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Jours tranquilles à Paris
25 août 2019

Au sommet du G7, le nucléaire iranien, l’Amazonie et la Russie au cœur des discussions

Le ministre des affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, est arrivé à Biarritz pour rencontrer le chef de la diplomatie française.

Un invité surprise est arrivé à Biarritz : le ministre des affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, rencontrait le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, dimanche 25 août en début d’après-midi.

iran

De leur côté, au lendemain d’un premier dîner informel, les dirigeants du G7 réunis à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) ont de nouveau abordé les grands sujets à l’ordre du jour de la diplomatie internationale. Ils se sont cette fois réunis autour d’une table de travail et, à en croire Donald Trump, sous le signe d’une bonne entente mutuelle, en dépit de désaccords manifestes. Les dirigeants du G7 (Etats-Unis, Allemagne, Grande-Bretagne, France, Italie, Japon et Canada) « s’entendent très bien », a assuré le président américain sur Twitter, contrairement à ce que pourraient selon lui laisser penser les « répugnantes fake news ».

Nucléaire iranien, réintégration de la Russie, incendies en Amazonie… Les questions à l’ordre du jour des discussions sont nombreuses.

Sur l’Iran, les pays du G7 vont continuer « à agir chacun dans son rôle »

C’est une visite qui n’était pas annoncée. Le ministre des affaires étrangères iranien est arrivé au Pays basque dimanche en début d’après-midi, a fait savoir Téhéran. L’avion officiel transportant Mohammad Javad Zarif s’est posé à 14 h 13 à l’aéroport de Biarritz, selon le site de suivi du trafic aérien Flightradar24.

Le chef de la diplomatie iranienne s’entretient actuellement avec son homologue français, Jean-Yves Le Drian, mais aucune rencontre n’était prévue avec la délégation américaine du G7. « Il s’agit de faire le point sur les conditions auxquelles nous pouvons avoir une désescalade et une pause », a précisé l’Elysée.

Au sujet du nucléaire iranien, de premières incompréhensions entre les dirigeants présents à Biarritz sont apparues dimanche en milieu de journée. Au micro de LCI, le président français, Emmanuel Macron, a, dans un premier temps, affirmé avoir été chargé par ses partenaires d’une « communication commune » sur le dossier, confirmant des informations données de sources diplomatiques.

Selon ces sources, les Sept ont chargé Emmanuel Macron de « discuter et d’adresser un message à l’Iran » pour éviter l’escalade dans la région. Les Iraniens ont arrêté en juillet de respecter certains engagements de l’accord de Vienne encadrant leur programme nucléaire, en réaction à la sortie en mai 2018 des Etats-Unis du texte et à la réintroduction de lourdes sanctions américaines.

Pau après, le président américain, Donald Trump, a toutefois démenti que les pays du G7 se soient mis d’accord sur un message commun à transmettre à l’Iran. « Je n’ai pas discuté de cela », a-t-il dit en réponse à des journalistes. Il a ainsi contraint M. Macron à revenir sur ses propos :

« Le G7 est un club informel, il n’y a pas de mandat formel qui est donné dans le cadre du G7 à l’un ou à l’autre et donc il y a des initiatives qui continueront d’être prises par les uns et les autres. »

« On a eu une discussion hier sur l’Iran qui a dégagé deux lignes de force communes », a-t-il poursuivi devant la presse en marge du sommet :

« Aucun membre du G7 ne veut que l’Iran puisse jamais avoir l’arme nucléaire (…) et tous les membres du G7 sont profondément attachés à la stabilité et la paix de la région et donc ne veulent pas engager des actions qui puissent nuire à celles-ci ».

Début août, Emmanuel Macron, très impliqué dans les efforts européens pour tenter de sauver l’accord, s’était attiré les foudres de Donald Trump qui lui avait reproché de trop parler « pour les Etats-Unis ».

Le G7 d’accord pour « aider au plus vite les pays frappés » par les incendies en Amazonie

Les Sept ont également abordé dimanche la question de l’Amazonie en proie à des milliers d’incendies depuis plusieurs semaines provoquant un tollé mondial face à la politique du président brésilien, Jair Bolsonaro. Le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, a annoncé en début d’après-midi que les pays du G7 s’étaient mis d’accord pour « aider le plus vite possible les pays frappés ».

« Il y a une vraie convergence pour dire “on se met tous d’accord pour aider au plus vite possible les pays qui sont frappés par ces feux” », a rapporté le président français, faisant état de contacts en cours « avec tous les pays de l’Amazonie (…) pour qu’on puisse finaliser des engagements très concrets de moyens techniques et financiers ». « Nous sommes en train de travailler à un mécanisme de mobilisation internationale pour pouvoir aider de manière plus efficace ces pays », a précisé M. Macron.

Quant à la question de plus long terme de la reforestation de l’Amazonie, « plusieurs sensibilités se sont exprimées autour de la table », a ajouté M. Macron, en soulignant l’attachement des pays concernés à leur souveraineté nationale. « Mais l’enjeu de l’Amazonie pour ces pays comme pour la communauté internationale est tel – en termes de biodiversité, d’oxygène, de lutte contre le réchauffement climatique – qu’il nous faut procéder à cette reforestation », a plaidé le président français.

« Trop tôt » pour réintégrer la Russie

Au cours de leur dîner de samedi soir, au pied du phare de Biarritz, les sept dirigeants se sont aussi entendus pour « renforcer le dialogue et la coordination » sur les crises actuelles avec la Russie, tout en estimant qu’il était « trop tôt » pour la réintégrer dans un G8, selon une source diplomatique. La Russie a été exclue du G8 en 2014 après l’invasion de la Crimée. Mais Donald Trump est plutôt favorable à son retour, contrairement à ses pairs.

La guerre commerciale entre Pékin et Washington ne « provoque pas de tensions », selon Trump

La session de travail de dimanche matin était consacrée à « l’économie internationale », au « commerce » et à la « sécurité internationale », un programme suffisamment vaste pour permettre théoriquement de traiter de toutes les questions qui fâchent, dont les relations commerciales délétères entre les Etats-Unis et la Chine. Donald Trump a toutefois affirmé dimanche que cette guerre commerciale ne provoquait pas de tension au sommet.

« Je pense qu’ils respectent la guerre commerciale. Elle devait avoir lieu », a déclaré le président américain à des journalistes. Il a d’ailleurs précisé qu’il regrettait de ne pas avoir encore plus relevé les droits de douanes pour les produits chinois.

Très favorable aux accords bilatéraux, Donald Trump a également affirmé que les Etats-Unis étaient « très proches » d’un accord commercial « majeur » avec le Japon sur lequel les deux pays travaillent depuis cinq mois.

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25 août 2019

Cette photo du G7 a inspiré un concours de blagues (et c'est drôle)

G7 table ronde

La photo aurait été prise par un appareil photo accroché au plafond. Mais ce n'est pas ce qui a intéressé les blagueurs...

