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Jours tranquilles à Paris
21 août 2020

Soupçon d’empoisonnement de l’opposant russe Navalny

L’opposant russe Alexeï Navalny a été placé, jeudi, en réanimation dans un état grave dans un hôpital en Sibérie, après s’être senti mal, son entourage criant à l’empoisonnement.

Selon sa porte-parole, Kira Iarmych, l’avion dans lequel voyageait le principal opposant au Kremlin se rendait de Tomsk à Moscou, lorsqu’il a dû effectuer un atterrissage d’urgence en raison de la dégradation subite de son état de santé. « Je suis sûr que c’était un empoisonnement intentionnel », a-t-elle déclaré à la radio Echo de Moscou.

L’opposant de 44 ans se trouve en réanimation au service de toxicologie de l’hôpital d’Omsk, a indiqué l’agence de presse publique Tass. « Alexeï est toujours inconscient, il est connecté à un respirateur artificiel. L’hôpital a appelé la police à notre demande », a précisé Mme Iarmych sur Twitter. « Nous pensons qu’Alexeï a été empoisonné avec quelque chose mélangé à son thé qu’il a bu à l’aéroport. Il n’a rien bu d’autre ce matin. Tout de suite après le décollage, il a perdu conscience », a-t-elle précisé. Anatoli Kalinitchenko, le vice-directeur de l’hôpital des urgences a, quant à lui, affirmé qu’il était trop tôt pour confirmer la thèse de l’empoisonnement.

« Qu’il ait donné l’ordre personnellement ou pas, la responsabilité repose sur lui », a dénoncé Mme Iarmych, pointant du doigt le président Vladimir Poutine. Par la voix de son porte-parole, Dmitri Peskov, le Kremlin a dit souhaiter à Alexeï Navalny, « comme à n’importe quel citoyen russe », un « prompt rétablissement ». Il a également assuré que le Kremlin était prêt à apporter son aide pour que l’opposant soit transféré à l’étranger.

L’ONG allemande de défense des Droits de l’Homme Cinema for Peace, a annoncé, jeudi soir, être en train de tenter de faire hospitaliser en Allemagne Alexeï Navalny. Emmanuel Macron a déclaré que « Toute la clarté devra être faite », tandis qu’Angela Merkel, qu’il rencontrait jeudi à Brégançon, a précisé que « Navalny pourra recevoir toute aide médicale en France ou en Allemagne ».

Déjà empoisonné en juillet 2019 ?

Principal opposant du Kremlin, dont les publications dénonçant la corruption des élites russes sont abondamment partagées sur les réseaux sociaux, Alexeï Navalny a déjà été victime d’attaques physiques par le passé. En 2017, il avait notamment été aspergé de produit antiseptique dans les yeux à la sortie de son bureau à Moscou.

En juillet 2019, tandis qu’il purgeait une courte peine de prison, il avait été traité à l’hôpital après avoir soudainement souffert d’abcès sur le haut du corps, dénonçant un empoisonnement alors que les autorités évoquaient une « réaction allergique » et avaient assuré n’avoir retrouvé « aucune substance toxique ».

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20 août 2020

Barack Obama attaque frontalement Donald Trump.

barack

“Même s’il a critiqué ses politiques dans le passé”, le 44e président américain cite rarement le nom de son successeur, signale USA Today. Mercredi soir, pour le troisième jour de la convention démocrate, Barack Obama n’a pas hésité à mentionner directement Donald Trump. Un homme qui a fait de la présidence “un show de télé-réalité supplémentaire pour obtenir l’attention qu’il désire”, selon l’ex-locataire de la Maison Blanche. “J’ai espéré que Donald Trump montre qu’il était prêt à prendre sa fonction sérieusement (…) Il ne l’a pas fait”, a-t-il poursuivi. 170 000 morts et des millions d’emplois perdus à cause du coronavirus en sont les conséquences dit-il. Alors “la démocratie est en jeu” dans cette élection. Le prix Nobel de la paix a par ailleurs salué son “frère” Joe Biden. “Il a fait de moi un meilleur président. Il a la personnalité ainsi que l’expérience pour faire de nous un meilleur pays”. Son discours prononcé à Philadelphie a précédé celui de Kamala Harris qui est devenue officiellement la colistière de Joe Biden la première femme noire à apparaître sur un ticket présidentiel.

20 août 2020

Russie : l'opposant Alexeï Navalny hospitalisé en soins intensifs, sa porte-parole dénonce un empoisonnement

navalny

L'activiste anti-corruption russe Alexeï Navalny lors d'un rassemblement commémorant les 5 ans de l'assassinat de l'opposant Boris Nemtsov à Moscou (Russie), le 29 février 2020. (SHAMIL ZHUMATOV / REUTERS)

L'activiste anti-corruption russe Alexeï Navalny, un des principaux opposants au président Vladimir Poutine, est hospitalisé "en soins intensifs", a annoncé sa porte-parole sur Twitter, jeudi 20 août. "Nous supposons qu'Alexeï a été empoisonné", écrit cette dernière, qui indique que Navalny s'est d'abord "senti mal" dans un avion, et qu'il a depuis perdu connaissance. Il a été placé sous respiration artificielle, a-t-elle ajouté.

L'agence de presse d'Etat Tass a confirmé qu'Alexeï Navalny avait été admis à l'unité de soins intensifs du service de toxicologie aux urgences de l'hôpital d'Omsk, en Sibérie.

L'an dernier, l'opposant avait déjà fait état de soupçons d'empoisonnement à son encontre, démentis par un médecin, alors qu'il se trouvait en détention. "De toute évidence, ils lui ont fait la même chose" à nouveau, écrit la porte-parole, Kira Yarmysh, jeudi.

Son avion a atterri d'urgence à Omsk

"Ce matin, Navalny rentrait à Moscou de Tomsk", explique-t-elle. Tomsk est située en Sibérie occidentale, à 3 600 km à l'est de Moscou. "Pendant le vol, il s'est senti mal. L'avion a atterri de toute urgence à Omsk", également située en Sibérie, a expliqué la porte-parole. "Nous supposons qu'Alexeï a été empoisonné avec quelque chose de mélangé dans le thé", la "seule chose" qu'il ait bue jeudi matin, a-t-elle ajouté.

L'avocat de 44 ans, dont les publications anti-corruption sont abondamment partagées sur les réseaux sociaux, a déjà souffert d'attaques physiques dans le passé. Il avait notamment été aspergé dans les yeux par un produit désinfectant à la sortie de son bureau en 2017.

Alexeï Navalny, ses partisans et leurs familles font régulièrement l'objet d'interpellations, de perquisitions et de pressions policières dans toute la Russie. Sa candidature à l'élection présidentielle de 2018 avait été rejetée en raison d'une précédente condamnation.

20 août 2020

Afghanistan : «Qui attaque des nouveau-nés et des mères ?»

Par Luc Mathieu, envoyé spécial à Kaboul, photos Sandra Calligaro — Libération

Le matin du 12 mai, une maternité de Kaboul subissait une violente attaque dans laquelle 24 personnes ont été tuées. Après plusieurs semaines d’enquête, «Libération» est parvenu à identifier les probables assaillants, et à déterminer ce qui a motivé le massacre.

