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Jours tranquilles à Paris

4 juillet 2020

Albert Dupontel à Auray - Save the date...

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4 juillet 2020

Adolf Hitler, 35 ans, à sa sortie de la prison de Landsberg, 1924.

hitler

4 juillet 2020

A Paris, les galeries d’art fêtent la reprise, le temps d’un week-end

Par Philippe Dagen

Une soixantaine de maisons participent au Paris Gallery Weekend qui a lieu jusqu’au dimanche 5 juillet.

Créée en 2014 à Paris, Choices était, jusqu’en 2019, une opération de promotion des galeries parisiennes : une quarantaine d’entre elles s’ouvraient un week-end entier, programme augmenté de visites dans quelques institutions partenaires – l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts (Ensba), le Palais de Tokyo –, de quelques mondanités et, en principe, de bonnes ventes. Cette année, après trois mois de fermeture forcée, il s’agit pour elles de montrer qu’elles ont survécu et de vérifier qu’il y a encore des amateurs et des collectionneurs, à travers l’opération Paris Gallery Weekend.

Aussi ledit week-end a-t-il commencé dès le jeudi 2 juillet au soir, et le nombre des galeries participantes est-il en hausse – une soixantaine. L’itinéraire, pour les plus enthousiastes – ou les plus consciencieux – est long, du Marais in extenso aux beaux quartiers côté avenue Matignon et rue de Téhéran, avec détour par Saint-Germain-des-Prés, sa rue des Beaux-Arts et sa rue de Seine. Les mondanités sont prohibées et, naturellement, le flacon de gel hydroalcoolique est en vue sur son socle ou son étagère.

Etant donné la diversité des galeries, les propositions sont extrêmement variées, du muséal de très haut niveau – Hannah Hoch, Victor Brauner et Hans Bellmer chez Natalie Seroussi – au plus jeune qui deviendra muséal à son tour ou est déjà en train de le devenir – Elina Brotherus chez gb Agency, Chourouk Hriech chez Anne-Sarah Bénichou, Nazanin Pouyandeh chez Vincent Sator, Alia Farid chez Imane Farès. Il n’y aurait donc guère de sens à prétendre distinguer quelque tendance artistique, d’autant que chaque galerie tient à marquer son individualité. Mais il est néanmoins une tendance visible, celle des galeristes à pratiquer de plus en plus l’exposition collective.

Le parti du collectif

Bref rappel historique : jadis, les galeries n’organisaient pas systématiquement des expositions personnelles. Soit elles ménageaient dans leurs calendriers des périodes où étaient accrochés ensemble plusieurs artistes, au gré de leurs travaux récents ; soit elles montaient des expositions collectives autour d’un sujet, d’une idée ou de tout critère de cohérence. L’exposition dans laquelle un groupe – également nommé parfois avant-garde – se présente fort de son unité et, éventuellement, d’un nom et d’un manifeste, est la forme combattante de ce genre de manifestation, réalisée pour la première fois par les impressionnistes en 1874, et maintes fois recommencée par futuristes, dadaïstes, surréalistes, minimalistes, etc. Depuis la fin du XXe siècle, cette pratique semblait tomber en désuétude, ce dont on accuserait volontiers la triste logique mercantile qui enseigne qu’il est bien plus facile de défendre un nom qu’une idée. La déliquescence du genre paraissait aussi prononcée à Paris qu’à New York, Berlin ou Londres.

La particularité la plus visible du Paris Gallery Weekend est, à l’inverse, que non seulement la moitié des galeries prend le parti du collectif, mais que plusieurs ne se contentent pas d’amasser : elles composent, elles construisent. On l’a déjà signalé pour Oh les beaux jours chez Michel Rein (Le Monde du 12 juin). La même exigence se reconnaît chez Maïa Muller, qui a été l’une des premières à relancer le genre. Son accrochage est le quatrième de la série La Ligne rouge – une vraie ligne rouge tracée sur les murs – avec, entre autres, Yesmine Ben Khelil, Io Burgard et Jean-Michel Alberola. Chez Eric Mouchet, le point commun entre les artistes exposés est le corps, des œuvres d’Orlan et de Robert Mapplethorpe jusqu’aux gouaches limpides et féroces de Kubra Khademi.

