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Jours tranquilles à Paris
10 juillet 2019

La mobilisation à Hongkong profite à la présidente taïwanaise

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Tsai Ing-wen, qui a toujours rejeté la formule « un pays, deux systèmes » que Pékin souhaite étendre à Taipei, remonte dans les sondages

SHANGHAÏ

Il y a à peine deux mois, la présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, était donnée perdante dans tous les sondages pour la présidentielle de janvier 2020. La stagnation des salaires, des réformes impopulaires et les tensions continues avec la Chine lui étaient reprochées. Elle avait d’ailleurs démissionné de la présidence du Parti progressiste démocratique (DPP), après une gifle aux élections municipales de décembre 2018. Mais aujourd’hui, la présidente taïwanaise, qui tient une ligne ferme face à Pékin, est au coude-à-coude avec ses concurrents. La crise à Hongkong est passée par là : les manifestations monstres, depuis début juin, pour dénoncer une loi autorisant les extraditions vers la Chine, ont trouvé un écho favorable à Taïwan, île indépendante de fait mais sur laquelle la Chine revendique sa souveraineté.

Pour les Taïwanais, les tensions à Hongkong sont un rappel de la fragilité de leur position : l’île a toutes les caractéristiques d’un Etat, sauf la reconnaissance internationale. Elle est dans le viseur de la Chine depuis l’élection de Mme Tsai en 2016, qui a d’emblée marqué ses distances avec le régime communiste. Le président chinois Xi Jinping verrait le retour de l’île dans le giron de la Chine continentale comme un symbole de la puissance chinoise retrouvée, qui viendrait cimenter son héritage politique. Le 2 janvier, M. Xi avait prononcé un discours menaçant, affirmant ne pas exclure l’usage de la force pour reprendre l’île, et proposant un rapprochement sous le régime « un pays deux systèmes » qui définit l’autonomie relative dont bénéficie Hongkong depuis sa rétrocession par le Royaume-Uni à la Chine, en 1997.

« Combat pour la liberté »

Peu après le début du mouvement dans l’ancienne colonie britannique, Mme Tsai a dit son soutien aux manifestants en parlant d’un « combat pour la liberté et la démocratie » et estimé que la solution « ne pourra jamais être acceptée pour la démocratie taïwanaise ». « Les manifestations à Hongkong font apprécier encore plus notre système démocratique et notre mode de vie », a déclaré la présidente, le 13 juin.

De quoi donner des ailes aux opposants à un rapprochement avec le continent. « Les Taïwanais ont réagi avec enthousiasme aux manifestations. Voir 2 millions de Hongkongais dans la rue a beaucoup impressionné les Taïwanais pour qui la démocratie, l’Etat de droit, la liberté et les droits de l’homme sont des intérêts fondamentaux, d’où une défiance de plus en plus profonde à la solution “Un pays, deux systèmes” à Taïwan », estime Lin Yizheng, ex-secrétaire général du DPP et président de la Fondation pour une nouvelle Constitution, une organisation en faveur de l’indépendance. Le « consensus de 1992 », accord entre le Kouomintang alors au pouvoir à Taipei et le Parti communiste chinois, avait permis le dégel dans le détroit de Formose, les deux parties reconnaissant « l’existence d’une seule Chine », mais « avec plusieurs interprétations ».

L’ampleur de la crise hongkongaise a secoué l’ensemble de la classe politique taïwanaise, en pleine campagne des primaires du Kuomintang, devenu le principal parti d’opposition, plus conciliant avec Pékin. Han Kuo-yu, le maire populiste de Kaohsiung (sud), promet aux électeurs de redresser l’économie du pays en ouvrant les vannes aux investissements chinois. Le 16 juin, il a pourtant récusé, à son tour, la formule proposée par la Chine. « “Un pays deux systèmes” ne pourra jamais être mis en place à Taïwan. Les Taïwanais ne l’accepteront jamais, il faudrait d’abord me passer sur le corps », s’est emporté le candidat.