Sakina devait sortir de la maternité le 12 mai, à 11 heures. Sa fille Zara, son sixième enfant, était née deux jours plus tôt. L’accouchement avait été long et Zara avait souffert de problèmes respiratoires. Mais elle se portait mieux. Dans la nuit du 11 au 12 mai, vers 3 heures du matin, Sakina a appelé son mari : «Viens nous chercher tout à l’heure, ils nous laissent rentrer à la maison, le bébé va bien.» Mohamed Amin était là, dès l’aube, devant l’entrée de la maternité de Médecins sans frontières (MSF) à Dasht-e-Barchi, quartier pauvre de l’ouest de Kaboul. Il a attendu dehors, les hommes ne sont pas admis dans les maternités afghanes. A 9 h 50, il a entendu les premiers coups de feu. Il s’est précipité, mais des policiers l’ont empêché d’entrer. Les tirs ont redoublé, des explosions ont retenti. Il a appelé sa femme des dizaines de fois. Elle n’a jamais répondu. Dans l’après-midi, il a erré d’hôpital en hôpital, priant qu’elle ne soit que blessée. Il a fini dans celui où avaient été déposés les morts. Sakina était là, yeux ouverts, une oreille ensanglantée et un trou à l’arrière du crâne, tuée d’une balle dans la tête. Zara, sa fille, était indemne.

Depuis, Amin reste seul, prostré dans son salon aux murs de béton sale à Bagh Qazi, à l’extrémité de Dasht-e-Barchi, où vivent un million de Hazaras, ethnie minoritaire chiite. Sa maison est adossée à une montagne sèche. Derrière se déploie la dangereuse et talibane province du Logar. Devant, depuis la fenêtre du salon, la vue sur Kaboul est splendide. C’est une maison de deux pièces, sans eau courante et avec une batterie de voiture posée sur un rebord de fenêtre pour compenser les coupures d’électricité. Il y a une petite cour au sol de poussière, typique des habitations vétustes de la ville. Aucune route n’y mène, seulement un sentier et ses ornières.

Amin est dévasté. Assis en tailleur sur un tapis, il ne cesse de s’affaisser, épaules voûtées, tête baissée et voix faible qui se meurt parfois dans les aigus. Il pleure souvent et sèche ses larmes avec son keffieh. «Quand on s’est mariés, j’avais 17 ans et elle 16. Elle était courageuse et humble. Il y a un mois, pendant le confinement, je ne pouvais pas travailler. J’allais ramasser des plantes sèches sur la montagne, elle se débrouillait pour faire du feu et cuire du pain. Elle me poussait, elle avait toujours des idées pour que notre vie soit plus facile.» Depuis l’enterrement, le mari de Sakina vit seul. Ses enfants sont restés dans sa belle-famille dans la province de Ghazni. Il doit les récupérer dans quelques semaines. «Comment vais-je faire ?» demande-t-il. Il n’a pas d’argent. Il travaille au jour le jour et collecte de la ferraille dans des décharges et des immeubles abandonnés. Cela lui rapporte 6 000 afghanis (67 euros) par mois.

Même dans un pays comme l’Afghanistan, même dans une ville comme Kaboul où les attentats sont devenus une norme, l’attaque du 12 mai est d’une sauvagerie effarante. Jamais une maternité n’avait été visée, jamais des tireurs n’avaient assassiné des femmes prêtes à accoucher, une par une, lit par lit, laissant leur bébé mourir avant d’avoir pu naître. L’attentat a tué 24 personnes, dont 16 mères, une sage-femme et deux enfants de 7 ans.

2020/08/24. Kaboul, Afghanistan. Mohamad Amir (34 ans) a perdu sa femme dans l'attaque de la maternité MSF le 12 mai dernier.  Il a envoyé ses 6 enfants, dont le nouveau-né, chez son frère en province, pour que sa belle-soeur s'en occupe. Depuis, incapable de travailler, il reste la plupart du temps seul dans sa petite maison sur les hauteurs de Dasht-e Bartchi. Quand il évoque Sakina, sa femme défunte, sa voix se brise, ses mains tremblent, triturent son cheche. "Pourquoi est-ce toujours les meilleurs qui Mohamed Amin, chez lui, le 28 juillet. Sa femme Sakina devait quitter la maternité le matin de l’attaque. Photo Sandra Calligaro pour Libération

Amin n’est pas que fracassé par la tristesse, il est aussi furieux. Il sait qu’en tant que Hazara, il est une cible. Les talibans les honnissent et les jihadistes de l’Etat islamique (EI) les haïssent ; ils sont chiites, et donc impies. Depuis que Daech s’est implanté en Afghanistan en 2015, les Hazaras n’ont jamais été autant visés par des attentats : une manifestation en 2016, un centre culturel en 2017, un club de sport en 2018, des étudiants dans un bus en 2019, un mariage et une cérémonie pour l’anniversaire d’une figure hazara en 2020. «Oui, c’est sûrement Daech qui a attaqué la maternité. Ou les talibans, ou quelqu’un d’autre, comment je pourrais savoir ? Je n’attends rien du gouvernement, ce sont des traîtres, ils ne s’intéressent qu’à eux, qu’à leurs intérêts. Il faut que la communauté internationale se charge de l’enquête. Et après, je voudrais que le responsable soit amené ici, dans ce salon, juste quelques secondes. Je lui dirais : "Tu vois ma maison, tu vois comment on vit. Pourquoi tu as tué ma femme ?" Je voudrais qu’il comprenne que je brûle comme du bois sec.»

Personne n’amènera l’organisateur de l’attaque chez Amin. L’attentat n’a pas été revendiqué - les talibans ont nié catégoriquement en être les auteurs - et l’enquête n’est pas finie. «Vous savez, elle ne le sera peut-être jamais, dit un conseiller de la présidence afghane. Souvent, les investigations sur les attentats n’aboutissent pas. Le NDS [le National Directorate of Security, les services de renseignement afghans, ndlr] travaille, mais quand leur piste aboutit au Pakistan, c’est fini, ils ne peuvent pas aller plus loin. C’est vrai que cette attaque devrait déclencher une enquête internationale. Mais qui s’en soucie ? Rien ne se passera, tout le monde a déjà oublié.» MSF a mené ses propres investigations. L’ONG n’a pas pu conclure formellement à la responsabilité de tel ou tel groupe. «Nous avons les versions émises par différentes parties qui ne concordent pas. Et nous n’avons pas de preuves», expliquait à la mi-juillet Françoise Bouchet-Saulnier, directrice juridique de MSF.

Libération a eu accès à l’enquête des services de renseignement afghans. En la croisant avec les récits de victimes, les analyses de hauts responsables du gouvernement et de diplomates, il est possible de pointer le responsable : l’Etat islamique (EI). Et un mobile : la vengeance. Deux femmes enceintes avaient été tuées début mai lors d’une opération des forces de sécurité contre une cellule de Daech dans la région de Kaboul. Mais selon le NDS, l’EI n’a pas agi seul. Des hommes du réseau Haqqani, un groupe afghan allié aux talibans, ont assuré la logistique. Le Lashkar-e-Taiba, une organisation jihadiste pakistanaise, aurait agi, pour sa part, comme commanditaire. Un «triangle», comme dit un responsable du NDS, qui explique aussi la diversité des réactions officielles, de la présidence afghane au département d’Etat américain, chacun pouvant pointer le responsable qui l’arrange. Trois mois après les faits, il est possible de retracer l’attaque et d’expliquer pourquoi une maternité a pu être visée et des femmes tuées alors qu’elles venaient d’accoucher ou s’apprêtaient à le faire.

