodémocratie espère transformer en message de défiance envers le gouvernement soutenu par Pékin.

Après la mobilisation dans la rue, place aux urnes. Le vote pour des élections locales s’est ouvert à Hongkong sans retard, dimanche 24 novembre à 7 h 30 heure locale (0 h 30 à Paris), avec 4,1 millions d’inscrits. La campagne électorale a été l’occasion d’une pause dans les grandes manifestations et les affrontements violents entre police et contestataires, offrant un répit à une ville dont le fonctionnement quotidien est perturbé depuis près de six mois.

Les mouvements pour la démocratie à Hongkong ont encouragé les citoyens à se rendre aux urnes et à suspendre leurs actions. Sur l’immense forum Internet LiHKG, nombreux ont été les appels à « ne pas mettre en danger l’élection ».

Ce scrutin pour élire des conseils de districts suscite normalement peu de passions, dominé par des candidats alliés au gouvernement prochinois et s’affrontant sur des questions de collecte des déchets ou d’urbanisme. Le contexte a complètement changé, et leurs adversaires prodémocratie comptent montrer à la cheffe du gouvernement Carrie Lam qu’ils ont le soutien populaire.

Les Hongkongais doivent élire 452 conseillers dans 18 districts, lors de ce qui est le scrutin le plus direct organisé sur le territoire semi-autonome. Et d’habitude la participation est relativement faible.

400 000 nouveaux électeurs

Le fait que 400 000 nouveaux électeurs se soient inscrits a été interprété comme un signe positif pour le camp prodémocratie. L’exécutif a prévenu qu’il veillerait au bon déroulement de l’élection, en déployant les forces de l’ordre dans la rue et à proximité des bureaux de vote.

« Si vous suscitez un chaos gigantesque ou que vous vous adonnez à des actions illicites, ce sera difficile d’organiser une élection juste, affirmait samedi son numéro deux, Matthew Cheung. C’est un véritable exercice démocratique. Je veux vraiment que les gens l’aient à cœur. »

La crise politique avait démarré en juin par des protestations contre un projet de loi permettant d’extrader les justiciables hongkongais vers la Chine continentale. Si ce projet a été retiré, elles se sont muées en vaste mouvement prodémocratie qui dénonce la violence de la répression policière sur le territoire.

Contrairement aux conseillers de district, les membres du corps législatif sont élus par un mélange de scrutin universel et de désignation par des groupes d’intérêt économique remplis de fidèles à Pékin. De même, le chef de gouvernement est choisi par un comité de personnalités favorables à la domination chinoise. D’après les analystes, les candidats prodémocratie devraient progresser dans les suffrages, mais rester loin de la majorité des 452 sièges en jeu.

Dans des tracts intitulés « Comment voter », des groupes prodémocratie ont conseillé aux électeurs de se présenter tôt, d’avoir tous leurs papiers, d’éviter « les hauts noirs et les masques » (tenue associée aux manifestants) et de respecter strictement les règles au moment de déposer leur bulletin dans l’urne.

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19 novembre 2019

Hongkong : l’exécutif appelle les manifestants encore dans l’université à se rendre

Des protestataires ont réussi à s’enfuir du campus assiégé, lundi soir, en descendant en rappel d’une passerelle. La police menace d’utiliser des « balles réelles » contre les manifestants prodémocratie.

Quelques dizaines de manifestants hongkongais, retranchés dans l’Université polytechnique (PolyU) assiégée par la police, ont réussi à s’enfuir, lundi 18 novembre au soir, avant que les forces de l’ordre s’en aperçoivent et barrent la route aux suivants, ont rapporté plusieurs journalistes présents sur place.

Les protestataires sont descendus en rappel d’une passerelle, puis ont été récupérés sur une route en contrebas par des personnes à moto. Cette fuite spectaculaire intervient alors que la police menace désormais d’utiliser des « balles réelles » face aux cocktails Molotov des manifestants prodémocratie. « Il s’agit probablement de la chose la plus surréaliste à laquelle j’ai assisté depuis le début des manifestations à Hongkong », a tweeté un journaliste indépendant sur place :

La cheffe de l’exécutif hongkongais, Carrie Lam, a estimé mardi matin que les manifestants encore retranchés dans le campus n’avaient d’autre option que de se rendre, s’ils souhaitaient une solution pacifique à ce face-à-face tendu avec les policiers. « Ce but ne peut être atteint qu’avec la pleine coopération des manifestants, et notamment bien sûr des émeutiers qui doivent cesser les violences, rendre les armes et sortir pacifiquement en écoutant les instructions de la police », a déclaré Mme Lam lors d’une conférence de presse, sa première depuis le début du siège de la PolyU dimanche.