Bien que son titre soit évasif, le Summer Show de Dominique Fiat trouve son unité dans les questions d’identité et d’histoire, des autoportraits de la série L’Arlésienne de Ninar Esber aux photos rapportées par Nicola Lo Calzo du Bénin et du Togo, où il regarde le vaudou à la lumière de l’histoire de la traite négrière, histoire également présente, sur le mode allégorique, dans les travaux d’Emo de Medeiros. Jérôme Poggi prend le titre de son exposition, L’Arc-en-ciel de la gravité, au romancier Thomas Pynchon et orchestre le thème céleste en faisant jouer ensemble Anna-Eva Bergman, Sam Francis et Simon Hantaï, parmi les grands anciens, et Kapwani Kiwanga, Sidival Fila, Djamel Tatah et Georges Tony Stoll parmi les contemporains. Une exposition collective bien conçue, c’est un vrai plaisir.

Informations, programme et adresses sur le site Parisgalleryweekend.com. Jusqu’au dimanche 5 juillet.

4 juillet 2020

Fanny Müller

fanny97

4 juillet 2020

La justice turque rappelle le meurtre de Jamal Khashoggi au bon souvenir de Riyad

Le procès in absentia de vingt Saoudiens accusés d’implication dans la mort du journaliste s’est ouvert vendredi à Istanbul.

Par Jean-François Chapelle

C’est un procès un peu bancal, sans accusés dans le box, sans guère de chances de parvenir à des condamnations et avec à peine une poignée d’observateurs admis à l’audience, qui s’est ouvert vendredi 3 juillet devant la 11e cour d’assises d’Istanbul.

Mais pour les proches du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi, et pour les défenseurs de la liberté de la presse, cette procédure est un peu la dernière chance de faire la lumière sur les vrais commanditaires d’un crime d’une rare sauvagerie, commis le 2 octobre 2018 dans les locaux du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul.

Exilé depuis l’été 2017 aux Etats-Unis, le journaliste, fin connaisseur de la famille royale saoudienne et détracteur déterminé de la politique autoritaire menée par le prince héritier Mohammed Ben Salman, fréquentait assidûment les rives du Bosphore, où résidait sa fiancée, une jeune doctorante turque. Pour pouvoir épouser Hatice Cengiz, Khashoggi, 59 ans, s’était déjà rendu une première fois au consulat, afin d’obtenir un certificat attestant de son divorce avec sa première épouse, prononcé en Arabie saoudite.

Les agents consulaires lui avaient alors donné un second rendez-vous, dont il n’est jamais revenu. Selon l’acte d’accusation de 117 pages rédigé par le parquet d’Istanbul, le journaliste a été étranglé puis dépecé par un commando de quinze personnes, dont un médecin légiste, venu spécialement d’Arabie saoudite. Son corps n’a jamais été retrouvé.

Colère du prince

L’affaire a certes déjà été jugée par un tribunal saoudien. Mais celui-ci s’est borné à cibler les exécutants – cinq d’entre eux ont été condamnés en décembre 2019 à la peine de mort, trois autres à vingt-quatre ans de prison –, considérant que l’objectif du commando était de ramener Khashoggi sain et sauf à Riyad et que c’était le chef de l’équipe qui, incapable de faire sortir le journaliste du consulat par la force, avait décidé de le tuer.

Les procureurs turcs racontent cependant une toute autre histoire, puisqu’ils accusent deux proches du prince héritier, l’ancien chef adjoint des services de renseignement, le général Ahmed Al-Assiri, et l’ancien conseiller à la cour royale, Saoud Al-Qahtani, d’avoir conçu et ordonné le crime. Ils réclament la prison à vie à leur encontre ainsi qu’à celles de dix-huit hommes de main.

Et si l’acte d’accusation ne le désigne pas ouvertement, le nom de Mohammed Ben Salman, (« MBS »), a bien été prononcé au cours de la première audience. Devant un public restreint, pour cause de pandémie de Covid-19, et en l’absence des accusés, restés en Arabie saoudite, Yasin Aktay, conseiller du président turc Recep Tayyip Erdogan et ami proche de Khashoggi, a rappelé les espoirs que le journaliste avait d’abord placés dans la personne du prince héritier, puis sa déception et le choix de l’exil, parce qu’à Riyad, « tout le monde était désormais obligé d’applaudir les politiques erronées de MBS ».