Une clarification tardive. Donné gagnant il y a un mois, M. Han est, à une semaine de la primaire du 16 juillet, à la traîne derrière Terry Gou, patron jusqu’en juin de Foxconn. Le fondateur du géant de la sous-traitance électronique, dont les liens économiques avec la Chine où son groupe a l’essentiel de ses usines, ont été pointés du doigt, avait pris soin de clarifier plus tôt sa position : pas de solution à « un pays deux systèmes », mais la reconnaissance du statu quo issu de 1992. C’est le refus de reconnaître ce « consensus » par la présidente actuelle qui a conduit la Chine à multiplier les représailles économiques, en limitant par exemple la venue de touristes chinois sur l’île.

« Les candidats bleus [couleur du Kuomintang] sont rappelés à la vulgate de leur parti par la situation à Hongkong et par la chef de file de la politique taïwanaise, Tsai Ing-wen qui, dans un océan de menaces, représente une position stable, sans provocation, proche des militaires et constante dans ses déclarations, explique Stéphane Corcuff, enseignant à Sciences Po Lyon et chercheur associé au Centre d’études sur la Chine contemporaine de Taipei. Alors qu’il y a quelques mois, la profondeur de ses réformes, sa dureté dans sa communication, son manque d’empathie, l’avaient plombée dans les sondages, elle est en train de réémerger, parce que le contexte géopolitique se rappelle aux Taïwanais. »

Dimanche 23 juin, des dizaines de milliers de manifestants avaient défilé dans les rues de Taipei pour dénoncer l’influence de la Chine sur les médias locaux. Dans le même temps, le gouvernement de Tsai annonçait une « conférence de sécurité nationale » et un projet de loi pour mieux examiner les investissements étrangers mettant en jeu la sécurité nationale. Un texte visant, encore une fois, son puissant voisin.

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2 juillet 2019

Scènes de chaos à Hongkong pour l’anniversaire de la rétrocession à la Chine

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Par Florence de Changy, Hongkong, correspondance

Marée de manifestants dans les rues, Parlement local pris d’assaut, charges de la police… Les tensions sont montées de plusieurs crans dans le territoire.

Alors que quelques milliers de jeunes faisaient le siège depuis le petit matin devant l’entrée des députés au Parlement de Hongkong, le Conseil législatif (ou « Legco »), en ce lundi 1er juillet, 22e anniversaire de la rétrocession du territoire à la Chine, c’est au soir que la situation a basculé.

Certains avaient passé la nuit sur place. Durant des heures, les manifestants ont tenté par tous les moyens de fracturer les grandes baies en verre haute sécurité du bâtiment. A coups de bâtons, de marteaux, de piquets métalliques ou de chariots. Postés à l’intérieur, quelques dizaines de policiers ont observé, sans intervenir, ce casse méticuleux et laborieux qui a duré presque une journée entière.

Soudain, autour de 21 heures, une baie vitrée a cédé et les manifestants sont parvenus à lever un rideau de fer. Des dizaines, probablement ensuite des centaines de tee-shirts noirs coiffés de casques jaunes se sont engouffrés dans l’immeuble, montant dans les étages par les escaliers mécaniques. C’est alors que les couloirs et les grandes salles propres et modernes du Conseil législatif se sont métamorphosés, prenant, en quelques minutes seulement, de choquantes allures de squat, avec graffitis et œufs écrasés aux murs, mobilier renversé, cadres décrochés ou fracassés.

« Régime meurtrier »

Les manifestants ont déployé le drapeau d’avant la rétrocession du territoire par le Royaume-Uni et brandi une banderole au-dessus du pupitre du président du Conseil législatif sur laquelle était écrit : « Ce n’est pas une émeute, c’est une tyrannie. » Un jeu de mots sur les caractères chinois, et une référence à la qualification d’« émeutiers » par le chef de la police et la chef de l’exécutif Carrie Lam lors d’une précédente manifestation, le 12 juin, une caractérisation qui avait choqué.