1. L’attaque

Le 12 mai, peu avant 9 h 50, un chant religieux, déclamé en pachtou, est entendu sur le canal 1 du système radio de Médecins sans frontières. Quelques minutes plus tard, un homme, vêtu d’un shalwar kamiz bleu et d’un haut d’uniforme de la police, arrive devant la haute porte métallique blanche qui marque l’entrée de l’hôpital dit des «100 lits» de Dasht-e-Barchi. La maternité est au bout de l’allée, à une cinquantaine de mètres à l’intérieur de l’enceinte. L’homme tire sur un garde, non armé, qui tombe.

Jamila Hussein, 60 ans, est là, assise sous l’auvent métallique à l’entrée de l’hôpital. Elle est venue avec ses petits-enfants, Maadi et sa cousine Razia, 7 ans tous les deux, qui doivent se faire vacciner. Elle voit arriver l’assaillant armé d’une kalachnikov. «Il était jeune, à peine adulte. Il m’a regardé et il a tiré. Maadi a fait un drôle de bruit, comme s’il avait reçu un énorme coup de poing dans le ventre.» Jamila, touchée par deux balles dans les jambes, se penche vers ses petits-enfants. Elle a le temps de voir passer deux autres hommes : «Ils portaient un uniforme de la police et avaient des armes, ils étaient avec celui qui a tiré, ils le suivaient à un ou deux mètres. C’était une équipe. Ils sont passés sans nous regarder.» Les deux enfants mourront quelques minutes plus tard.

24/07/2020. Kaboul, Afghanistan. Mohamad Assef a perdu son fils Mahdi, âgé de 7 ans, lors de l'attaque de la maternité MSF le 12 mai 2020. Il était venu se faire vacciner à l'hôpital avec sa grand-mère. Sa petite soeur Mahdia ne sait pas qu'il est décédé, ses parents lui ont dit que son frère était parti en pélerinage à Kerbala. Depuis, elle attend son retour, et passe son temps sur le vélo de son frère, où à côté.Le père de Maadi, 7 ans. Sa petite sœur Mahdia ne sait pas que son frère a été tué et pense qu’il est parti en «pèlerinage». Photo Sandra Calligaro pour Libération

Ghulam Reza Barati, qui fait office de chef informel de la communauté hazara du quartier, était juste à côté de l’hôpital quand il entend les premiers coups de feu. Il voit l’homme en shalwar kamiz bleu qui court dans l’allée. «J’avais mon pistolet, je lui ai tiré dessus.» L’assaillant continue à courir. Il n’hésite pas, il sait où il va : au bout de l’allée, à la maternité.

Dans le bâtiment à un étage, l’alarme hurle. Les employés ont suivi une formation de sécurité. Ils savent qu’il faut se précipiter avec les patients qui le peuvent dans les «safe rooms», les chambres fortes. Il y en a plusieurs, réparties dans les deux niveaux. Elles sont fermées par d’épaisses portes métalliques qui résistent aux balles. Au total, plus de 90 personnes, dont 9 patientes, s’y réfugient. Il n’est pas encore 10 heures.

Les premiers policiers arrivent. Ils se méfient, ne connaissent pas les assaillants ni les types d’armes qu’ils utilisent. Ils restent à distance. A 10 h 29, la CRU (Crisis Response Unit), les forces spéciales afghanes, est prévenue. A l’intérieur de la maternité, le carnage a commencé. Au moins un assaillant est entré en tirant sur la serrure de la porte d’entrée. Il s’engouffre dans une première salle, où attendent des femmes qui doivent accoucher. Il ouvre le feu, trois sont tuées. Il continue dans le couloir et rejoint la salle «post-natale», où se reposent celles qui viennent de donner naissance. Il s’approche des lits. Une mère qui s’était cachée sous le lit est abattue. Mais il en épargne une autre : elle l’a supplié, en pachtou, de ne pas tirer.

Depuis la chambre forte où elle s’est réfugiée avec 13 autres personnes, Chékaba (1), médecin, entend les coups de feu. Les assaillants se rapprochent. L’un d’eux frappe à la porte blindée. Chékaba l’interpelle : «Nous sommes des employés de MSF, qu’est-ce que vous voulez ?» «Si vous êtes des médecins et des infirmières, sortez», répond l’homme. «Il parlait très mal dari, c’était très haché, très lent. A un moment, il est passé au pachtou, mais ce n’était pas un pachtou comme on le parle en Afghanistan. Il avait un accent pakistanais», raconte Chékaba. L’homme est bien renseigné, il connaît le nom et la fonction de plusieurs employés. Elle l’entend parler avec un autre homme. «Ils étaient au moins deux, c’est sûr, j’ai aussi entendu leurs pas quand ils se sont éloignés. Ils n’ont pas essayé de forcer la porte.»

A l’extérieur de la maternité, l’opération militaire se met en place. A 11 h 46, des forces spéciales de l’Otan arrivent. Les soldats sont américains et anglais. L’assaut est dirigé par des Norvégiens. Ils s’approchent par l’arrière de la maternité, par le portail de la «guest house», la maison où sont logés les employés étrangers de MSF. Ils ont des drones et un robot anti-explosifs. A 13 heures, le chef de la sécurité de MSF reçoit un message : «N’ouvrez pas [les chambres fortes]. Ça va être violent.» Les tirs et les explosions redoublent. Devant l’entrée, deux voitures brûlent sur le parking. A côté, un corps. C’est celui de Maryam, une sage-femme. Elle n’a pas voulu s’échapper, elle est restée avec une patiente dans un préfabriqué installé dans la cour. «Elle était complètement carbonisée. Je la connaissais bien, je l’ai reconnue à sa bague», dit Ghulam Reza Barati, le chef de la communauté.

Des snipers de l’Otan se positionnent sur des toits. Les soldats afghans tirent sans discontinuer. Deux hélicoptères tournent au-dessus de la maternité. Un assaillant est au rez-de-chaussée et tente de s’échapper. Mais il est coincé, il n’y a pas de cave. Il finit par se retrouver dans un cul-de-sac, un réduit qui donne sur la cour. C’est là que son corps sera retrouvé. Une photo le montre torse nu, sans blessures apparentes. Ses vêtements ont été découpés par les forces spéciales, qui étaient persuadées de trouver une ceinture d’explosifs. Il n’en avait pas. Selon une source occidentale, il était âgé de 19 ans.

Depuis sa chambre forte, Chékaba entend que les tirs ont cessé. Elle entrouvre la porte blindée et aperçoit des soldats étrangers. Elle sort et découvre le carnage, les impacts de balles, les traînées de sang et les corps des femmes, certaines défigurées. Elle découvrira plus tard que dans une autre chambre forte, un bébé est né. La sage-femme a coupé le cordon ombilical avec ses mains. Il est un peu plus de 14 h 30, l’attaque a duré près de cinq heures.