Il a aussi évoqué la colère du prince après la création par son ami, en janvier 2018, de la plateforme DAWN (« La démocratie pour le monde arabe maintenant »), réunissant des journalistes, intellectuels et militants issus des courants islamistes et libéraux pour promouvoir la démocratie.

« Une ambiance de panique »

En trois heures et demie d’audience, la cour, masque chirurgical sur le nez, a entendu les dépositions de la fiancée, en qualité de plaignante, et de huit témoins, pour la plupart des personnels turcs du consulat saoudien. Parfois submergée par l’émotion, la jeune femme, en robe noire et foulard gris, a relaté l’attente angoissée se muant en terreur quand un agent consulaire lui a annoncé, « avec un visage qui exprimait la peur », qu’il ne trouvait pas trace de son promis dans le consulat.

Le témoignage d’un technicien du consulat, en particulier, a retenu l’attention. Zeki Demir a en effet indiqué avoir été appelé à la résidence du consul, le jour du crime, pour y allumer un grand fourneau, avant d’être sommé de partir, « dans une ambiance de panique ».

A l’issue de l’audience, Agnès Callamard, rapporteure spéciale des Nations unies sur les exécutions sommaires, s’est réjouie devant la presse de l’ouverture de ce procès, aussi « imparfait » soit-il, avec ses accusés absents, ses avocats commis d’office et son issue incertaine, le droit turc ne permettant pas la condamnation d’accusés jugés in absentia.

« Le procès saoudien était tout sauf de la justice, c’était un travestissement de la justice », a-t-elle déclaré.

« Ici, nous avons un espace où les victimes peuvent être entendues comme elles ne l’ont jamais été auparavant. Les témoins doivent parler sous serment, ce qui donne bien plus de légitimité à leurs déclarations. C’est important pour la révélation de la vérité, plus d’informations vont remonter. »

Interrogée par Le Monde, l’experte onusienne a indiqué que les cinq condamnés à mort du procès saoudien étaient toujours en prison, après le pardon accordé le 22 mai par les fils de la victime à ses assassins. « Ils n’ont pas encore été libérés et la question du pardon soulève une controverse en Arabie saoudite, où elle est contestée par des théologiens », a-t-elle affirmé.

Agnès Callamard a également déploré l’absence totale, à ses côtés, de représentants « des pays qui ont été en première ligne dans le combat pour la liberté d’expression » et a encouragé ces derniers à se mobiliser pour la prochaine audience, le 24 novembre. « On parle ici d’un meurtre d’Etat, c’est pour cela que la présence des Etats est importante. »

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4 juillet 2020

François Fillon

fillon prison

4 juillet 2020

Trump au Mont Rushmore pour un feu d’artifice de transgressions

independance day

Par Corine Lesnes, San Francisco, correspondante

A la veille de la fête nationale, le président américain a fustigé ceux qui veulent réexaminer l’histoire américaine et faire tomber les statues.

Un feu d’artifice de transgressions. Sans masques ni distanciation physique, malgré l’opposition des nations indiennes et le risque d’incendie, Donald Trump a tenu un rassemblement, vendredi 3 juillet, veille de la fête nationale américaine, au pied du Mont Rushmore, dans le Dakota du Sud. Les Etats-Unis sont « le pays le plus grand et le plus juste qui ait jamais existé sur cette Terre », a-t-il proclamé.

Le podium avait été disposé de sorte que sa silhouette s’inscrive dans le cadre iconique où sont gravés à même la roche les visages de George Washington, Thomas Jefferson, Abraham Lincoln et Teddy Roosevelt. Lisant son téléprompteur, M. Trump a mis en garde contre le « danger grandissant » posé par les jeunes Américains qui contestent l’héritage des fondateurs de la République. « Le but de la révolution culturelle de la gauche est de renverser la révolution américaine », a-t-il lancé. George Washington ne sera « jamais oublié », a-t-il promis, Jefferson « jamais abandonné ».