Le HuffPost

G7 - Cette photo représente-t-elle la première chose que l’on voit en descendant en enfer? C’est en tout cas l’interprétation facétieuse d’un internaute en ce deuxième jour de G7 ce dimanche 25 août.

Comme lui, ils sont nombreux à avoir repéré ce cliché singulier publié par le compte Twitter officiel du sommet international. Pris en hauteur, comme vous pouvez le voir ci-dessous, il montre les sept dirigeants de ce club fermé (à savoir l’Allemande Angela Merkel, l’Italien Giuseppe Conte, l’Américain Donald Trump, le Britannique Boris Johnson, le Japonais Shinzo Abe, le Canadien Justin Trudeau, le Français Emmanuel Macron et le Président du Conseil européen Donald Tusk) attablés face à face.

Pour la petite histoire, Le Figaro  croit savoir que la photo a été pris” par un appareil photo accroché au plafond, vraisemblablement activé à distance.

Mais ce n’est pas franchement ce qui a intéressé les internautes. Ils sont nombreux a avoir publié des petits traits d’humour concernant cette photographie étonnante. “Bienvenue à l’association des pompiers-pyromanes”, a ainsi écrit l’humoriste de France Inter Guillaume Meurice quand d’autres s’imaginent en moustique, “repéré” par ses proies, comme vous pouvez le voir ci-dessous.

Mention spéciale à cet internaute qui a imaginé une sorte de jeu de la bouteille au milieu de la grande table du G7. Cet exercice d’une autre époque qui consistait à faire tourner un objet entre un groupe de jeunes gens et d’embrasser la personne se retrouvant à l’autre extrémité dudit objet.

"Miss Thatcher, vous nous entendez ?" 

La première chose que tu vois quand tu descends en enfer

Le G7,la planète est entre de " Bonnes mains" 

Bienvenue à l'association des pompiers-pyromanes. 

Quand t'es un moustique et que tu t'es fait repérer.

Clairement Merkel est en train de penser : « Arrêtez vos conneries, se casser les cervicales en deux c’est plus de mon âge » 

"Esprit de la croissance, si tu es là manifeste-toi" 

25 août 2019

G7 à Biarritz

g7jeuplage

g7 amazonie

25 août 2019

A Bayonne, les anti-G7 organisent une « marche des portraits » de Macron

Les militants alternatifs et écologistes ont défilé avec des portraits du président décrochés depuis des mois dans des mairies.

macron portraits

Manifestation anti-Macron dimanche 25 août à Bayonne. Emilio Morenatti / AP

Une nouvelle manifestation, la troisième en deux jours, a rassemblé dimanche 25 août dans la matinée à Bayonne quelques centaines de manifestants anti-G7, cette fois « pour le climat et la justice sociale », brandissant certains des 128 portraits du président Macron décrochés depuis des mois dans des mairies.

Sous le slogan « Climat et justice sociale : Macron décroche, décrochons-le ! », cette « marche des portraits », était organisée par les mouvements alternatifs et écologistes ANV COP 21, Alternatiba et Bizi, ces deux derniers d’origine basque. Elle se voulait « 100 % non violente et à visage découvert », selon les organisateurs.

Dans les rues étroites du centre de Bayonne, des militants ont déambulé en brandissant des portraits du chef de l’Etat, tête en bas, scandant « on est plus chauds que le climat » ou « et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime contre l’humanité ». « On le porte à l’envers pour signifier le manque de sens de sa politique », a expliqué Mathieu, militant de Bizi. Beaucoup portaient aussi des paquets semblant emballer un portrait présidentiel, sur lequel était écrit en français, anglais, espagnol ou basque « Climat, justice sociale, où est Macron ? ».

Les manifestants se sont ensuite dispersés dans le calme après deux heures d’action « dans la zone la plus sécurisée de l’Etat français », selon eux. Les forces de l’ordre sont toutefois restées très discrètes tout au long de la manifestation.

Le 128e portrait décroché vendredi à Irissary

La journée de samedi, ouverture du G7, avait été marquée par deux manifestations d’opposants au sommet : la plus grande, qui a réuni 15 000 personnes selon les organisateurs (9 000 selon la police), a défilé de Hendaye à Irun, sur la frontière espagnole, dans le calme et sans incident. En fin de journée à Bayonne, une manifestation, non autorisée celle-là, a donné lieu à de brefs heurts entre police et manifestants, avec tirs de canon à eau et gaz lacrymogène, mais sans débordements majeurs, sans blessés ni dégâts aux commerces.

Vendredi matin encore, à la veille du G7, un portrait du chef de l’Etat a été décroché dans la mairie d’un petit village du Pays basque, Irissary, une petite mairie des Pyrénées-Atlantiques. Un « pied de nez » à l’impressionnant dispositif de sécurité déployé sur la région pour le G7, avec 13 200 policiers, selon Alternatiba, Bizi et ANV COP21.

Ce portrait, selon ces associations, était le 128e décroché par des militants dans diverses mairies de France depuis février, dans la lignée des « actions de désobéissance civile non violente » revendiquées par ces associations. Ces actions ont donné lieu à 93 gardes à vue de militants et 57 convocations de militant, selon la même source.

25 août 2019

Hongkong : la fin d’une exception chinoise ?

Par Florence de Changy, Hongkong, correspondance, Frédéric Lemaître, Pékin, correspondant

Les Hongkongais, qui manifestent en nombre depuis le mois de juin, redoutent de voir disparaître le principe « un pays, deux systèmes » régissant leur relation avec Pékin et prévoyant une évolution vers la démocratie libérale.

Il fait chaud, très chaud, ce mercredi 7 août 2019 à Hongkong. Trente-quatre degrés. Pourtant, à l’heure de la pause déjeuner, pas moins de 3 000 avocats et magistrats, impeccablement vêtus d’un costume cravate ou d’un tailleur noir, manifestent dans le centre-ville. Une démarche exceptionnelle depuis la rétrocession de la colonie britannique à la Chine, le 1er juillet 1997, mais la deuxième depuis le début de la crise actuelle, début juin.

Mince, très digne, un homme âgé prend la parole. Martin Lee a 81 ans. Avocat, ex-membre du Parlement, il est l’une des grandes figures démocratiques de la ville. « Nous sommes ici pour protéger l’Etat de droit », dit-il. C’est l’un de ses jeunes confrères, l’avocat et député Dennis Kwok, représentant des professions légales au Parlement, 41 ans, qui organisé le rassemblement. Il s’agit de dénoncer l’inculpation pour « émeutes » – passible de dix ans de détention − de 44 Honkongais qui ont manifesté contre le projet de loi sur les extraditions vers la Chine, tandis qu’aucune charge n’a été retenue contre les voyous, suspectés d’appartenir à des gangs mafieux qui, le 21 juillet, dans une station de métro, ont attaqué à coups de matraque des manifestants et des passants qui rentraient tranquillement chez eux.