Au mur, l’emblème de la ville, une fleur de bauhinia blanche sur fond rouge, a été tagué à la bombe noire. « Régime meurtrier », pouvait-on lire sur un mur. Les manifestants ont occupé le bâtiment pendant trois heures, avant de s’en retirer et d’être éloignés de la zone par la police qui a fait usage de gaz lacrymogène.

Lors d’une conférence de presse, mardi à l’aube, la chef du gouvernement de Hongkong, Carrie Lam, a condamné l’invasion « extrêmement violente » du Parlement. Evoquant des événements « bouleversants et choquants », elle a dit espérer que la situation « revienne à la normale aussi vite que possible ».

« Ils n’ont plus rien à perdre »

Depuis que le gouvernement a présenté un projet de loi d’extradition permettant le transfert de suspects vers la Chine continentale notamment, les opposants au texte ont focalisé leur mobilisation sur le « Legco », afin de bloquer à tout prix son adoption, y compris en empêchant physiquement les députés de se réunir. L’annonce, le 15 juin, de la suspension du projet de loi n’a pas satisfait les manifestants qui réclament son abandon total.

Ces derniers y voient une nouvelle illustration de l’érosion des libertés à la main de la Chine, comme le dénonçait déjà en 2014 le « mouvement des parapluies », trois mois d’occupation des principales artères du centre financier asiatique.

Depuis, une partie de ces militants, constatant qu’ils n’ont pas été entendus, se sont radicalisés dans leur dénonciation des institutions – la chef de l’exécutif et l’organe législatif –, tous deux accusés d’être au service de Pékin. Ils exigent davantage d’autonomie, tandis que le président chinois, Xi Jinping, se montre plus intransigeant que jamais.

La veille au soir, au même endroit, la tension était déjà montée d’un cran. Des échauffourées avaient eu lieu lorsque des manifestants pro-Pékin sortant d’un grand rassemblement de soutien à la police de Hongkong (150 000 personnes selon les organisateurs) avaient arraché tous les messages de solidarité du mouvement de protestation actuel et saccagé les installations (autel floral, etc.) qui rendaient hommage à un jeune homme mort il y a deux semaines – il était tombé en installant une bannière réclamant le retrait total de la loi d’extradition. Depuis, deux autres jeunes se sont suicidés en laissant des messages liant leur acte à la mobilisation actuelle.

Le soir, la plupart des autres jeunes, assis sur la grande pelouse avoisinante, sont restés par solidarité. Ils auraient préféré arriver à leurs fins par d’autres moyens, mais ils estiment avoir épuisé toutes les voies pour se faire entendre autrement. « Ceux qui font cela, c’est parce qu’ils estiment qu’ils n’ont plus rien à perdre une fois que Hongkong perd ses libertés. Ils se disent, il y en a qui se suicident, nous, on va faire quelque chose de plus efficace. Mais, au fond, c’est plus ou moins le même désespoir », dit Tiger Lam, 22 ans, étudiante en travaux publics.

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Violence sévèrement punie

Ce vandalisme ne manquera pas de choquer, d’autant qu’il est totalement atypique à Hongkong, où les manifestants se sont illustrés ces dernières années par leur civisme, ramassant systématiquement les déchets. Les récentes manifestations gigantesques des 9 et 16 juin, rassemblant un puis deux millions de participants, l’ont rappelé au monde entier : les Hongkongais sont polis et policés, et extraordinairement respectueux de l’ordre public.

En retour, la violence est sévèrement punie : en 2016, l’émeute d’une nuit, dite « des boulettes de poissons » (contre la fermeture d’échoppes de cuisine de rue illégales), avait fait des blessés et choqué la population. L’un des responsables, l’étudiant Edward Leung, avait écopé de six ans de prison ferme.

Plus tôt dans la journée, nombre de députés de l’opposition s’étaient rendus sur place pour tenter de convaincre les jeunes les plus décidés à en découdre de renoncer à leurs méthodes violentes. Certains avaient été brusquement écartés. « Le mouvement a perdu en quelques heures tout le crédit moral engrangé au cours des dernières semaines », devait constater, dubitatif, le conseiller du district sud, Paul Zimmerman.