2. Les auteurs

Une vengeance. Les enquêteurs du NDS et des responsables étrangers en sont persuadés : l’attaque contre la maternité a été décidée en représailles à une opération des forces afghanes contre une cellule de l’Etat islamique. Il ne s’agit pas d’une construction intellectuelle ou d’une intuition. Selon nos informations, une «interception téléphonique», une écoute, le prouve.

Apparu en 2015 dans le pays, l’Etat islamique de la province du Khorasan, le nom de la branche dans la région, a été largement affaibli par des offensives militaires en 2018 et 2019. Il a perdu ses fiefs dans la province de Nangarhar (Est) et s’est replié plus au nord, dans la Kunar. Mais le groupe conserve des cellules dans plusieurs grandes villes, dont Kaboul, et reste capable de commettre des attentats. Dans les semaines qui ont précédé l’attaque, le NDS a lancé plusieurs opérations. Début avril, le chef de l’EI en Afghanistan, Aslam Farooqi, est arrêté dans la province de Kandahar (Sud). Le 5 mai, des raids visent trois cellules à Kaboul et dans le district de Shakar Dara, à une vingtaine de kilomètres au nord. Après cinq heures de combats, le NDS annonce que cinq «combattants» sont tués. Parmi eux, trois femmes, dont deux étaient enceintes. «C’est là qu’est l’explication, dit une source sécuritaire. Ils se sont vengés en visant une maternité. D’autant que ce n’était pas une cible compliquée à frapper.»

L’un des auteurs a été identifié : Abou Omar, aussi appelé Nour Akbar. Agé d’une vingtaine d’années, il avait fait allégeance à Daech dans la province de Kunar il y a environ un an. Il a ensuite disparu en Iran, affirme une source au NDS, avant de revenir en avril.

Le réseau Haqqani est aussi impliqué, selon l’enquête des services de renseignement afghans. Le groupe doit son nom à son fondateur, Jalaluddin Haqqani, un chef de guerre allié des Etats-Unis durant les combats contre l’armée rouge. Il s’est ensuite allié aux talibans après l’intervention de l’Otan. C’est lui qui, à partir de 2005, a commencé à commanditer des attentats-suicides en Afghanistan, jusque-là épargné. L’organisation est contrôlée par les services de renseignement militaire pakistanais (ISI). A sa mort, Jalaluddin Haqqani a été remplacé par l’un de ses fils, Sirajuddin, qui est aussi devenu numéro 2 des talibans.

«Nous avons arrêté deux hommes, Atahullah et Rafiullah, originaires du nord du pays, qui ont servi de facilitateurs pour l’attentat contre MSF. Ils appartiennent au réseau Haqqani, il n’y a aucun doute», affirme un officiel du NDS. L’hypothèse est plausible, le réseau dispose de cellules capables d’organiser ou d’aider à la préparation d’attentats, en fournissant caches, armes, et même des kamikazes. L’organisation est-elle pour autant directement impliquée ? «Il faut faire attention. Les facilitateurs du réseau Haqqani peuvent aussi se comporter en hommes d’affaires qui font payer leurs services à qui le demande. Cela ne signifie pas que la direction du mouvement était au courant et que les talibans soient impliqués par ricochet», explique une source occidentale.

27/07/2020. Kaboul, Afghanistan. Les abords de l' "hôpital des 100 Lits", dans lequel MSF soutenait la maternité. le 12 mai dernier, une attaque jusqu'à présent non revediquée, a fait 24 morts: principalement des mères en train d'accoucher et nouveaux nés, mais aussi une sage-femme de MSF et deux enfants venus se faire vacciner.Aux abords de l’hôpital des «100 lits», dans le quartier pauvre de Dasht-e-Barchi (ouest de Kaboul), le 27 juillet. Photo Sandra Calligaro

Reste une question : comment Daech a-t-il pu frapper alors que son chef en Afghanistan avait été arrêté un mois plus tôt ? «L’EI est très hiérarchisé dans la région. La perte de son dirigeant a forcément perturbé le fonctionnement du groupe, surtout pour décider d’une attaque aussi symbolique. Le plus probable est qu’une autre organisation a été impliquée», explique le chercheur Hussein Ehasani, auteur d’une étude sur l’EI en Afghanistan. L’analyse est corroborée par un officiel du NDS et par l’un de ses anciens directeurs. Selon eux, l’ordre de frapper est venu du Lashkar-e-Taiba, une organisation jihadiste pakistanaise. Il y a une connexion directe : le chef de l’EI arrêté en avril, Aslam Farooqi, avait été l’un de leurs commandants. «Ils fonctionnent ensemble, dans un triangle. Le Lashkar-e-Taiba a commandité, le réseau Haqqani a aidé, et des hommes de l’EI ont frappé. On a vu cette configuration dans plusieurs autres attentats récents. Parfois, Daech ne fait même qu’endosser la responsabilité, ce sont des gens de Haqqani qui commettent l’attaque», dit un officiel du NDS.

Trois mois après les faits, il demeure de nombreuses zones d’ombre et de mystères. Combien y avait-il d’assaillants ? Cinq, selon le NDS. Trois, selon des sources diplomatiques. Mais pourquoi un seul corps a-t-il été vu par les employés de MSF lorsqu’ils sont sortis des chambres fortes ? Les autres se sont-ils échappés ? Ou ont-ils tous été tués, comme l’affirment les services afghans ? Et comment étaient-ils aussi bien renseignés ? Depuis combien de temps la maternité était-elle devenue une cible potentielle ? Qui la surveillait ? Pourquoi l’Etat islamique n’a-t-il pas revendiqué l’attaque ?

MSF n’a pas attendu d’avoir toutes les réponses. Le 15 juin, l’ONG a annoncé qu’elle retirait ses équipes de la maternité. «Des murs plus hauts et des portes de sécurité plus épaisses n’empêcheront pas de tels actes de se reproduire», a dit son directeur général, Thierry Allafort-Duverger. Le gouvernement afghan est censé prendre le relais et remplacer les médecins. «Il faudra au minimum un an, un an et demi, pour recruter et se réorganiser. Et encore, c’est optimiste, dit un responsable du ministère de la Santé. Il faut que MSF comprenne précisément ce qu’il s’est passé et que le gouvernement s’engage à les protéger. Alors ils pourront revenir. Il le faut, un million de personnes, les habitants de Dasht-e-Barchi, dépendent d’eux.»