« CE PRINCIPE, C’EST NOTRE TRÉSOR. ET TOUT LE MONDE EN PROFITE. Y COMPRIS PÉKIN » FELIX CHUNG, DIRIGEANT DU PARTI LIBÉRAL

« L’Etat de droit signifie que nous sommes tous égaux devant la loi », rappelle Martin Lee sous les applaudissements. Les deux hommes ont fait leurs études de droit au Royaume-Uni. L’aîné avant la rétrocession, son cadet après. Ils incarnent cette élite qui soutient aujourd’hui le combat de la jeunesse de Hongkong pour que leur ville ne devienne pas tout à fait chinoise, et qu’elle continue de bénéficier du principe qui la gouverne depuis 1997 : « un pays, deux systèmes », dont l’Etat de droit constitue la pierre angulaire.

« Ce principe, c’est notre trésor. Et tout le monde en profite. Y compris Pékin, qui n’a pas besoin d’une ville chinoise supplémentaire », veut croire Felix Chung, qui dirige le Parti libéral. Il se définit comme centriste : il soutient le gouvernement de Hongkong mais ne cache pas son désarroi actuel. Les députés de l’opposition sont plus sévères quant à l’érosion de ce principe. « Nous en sommes à 1 pays, 1,1 système », estime Claudia Mo, une des figures de l’opposition dont le bureau, situé dans l’aile ouest du Parlement, offre une vue directe sur l’immeuble qui abrite l’armée chinoise.

Une frontière physique

Hongkong est régi par un système unique au monde depuis 1997. Région administrative spéciale (RAS) de Chine, comme sa voisine Macao, elle jouit officiellement d’un « haut degré d’autonomie », sauf en matière de diplomatie et de défense. Elle a son propre système juridique protégé par l’Etat de droit, principe qui, comme dans la plupart des démocraties, place la justice au-dessus des autres institutions. La Région dispose de sa propre monnaie (le dollar de Hongkong), qui est pleinement convertible, à la différence du yuan chinois. Ses habitants possèdent un passeport leur donnant accès à tous les pays du monde – dont 166 sans visa, c’est-à-dire cinq fois plus que ce que permet un passeport chinois.

C’est aussi une frontière physique qui sépare la RAS de la Chine. Hongkong est membre de plein droit d’organismes internationaux – Organisation mondiale du commerce (OMC), Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec), Banque asiatique de développement… − et participe aux Jeux olympiques sous la bannière « Hongkong Chine ». On continue d’y rouler à gauche et, à la différence de la plupart des Chinois, les Hongkongais parlent le cantonais et non le mandarin et écrivent en caractères classiques, tandis qu’ils ont été simplifiés en Chine communiste à partir des années 1950.

De fait, la décolonisation de 1997 s’est déroulée comme prévu par l’ancienne puissance coloniale britannique et la nouvelle mère patrie chinoise : dans le calme, malgré l’exode de milliers de citoyens hongkongais. Depuis, Hongkong n’a fait que croître et prospérer et a prouvé que, contrairement aux inquiétudes des années 1980, capitalisme et « socialisme aux caractéristiques chinoises », selon la formule consacrée à Pékin, pouvaient cohabiter. Peut-on en dire autant du régime chinois de parti unique et de la démocratie libérale hongkongaise ?

Un système ambigu

« [A Hongkong] nous n’avons jamais été autant en démocratie », plaide Regina Ip, présidente du New People’s Party, l’un des plus fervents soutiens de Pékin. « C’est sans doute vrai », reconnaît John Carroll, un historien de l’université de Hongkong. Certes la police réprime les manifestants, mais une partie de ces derniers, qui s’acharnent contre les commissariats, ne reçoit le plus souvent en retour « que » des gaz lacrymogènes. En février, l’ONG américaine World Justice Project, qui publie chaque année un classement des pays en fonction de leur respect du droit (le Rule of Law Index), classait Hongkong au 16e rang mondial, juste devant la France et loin devant la Chine continentale (82e). Et le chef de l’exécutif accepte de se soumettre aux questions acerbes de la presse locale.

CRITIQUER LE PARTI COMMUNISTE EST ANTICONSTITUTIONNEL EN CHINE ; PAR CONSÉQUENT, LES DÉPUTÉS PRODÉMOCRATIE DE HONGKONG SONT SUR LA CORDE RAIDE

Le système politique de Hongkong est ambigu. Alors que le multipartisme est réel, seuls certains membres du Parlement sont élus au suffrage universel. Les autres sont désignés par des corporations professionnelles très majoritairement favorables à Pékin. Et, depuis 2016, le pouvoir n’hésite plus à invalider sous des prétextes juridiques l’élection de députés. Critiquer le Parti communiste est anticonstitutionnel en Chine ; par conséquent, les députés prodémocratie de Hongkong sont sur la corde raide. C’est ce que les juristes appellent « l’utilisation du droit contre la démocratie ». En outre, le chef de l’exécutif est présélectionné par Pékin, avant d’être « élu » par un collège de 1 200 voix, dont les deux tiers sont mécaniquement pro-Pékin.

Un avant et un après Tiananmen

En fait, la mini-Constitution de Hongkong, la Basic Law, prévoyait une évolution vers une démocratie libérale en fonction de modalités précises. Elle indique en effet comme « but ultime » que le chef de l’exécutif soit élu au suffrage universel, mais « sur nomination d’un comité largement représentatif et en respect des procédures démocratiques ». Au lieu de progresser, comme prévu, vers un système plus démocratique, Hongkong paraît au contraire s’en éloigner. Le tournant a été pris avant même 1997 et les espoirs de voir la Chine devenir un Etat de droit à l’occidentale ont disparu sous les chenilles des chars de la place Tiananmen, en juin 1989.

Les dirigeants chinois qui, jusque-là, considéraient les bienfaits que pouvait leur apporter la colonie britannique ont redouté, après Tiananmen, la « contagion démocratique » que la rétrocession pourrait entraîner sur le continent. Les divers mouvements de révolte qui ont agité Hongkong – notamment en 2003, 2012, 2014, 2016 et ceux d’aujourd’hui – ont rappelé à Pékin l’attachement des Hongkongais à leurs libertés et à la démocratie qui leur avait été promise. Et la convergence entre les « deux systèmes », espérée par les initiateurs du principe « un pays, deux systèmes », n’a pas eu lieu.

« LES MANIFESTATIONS MASSIVES DE 2003 ONT INCITÉ PÉKIN À MODIFIER SA STRATÉGIE DE GOUVERNANCE QUI, D’UNE NON-INGÉRENCE MODÉRÉE, A OPTÉ POUR UNE ATTITUDE PLUS ACTIVE » HAN ZHU, CHERCHEUR À L’UNIVERSITÉ DE DROIT DE HONGKONG

En 2003, quand le gouvernement a tenté de mettre en œuvre l’article 23 de la Basic Law (une loi de sécurité interdisant toute activité de trahison, subversion, sécession, etc.), les Hongkongais sont descendus en masse dans la rue pour s’y opposer. Ce fut la première déconvenue majeure pour Pékin qui, depuis, rappelle régulièrement aux chefs de l’exécutif successifs hongkongais qu’ils doivent appliquer l’article 23… De leur côté, les partisans de la démocratie réclament que soient respectées des promesses de démocratie également contenues dans la Basic Law.