Pendant que la tension montait aux abords du « Legco », plus d’un demi-million de personnes (550 000 selon les organisateurs) avaient à nouveau défilé paisiblement, dans les rues de Hongkong. Leurs revendications étaient les mêmes que celles de la marche du 16 juin, à savoir l’abandon total de la loi d’extradition, une enquête à propos des violences policières du 12 juin, le retrait du mot « émeutes » pour caractériser les événements du 12 juin, la libération sans suite des personnes interpellées et la démission de Carrie Lam.

2 juillet 2019

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30 juin 2019

Rencontre historique: Kim Jong-un et Trump

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30 juin 2019

Kim Jong-un accepte de rencontrer Donald Trump sur la zone démilitarisée

Le leader nord-coréen a répondu favorablement à la demande inattendue du président des Etats-Unis, qui proposait une « poignée de main » symbolique à Panmunjom.

Via son moyen de communication préféré, Twitter, Donald Trump a donné rendez-vous, dimanche 30 juin, à Kim Jong-un pour un « bonjour » et une « poignée de main » hautement symbolique à la frontière entre les deux Corées. Quelques heures avant cet événement, à 13 h 15 locales (6 h 15 à Paris), le numéro un nord-coréen a répondu favorablement à cette invitation impromptue, a annoncé Séoul.

Arrivé samedi soir en Corée du Sud, le président américain doit se rendre en début d’après-midi à Panmunjom, seul lieu de contact entre les deux pays sur la zone démilitarisée (DMZ), le no man’s land qui les sépare depuis la fin de la guerre de Corée (1950-1953).

Le suspense était à son comble dans la matinée. « [Kim Jong-un] en a très envie », avait assuré Donald Trump, dimanche matin, lors d’un discours à Séoul, sans préciser si le dirigeant nord-coréen avait ou non accepté l’invitation. Cela n’avait pas empêché les spéculations ; alimentées en partie par une agence de voyages qui annonçait que la DMZ était fermée aux touristes côté Nord pour la journée.

Cette rencontre est la troisième entre les deux hommes depuis leur sommet historique de Singapour en juin 2018, puis le rendez-vous raté de Hanoï, au Vietnam en février. Un nouveau moment clé du rapprochement entre les deux ennemis pourrait se produire si Donald Trump s’aventurait à effectuer quelques pas au Nord : jamais un président des Etats-Unis en exercice n’a foulé le territoire de la République populaire démocratique de Corée.

Une « incitation économique » américaine possible

Kim Jong-un lui-même avait traversé la frontière, en avril 2018, lors de son premier sommet sur la DMZ avec son homologue sud-coréen, Moon Jae-in.

« Je serais très à l’aise de le faire, cela ne me poserait aucun problème », a affirmé le locataire de la Maison Blanche, samedi. Moon Jae-in, qui compte beaucoup sur une détente avec le voisin du Nord, s’est ensuite félicité que « la fleur de la paix se soit entièrement épanouie sur la péninsule coréenne ».

De l’avis des experts, cette rencontre ne devrait pas suffire à résoudre le délicat dossier de la dénucléarisation de la Corée du Nord, sur lequel achoppe le rapprochement avec Washington. L’administration américaine exige que Pyongyang renonce définitivement à son programme nucléaire avant d’envisager une levée des sanctions internationales, ce que le Nord refuse.

Selon Harry J. Kazianis, spécialiste de la République populaire démocratique de Corée au Center for the National Interest, un centre de réflexion basé à Washington, Donald Trump pourrait toutefois mettre à profit sa visite dans la péninsule pour offrir de « suspendre » une partie des sanctions onusiennes, en échange du démantèlement total par Pyongyang de son principal centre d’essais nucléaires de Yongbyon.

« Une telle formulation donnerait à la Corée du Nord l’incitation économique dont elle a besoin pour ranimer son économie, tout en donnant à Donald Trump une grande victoire diplomatique au moment où les tensions montent dans le monde entier, que ce soit avec les alliés ou avec les ennemis des Etats-Unis », observe-t-il.