Siège total

L’occupation avait commencé dans les meilleures dispositions : excellente organisation, nourriture et eau en abondance, tapis de yoga pour dormir, personnel médical bénévole, et motivation au zénith. Mais la confiance est en chute libre à cause du siège désormais total, qui empêche tout ravitaillement, la peur d’être arrêté et les menaces d’assaut croissantes de la police antiémeute.

A l’intérieur de l’université, des dizaines de protestataires étaient affalés sur des chaises, épuisés par deux jours de bataille. Certains pleuraient, consolés par des amis. D’autres manifestants passaient des coups de téléphone à leur famille, à des amis ou à des avocats grâce au peu de batterie qu’il leur restait. Un jeune homme assis seul dans une cantine de l’établissement éclatait en sanglots devant son repas, selon le récit d’un journaliste de l’Agence France-presse.

Inquiètes face à cette situation de tension extrême, des familles d’étudiants assiégés se sont réunies lundi soir sur une passerelle piétonne proche de la PolyU, pour une veillée. Certaines personnes tenaient des affiches avec le message « Sauvez les enfants », à distance d’un cordon serré de policiers antiémeutes.

Dans la soirée, des manifestants mineurs ont d’ailleurs été autorisés à partir sous encadrement policier, selon un journaliste de l’agence Reuters qui précise qu’ils pourraient tout de même être poursuivis plus tard.

Cinq mois de mobilisation

La mobilisation en cours dans l’ex-colonie britannique depuis plus de cinq mois a basculé la semaine dernière dans une phase beaucoup plus radicale et violente, qui a entraîné notamment la fermeture des écoles. L’exécutif hongkongais, qui est aligné sur Pékin, s’est refusé à accéder aux revendications des manifestants. Ceux-ci demandent notamment l’avènement du suffrage universel dans la mégapole de 7,5 millions d’habitants, et une enquête sur les violences policières.

La Chine a maintes fois averti qu’elle ne tolérerait pas la dissidence, et l’inquiétude monte face à l’éventualité d’une intervention visant à mettre fin à la crise. Des soldats de l’armée chinoise, présents à Hongkong depuis la rétrocession de l’ex-colonie en 1997, sont sortis ce week-end de leur caserne pour déblayer certaines rues de leurs barricades. Une apparition rarissime, qui a encore alimenté l’hypothèse d’une opération militaire.

L’ambassadeur de Chine au Royaume-Uni a donné lundi du crédit supplémentaire à cette option. « Le gouvernement de Hongkong fait tout son possible pour reprendre le contrôle de la situation, a déclaré Liu Xiaoming lors d’une conférence de presse. Mais si elle devenait incontrôlable, le gouvernement central ne restera certainement pas les bras croisés. Nous avons la résolution et le pouvoir suffisants pour mettre fin aux troubles. »

Lundi soir, l’Union européenne (UE) a appelé les forces de l’ordre à une réaction « strictement proportionnée ». « Toute violence est inacceptable. (…) Et les libertés fondamentales, y compris le droit de réunion pacifique des Hongkongais, doivent être respectées », a ajouté la cheffe de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini, au nom des 28 Etats membres.

Jugeant la violence « inacceptable d’où qu’elle vienne », le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, a estimé lundi qu’il incombait au gouvernement de Hongkong de « rétablir le calme » dans le territoire, en prenant notamment « des mesures claires pour répondre aux demandes de l’opinion ».

Aggravation de la violence

La contestation était montée d’un cran lundi dernier avec une nouvelle stratégie, baptisée « Eclore partout » (« Blossom Everywhere »), qui consiste à multiplier les actions – blocages, affrontements, vandalisme – pour éprouver au maximum les capacités de la police. Conséquence : l’immobilisation quasi générale des transports en commun la semaine dernière pendant cinq jours. Lundi, les écoles n’ont pas rouvert.

Cette stratégie a eu pour effet d’ancrer la contestation dans plusieurs lieux, comme les campus, alors que les manifestants préconisaient au cours des mois précédents d’être insaisissables et fluides « comme l’eau ».

Cette nouvelle phase a été marquée par une aggravation de la violence dans les deux camps, comme l’ont montré les images d’un policier blessé à la jambe dimanche par une flèche tirée par un manifestant près de la PolyU. La police dit avoir tiré lundi trois balles près du campus, en précisant que personne n’avait été blessé. Les forces de l’ordre se sont servies de leur arme de service lors d’incidents isolés, sans faire de mort. Lundi, Wu Qian, un porte-parole du ministre chinois de la défense, a estimé que « mettre fin aux violences et restaurer l’ordre est la tâche la plus urgente à Hongkong ».