« Les manifestations massives de 2003 ont incité Pékin à modifier sa stratégie de gouvernance qui, d’une non-ingérence modérée, a opté pour une attitude plus active », note le chercheur Han Zhu, de la faculté de droit de l’université de Hongkong, dans la revue Perspectives chinoises de janvier 2019. Le dernier article de la Basic Law réserve d’ailleurs le droit d’interprétation des autres articles à Pékin, qui a donc le dernier mot. Qu’entend faire la Chine de cette ville-rebelle ?

Inclure Hongkong le plus vite possible

Les dirigeants chinois soulignent régulièrement les limites du « haut degré d’autonomie » dont jouit Hongkong. Celui-ci « est autorisé par le gouvernement central. Il n’est pas inhérent », remarquait, en janvier 2018, Jiang Jianguo, à l’époque directeur adjoint du département de la communication du gouvernement chinois. Pour reprendre une métaphore chère au président Xi Jinping, dans la formule « Un pays, deux systèmes », le pays constitue le tronc et les racines de l’arbre. Et les deux systèmes, les branches et les feuilles. Pékin a-t-il pour autant intérêt à couper cette branche ? Une question éminemment politique, mais aussi économique.

Certes, la part de Hongkong dans l’économie nationale a diminué comme peau de chagrin depuis la rétrocession, passant de 17 % à 3 % du PIB. Son port, longtemps le plus grand du monde pour le transport de conteneurs, a chuté en cinquième position derrière trois ports chinois, dont celui de la ville voisine de Shenzhen, et Singapour. Parallèlement, l’intégration de l’ancienne colonie britannique au sud de la Chine s’est concrétisée au gré de nouvelles infrastructures colossales : autoroutes, ponts, tunnels, métros, trains rapides…

Tout est en œuvre pour inclure le plus vite possible Hongkong dans le grand ensemble chinois. Certains estiment que le projet de « Grande baie », une agglomération pour le moment encore théorique de toutes les grandes villes du sud de la Chine, a pour objectif de noyer la petite Hongkong qui accuse déjà beaucoup de retard, notamment dans le secteur-clé des nouvelles technologies.

L’atout de la « Common Law »

Dimanche 18 août, pendant que les Hongkongais étaient 1,7 million à manifester une fois de plus leur colère, Pékin a d’ailleurs annoncé que Shenzhen, cette ville-frontière au cœur des premières réformes économiques chinoises lancées il y a quarante ans, allait à nouveau bénéficier de statuts juridique, fiscal, voire politique, particuliers. Si les quelque 1 500 multinationales présentes à Hongkong estiment que le principe « un pays, deux systèmes » est menacé, elles pourraient être tentées d’élire domicile à Singapour.

« L’atout le plus important de Hongkong pour le monde des affaires, y compris pour les entreprises chinoises, c’est son système juridique de Common Law qui s’exerce dans un contexte d’Etat de droit, où la crédibilité et la transparence des tribunaux sont garanties. Dans la Common Law, le droit contractuel est prééminent et c’est essentiel pour les entreprises », note Claude Haberer, directeur associé Asie-Pacifique de la banque privée Pictet. C’est pourquoi beaucoup pensent que le Parti communiste chinois, qui a toujours su faire preuve de pragmatisme quand ses intérêts étaient en jeu, hésitera à deux fois avant de « siniser » complètement Hongkong.

La Chine serait en fait la première à en souffrir. Hongkong offre en effet à la « mère patrie », l’une des plus grandes et reluisantes places financières internationales de la planète. Avec environ 4 000 milliards de dollars (3 600 milliards d’euros) de capitalisation boursière, elle rivalise avec New York pour les plus grandes introductions en Bourse et accueille près de 250 banques, dont toutes les plus grandes. Dans ce secteur au moins, Hongkong a su garder son avance et demeure loin devant ses cousines chinoises, en dépit des ambitions nationales affichées pour Shanghaï ou Shenzhen.

Une place de choix pour les entreprises chinoises

Hongkong est d’ailleurs le lieu de prédilection des introductions en Bourse des entreprises chinoises qui, dans leur grande majorité (75 %), l’ont choisie ces huit dernières années. Au jour le jour, la majeure partie des transactions à la Bourse de Hongkong s’effectuent entre sociétés chinoises. Environ 65 % des investissements étrangers en Chine et 65 % des investissements chinois à l’étranger passent par la place de Hongkong. En outre, l’ancienne colonie a joué un rôle de fer de lance dans l’internationalisation de la monnaie chinoise, le CNH (yuan offshore), et continue d’être la première place de conversion.

« Quand une entreprise chinoise a besoin de lever des fonds pour des acquisitions hors de Chine, qu’il s’agisse d’une introduction en Bourse, d’obtenir du crédit bancaire ou d’émettre des obligations sur les marchés internationaux, Hongkong reste la place de choix pour les entreprises chinoises », rappelle le dirigeant de l’une des plus grandes banques de Hongkong, qui souhaite conserver l’anonymat.

LE RÔLE DE HONGKONG DE COFFRE-FORT POUR L’ÉPARGNE DES RICHES CHINOIS POURRAIT AUSSI ÊTRE UN ARGUMENT DISCRET DE DISSUASION À UNE INTERVENTION BRUTALE DE PÉKIN

« Si le principe “Un pays, deux systèmes” était aboli, tout le marché financier s’écroulerait… Ce n’est pas un scénario crédible », ajoute-t-il, affirmant se faire l’écho d’un point de vue quasi général dans le secteur. « Après avoir longtemps joué le rôle d’entrée vers la Chine pour les investisseurs et entreprises occidentales, Hongkong est en passe de devenir davantage un tremplin vers le monde extérieur pour les entreprises et les entrepreneurs chinois », observe Claude Haberer.

Le rôle de coffre-fort pour l’épargne des riches Chinois joué par Hongkong pourrait aussi être un argument discret de dissuasion à une intervention brutale de Pékin, même si tout indique que les plus grosses fortunes chinoises ont compris depuis quelque temps que Hongkong n’assurait plus les mêmes garanties que par le passé. L’absence de contrôle sur les mouvements de capitaux rend très facile le transfert des fonds vers Singapour, Genève ou les paradis fiscaux.

Une partie inégale

Reste que la partie est inégale : dans le pire des cas, la Chine pourrait se passer de Hongkong, alors que l’inverse n’est pas vrai. L’annonce par Pékin, vendredi 9 août, du départ du patron de la compagnie aérienne Cathay Pacific, cotée à Hongkong, est une première qui en dit long sur la volonté actuelle de la Chine de remettre la ville au pas, y compris ses milieux d’affaires.

Car force est de constater que, même si l’on entend de plus en plus parler le mandarin dans les rues et les commerces de Hongkong, les deux mondes s’éloignent au fur et à mesure que la Chine se replie idéologiquement sur elle-même.