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17 juin 2019

Le président chinois Xi Jinping affaibli par la crise à Hongkong

Par Frédéric Lemaître, Hongkong, envoyé spécial

Le dirigeant veut faire de l’intégration de la ville un modèle qu’il entend reproduire – voire imposer – à Taïwan. Las, les habitants de l’île ont rappelé qu’ils n’entendent nullement se faire absorber par Pékin.

Avec de tels amis, Xi Jinping n’a plus besoin d’ennemis. En pleine guerre froide technologique et commerciale avec Washington, Pékin vient de se tirer une balle dans le pied de la façon la plus inattendue qui soit. Pour avoir voulu faire adopter en urgence un projet de loi sur l’extradition, notamment vers la Chine continentale, puis pour y avoir renoncé sous la pression populaire, Carrie Lam, chef de l’exécutif de Hongkong, vient de perdre sur toute la ligne et, par ricochet, d’affaiblir son mentor, le président chinois.

Pire, dans cette région administrative spéciale rétrocédée par le Royaume-Uni à la Chine le 1er juillet 1997, elle a provoqué, dimanche 16 juin, la plus grande manifestation jamais organisée contre Pékin sur ce territoire. Deux millions de personnes sur 7,4 millions d’habitants.

« Grâce à » Carrie Lam, Hongkong vient spectaculairement de rappeler au monde entier qu’une grande partie des habitants de cette ville prospère qui continue de jouir de libertés impensables dans le reste de la Chine n’entend nullement se faire absorber par le régime communiste. Un revers de taille pour le président chinois.

Celui-ci veut en effet faire de l’intégration de cette ville un modèle qu’il entend reproduire – voire imposer – à Taïwan. Le 2 janvier, dans un discours au ton martial prononcé au Palais du peuple, à Pékin, Xi Jinping a déclaré que cette île de 23 millions d’habitants, indépendante de facto mais que Pékin considère toujours comme une province chinoise, devait à son tour être régie par la formule « un pays, deux systèmes » en vigueur à Hongkong.

Premier revers sur le front intérieur pour Xi Jinping

Dimanche, les Hongkongais ont signifié qu’à leurs yeux, Pékin ne tenait pas ses engagements. En 1997, la Chine avait accepté que Hongkong devienne une démocratie pleine et entière. Une vingtaine d’années plus tard, les Hongkongais s’aperçoivent qu’au contraire, la Chine communiste veut les absorber, sans même attendre 2047, fin de son engagement à respecter la célèbre formule.

Hongkong devait être un modèle pour les Taïwanais : elle devient un repoussoir. Tous les sondages montrent que la présidente taïwanaise, Tsai Ing-wen, chef de file du Parti indépendantiste (DPP), profite indirectement de la crise de Hongkong. A sept mois de la prochaine élection présidentielle, cette femme, bête noire de Pékin, ne pouvait rêver meilleur argument électoral.

Qui plus est, cette nouvelle révolte des Hongkongais intervient alors que Pékin s’apprête à célébrer en grande pompe les 70 ans de l’arrivée des communistes au pouvoir, le 1er octobre 1949. Manifestement, il y a en Chine-même des millions de personnes pour qui la « nouvelle ère » promise par Xi Jinping fait figure d’ère glaciaire.

Ce revers sur le front intérieur est le premier subi par Xi Jinping depuis son arrivée au pouvoir à la fin de 2012. A dix jours du sommet du G20 à Osaka (Japon), il met le Chinois en difficulté face au président américain Donald Trump. Dimanche, Mike Pompeo, le secrétaire d’Etat américain, s’est fait un plaisir d’annoncer sur Fox News que Donald Trump, « farouche défenseur des droits humains », évoquerait Hongkong lors du sommet.

Une carte supplémentaire dans le jeu de Trump

Plus grave : des élus démocrates et républicains avaient annoncé vendredi que si la région administrative spéciale qu’est Hongkong cessait d’être gouvernée par la rule of law (l’Etat de droit), Washington pourrait remettre en cause les accords économiques qui lient les Etats-Unis à cette île et dont Pékin bénéficie indirectement. Bref, Trump dispose désormais d’une carte supplémentaire dans son jeu.