Quelque 7 000 spectateurs ont assisté au discours et au spectacle, serrés sur des chaises pliantes disposées sur la terrasse qui conclut la monumentale Avenue des drapeaux, au pied de ce National Memorial, commencé en 1927 et achevé en 1941.

La gouverneure républicaine du Dakota du Sud, Kristi Noem, avait décidé de ne pas tenir compte des consignes de distanciation renouvelées à la veille de la fête nationale par les autorités sanitaires. Alors que l’épidémie connaît une recrudescence record dans quatorze Etats, au point que les traditionnels pique-niques du 4-Juillet et autres excursions dans les parcs nationaux ont été découragés voire interdits, elle avait invité chacun à prendre ses responsabilités, la fête de l’indépendance étant une célébration de la liberté individuelle chère aux Américains – dont celle de ne pas porter de masque par une si belle soirée.

Visite insultante pour les Sioux

Depuis 2010, aucun feu d’artifice n’avait eu lieu au Mont Rushmore, en raison des risques d’incendie. Sur l’insistance de la Maison Blanche, le service des parcs nationaux a approuvé leur retour, assurant que le festival pyrotechnique réclamé depuis deux ans par M. Trump ne causerait pas de dommages à l’environnement. Un survol d’avions de combat pendant l’hymne national est venu renforcer l’effet patriotique, ainsi que les témoignages vidéo de militaires originaires du Dakota du Sud et désireux de souhaiter un « bon anniversaire » (le 244e) aux Etats-Unis.

La visite a été vue comme particulièrement insultante par les Sioux dont c’est la terre ancestrale. Les gouvernements des tribus lakotas avaient demandé à la Maison Blanche d’y renoncer. D’une part pour ne pas risquer de propager le coronavirus parmi les populations amérindiennes, particulièrement vulnérables. D’autre part, par respect pour les revendications historiques des Sioux.

Pour les tribus Lakotas et Oglala, les Blacks Hills, où se situe le Mont Rushmore, sont des collines sacrées. Par les traités de Fort Laramie de 1851 et 1868, le gouvernement des Etats-Unis leur en avait garanti la souveraineté. Il n’a pas tenu parole.

Après la découverte d’or, en 1874, les Sioux ont vu leur territoire de 240 000 km2 réduit à cinq réserves disséminées dans les Dakotas du Nord et du Sud. En 1980, la Cour suprême a condamné le gouvernement fédéral à indemniser les tribus, mais celles-ci continuent à refuser l’argent – estimé aujourd’hui à plus de 1 milliard de dollars (890 millions d’euros) – et à revendiquer les Black Hills.

Une centaine de membres de la tribu Lakota et des militants alliés ont réussi à empêcher pendant deux heures l’accès au monument, après avoir bloqué la route avec des camionnettes dont ils avaient retiré les pneus. « C’est comme si Trump essayait d’aller tenir un feu d’artifice au Vatican », a critiqué Julian Bear Runner, le président de la tribu Oglala, où on célèbre chaque 25 juin la victoire des Amérindiens en 1876 sur le général Custer, l’homme qui ouvrit les Black Hills aux chercheurs d’or. « Du sel dans une plaie », a comparé Ricky Gray Grass, un autre dirigeant de la tribu, dans le Washington Post : non seulement les collines ont été saisies au mépris des traités, mais y graver « les visages blancs des auteurs du génocide », a ajouté à l’humiliation.

« Effacer notre histoire »

A un moment de réexamen des épisodes les moins glorieux de l’histoire américaine, la visite de Donald Trump a eu pour effet d’enfoncer le clou sur les failles des héros nationaux. La presse a répété une fois de plus que George Washington avait 123 esclaves et que Thomas Jefferson en eut plus de 600 au cours de sa vie. Teddy Roosevelt est maintenant connu non plus seulement comme un passionné des parcs nationaux ou du canal de Panama mais aussi comme un président qui a tenu nombre de propos racistes – ce qui le menace d’être descendu de son piédestal équestre du musée d’histoire naturelle de New York.

Quant à Lincoln, s’il a prononcé l’émancipation des esclaves, il est aussi celui qui a approuvé la mort par pendaison de trente-huit Sioux en 1862 après un violent conflit avec les colons blancs.