« En 2008, chaque famille de Hongkong a donné de l’argent pour aider les victimes du tremblement de terre du Sichuan. Lors des Jeux olympiques, nous étions fiers des médailles chinoises, même si nous avions nos propres équipes. Ces liens ont tendance à disparaître. Nous voyons moins souvent les membres de nos familles restées en Chine. Les liens se distendent », confie une manifestante.

« AUJOURD’HUI LES HONGKONGAIS EN VEULENT ENCORE PLUS, ALORS QU’ILS CONTRIBUENT DE MOINS EN MOINS À LA CROISSANCE DU PAYS » UN FAMILIER DE LA CHINE, DE TAÏWAN, HONGKONG ET SINGAPOUR

« Les Hongkongais se bercent de l’idée que c’est grâce à eux que la Chine a décollé. Mais s’ils sont allés en Chine dès la fin des années 1970, c’était comme investisseurs et la plupart y ont fait fortune. C’est donc à eux d’être reconnaissants de ce que la Chine leur a donné et non l’inverse, explique ce familier de la Chine, de Taïwan, de Hongkong et de Singapour. Aujourd’hui, les Chinois sont fous de rage de l’ingratitude des Hongkongais. Ils pensent que Hongkong s’est enrichi grâce à la Chine, que la ville ne serait rien sans la Chine, ce qui est une évidence. » Il ajoute : « Du point de vue de la Chine, Hongkong a toujours été plus riche, plus libre, plus ouverte et développée que n’importe quelle autre ville du pays… Et aujourd’hui, les Hongkongais en veulent encore plus, alors qu’ils contribuent de moins en moins à la croissance du pays. »

Un sondage réalisé par l’université de Hongkong, à la mi-juin, juste après des manifestations d’ampleur historique il est vrai, indiquait que 53 % des habitants interrogés s’identifiaient comme Hongkongais, contre 11 % seulement comme Chinois – le taux le plus bas depuis 1997. Quand on leur demande s’ils sont fiers d’être citoyens chinois, 71 % des Hongkongais répondent par la négative. Un pourcentage qui bondit à 90 % chez les 18-29 ans. Manifestement, le « rêve chinois » promis par Xi Jinping à ses compatriotes ne passe pas la frontière.

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24 août 2019

Décryptages - Pourquoi Donald Trump s’intéresse au Groenland

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Par Gary Dagorn

En montrant son intérêt pour le territoire arctique, le président américain se positionne dans la course aux ressources souterraines qui l’oppose à la Russie et à la Chine.

Révélé le 15 août par The Wall Street Journal, l’intérêt de Donald Trump pour l’acquisition du Groenland a été confirmé trois jours plus tard par le président lui-même. Le refus du gouvernement groenlandais et de la première ministre danoise, Mette Frederiksen, ont poussé Donald Trump à retarder sa visite au Danemark, prévue pour septembre, entraînant un incident diplomatique entre les deux pays.

L’attitude du président américain, coutumier des sorties provocatrices, a été largement critiquée. Elle ne doit pourtant rien au hasard.

Course vers l’Arctique

Les propos de Donald Trump s’inscrivent dans un contexte plus large dans lequel l’océan Arctique devient le lieu d’investissements croissants de la part des Russes et des Chinois, à mesure que le réchauffement climatique fait fondre la calotte glaciaire. Les territoires de l’Arctique sont riches en matériaux indispensables à l’industrie (or, zinc, cuivre, graphite, nickel, platine, uranium) et en hydrocarbures. Un rapport de l’Institut géologique américain publié en 2008 estimait que ces ressources représentaient jusqu’à 13 % des réserves non découvertes de pétrole et 30 % pour le gaz.

Dans cette course à l’exploitation des vastes ressources souterraines de l’Arctique, la Russie et la Chine ont devancé les Américains. D’après le cabinet de conseil financier Guggenheim Partners, plusieurs centaines de projets d’infrastructures représentant plus de 860 milliards de dollars d’investissements sont en train de voir le jour dans l’océan le plus septentrional du globe.

La Russie a déjà prévu 186 milliards de dollars d’investissements, contre un peu plus de 100 pour les Etats-Unis. La société pétrolière russe Rosneft a commencé à forer sur un champ dont le potentiel est estimé à un demi-milliard de barils, et découvre de nouveaux champs potentiels régulièrement. Le pays espère produire de 20 % à 30 % du pétrole russe dans les eaux arctiques d’ici à 2050. Gazprom, lui, extrait déjà de grandes quantités de gaz de ses exploitations en mer de Petchora.

La Norvège s’est elle aussi lancée dans l’extraction des ressources pétrolières dans la mer de Barents, au nord de ses côtes, avec une première exploitation dans le champ de Goliat, mise en service en 2016. Une seconde exploitation devrait voir le jour en 2022.

Mais en plus des huit pays de la zone, la Chine joue les invités (plus ou moins) surprises dans la course aux ressources. Car, bien que celle-ci n’ait aucune côte sur l’océan Arctique ni aucune revendication territoriale, la seconde économie du monde compte bien peser et s’est déclarée comme une « puissance presque arctique ». Elle fait partie du Conseil de l’Arctique comme pays observateur, depuis 2013, et est entrée au capital de joint ventures russes d’exploitation gazière.

La Chine a aussi multiplié les investissements dans les pays arctiques européens, notamment au Groenland, en échange d’un accès aux ressources minières de l’île, ce qui permet au territoire de moins dépendre de sa tutelle danoise.

Un enjeu stratégique pour les Etats-Unis

Ces initiatives chinoises sont perçues par les Etats-Unis comme une menace directe à leur influence sur une région qu’ils estiment être une extension géographique du continent américain, à l’instar de l’Alaska, acquis en 1867.

Face à ces avancées sino-russes, les autorités américaines tentent désormais de réagir. Ainsi, l’administration Trump a annoncé en janvier 2018 l’ouverture des eaux arctiques américaines au forage, notamment au large de l’Alaska, mais la décision a été jugée illégale par une juge du district de l’Alaska le 31 mars, car seul le Congrès a le pouvoir d’ajouter des zones ouvertes à l’exploitation des hydrocarbures. Ce revers met en difficulté les ambitions de l’administration Trump, qui considère désormais l’Arctique comme un enjeu central. La stratégie publiée par le Pentagone en juin 2019 présente clairement cette zone comme une nouvelle grande compétition entre eux, les Russes et les Chinois.

Au-delà de la géopolitique, les propos de Donald Trump ont également une connotation très politique : il s’agit aussi d’adopter une rhétorique plus agressive et directe, à l’instar de la stratégie musclée adoptée par Moscou. Donald Trump, depuis son élection, s’emploie à « secouer » un jeu diplomatique habituellement feutré et très codifié, ce qui s’avère populaire auprès de son électorat, friand de cette image de négociateur « dur » mais réaliste (ou « deal maker »), capable de faire bouger les lignes.

Un achat qui semble peu probable

Malgré les velléités américaines, l’achat de cette île de 2,16 millions de kilomètres carrés reste très peu probable, en raison de nombreux obstacles. Parce qu’un tel achat doit passer par un traité, celui-ci doit être ratifié par les trois parties : les Etats-Unis, le Danemark et le Groenland, dont le consentement est obligatoire. Or les Groenlandais ne souhaitent pas d’un rachat ou d’une nouvelle tutelle, mais demandent au contraire – et de longue date – davantage d’autonomie, si ce n’est l’indépendance réelle, à Copenhague.