3. Les récupérations politiques

Comme après chaque attentat majeur, les condamnations se succèdent. «Qui attaque des nouveau-nés et des mères ? Qui fait cela ? Le plus innocent des innocents, un bébé ! Pourquoi ?» s’indigne sur Twitter Deborah Lyons, chef de la mission des Nations unies en Afghanistan. Dans un communiqué, le Quai d’Orsay présente ses condoléances aux familles des victimes. Les réactions sont d’autant plus vives qu’un autre attentat, revendiqué par l’EI, a visé les funérailles d’un chef de la police dans la province de Nangarhar (Est), tuant au moins 25 personnes. Comme si aucune étape du cycle de la vie, de la naissance à la mort, ne pouvait être épargnée en Afghanistan. Aux condamnations d’usage se superposent les réactions politiques. Dans un discours télévisé, le président afghan accuse non seulement l’Etat islamique, mais aussi les talibans. Et il ordonne aux forces de sécurité «de mettre fin à leur posture de défense active, de retourner à leur posture offensive, et de reprendre leurs opérations contre l’ennemi». Son vice-président, Amrullah Saleh, est encore plus vindicatif : «Les terroristes talibans, leurs alliés présents et passés, et leurs jumeaux idéologiques ont attaqué une maternité et des funérailles… Voilà le comportement des nouveaux talibans après qu’ils ont suivi des cours d’humanité à Doha.» Le message est alambiqué mais transparent : c’est une charge contre l’accord signé fin février au Qatar entre les Etats-Unis et les talibans. Après dix-neuf ans de guerre, Washington a accepté de fixer un calendrier de départ de ses troupes. Les talibans ont gagné.

Cet accord a rendu furieux la présidence afghane. Ashraf Ghani n’a non seulement pas été consulté, mais il s’est vu intimer l’ordre par les Etats-Unis de libérer 5 000 prisonniers insurgés et de démarrer un processus de paix. Il a tenté de résister, de fixer ses conditions, mais Washington, via son émissaire Zalmay Khalilzad, lui rappelle régulièrement qu’il ne peut pas s’opposer à la volonté américaine. «Ghani et une partie de son gouvernement ont tout fait pour impliquer les talibans dans l’attaque. Ils veulent que ce soit eux pour reprendre la main et ne pas démarrer les discussions de paix. Ghani est prêt à tout pour rester au pouvoir, chaque jour passé au palais présidentiel est une victoire pour lui», explique une source diplomatique. Les talibans, eux, ont nié toute implication. «Nous ne pourrions même pas penser à attaquer une maternité et des funérailles», a déclaré leur porte-parole au Qatar, Suhail Shaheen.

Les responsables américains en prennent note et réagissent à l’inverse du gouvernement afghan : ils accusent l’Etat islamique. Le secrétaire d’Etat, Mike Pompeo, va jusqu’à déclarer : «Les talibans et le gouvernement afghan devraient coopérer pour amener les responsables devant la justice.» Le 15 mai, l’émissaire américain Zalmay Khalilzad, maître d’œuvre de l’accord avec les insurgés, affirme que Washington a conclu à la responsabilité de l’EI et dit aux Afghans de ne pas tomber «dans le piège qui leur est tendu». «Les Afghans doivent se rassembler [et] poursuivre une opportunité historique de paix. Plus d’excuses. Les Afghans, et le monde, méritent mieux», conclut-il. Les pourparlers entre le gouvernement afghan et les talibans étaient censés démarrer le 10 mars. Ils pourraient finalement débuter courant août.

Mohamed Amin, le mari de Sakina, ne suit pas les tractations. Il n’espère pas la paix, il ne connaît que la guerre. Depuis la mort de sa femme, il ne dort plus. «Je pense sans arrêt à ce qu’elle me disait quand je partais travailler : "Fais attention, c’est Kaboul, il y a des attentats et des voitures piégées." Elle s’inquiétait sans arrêt pour moi, pour les enfants. Mais pas pour elle.»

(1)     Le prénom a été changé.

19 août 2020

Coup d’État - Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta démissionne sous la contrainte des militaires

mali president

COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

Contesté dans la rue depuis plusieurs semaines, “IBK” a été renversé mardi 18 août par un coup d’État militaire après une mutinerie acclamée par des manifestants. Une nouvelle crise qui inquiète et fragilise les pays voisins du Mali, engagés à ses côtés dans une lutte contre la menace jihadiste.

Le Mali s’est réveillé mercredi matin sans président. Ibrahim Boubacar Keïta dit “IBK” a été contraint de démissionner dans la nuit, après avoir été arrêté plus tôt dans la journée avec son Premier ministre Boubou Cissé, par des soldats mutins, rapporte le site d’information malien MaliJet.

Visiblement fatigué, muni d’un masque de protection chirurgical, Ibrahim Boubacar Keïta a expliqué vers minuit, dans une allocution télévisée, qu’il n’avait pas d’autre choix que de se soumettre à la volonté de son armée en révolte pour éviter que du sang ne soit versé. Le chef de l’État a aussi annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale.

“Les contempteurs du régime semblent avoir gagné, même si en fait c’est tout le Mali qui perd”, soulignait en début de soirée L’Observateur Paalga, après avoir appris l’arrestation du président malien. “Ibrahim Boubacar Keïta fait peut-être partie de l’histoire du Mali, mais les problèmes du pays, eux, restent entiers particulièrement l’insécurité endémique dans laquelle il est plongé depuis bientôt une décennie. Et il faudra bien plus que la déchéance de son premier magistrat pour en venir à bout”, analyse-t-il.

“Un coup d’État au Mali pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour les pays voisins”

Ce putsch intervient alors que le Mali et ses voisins sont confrontés depuis des années à des attaques jihadistes. Certains redoutent que le coup d’État de mardi ne vienne déstabiliser un peu plus la région. “On ne saurait remporter la guerre face aux terroristes déterminés à vaincre, avec une armée qui semble vouloir ouvrir une nouvelle ère d’incertitudes pour ce pays”, estime notamment le quotidien burkinabé Le Pays.

Inquiète pour la sécurité de la région, la Communauté des États ouest-africains (Cédéao) a condamné mardi soir le renversement du président malien et de son Premier ministre par des “militaires putschistes”. Elle a aussi suspendu le Mali de tous ses organes de décision et décidé de fermer toutes les frontières terrestres et aériennes que partagent les pays membres de l’organisation avec Bamako. “Un coup d’État au Mali pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour les pays voisins qui luttent déjà contre la porosité de leurs frontières”, note le Washington Post. “La fragilité du Sahel fait peur à tous les leaders de la région”, a expliqué au quotidien américain, l’ancien haut fonctionnaire libérien Gyude Moore. “Si un pays tombe, cette instabilité peut se répandre à travers d’autres comme une maladie contagieuse”.

“Certains ne manqueront pas d’établir un parallèle entre les évènements de mardi et ceux de 2012”, lorsque des militaires avaient renversé le président Amadou Toumani Touré, accusé d’incompétence face aux rebelles, analyse Will Ross, journaliste au service Afrique de la BBC. “De violents jihadistes avaient alors profité du chaos pour s’emparer du nord du Mali. Et ils continuent encore aujourd’hui de semer le trouble à travers la région”.

Noémie Taylor-Rosner

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19 août 2020

Face aux incertitudes biélorusses, le dilemme de Moscou

Par Benoît Vitkine, Moscou, correspondant - Le Monde

L’option la plus réaliste pour la Russie est de tenter de mettre en toute discrétion la main sur la transition politique et d’éviter les désagréments d’une escalade.

Analyse. Les réactions de Moscou à la crise chez son voisin biélorusse, née des fraudes à l’élection présidentielle du 9 août, sont scrutées avec une attention singulière, entre fantasmes d’une intervention armée et attente d’un revirement diplomatique. Parmi les acteurs extérieurs, aucun ne dispose d’un poids comparable sur les affaires biélorusses. Pourtant, la partition jouée par Moscou est tout sauf simple. Elle se résume même à un douloureux dilemme : ne rien faire est impossible ; agir peut se révéler contre-productif.