La biographie du sculpteur des visages du Mount Rushmore – de 18 m de haut – a également été reconsidérée. Artiste célébré sans réserve par l’historiographie du parc, Gutzon Borglum, Américain d’origine danoise, il s’est révélé être membre du Ku Klux Klan dans les années 1920. Il fut même membre du Kloncilium, le cercle des dirigeants du Klan, pour qui il espérait bâtir un monument à la gloire de la Confédération sudiste.

Dans son intervention, Donald Trump a défendu les pères fondateurs et il a promis de s’opposer à la « campagne sans merci » lancée par la gauche radicale pour « effacer notre histoire ». Un discours à contre-courant : quelques heures avant sa visite, l’équipe de football américain des Redskins (« peaux rouges ») de Washington a annoncé qu’elle allait reconsidérer son nom. Une décision qui a été saluée comme une victoire dans le monde indien, qui demandait depuis des années à l’équipe de prendre en compte son sentiment à l’égard d’un nom qu’elle juge dégradant même si ce n’est pas l’avis des Blancs.

4 juillet 2020

Gay Pride

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4 juillet 2020

Avec Jean Castex comme premier ministre, Emmanuel Macron assume de vouloir gouverner seul

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Par Cédric Pietralunga, Alexandre Lemarié

Le chef de l’Etat a choisi un haut fonctionnaire et élu local de 55 ans au profil de « collaborateur », censé lui faire moins d’ombre à Matignon.

Il entend être le seul patron. Après avoir dirigé le pays en binôme avec Edouard Philippe pendant trois ans, Emmanuel Macron a décidé, vendredi 3 juillet, de remplacer son premier ministre, si populaire dans l’opinion et qui n’hésitait plus à contester certains choix, par Jean Castex (photo ci-dessus) , un haut fonctionnaire et élu local de 55 ans, censé lui faire moins d’ombre. Un profil de « collaborateur », qui illustre la volonté du chef de l’Etat d’être à la manœuvre pour la dernière ligne droite de son quinquennat, avant de se lancer dans la campagne pour la présidentielle de 2022. « Macron a décidé de cumuler les deux postes. Il fera président et premier ministre en même temps ! », s’amuse un responsable de la majorité.

Inconnu de la plupart des Français, le nouvel occupant de Matignon n’a jamais eu d’expérience politique nationale. Ancien conseiller régional du Languedoc-Roussillon, actuel conseiller départemental des Pyrénées-Orientales et maire de Prades, une petite ville de 6 000 habitants située à l’ouest de Perpignan, Jean Castex était jusqu’ici – un peu – connu pour avoir élaboré le plan de déconfinement mis en œuvre par l’exécutif à partir du 11 mai. C’est lors de ces nombreux échanges au cours de cette période que le haut fonctionnaire aurait séduit le chef de l’Etat par son « esprit de dialogue et de responsabilité ». « Jean Castex, c’est l’homme du déconfinement réussi », se félicite-t-on à l’Elysée.

Un profil qui correspond en tout cas à l’envie de M. Macron de « diriger le pays à bride courte », sans partager le pouvoir avec une personnalité de premier plan. « Le président a la volonté, dans les deux prochaines années, de gouverner lui-même. Il veut être maître de son destin et de sa réélection », explique un proche.

A entendre les macronistes, leur champion, qu’ils présentent comme « intuitif » et « transformateur », ne voulait plus être « corseté » dans ses initiatives par le chef du gouvernement, comme cela a pu être le cas avec M. Philippe. « Il reste juste le temps nécessaire pour que les changements mis en œuvre produisent des résultats avant la fin du quinquennat », justifie l’entourage de M. Macron. « Le président voulait gouverner », concède celui de M. Philippe. Un rôle en second plan intégré par M. Castex lui-même : « Je ne suis pas là pour chercher la lumière. Je suis ici pour chercher des résultats », a-t-il affirmé sur TF1, vendredi soir.