18 novembre 2019

Hong Kong

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18 novembre 2019

Hongkong : les manifestants tiennent toujours un campus assiégé par la police

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Un policier a été blessé dimanche par une flèche tirée par un protestataire, sur la péninsule de Kowloon. Les forces de l’ordre menacent de tirer à « balles réelles » pour répondre aux « armes létales » des manifestants prodémocratie.

La situation reste extrêmement tendue à Hongkong, lundi 18 novembre, après une journée de dimanche marquée par de nouveaux heurts entre policiers et manifestants prodémocratie. Des centaines de contestataires se sont ainsi retranchés dans l’université polytechnique de Hongkong (PolyU), située sur la presqu’île de Kowloon, devenue la principale ligne de front de la contestation et le théâtre, toute la nuit, d’affrontements, alors qu’un appel à « défendre la PolyU » avait été lancé.

Les manifestants entendent continuer à paralyser la ville pour « étrangler l’économie » de l’ex-colonie britannique, promettant de continuer à bloquer le Cross Harbour Tunnel, un des trois tunnels routiers desservant l’île de Hongkong, qui est fermé depuis mardi.

L’entrée du campus a été incendiée lundi matin pour empêcher une intervention de la police, qui menace de son côté de répondre avec des « balles réelles » aux « armes létales » des protestataires, selon une déclaration du porte-parole de la police, Louis Lau, dans une vidéo diffusée en direct sur Facebook.

« Je demande ici aux émeutiers de ne pas utiliser de cocktails Molotov, de flèches, de voitures ou d’armes létales pour attaquer les policiers, a-t-il dit. S’ils poursuivaient des actions aussi dangereuses, nous n’aurions pas d’autre choix que d’utiliser la force minimale nécessaire, y compris les balles réelles, pour riposter. »

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Zone « d’émeute » déclarée

Cette mise en garde des forces de l’ordre, adressée après qu’un policier eut été blessé dimanche au mollet par une flèche tirée par un manifestant, constitue une nouvelle escalade verbale dans cette crise politique sans précédent.

La Chine a maintes fois averti qu’elle ne tolérerait pas la dissidence, et l’inquiétude monte face à la possibilité d’une intervention chinoise pour en finir avec un mouvement qui a débuté en juin mais atteint depuis quelques jours de nouveaux sommets de violence. La police a déclaré le secteur zone « d’émeute », menaçant de détruire les barricades érigées par les manifestants. La participation à une émeute est passible de dix ans de prison.

Plusieurs explosions très fortes ont retenti lundi à l’aube avant qu’un mur de flammes n’apparaisse à l’entrée de l’université. Il semble que la police ait tenté une intervention sur le campus, mais que celle-ci ait été repoussée par les manifestants déterminés à tenir leurs positions. La police a dit avoir tiré trois balles au petit matin près de l’université en précisant que personne n’avait été blessé.

« J’ai peur »

Les policiers hongkongais portent des armes de service, mais ils n’en ont fait qu’un usage limité depuis le début de la contestation, lors d’incidents isolés. Trois personnes ont été touchées par des tirs à balle réelle, aucune mortellement. Face aux groupes de protestataires jetant des briques et des cocktails Molotov, la police a privilégié les lacrymogènes, les balles en caoutchouc ou les canons à eau notamment.

Lundi, les manifestants retranchés dans le campus redoutaient l’assaut. « J’ai peur. Il n’y a pas de sortie, tout ce que je peux faire c’est me battre jusqu’au bout », a confié un militant. Owen Li, membre du conseil de PolyU et étudiant, a indiqué que la panique s’était emparée des quelques centaines d’occupants du campus. « Beaucoup d’amis se sentent impuissants (…) Nous appelons toute la société à sortir et nous aider », a-t-il lancé.

Des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) ont observé que les manifestants tentant de quitter le campus étaient parfois accueillis par des gaz lacrymogènes et obligés de retourner dans l’université.

Le président de la PolyU Teng Jinguang a pourtant diffusé un message vidéo disant avoir reçu des garanties de la police. « Nous avons reçu des assurances de la police sur le fait que vous pouviez quitter le campus pacifiquement, a-t-il dit. Je vais personnellement vous accompagner jusqu’aux forces de police pour assurer que votre cas est traité de façon juste. »

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Stratégie « Eclore partout »

La mégapole de 7,5 millions d’habitants traverse depuis cinq mois sa pire crise politique depuis sa rétrocession à la Chine en 1997, avec des manifestations quasi quotidiennes de la mouvance prodémocratie.

La contestation s’est intensifiée lundi dernier avec des opérations continues de blocage d’universités et de quartiers périphériques, en application d’une nouvelle stratégie baptisée « Eclore partout » (Blossom Everywhere), qui consiste à multiplier les actions pour éprouver au maximum les capacités de la police.