Le pire pour Xi Jinping est peut-être bien que Pékin n’est pas pour grand-chose dans le fiasco de Carrie Lam. Ces derniers jours, celle-ci a pris sur elle la responsabilité de présenter aux députés de Hongkong ce texte facilitant les extraditions, répondant ainsi à une demande de la communauté internationale.

Jusqu’ici, la plupart des organismes internationaux, comme la Banque mondiale ou le Forum économique mondial, classaient cette place financière parmi les bons élèves en termes de gouvernance. A leurs yeux, celle-ci n’avait qu’un point faible : son absence d’accords d’extradition avec le reste du monde, qui l’empêchait de participer pleinement à la lutte contre le crime organisé et le blanchiment d’argent.

Impasse

C’est pour remédier à cette lacune que l’administration de Hongkong aurait commencé à travailler sur un nouveau dispositif législatif. Mais en mars, un Taïwanais, désormais à Hongkong, reconnaît avoir commis un meurtre dans son île. Or, en l’absence d’accord, impossible de l’extrader.

Carrie Lam a alors décidé de faire adopter en urgence un texte qui concerne les crimes économiques mais également tout une batterie d’autres crimes. La défiance envers Pékin est telle à Hongkong – surtout depuis que la police chinoise enlève, à l’étranger et à Hongkong, des opposants au régime – que très vite les juristes puis les citoyens se sont méfiés de ce texte, rédigé en catimini, qui incluait la Chine continentale et listait plus d’une quarantaine de motifs d’extradition.

Au départ, Pékin, dit-on, n’aurait pas attaché plus d’importance que cela à ce projet, même si le pouvoir voyait d’un bon œil ce dispositif qui lui permettait de rapatrier les auteurs de sorties illégales de capitaux.

Aujourd’hui, la Chine est dans une impasse. Soit elle accède à la demande des Hongkongais et provoque la chute de Carrie Lam, ce qui serait une première. Soit celle-ci garde son poste et les pro-Pékin risquent de perdre les prochaines élections. Dans tous les cas, Xi Jinping a perdu une manche. Même si nul n’imagine que les Hongkongais ont gagné la partie.

16 juin 2019

Malgré le recul du gouvernement sur un projet de loi, nouvelle journée de mobilisation à Hongkong

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Les manifestants réclament le retrait définitif du projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine continentale, ainsi que la démission de Carrie Lam.

La suspension du projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine continentale est une rare concession de la part du gouvernement de Hongkong. Mais elle ne va pas assez loin pour ses opposants. Une nouvelle manifestation monstre est attendue dimanche 16 juin dans cette région administrative spéciale.

Ses organisateurs entendent maintenir la pression sur la chef de l’exécutif pro-Pékin de Hongkong, Carrie Lam, qui a annoncé samedi la suspension du projet controversé, un texte à l’origine depuis une semaine d’une vague inédite de colère et de violences dans l’ancienne colonie britannique.

Les manifestants réclament le retrait définitif de ce texte jugé dangereux pour les droits de l’homme, ainsi que la démission de Mme Lam et ses excuses pour la répression musclée des manifestations par la police ces derniers jours.

Jimmy Sham, du Civil Human Rights Front, a comparé le projet de loi à un « couteau » s’étant abattu sur Hongkong. « Il a presque atteint notre cœur. Maintenant le gouvernement dit qu’il ne l’enfoncera pas davantage, mais il refuse aussi de le ressortir », a-t-il dit devant des journalistes.

Un ressentiment général contre Carrie Lam et Pékin

Dimanche après-midi, la manifestation doit avoir lieu sur l’île de Hongkong entre un parc et le siège du Parlement. Il s’agit du même parcours que celui de la marche qui, une semaine plus tôt, avait selon ses organisateurs rassemblé un million de personnes dans ce territoire de sept millions d’habitants.