Impression de mise sous tutelle

Une impression de mise sous tutelle renforcée par le choix de Nicolas Revel pour diriger le cabinet du premier ministre. L’actuel directeur général de la Caisse nationale d’assurance-maladie, fils des journalistes Jean-François Revel et Claude Sarraute (ancienne collaboratrice du Monde), est un proche de M. Macron. Les deux hommes ont travaillé ensemble pour François Hollande, au secrétariat général de l’Elysée. M. Macron s’occupait alors des dossiers économiques, M. Revel, des questions sociales.

Lors de son élection en 2017, le nouveau chef de l’Etat avait déjà tenté d’imposer son ami à Matignon, mais M. Philippe s’y était opposé, craignant une trop grande dépendance. Il avait préféré confier le poste à l’un de ses proches, Benoît Ribadeau-Dumas.

« CASTEX, C’EST UNE INCARNATION DU “EN MÊME TEMPS”. C’EST PARIS ET PRADES, UN COUTEAU SUISSE QUI AIME L’ETAT MAIS AUSSI LES TERRITOIRES », ÉNUMÈRE-T-ON À L’ELYSÉE

Sans surprise, l’Elysée rejette l’accusation d’avoir choisi un simple « collaborateur » pour Matignon, qui ne serait là que pour obéir aux ordres du chef de l’Etat. « Jean Castex n’est pas un fantoche ou un factotum. Il a du caractère, ce n’est pas un chef de bureau, il l’a montré durant le déconfinement », assure un conseiller de M. Macron.

De fait, le délégué interministériel chargé du plan de déconfinement s’était opposé durement à certains poids lourds du gouvernement lors de la phase de préparation de la sortie de crise du Covid-19. Il avait notamment imposé au ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, une rentrée scolaire progressive et partielle, alors que ce dernier, réputé proche de M. Macron, militait pour un retour rapide de tous les enfants à l’école.

« Profil parfait pour la reconstruction »

Pour les macronistes, le choix de l’ex-conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Elysée est au contraire « très macronien ». « Castex, c’est une incarnation du “en même temps”. C’est Paris et Prades, c’est la Cour des comptes et le conseil départemental, un couteau suisse qui aime l’Etat mais aussi les territoires, c’est une rupture dans la continuité », énumère-t-on à l’Elysée. « Il connaît le terrain, la santé, les élus, le social, il a réussi le déconfinement… C’est le profil parfait pour la reconstruction maintes fois évoquée », abonde un visiteur du soir du chef de l’Etat.

Lors de son discours de passation des pouvoirs, vendredi en fin de journée, Jean Castex a d’ailleurs souligné en creux ses différences avec M. Philippe, expliquant qu’« une nouvelle étape du quinquennat s’ouvre » et que « les méthodes devront être adaptées ». « Il nous faudra plus que jamais réunir la nation », a-t-il ajouté, alors que son prédécesseur était souvent critiqué pour sa raideur.

SUR LE PLAN POLITIQUE, LE CHOIX DE JEAN CASTEX A AUSSI L’AVANTAGE DE NEUTRALISER XAVIER BERTRAND, QUI S’ANNONCE COMME UN RIVAL POUR 2022

En nommant une deuxième fois un maire Les Républicains (LR) à Matignon – Jean Castex a quitté LR il y a quelques jours, comme l’avait fait Edouard Philippe en 2017 à l’annonce de sa nomination –, M. Macron fait aussi le choix de poursuivre sa fracturation de la droite. Celle-ci avait été bien entamée par M. Philippe, qui avait emmené avec lui plusieurs de ses proches au gouvernement, comme Gérald Darmanin ou Sébastien Lecornu. La rumeur prête d’ailleurs au président l’intention de nommer d’autres figures de la droite dans son nouveau gouvernement, qui est attendu avant le prochain conseil des ministres, prévu le mercredi 8 juillet.

Jean Castex n’a pas indiqué s’il comptait adhérer à La République en marche (LRM), ce que s’était toujours refusé à faire son prédécesseur. Le choix de cet ex-collaborateur de M. Sarkozy et de Xavier Bertrand illustre surtout la volonté du chef de l’Etat de conserver son socle électoral, composé d’une partie de sympathisants LR. « C’est un choix rassurant pour les gens de droite », estime un pilier de la majorité, qui voit également dans la nomination de l’élu local le symbole de « la place importante » que M. Macron veut « accorder aux territoires ».