Il faut d’abord se souvenir que le président biélorusse Alexandre Loukachenko n’a jamais bénéficié d’un soutien inconditionnel de la part de Moscou. Ses atermoiements permanents entre Est et Ouest en ont fait un partenaire difficile. Sa résistance à une intégration plus poussée entre les deux pays, prévue par un traité de 1999, a même fini par irriter franchement Vladimir Poutine, et a conduit le Kremlin à limiter son financement du coûteux modèle social biélorusse.

Ces motifs d’irritation se sont accrus à l’approche du scrutin du 9 août, avec l’arrestation de mercenaires russes et des appels répétés à défendre la souveraineté de Minsk face à Moscou. « Loukachenko a toujours mené un double jeu. Mais qu’à l’approche des élections il ait vendu à l’Ouest une rhétorique antirusse, cela Poutine ne le pardonne pas », affirme ainsi le politiste Alexandre Baunov à la télévision Dojd.

Depuis qu’il joue sa survie, Alexandre Loukachenko a radicalement changé de braquet. Les mercenaires ont été rendus à la Russie et le président biélorusse dénonce désormais l’interventionnisme occidental, voire la menace d’une invasion de l’OTAN. Ses coups de fil répétés à Vladimir Poutine sont des signes de désespoir autant que des marques d’allégeance.

Ne pas rester les bras croisés

Côté russe, ces différends ont été partiellement mis de côté. Seuls restent un certain nombre de principes : le Kremlin ne lâche pas un allié en rase campagne, en tout cas pas publiquement ; un pouvoir légitime ne cède pas face à la rue. « Moscou a du mal à voir les manifestants biélorusses autrement que comme manipulés par l’Occident, assure la politiste Tatiana Stanovaya. Avec eux c’est un peu comme avec les terroristes : on ne négocie pas. Pour autant, la Russie comprend la fragilité du pouvoir de Loukachenko et ne le soutiendra pas s’il tire sur la foule. »

Les médias russes, qui ont d’abord fait montre de sympathie pour les contestataires, effrayés par la violence de la répression, se sont d’ailleurs ressaisis. Ils multiplient désormais les comparaisons avec le Maïdan ukrainien, modèle honni s’il en est. De la même façon, les communiqués officiels du Kremlin ou du ministère des affaires étrangères se sont réchauffés.

La perspective d’un pourrissement de la crise est une autre raison pour la Russie de ne pas rester les bras croisés. Un enlisement pourrait ainsi favoriser l’émergence de nouveaux acteurs. L’annonce de nouvelles sanctions européennes, la forte implication de la Pologne ou des pays baltes peuvent avoir pour conséquence de faire reculer les positions russes. Une telle perspective est inacceptable : plus encore que l’Ukraine, la Biélorussie est vue comme une chasse gardée, un pays « frère » dont la souveraineté est même vue par certains à Moscou comme factice.

Ce constat posé, que peut faire la Russie ? Soutenir plus activement Alexandre Loukachenko pourrait s’avérer non seulement vain, tant son régime est discrédité, mais même risqué, voire contre-productif. En l’état actuel, l’opinion biélorusse est neutre. Dans les manifestations aucun slogan hostile à Moscou n’est exprimé. Parmi les meneurs de la contestation, aucun n’évoque le moindre basculement géopolitique, même si, souligne le professeur Dmitri Souslov, « le simple fait que [la candidate] Svetlana Tsikhanovskaïa ait trouvé refuge en Lituanie suffit à la disqualifier aux yeux du Kremlin ».

« Une menace existentielle »

Résultat : une intervention trop appuyée aurait pour effet de heurter une part importante de la population biélorusse. Sans parler d’une intervention militaire ou sécuritaire, certes peu probable, mais parfois évoquée en Biélorussie, encore plus depuis le transfert, dimanche, d’unités militaires russes vers la ville de Smolensk, à la frontière.

Les appels de la présidente de la chaîne RT, Margarita Simonian, à « envoyer les hommes polis rétablir l’ordre », en référence aux soldats qui ont conduit l’annexion de la Crimée, relèvent plus de la distraction à visées internes.

La seule exception serait un éventuel – et on l’a dit, très hypothétique – basculement de Minsk dans le camp occidental, ou la menace d’une sortie de l’Union économique eurasiatique. « Dans ce cas-là, Moscou serait prêt à aller très loin, assure M. Souslov. Un tel scénario est vu comme une menace existentielle, plus encore que dans le cas ukrainien. »

En attendant, la marge de manœuvre du Kremlin est limitée. Moscou peut chercher à obtenir le maximum d’un Loukachenko finissant, dans le sens d’une intégration plus poussée, mais la portée de telles avancées serait limitée. L’option la plus réaliste pour la Russie est surtout de tenter de mettre discrètement la main sur la transition, en essayant d’éviter les désagréments d’un engrenage violent comme ceux d’une élection ouverte.

Le précédent arménien

Un obstacle ici : l’opposition manque de candidats crédibles, aux yeux de Moscou ; et au sein du régime, M. Loukachenko a toujours pris soin d’écarter les hauts responsables qui développaient des liens personnels trop poussés avec Moscou, rappelle Tatiana Stanovaya, du groupe de réflexion R.Politik. Selon une source dans la diplomatie biélorusse, des contacts existent toutefois d’ores et déjà avec des acteurs au sein du régime.

Cette perspective impliquerait « une conversation franche, avec des engagements réciproques », écrit Dmitri Trenin dans un article pour le centre Carnegie. Le précédent arménien de 2018 pourrait être utilisé : porté au pouvoir par une révolte populaire, l’opposant Nikol Pachinian s’était empressé de rassurer Moscou en promettant une coopération militaire accrue.

Dans l’intervalle, Alexandre Loukachenko sera probablement prié de se montrer conciliant, de faire quelques concessions de forme, pour éviter une escalade ou un écroulement trop soudain.

18 août 2020

Convention d’Istanbul : la Turquie fait fi de toute femme

Par Jérémie Berlioux, correspondant à Istanbul — Libération

turquie femmes

Lors d'une manifestation pour une meilleure application de la convention d'Istanbul, le 5 août. (Photo Yasin Akgul. AFP)

Ankara envisage de se retirer du traité sur la lutte contre les violences faites aux femmes. Les organisations féministes turques sont vent debout contre le projet.

Merve Yesiltas, 31 ans, brûlée vive par son compagnon. Dilan Karatas, 7 ans, pendue à un arbre par son père. Pinar Gültekin, 27 ans, battue à mort et coulée dans du béton. La liste des féminicides ne cesse de s’allonger en Turquie. Au moins 239 femmes ont été assassinées depuis le début de l’année et l’épidémie de Covid-19 devrait accentuer la tendance annuelle. Pourtant, malgré ce bilan macabre, Ankara songe à se retirer de la convention d’Istanbul visant à l’élimination de toutes les formes de violences à l’égard des femmes. Ce traité, adopté en 2011 et ratifié par 33 pays et l’Union européenne, entend établir un cadre pour prévenir les violences, protéger les victimes, poursuivre les coupables et promouvoir des politiques s’attaquant aux inégalités de genre.