De l’autre côté de l’Atlantique, la ratification d’un traité d’achat requiert obligatoirement l’approbation du Congrès, c’est-à-dire aussi bien du Sénat (qui doit ratifier), contrôlé par les républicains, que de la Chambre des représentants (qui doit donner son autorisation budgétaire). Si la ratification des sénateurs n’est pas inconcevable, la Chambre des représentants, repassée sous pavillon démocrate aux élections de mi-mandat de novembre 2018, rend la conclusion d’un traité au mieux incertaine, au pire impossible.

Enfin, du côté danois, une vente est également complètement exclue, Copenhague n’ayant aucun intérêt à perdre son influence historique sur ce territoire qu’il revendique depuis 1775, d’autant qu’il a déjà décliné une offre des Etats-Unis dans le passé. En effet, après avoir songé à acquérir l’île en 1867 (juste après avoir racheté l’Alaska aux Russes), les Américains ont soumis une offre en 1946 aux Danois, leur proposant 100 millions de dollars en or, ce que ces derniers avaient refusé. La proposition, restée secrète, n’a été révélée qu’en 1991, lorsqu’un journal danois, le Jyllands-Posten, a étudié les documents désormais déclassifiés.

trump gro

24 août 2019

Amazonie en feu. Une crise diplomatique

Face à une forêt amazonienne ravagée par les flammes, les grands dirigeants européens ont tapé du poing sur la table, vendredi, Emmanuel Macron accusant son homologue brésilien Jair Bolsonaro d’avoir « menti » sur ses engagements en faveur de l’environnement.

L’ampleur des feux qui ravagent la plus vaste forêt tropicale de la planète préoccupe le monde entier. Selon l’Institut national de recherche spatiale (INPE) du Brésil, il y a eu près de 2 500 nouveaux départs de feu en l’espace de 48 heures dans l’ensemble du Brésil. La déforestation, qui avance rapidement, en est la principale cause.

Une série de manifestations a été lancée à travers le monde en faveur du poumon « en feu » de la planète. Des rassemblements ont eu lieu à Londres, Barcelone, Genève, Amsterdam… Vendredi soir, des manifestations devaient avoir lieu à São Paulo et Rio.

Devant « l’inaction de Jair Bolsonaro face au changement climatique, y compris sur les incendies », la France dira « non » au traité de libre-échange controversé entre l’UE et le Mercosur, a prévenu la présidence française, à la veille du sommet du G7, qui se tient, de samedi à lundi, à Biarritz. 

macron bresil

« Bolsonaro a menti »

« Compte tenu de l’attitude du Brésil ces dernières semaines, le président de la République ne peut que constater que le président Bolsonaro lui a menti lors du sommet (du G20, ndlr) d’Osaka », a déclaré, vendredi, l’Élysée, estimant que « le président Bolsonaro a décidé de ne pas respecter ses engagements climatiques ni de s’engager en matière de biodiversité ».

Auparavant, le chef de l’État brésilien avait accusé son homologue français de « mentalité colonialiste » pour avoir appelé à discuter des feux au Brésil lors du sommet de Biarritz, en son absence.

Dans l’urgence, les conseillers diplomatiques des chefs d’État « se mobilisent pour avoir des initiatives concrètes pour l’Amazonie, qui pourraient se matérialiser au G7 », selon la présidence française.

L’Irlande a elle aussi menacé de voter contre l’accord avec le Mercosur. Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, s’est dit « extrêmement soucieux » et la chancelière allemande, Angela Merkel, a réclamé que cette « situation d’urgence aiguë » figure en bonne place au menu des discussions du G7.

« Pas la réponse appropriée »

Un porte-parole du gouvernement allemand a cependant fait savoir que la décision du président français Emmanuel Macron de s’opposer à l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur n’était pas « la réponse appropriée » aux incendies dans la forêt amazonienne au Brésil. « L’échec de la conclusion de l’accord Mercosur ne contribuerait pas à réduire le défrichement de la forêt tropicale au Brésil. »

L’armée contre les incendies ?

Le président brésilien Jair Bolsonaro, sous forte pression internationale, « penchait », vendredi, pour l’envoi de l’armée en Amazonie afin de lutter contre les incendies. Plus tôt dans la semaine, ce climato-sceptique assumé avait déclaré avoir des « soupçons » sur une responsabilité des ONG dans les feux en Amazonie. Il avait également accusé les gouverneurs des États amazoniens « de ne pas avoir levé le petit doigt » contre les incendies et même de « connivence ».

24 août 2019

Emmanuel Macron s'adressera aux Français samedi à 13 heures, avant l'ouverture du G7

Le chef de l'Etat "souhaite expliquer les enjeux du G7 et les objectifs recherchés pour la vie concrète des Français", selon l'Elysée.

Avant de s'entretenir avec ses homologues des grandes puissances mondiales à l'occasion du G7 organisé à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), Emmanuel Macron s'adressera aux Français samedi à 13 heures, annonce l'Elysée vendredi 23 août. "Juste avant l'ouverture du sommet, le président souhaite expliquer ses enjeux et les objectifs recherchés pour la vie concrète des Français", a précisé la présidence.

Guerre commerciale, polémique sur les feux de forêts en Amazonie, taxe sur les Gafa, Brexit... Cette allocution pourrait être l'occasion pour le chef de l'Etat de balayer les nombreux sujets qui seront évoqués lors de ce sommet. Durant trois jours, les leaders du monde seront confinés dans un palace, loin de la société civile dont ils se veulent à l'écoute. Plus de 13 000 policiers et gendarmes seront mobilisés dans toute la région, où un grand rassemblement d'opposants au sommet fait craindre des violences samedi d'Hendaye à Irun.

23 août 2019

« Retrouver la sève des G7 », le défi d’Emmanuel Macron

g7 photo

Par Marc Semo

Le sommet, qui doit se dérouler à Biarritz du 24 au 26 août, s’annonce délicat sur fond de menaces de récession économique, tensions internationales croissantes et dissensions internes.

Signe des temps, un communiqué commun aussi générique que généreux pour énumérer les grands défis du monde ne devrait pas conclure les trois jours du G7 de Biarritz du 24 au 26 août. Laborieusement négocié entre sherpas, un tel texte marquait comme la traditionnelle photo de famille ces réunions entre les dirigeants des principales puissances économiques démocratiques (Etats-Unis, France, Royaume-uni, Allemagne, Japon, Italie, Canada).

Mais rarement un tel sommet se sera annoncé comme aussi difficile sur fond de menaces de récession économique, de tensions internationales croissantes mais surtout de dissensions internes toujours plus vives entre membres. Club informel, cette instance, inventée en 1975 par le président français, Valéry Giscard d’Estaing, pour faire face au premier choc pétrolier et à la crise du dollar, se veut avant tout un lieu de concertation. Celle-ci risque de tourner court alors même que les chefs d’Etat ou de gouvernements présents sont tous fragilisés ou focalisés sur leurs enjeux politiques intérieurs.