« Gaulliste social »

Sur le plan politique, le choix de Jean Castex a aussi l’avantage de neutraliser Xavier Bertrand, qui s’annonce comme un rival pour 2022. Le nouveau premier ministre est un proche du président des Hauts-de-France : il a été son directeur de cabinet de 2006 à 2008, au ministère de la santé puis du travail, et les deux hommes sont restés proches.

« Castex est un gaulliste social. Le nommer à Matignon est malin, Xavier Bertrand aura beaucoup de mal à critiquer la politique menée par son ancien bras droit », savoure un parlementaire de la majorité. « Je connais et j’apprécie les qualités de serviteur de l’Etat de Jean Castex (…). Puissent-elles corriger les mauvais choix du président de la République », a tweeté l’élu LR quelques heures après la nomination de son ancien conseiller.

Plusieurs élus de l’aile droite de la majorité se sont d’ailleurs réjouis de la promotion de M. Castex, vantant « un grand commis de l’Etat ». « C’est un homme d’honneur et un immense travailleur », juge ainsi la députée (LRM, Paris) Olivia Grégoire, qui décrit un « fin connaisseur des arcanes de l’Etat ». Il a surtout l’avantage de cocher de nombreuses cases, souligne sa collègue de l’Essonne, Marie Guévenoux. « C’est un élu local, connaissant parfaitement le fonctionnement de l’Etat et qui a supervisé le déconfinement… Son profil présente beaucoup d’atouts. » « Sa compétence et son expérience seront essentielles pour la reconstruction du pays après la crise », abonde le député (LRM, Français de l’étranger) Pieyre-Alexandre Anglade.

« L’adoubement de la droite au sommet de l’Etat »

L’aile gauche de la majorité, à l’inverse, raille le choix d’un « Philippe en moins bien ». « Macron a remplacé un premier ministre techno, de droite et populaire, par un premier ministre techno, de droite et inconnu », résume de manière cruelle un député macroniste issu du PS, déplorant « l’adoubement de la droite au sommet de l’Etat ».

« Jean Castex est a priori plus à droite et plus techno que son prédécesseur mais sans sa popularité. Quelle est la logique ? Sauf à ce qu’Emmanuel Macron veuille gouverner lui-même, mais alors demandons-nous s’il y a encore besoin d’un premier ministre », estime le député (ex-LRM, Val-d’Oise) Aurélien Taché. D’autres jugent, en outre, M. Castex peu compatible avec le tournant écologique et social promis par M. Macron. « Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne l’a pas souvent entendu parler d’écologie pour l’instant », remarque le député (ex-LRM, Maine-et-Loire) Matthieu Orphelin, proche de Nicolas Hulot.

Quant à Edouard Philippe, son entourage récuse l’idée que le choix de démissionner lui aurait été imposé. « Il y avait une logique à cette nomination, il fallait incarner le changement voulu par le président, il était normal de prendre quelqu’un d’autre pour faire autrement », explique un conseiller du désormais ex-premier ministre. Pas question de parler de rupture, donc. « Edouard Philippe sait ce qu’il doit au président. Etre premier ministre a été pour lui le plus grand des honneurs. Il n’a aucune amertume et beaucoup de reconnaissance », ajoute ce proche, qui décrit un homme « heureux et fier du travail accompli ».

Signe de cette bonne entente, l’Elysée a indiqué que M. Philippe allait s’occuper de la structuration de la majorité en vue des prochaines élections. « Le président lui a demandé de l’aider à construire un nouveau parti politique », assure un conseiller. Sorti exsangue des municipales, LRM cherche un second souffle et doit d’urgence être revitalisé sous peine de disparaître. Un moyen aussi pour l’Elysée de garder un œil sur un ex-premier ministre populaire et qui pourrait se présenter comme un recours si M. Macron était en difficulté à l’approche de 2022.

Mais cette mission ne devrait pas démarrer de suite. « Dès ce week-end, Edouard Philippe retourne au Havre », confie son entourage. Habitué à faire passer des messages par le biais de ses boutons de manchette, l’ex-premier ministre avait donné le ton vendredi : il arborait des tongs roses en bouton de manchettes à ses poignets.

4 juillet 2020

Jean Paul Goude

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