Mercredi, Hongkong avait connu les pires violences politiques depuis sa rétrocession à la Chine en 1997. Une nouvelle manifestation rassemblant des dizaines de milliers de personnes avait été dispersée par la police à l’aide de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. La police a justifié la vigueur de son action par les actes de violence perpétrés par certains manifestants. Mais l’opposition l’accuse de prendre prétexte des violences d’une infime minorité pour se déchaîner sur l’ensemble des protestataires, en grande majorité pacifiques.

Déclenché par le projet de loi sur les extraditions, le mouvement de protestation exprime aussi un ressentiment beaucoup plus large de la population de Hongkong contre Carrie Lam et contre Pékin, accusés de rogner depuis des années les libertés dont jouit l’ancien territoire britannique, estiment les analystes.

Des propos de Mme Lam, qui a récemment qualifié les manifestants d’« émeutiers », n’ont rien arrangé. « Les groupes pro-démocratie ne vont pas s’arrêter là. Ils veulent profiter de la dynamique contre Carrie Lam », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) l’analyste politique Willy Lam. « Ils vont maintenir la pression et continuer sur cette lancée. »

De nombreuses inquiétudes autour du projet

Nommée à la tête de l’exécutif par une commission largement composée de loyalistes pro-Pékin, Carrie Lam a affirmé que cette loi sur les extraditions était nécessaire pour empêcher la place financière asiatique de devenir un refuge pour criminels, tout en admettant que son administration avait sous-estimé l’opposition populaire.

Selon ses détracteurs, ce projet placerait la population à la merci du système judiciaire de Chine continentale, opaque et sous influence du Parti communiste. Les milieux d’affaires craignent eux que la réforme nuise à l’image internationale et l’attractivité du centre financier. L’opposition au projet de loi réunit notamment avocats, organisations juridiques influentes, capitaines d’industrie, chambres de commerce, journalistes, militants et diplomates occidentaux.

En vertu du principe « un pays, deux systèmes », l’ancienne colonie britannique continue à jouir de libertés inconnues dans le pays vingt-deux ans après son retour dans le giron chinois. Mais ces dernières années, la disparition de plusieurs libraires et d’un milliardaire chinois – critiques envers Pékin – ont semé le trouble. Ils sont ensuite réapparus en Chine, où ils ont été visés par des poursuites judiciaires.

Si la manifestation de dimanche se déroule dans le calme, « on devrait connaître une trêve dans les mois qui viennent », a estimé l’analyste politique Dixon Sing, interrogé par l’AFP. « Mais la crainte que la loi revienne devant le Parlement et finisse par être votée va rester présente un bon moment. »

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27 mai 2019

La dénucléarisation en Corée du Nord au cœur de la visite de Donald Trump au Japon

Par Philippe Mesmer, Tokyo, correspondance

Encouragé par le président américain, en visite au Japon, le premier ministre japonais souhaite désormais rencontrer le dirigeant nord-coréen.

Après un dimanche consacré au golf et à la remise d’une « Coupe du président des Etats-Unis » au vainqueur du tournoi d’été de sumo à Tokyo, Donald Trump devait être, lundi 27 mai, le premier dirigeant étranger à rencontrer le nouvel empereur du Japon, Naruhito. La visite d’Etat du président américain, arrivé samedi, ne devait entrer dans le vif du sujet que lundi, lors d’un sommet avec le premier ministre japonais, Shinzo Abe. Au menu : le commerce, la Chine, le G20, prévu à Osaka fin juin, et bien sûr l’Iran et la Corée du Nord. Tout est fait pour souligner la proximité entre les deux dirigeants et la solidité de l’alliance militaire nippo-américaine.

M. Abe soigne aussi sa popularité à l’approche des élections sénatoriales de juillet. Donald Trump a choisi de ne pas embarrasser sa campagne électorale avec les questions commerciales, sur l’agriculture et l’automobile notamment, qui font l’objet d’âpres négociations. « L’essentiel attendra l’issue des élections de juillet », a-t-il tweeté après la partie de golf. Le 25 mai, le ministre japonais du commerce, Toshimitsu Motegi, avait admis qu’un accord commercial ne serait pas pour cette fois.