Le mouvement avait débuté en juin sur le rejet d’un projet de loi qui visait à autoriser les extraditions vers la Chine. Le texte a été suspendu en septembre, mais la mobilisation avait entre-temps considérablement élargi ses revendications pour demander le suffrage universel ou encore une enquête sur les violences policières.

La détermination des manifestants s’est heurtée ces derniers mois à l’intransigeance des autorités, faisant basculer la région semi-autonome dans une spirale de violence. Deux personnes ont péri depuis le début du mois, tandis que la place financière hongkongaise a plongé dans la récession. Dimanche, l’autorité aéroportuaire locale a annoncé une chute du trafic de 13 % en octobre par rapport à octobre 2018, avec 5,4 millions de passagers.

Sortie rare des militaires chinois

Samedi, des militaires chinois avaient participé au nettoyage des rues de Hongkong, une sortie rare. « Des soldats de l’Armée populaire de libération ont aidé des habitants à dégager les voies et ont été applaudis par les riverains », a affirmé l’armée sur le réseau social Weibo, confirmant des informations de presse faisant état de l’opération. Hongkong est une ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997. A cette date, l’Armée populaire de libération a établi une garnison dans le territoire autonome. Mais les militaires restent d’ordinaire discrets et sont rarement vus en public dans les rues.

L’opération, très organisée, a duré moins d’une heure. Les hommes sont ensuite retournés dans leur caserne en chantant « un, deux, trois, quatre » en mandarin – le cantonais est la langue majoritaire à Hongkong. Le gouvernement local, par la voix de son porte-parole, a déclaré n’avoir « pas sollicité » l’aide de l’armée chinoise, qui a lancé cette opération « d’elle-même ».

18 novembre 2019

Massacre des Rohingyas : le cas d'Aung San Suu Kyi examiné par la justice internationale

Fuyant les persécutions et les massacres, 700 000 Rohingyas avaient dû quitter la Birmanie en 2017. Après une plainte déposée en Argentine, la Cour pénale internationale a lancé une enquête sur des crimes présumés.

Elle fut un temps le symbole d'un espoir démocratique en Birmanie. La prix Nobel de la paix 1991 est directement visée par la plainte déposée auprès de la justice argentine, ce jeudi 14 novembre, par des associations de défense des droits des Rohingyas, révèle le Guardian.

La compétence universelle, qui permet à la justice d'intervenir quel que soit le lieu où le crime a été commis, a été invoquée pour accuser plusieurs dirigeants birmans de "crime de guerre" et de "crime contre l'humanité". Le cas d'Aung San Suu Kyi sera examiné pour son rôle dans la “menace existentielle” qui pèse sur les Rohingyas.

Persécutée pendant des années, cette ethnie de confession musulmane minoritaire en Birmanie est victime d'un génocide qui aurait tué au moins 10 000 d'entre eux, selon une enquête de l'ONU. En 2017, plus de 700 000 Rohingyas ont été contraints de quitter le pays et de se réfugier au Bangladesh, pays voisin.

“Cette plainte vise à obtenir une sanction pénale contre les auteurs, les complices et ceux qui ont caché ce génocide. Nous passons par l'Argentine car il n'existe aucune autre possibilité pour déposer plainte”, a déclaré Tomas Ojea, l'avocat à l'origine de la plainte, à l'AFP.

La Cour pénale internationale ouvre une enquête

Le même jour, les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont lancé une enquête sur “des crimes (...) qui auraient été commis contre le peuple rohingya du Myanmar”. D'après l'AFP, la procureure de la Cour, Fatou Bensouda étudiait le dossier des Rohingyas depuis septembre 2018.

Si la Birmanie n'est pas partie au Statut de Rome, traité fondateur de la CPI, le Bangladesh, où auraient été déportés les Rohingyas, l'est. “Selon les documents fournis, entre 600 000 et un million de Rohingyas auraient été déplacés de force du Myanmar vers le Bangladesh voisin à la suite d'actes de coercition allégués”, pouvait-on lire sur le site du tribunal de La Haye, ce jeudi. Une preuve suffisante pour déclencher l'ouverture d'une enquête sur des actes de violence et de déportations qui pourraient constituer des "crimes contre l'humanité".

D'après l'ONG Human Rights Watch, la junte militaire au pouvoir se serait rendue coupable de “tueries de masse, violences sexuelles et d'incendies criminels de grande ampleur contre les musulmans rohingyas dans l'Etat d'Arakan [au nord du pays, ndlr]” depuis août 2017. Des centaines de milliers de personnes sont encore entassées dans le plus grand camp de réfugiés du monde à Cox's Bazar au Bangladesh.

17 novembre 2019

Hong Kong

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