« Retrouver la sève des G7 »

« Il faut retrouver la sève des G7, celle des échanges et du dialogue où l’on se dit les choses », a expliqué le président français, Emmanuel Macron, ironisant sur « ces communiqués que personne ne lit qui sont le résultat d’interminables chicayas bureaucratiques entre Etats profonds des pays membres ». Et de rappeler avec humour que lui-même, en tant que sherpa, participa à de telles interminables discussions.

Parlant le 21 août devant l’Association de la presse présidentielle, à trois jours du début du sommet et avant l’ouverture la semaine prochaine de la conférence annuelle des ambassadeurs et des ambassadrices, le chef de l’Etat qui, selon la Constitution, détermine les grandes options de la politique étrangère française a voulu en rappeler les enjeux. « Nous vivons une période historique de l’ordre international qui est le nôtre marquée par une crise très profonde des démocraties, à la fois de représentativité et d’efficacité », a-t-il insisté, soulignant leurs difficultés « à répondre aux peurs contemporaines, la peur climatique, la peur technologique, la peur des migrations ».

Risque d’une diplomatie de la posture

« La lutte contre les inégalités », le thème central choisi pour ce premier G7 organisé par la France depuis huit ans, est essentiel mais il risque d’être un peu occulté par les dossiers les plus chauds, tels l’escalade dans le golfe Persique entre Washington et Téhéran, la guerre commerciale des Etats-unis avec la Chine ou l’urgence climatique. Grand perturbateur du précédent G7 à la Malbaie, au Québec, Donald Trump avait retiré sa signature du communiqué final traitant son hôte, le premier ministre canadien Justin Trudeau, de « malhonnête ».

Désormais en campagne pour sa réélection en 2020, il ne peut surenchérir dans son cavalier seul après s’être déjà retiré de l’accord de Paris sur le climat et de l’accord sur le nucléaire iranien. Empêtré dans le Brexit, le nouveau premier ministre britannique, Boris Johnson, est tenté de se rapprocher du locataire de la Maison Blanche. La chancelière allemande, Angela Merkel, est en fin de règne et Justin Trudeau est encore plus affaibli politiquement. Le président du conseil italien, Giuseppe Conte, est démissionnaire.

« Un tel contexte ne peut que favoriser chez les participants une diplomatie de la posture et donc paralyser toute concertation », relève Bertrand Badie, professeur émérite à Science Po Paris, qui de longue date pourfend la « diplomatie de connivence » dont le G7 est l’archétype. Cette instance est en outre toujours plus en décalage avec les réalités de la globalisation. Ses membres ne pèsent plus que 40 % du PIB du monde et 12 % de sa population. « Avant même que Donald Trump n’entre en scène, il était déjà évident que le G7 devait évoluer pour retrouver toute son attractivité », explique Pierre Vimont, ancien haut diplomate français et ex-numéro deux de la diplomatie de l’Union européenne, aujourd’hui chercheur au Carnegie Europe.

Le président français est conscient du défi. « L’ordre international reposait sur l’hégémonie occidentale depuis le XVIIIe siècle, alors la France, puis au XIXe, la Grande-Bretagne, et au XXe, les Etats-Unis. Mais cette hégémonie est aujourd’hui remise en cause », a expliqué Emmanuel Macron, insistant sur la nécessité « de défendre, en le renouvelant, un multilatéralisme contemporain en ne cédant à l’ensauvagement du monde ».

La question du retour de la Russie

Le président français veut faire évoluer le G7, qu’il critiquait à l’issue du sommet de Québec comme « un théâtre d’ombres et de divisions ». Il s’agit d’en alléger le fonctionnement et surtout de l’ouvrir toujours plus largement aux dirigeants de pays non-membres – mais aussi aux représentants de la société civile comme les ONG et les entreprises – afin de favoriser l’émergence de « coalitions de pays acteurs désireux de proposer des solutions concrètes ». Le premier ministre indien, Narendra Modi, le président chilien, Sebastian Pinera, et des dirigeants africains dont le Rwandais, Paul Kagame, mais aussi ceux des pays du G5 Sahel.

L’une des questions centrales du sommet sera celle d’un retour de la Russie, qui avait été exclue de cette instance en 2014, après l’annexion par la force de la Crimée et la déstabilisation de l’est de l’Ukraine. Le président français en a discuté, lors d’un entretien de plus d’une heure au téléphone dans la nuit du 20 au 21 août, avec son homologue américain Donald Trump, qui présidera le G7 l’année prochaine et se dit favorable à la réintégration de Moscou sans évoquer de préalables particuliers. « Il est pertinent qu’à terme la Russie revienne », a reconnu Emmanuel Macron, tout en rappelant que l’on ne peut oublier les raisons pour lesquelles elle en a été exclue et donc la nécessité de gestes significatifs du Kremlin sur l’Ukraine. « Dire “la Russie sans conditions doit demain revenir à la table”, c’est en quelque sorte acter la faiblesse du G7 », a-t-il explicité.

C’était l’une des raisons de la rencontre au fort de Brégançon cinq jours avant le G7 avec Vladimir Poutine. Le président aurait montré sa disponibilité à discuter sérieusement avec Kiev pour la mise en œuvre des accords de Minsk de février 2015 qui avaient mis fin aux combats les plus intenses mais restés jusqu’ici lettre morte. Une réunion d’un sommet à quatre de format Normandie – France, Allemagne, Russie, Ukraine – pourrait se tenir dans quelques semaines à Paris.

Les débats avec Trump s’annoncent houleux

« Il est essentiel d’arrimer la Russie à l’Europe car elle est européenne par son histoire, comme par sa géographie, et plus nous dirons qu’elle est européenne, plus elle le sera », a expliqué Emmanuel Macron qui, par cette ouverture à Moscou sans pour autant cacher les divergences, veut affirmer la France comme une « puissance d’équilibre ». « Même si nous avons des amis et des alliés, nous devons parler à tout le monde. Les ennemis de nos alliés ne sont pas nécessairement les nôtres », a-t-il insisté, reprenant des accents gaulliens et marquant sa différence vis-à-vis de Donald Trump. Les débats avec le locataire de la Maison Blanche s’annoncent pour le moins houleux. Ils vont commencer dès vendredi soir au dîner quand seront discutés les grands dossiers politiques. A commencer par la crise du Golfe.

« On doit avoir une discussion au sommet sur comment on gère le dossier iranien, on a des vrais désaccords au sein du G7 : trois puissances européennes et le Japon qui ont une position assez claire, un rapport avec l’Iran totalement assumé, et les Américains (…) qui ont décidé de changer totalement de ligne et ont dénoncé l’accord de 2015 sur le nucléaire », a expliqué le président français qui tente de se poser en médiateur entre Téhéran et Washington.