Les deux dirigeants devaient donc se concentrer sur l’Iran et surtout la Corée du Nord. Les tensions entre Américains et Iraniens embarrassent Tokyo. M. Abe propose de se rendre à Téhéran en juin pour jouer les intermédiaires et attend le feu vert de Washington.

Baisse des tensions

Réticent dans un premier temps, M. Abe se démène pour rencontrer le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un. Début mai, il parlait de « briser la défiance actuelle » et se disait prêt à une entrevue « sans conditions préalables ». Cette position marquait une rupture. La baisse des tensions amorcée début 2018 dans la péninsule coréenne n’avait pas convaincu Tokyo de sortir de la « pression maximale » imposée au régime de Pyongyang pour le contraindre à renoncer au nucléaire et à ses missiles, et à résoudre la question des Japonais enlevés.

Or Kim Jong-un a, depuis, rencontré tous les dirigeants des pays impliqués dans les pourparlers à six (Corées, Etats-Unis, Chine, Russie et Japon) – cadre de négociations sur le nucléaire nord-coréen entre 2003 et 2009 organisées par Pékin – sauf le premier ministre nippon.

Conscient de son isolement, Shinzo Abe a modéré ses positions, s’ouvrant au dialogue. Depuis juillet 2018, plusieurs rencontres informelles nippo-nord-coréennes ont eu lieu au Vietnam et en Mongolie, entre autres. En 2019, le Japon a refusé de s’associer à l’Union européenne pour présenter à l’ONU une motion sur les droits humains en Corée du Nord. La référence aux « pressions maximales » a disparu de son livre bleu sur la diplomatie, publié en avril.

Shinzo Abe cherche à rencontrer le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, pour résoudre la question des Japonais enlevés dans les années 1970-1980 par des agents de Pyongyang, sujet essentiel pour lui. Il a le soutien de Donald Trump qui devait rencontrer à Tokyo des proches de ces kidnappés. Le 25 mai, le conseiller de la Maison Blanche à la sécurité nationale, John Bolton, voyait dans un sommet Abe-Kim « une aide potentiellement importante » à la dénucléarisation de la Corée du Nord. Pour lui, une telle rencontre « serait certainement dans l’intérêt de la Corée du Nord ».

Impasse des négociations américano-nord-coréennes

Le renoncement à conditionner un sommet Abe-Kim à des avancées sur la question des enlèvements, semble-t-il sur le conseil de Washington, sera-t-il suffisant pour convaincre M. Kim ? En mars, après l’échec du deuxième sommet américano-nord-coréen d’Hanoï (Vietnam), Pyongyang avait reproché à Tokyo de passer par le président américain pour soulever la question des enlèvements.

Le quotidien officiel Rodong Sinmun écrivait que Tokyo « ne devait pas rêver de traiter avec » la Corée du Nord avant d’avoir « payé intégralement pour ses crimes passés », à savoir l’occupation de la péninsule coréenne entre 1910 et 1945. Au cours des négociations informelles, la partie nord-coréenne aurait exigé des dédommagements du Japon.

L’autre difficulté pour M. Abe pourrait être l’impasse actuelle des négociations américano-nord-coréennes et le regain de tension provoqué par les essais de missiles nord-coréens des 4 et 9 mai. John Bolton a, pour la première fois samedi, parlé de ces essais comme d’une « violation des résolutions du Conseil de sécurité ».

Donald Trump, de son côté, continue de tabler sur le dialogue et de minimiser la portée de ces tirs : « La Corée du Nord a utilisé des armes légères qui ont perturbé certains membres de mon équipe et d’autres, mais pas moi. J’ai confiance que le dirigeant Kim tiendra sa promesse envers moi », a-t-il tweeté le 26 mai.

26 mai 2019

Donald Trump est au Japon

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Photo ci-dessus : statuette de sumo offerte à Jacques Chirac au cours d'un de ses voyages au Japon. Photo réalisée au Musée du Président Chirac à Sarran en Corrèze.

26 mai 2019

Donald Trump est au Japon

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