La Turquie avait été le premier pays à le ratifier en 2012. Elle pourrait aussi faire partie des premiers, avec la Pologne, à le dénoncer. «L’absence de convention risque d’exacerber les attaques et isoler un peu plus les femmes dans la société», s’alarme Ilayda Kocoglu, militante féministe et ancienne vice-présidente à Istanbul du Parti républicain du peuple (CHP, parti d’opposition, centre gauche).

Homophobie

L’annonce de ce projet de retrait s’inscrit dans une campagne réactionnaire menée par de petites factions islamo-nationalistes dont dépend de plus en plus la formation du Président, le Parti de la justice et du développement (AKP). «Le gouvernement veut dénoncer la convention parce qu’elle inclut l’égalité des genres, en laquelle il ne croit pas», explique Selin Top, militante féministe. «[Ses membres] ne peuvent pas dire qu’ils acceptent qu’il y ait des violences contre les femmes et les enfants. Alors, ils disent que cette convention érode les valeurs familiales», continue-t-elle. Dans un contexte d’homophobie et transphobie grandissantes, des caciques du pouvoir prétendent que la convention d’Istanbul constitue un outil de «propagande homosexuelle». Ainsi, selon Numan Kurtulmus, vice-président de l’AKP, ce traité est un outil «aux mains des LGBT et d’éléments radicaux». Les organisations féministes turques, les seuls groupes en dans le pays à avoir réussi à maintenir, malgré la répression, une présence dans la rue, sont vent debout contre le projet de retrait. Fin juillet, la Plateforme des femmes pour l’égalité a ainsi appelé toutes les femmes à «revendiquer la convention, leurs droits et vies et à dire que la seule autorité habilitée à prendre des décisions sur ce sujet, ce sont les femmes elles-mêmes». A Istanbul et dans d’autres villes, des rassemblements sont organisés quasiment quotidiennement. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #istanbulsözleşmesiyaşatır (#appliquezlaconventiondistanbul) est omniprésent. Alors que ce traité était, jusqu’à maintenant, inconnu du plus grand nombre, l’opposition mène une campagne d’éducation politique en faveur du texte. Des mairies distribuent des fascicules aux couples se mariant, d’autres occupent les panneaux publicitaires pour défendre la convention. «Si le traité et le droit étaient entièrement appliqués, nous ne perdrions pas autant de femmes, souligne l’activiste Selin Top. L’égalité des genres doit être intériorisée. Des écoles aux domiciles et aux quartiers, des lieux de travail à la justice, il faut un programme pour mettre fin aux violences. La convention d’Istanbul peut être un guide vers cet objectif», ajoute-t-elle.

«Solidarité»

Fait rarissime dans une Turquie extrêmement polarisée, des voix soutenant la convention se font entendre jusqu’au cœur de l’AKP. Ainsi Mustafa Sentop, président du Parlement, s’est dit défavorable à un retrait de la convention, bien qu’il regrette que ce texte impose des «éléments appartenant à la culture occidentale».

La surprise est cependant venue, début août, de la puissante Association femmes et démocratie (KADEM) qui a exprimé son soutien au traité. Selon elle, le texte contribue à la lutte contre les violences domestiques et «n’encourage pas l’homosexualité». La vice-présidente de l’association n’est autre que Sümeyye Erdogan Bayraktar, la fille du président turc. Ce dernier a pourtant signalé, vendredi dernier, pencher en faveur d’un retrait, arguant qu’«un accord, une réglementation ou une idéologie qui sape les fondations de la famille n’est pas légitime».

Seul le Parlement, en vacances jusqu’au 1er octobre, pourra statuer sur le sujet. Les organisations féministes comptent utiliser ce délai pour se mobiliser. «Le mouvement le plus puissant en Turquie a toujours été le mouvement des femmes. Contre toute cette violence, nous devons nous tenir côte à côte et empêcher quiconque de briser cette solidarité», conclut Ilayda Kocoglu.

18 août 2020

Contestation - Marée humaine à Minsk pour réclamer le départ de Loukachenko

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COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

Des dizaines de milliers de personnes ont défilé pacifiquement dimanche dans le centre de Minsk pour réclamer le départ d’Alexandre Loukachenko. Mais le président biélorusse, qui se targue du soutien du Kremlin, refuse de plier devant ses opposants.

“Alexandre Loukachenko n’est pas disposé à abandonner le pouvoir”, constate El País. Le “dernier dictateur européen”, qui dirige la Biélorussie d’une main de fer depuis 1994, a assuré dimanche devant quelques milliers de sympathisants, réunis dans le centre de Minsk, qu’il ne céderait pas : “S’ils détruisent Loukachenko, ce sera le début de la fin”, a-t-il averti.

“Mais les faits sont têtus”, ajoute le quotidien espagnol : pendant que le président prétendait avoir gagné les élections du 9 août à la loyale, “une marée humaine envahissait les rues de la capitale et d’autres villes du pays pour exiger sa démission”.

“Pour la première fois, les Biélorusses pouvaient défiler librement dans le centre-ville, vêtus de drapeaux de l’opposition et scandant des slogans antigouvernementaux”, observe l’envoyé spécial du New York Times. “Après s’être rassemblés près de l’obélisque, ils se sont dirigés vers la place centrale, bloquant la circulation sur l’avenue principale de la capitale”.

“Il y a une semaine, un groupe de gens protestant sur un trottoir auraient été violemment dispersés par les forces antiémeutes. Ce dimanche, il n’y avait pas l’ombre d’un policier”, remarque le quotidien américain.

La plus grande manifestation de l’histoire de la Biélorussie, selon les observateurs, a ressemblé entre 100 000 et 200 000 personnes à Minsk, selon les observateurs.

“Les manifestants brandissaient les drapeaux rouge et blanc de l’opposition et scandaient ‘Justice !’, ‘Dehors !’, ‘Démission !’ ou ‘Liberté pour les prisonniers politiques !’”, raconte RFE-RL.

Les rassemblements ont largement gagné la province. L’envoyée spéciale du Daily Telegraph était à 250 km de Minsk, à Hrodna, l’une de ces grosses villes industrielles traditionnellement acquises à Loukachenko. Même là-bas, la colère gronde.

Roman Vydra, un ouvrier d’une quarantaine d’années a pris comme une “insulte” la victoire supposée du président avec 80 % des voix. “Personne ne pensait que le trucage des élections serait aussi éhonté”, dit-il. “Je ne connais pas une seule personne qui ait voté pour le président”.

Soutien prudent du Kremlin

Devant ses sympathisants, Loukachenko a agité le spectre d’une conspiration internationale contre la Biélorussie, et s’est targué du soutien de Vladimir Poutine.

L’agence officielle Belta précise que les deux hommes ont discuté samedi et dimanche et que le Kremlin “a confirmé son accord, si la situation venait à s’aggraver en raison de menaces extérieures, à une réponse commune”, conformément à l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), une alliance militaire qui rassemble la Russie et plusieurs anciennes républiques soviétiques.