Le chef de l’Etat a précisé qu’il aurait, « avant le G7, une réunion avec les Iraniens pour essayer de proposer des choses » et il devrait rencontrer le 23 août, selon l’agence officielle iranienne Irna, le ministre iranien des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif. L’Elysée espère arriver à obtenir un allégement des sanctions rétablies par Washignton en échange d’un retour de Téhéran au respect de ses engagements. Mais Donald Trump reste intransigeant rappelant dans un tweet la semaine dernière visant clairement Emmanuel Macron que « personne ne parle pour les Etats-Unis à part les Etats-Unis eux-mêmes ».

L’hôte de la Maison Blanche se montre tout aussi inflexible à propos de la taxe française sur les géants américains du numérique pourfendant dans un tweet « la stupidité de Macron ». Le président français compte bien néanmoins défendre à Biarritz son projet dénonçant un système « fou » où « les acteurs mondiaux du numérique ne contribuent pas fiscalement au financement du bien commun, ce qui n’est pas soutenable ».

23 août 2019

Tribune - Jean-Philippe Béja : « Le sort de Hongkong concerne tous les pays du monde »

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Par Jean-Philippe Béja, Directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste de la vie politique en Chine et à Hongkong

Dans une tribune au « Monde », le sinologue appelle les dirigeants réunis au G7 à faire preuve de courage en soutenant le mouvement de contestation dans l’ancienne colonie britannique.

Du 24 au 26 août, les chefs d’Etat et de gouvernement du G7 se réuniront à Biarritz. Ils discuteront des grands problèmes économiques, militaires et politiques du moment. Mais auront-ils une minute pour parler du combat que mène depuis deux mois la population de Hongkong pour défendre son identité ? A en juger par le silence assourdissant, notamment de l’Europe, qui accueille ces événements, cela n’est guère probable. Pourtant, le combat mené par la population de la Région administrative spéciale est un combat pour la liberté et la démocratie que les Sept sont censés défendre.

Hongkong est, de plus, l’une des principales places financières de la planète. Abritant le siège de milliers de compagnies occidentales et multinationales, elle est reconnue comme territoire douanier autonome et dispose d’une représentation autonome dans de nombreuses organisations de l’ONU. Depuis son retour dans le giron de la République populaire de Chine, en 1997, son gouvernement n’a cessé d’affirmer qu’elle est la « ville-monde d’Asie », classée chaque année comme l’une des économies les plus libres, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes puisqu’elle appartient à un pays dirigé par un parti communiste.

Son statut d’autonomie est garanti par la déclaration conjointe sino-britannique signée en 1984 et déposée aux Nations-unies. En un mot, son sort concerne tous les pays du globe. Et pourtant, aucune voix ne s’est élevée pour soutenir la lutte des Hongkongais : le 9 juin, un million de manifestants sont descendus dans la rue pour réclamer pacifiquement le retrait d’une proposition de loi visant à extrader vers la Chine les « criminels » qu’elle réclame. Etant donné que les tribunaux chinois sont aux ordres du pouvoir de Pékin, ce projet a été considéré comme signifiant la fin de l’autonomie de Hongkong.

« Germes de terrorisme »

L’indépendance du pouvoir judiciaire, promise par la déclaration conjointe, est en effet le fondement des libertés qui y règnent. Malgré cette mobilisation extraordinaire, la chef de l’exécutif nommée par Pékin n’a pas retiré son projet. Ce n’est qu’à la suite de l’occupation du Legco, le parlement local, par des manifestants, qu’elle a décidé de le suspendre. Une nouvelle manifestation a rassemblé 2 millions de personnes (sur une population de 7,5 millions) qui ont réaffirmé leur demande de retrait du projet ainsi que la création d’une commission d’enquête indépendante sur les violences policières.

Depuis, des manifestations regroupant plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont déroulées tous les week-ends, émaillées de violences surtout commises par la police. Aucune vitrine n’a été brisée, aucun pillage n’est à déplorer. Aujourd’hui, outre les deux revendications ci-dessus, les manifestants réclament les élections au suffrage universel du chef de l’exécutif et du parlement local, qui avaient été promises par la Chine.

Les autorités ont dénoncé les « violences des éléments radicalisés », le gouvernement chinois, par la voix de son responsable du bureau des affaires de Hongkong et Macao a, dans une conférence de presse sans précédent depuis 1997, dénoncé des « germes de terrorisme », et a demandé à la police et aux tribunaux hongkongais d’arrêter et de condamner sévèrement les « auteurs de violence ». Mais, surtout, le gouvernement de Pékin et à sa suite celui de Hongkong refusent catégoriquement d’entamer des discussions avec les protestataires.

Sauvegarder les libertés fondamentales

Le pouvoir chinois a diffusé des images de la police armée populaire réprimant des manifestations violentes à la fois pour intimider les protestataires et pour tester les réactions de la communauté internationale. Les seules ont été celles de Donald Trump qui, après avoir tweeté qu’il s’agissait d’une affaire intérieure chinoise et que la Chine viendrait à bout des émeutiers sans violence, a réaffirmé sa confiance en Xi Jinping, « un homme qu’[il] aime beaucoup ». Quant à la France, elle a fait savoir que le président Macron suivait la situation. C’est un peu court…

OÙ, DANS LE MONDE ACTUEL, VOIT-ON UNE POPULATION ENTIÈRE DESCENDRE DANS LA RUE POUR RÉCLAMER LA DÉMOCRATIE SANS CRAINDRE L’ARMÉE DE LA DEUXIÈME PUISSANCE MONDIALE ?

Dimanche 18 août, plus de deux mois après la première manifestation, 1,7 million de personnes sont descendues dans la rue malgré des pluies torrentielles. Les habitants de la ville-monde se battent pour sauvegarder les libertés fondamentales que le parti communiste s’était engagé à respecter pendant au moins cinquante ans. Sans violence, sans pillage, mais sans que leur gouvernement leur réponde.

Leur détermination pourrait faire reculer un pouvoir de plus en plus arrogant qui cherche à changer les règles du jeu international. Ils demandent le soutien des démocraties du monde développé. Laissera-t-on la Chine de Xi Jinping, qui a enfermé des centaines de milliers de Ouïgours et de Kazakhs dans des camps de rééducation, qui interdit aux dissidents de choisir leur avocat, qui réprime la société civile naissante en Chine, écraser cette révolte pacifique ?

Où, dans le monde actuel, voit-on une population entière descendre dans la rue pour réclamer la démocratie sans craindre l’armée de la deuxième puissance mondiale ? Si les dirigeants du G7 se taisent devant les menaces proférées par les dirigeants de Pékin, qui osera encore se battre pour les valeurs fondamentales établies par les Lumières ? Il y a deux ans, les dirigeants du G20 se sont tus alors que le Prix Nobel de la paix 2010, Liu Xiaobo, agonisait dans un hôpital-prison à Shenyang. Ceux du G7 réuni à Biarritz, au pays de la Déclaration des droits de l’homme, réitéreront-ils cette lâcheté ?

Jean-Philippe Béja est spécialiste de la vie politique en Chine et à Hongkong et directeur de recherche émérite au CNRS

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