“Mais Poutine n’a pas été jusqu’à apporter son soutien ou une quelconque approbation” au président biélorusse, qu’il considère peu fiable et en trop mauvaise posture, analyse The Guardian. “Il est probable que Moscou attende de voir si Loukachenko peut survivre aux prochaines semaines – ou jours –, alors que la contestation et les grèves le poussent à la démission”.

The Moscow Times partage cette analyse et estime, dans une colonne d’opinion, que la crise biélorusse offre l’opportunité d’une médiation russo-européenne : “Son objectif implicite pourrait être une transition graduelle et pacifique vers une Biélorussie sans Loukachenko”.

“Une coopération réussie entre l’Union européenne et la Russie n’est pas dans la poche – il y a beaucoup de méfiance à surmonter”, poursuit le site. “Mais un effort de coopération sur la Biélorussie pourrait être un début. Il est déjà trop tard pour Loukachenko. Mais il n’est jamais trop tôt, à Moscou et Bruxelles, pour apprendre des erreurs du passé”.

18 août 2020

Violences policières : «Ils nous traitaient comme des animaux»

bielo police

Par Justine Salvestroni, Envoyée spéciale à Grodno - Libération

A Minsk, le 15 août. L’homme aurait été blessé par la police lors d’une manifestation contre le régime. (Photo Vasily Fedosenko. Reuters)

La police a violemment réprimé, en début de semaine, ceux qui manifestaient contre Loukachenko. Certains, roués de coups dans des fourgons puis au commissariat, sont encore hospitalisés.

«Il n’y a pas eu de tortures.» C’est le vice-ministre biélorusse de l’Intérieur qui l’affirme, alors que le gouvernement nie l’existence de la vague de violences policières qui a submergé le pays, du 9 au 13 août, après la réélection contestée d’Alexandre Loukachenko. Alors que des milliers de manifestants - et passants malchanceux - sortent des prisons et des hôpitaux, les Biélorusses découvrent, horrifiés, l’étendue des dommages causés par la police et les Omon, les «chiens de Loukachenko», lâchés sur les foules à la moindre contestation.

«Ils remplissaient les prisons et les commissariats, tabassaient les gens, puis les relâchaient pour faire de la place pour de nouvelles victimes, raconte Denis, 24 ans, manager d’une boutique de Grodno, dans l’ouest. Je me suis fait arrêter le 11 août vers 21 heures, je manifestais pour des élections libres. Trois Omon ont commencé à me tabasser dans la rue, par terre, ils voulaient le code de mon téléphone. J’ai refusé, alors ils m’ont frappé encore plus, avec leur matraque, à coups de poing et de pied.» Bilan d’une vingtaine d’heures au poste : six passages à tabac, une confession écrite, un jugement au commissariat, des jambes couvertes de bleus et d’égratignures et, dans le dos, la marque d’une semelle imprimée sur la peau.

Tabasser

Pour Alexey, informaticien de 33 ans, l’élément déclencheur a été la photo d’une petite fille blessée à Grodno pendant l’arrestation de son père, en voiture, le 11 août. «La connexion internet venait d’être rétablie, et j’ai vu cette photo ! J’ai une petite fille, je passe par les mêmes rues. Ça m’a bouleversé, j’ai eu envie de faire quelque chose pour arrêter toute cette haine, toute cette violence.» Alexey imprime donc la photo de la gamine et écrit dessous : «Si vous voulez du sang, prenez le mien, pas celui de nos enfants.»

Cela ne prend que cinq minutes, le temps qu’Alexey se fasse arrêter devant la mairie : «Des types armés et masqués m’ont poussé dans un minibus. L’un a commencé à me frapper avec une matraque, il me posait toujours la même question absurde : "Combien tu as été payé pour faire ça ?" J’ai fini par dire 1 000 dollars, ça l’a un peu calmé. L’autre me donnait des coups de pied, mais avec le manque de place, il ne pouvait pas taper trop fort, alors il s’est acharné sur mon genou et mes reins. Ça a duré une dizaine de minutes, ils ont voulu écrire sur ma tête avec un marqueur noir, mais je suis chauve et je transpirais beaucoup, le feutre ne tenait pas, ça les a énervés.»

Arrivé au commissariat de Grodno, Alexey raconte avoir été obligé de signer des documents. Il a vu arriver son collègue Vladimir. «Je les entendais lui taper dessus, c’était horrible, il n’arrêtait pas de hurler.» Ayant appris l’arrestation d’Alexey, Vladimir, aussi père de famille et ému par la petite fille, est parti manifester place Lénine. Il a été arrêté à son tour : «Je me suis fait tabasser, surtout les jambes et les fesses. Dans le bus, des types sans uniforme m’ont dit de me mettre à genoux, ils ont dessiné sur mon visage avec un feutre noir, je ne sais pas pourquoi, mais ça les faisait beaucoup rigoler. Une fois arrivé au commissariat, ils m’ont encore tabassé. Je ne faisais rien pour me défendre. Ensuite, ils m’ont emmené dans leur gymnase, couché face contre terre. Ils ont posé la feuille avec la photo de la petite fille sur mon dos, et m’ont dit que si la feuille tombait, ils me frapperaient. Nous étions une vingtaine, ils faisaient tout pour nous humilier, ils nous traitaient comme des animaux.»

Les mains attachées dans le dos, Alexey finit par s’effondrer par terre, après quelques heures, puis est emmené à l’hôpital. «Les médecins s’occupent vraiment bien de nous, dit-il. Ils prennent les blessés au commissariat même si leur état n’est pas trop grave, juste pour les sortir de là.»

Code couleur

Le calvaire de Vladimir a duré plus longtemps : «Après que j’ai signé ces documents, un policier m’a mis des coups de genou dans l’estomac, je ne pouvais plus respirer. J’ai compris qu’il attendait que je dise que j’avais compris les documents. Ensuite ils m’ont redescendu au gymnase. M’ont couvert de "vert brillant" [un antiseptique coloré, ndlr] et forcé à rester sur le sol, dans une position inconfortable. Enfin ils ont appelé une ambulance. Je n’en pouvais plus.» Plusieurs médias ont rapporté, sans que cela n’ait été confirmé par les autorités, l’utilisation par la police d’un code couleur. Un manifestant marqué au feutre noir : allez-y carrément. Barbouillé de «vert brillant» : allez-y doucement.

Vladimir et Alexey sont encore hospitalisés à Grodno. «Vladimir n’a pas encore été jugé, parce qu’il est toujours à l’hôpital, explique son avocat, Alexandre Birilov. La plupart des procès se tiennent dans les jours qui suivent les manifestations, sur le lieu de détention, entre dix et quinze minutes par personne, à huis clos et sans avocat. Impossible de savoir s’il aura un procès équitable plus tard. En ce moment, personne ne suit les procédures normales. Heureusement, même en Biélorussie, les séances de torture et les procès expéditifs ne sont pas la norme.» D’après Birilov, les documents que beaucoup de manifestants ont dû signer sont des «rapports d’infraction administrative, qui ne peuvent pas être considérés comme des preuves». Denis se souvient du texte : «Si la police m’arrête à nouveau, c’est trois ans ferme.» Ce qui ne l’a pas empêché de manifester ce week-end pour exercer son «devoir de citoyen».

17 août 2020

Libération de ce 17 août

libé 17 aout

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