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Jours tranquilles à Paris

14 mai 2020

Bruno Bisang - photographe

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14 mai 2020

Vladimir Poutine apparaît comme un chef autoritaire en perte d’autorité

Article de Marie Mendras

Alors que la Russie se révèle comme l’un des principaux foyers de la pandémie de Covid-19, le président semble incapable de mettre le pays en ordre de bataille, analyse la politologue

La Russie arrive en seconde position, derrière les Etats-Unis, en matière de progression quotidienne de l’épidémie. Selon les données officielles, quelque 11 000 nouveaux cas de Covid-19 ont été enregistrés le 11 mai, pour un total qui dépasse les 220 000 personnes contaminées, et plus de 2 000 décès. Scientifiques et médecins assurent que les chiffres réels sont beaucoup plus élevés. La méthode de décompte des décès écarte les personnes qui souffraient aussi d’une autre pathologie, les victimes hors hôpital sont rarement comptabilisées, et les médias subissent un contrôle strict des autorités.

Le gouvernement semble en plein désarroi, ce qui provoque une forte anxiété au sein de la société. L’économie stagne depuis des années et l’arrêt de l’activité en mars laisse les acteurs économiques et les ménages exsangues. L’inadéquation des politiques étatiques invite à s’interroger : où est donc la fameuse « verticale du pouvoir », censée gouverner la vaste Fédération de Russie grâce aux oukases d’un président tout-puissant ?

A la mi-mars, quand les premiers cas ont enfin été reconnus, les autorités centrales ont sous-estimé le danger et n’ont pas proposé de réplique rapide pour juguler l’épidémie. C’est le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, qui a pris l’initiative de décréter le confinement dans la capitale le 30 mars.

Un président anxieux et mal à l’aise

Au même moment, le petit show humanitaire pour porter secours aux New-Yorkais, après les Italiens, a vite tourné au fiasco. De l’avis des bénéficiaires, les matériels envoyés étaient inadaptés et n’ont pas été utilisés (la ville de New York a quand même reçu une facture de 667 000 dollars à payer à l’Etat russe fin avril). En Russie, l’opération de communication n’a pas été appréciée, car les hôpitaux accueillaient de plus en plus de malades et manquaient de tout. Le Kremlin a montré qu’il continuait à dribbler sur le terrain de la concurrence avec l’Occident, alors que tous les Etats se préparaient à combattre le virus chez eux, sur le champ de bataille national.

Vladimir Poutine s’est adressé à la nation plusieurs fois, d’abord moralisateur et détaché, puis sombre et magnanime, en « octroyant » plusieurs semaines de congés confinés et payés (payés par qui ?, se demandent les travailleurs…). Alors qu’on attendait un chef déterminé, c’est un homme anxieux et mal à l’aise qui s’est exprimé devant les écrans de télévision. Le président a décidé de ne pas diriger le combat contre la pandémie, et l’a dit clairement aux gouverneurs des 85 provinces de Russie : à vous de gérer !

Il s’est retiré dans sa datcha présidentielle de Novo-Ogarevo, dans les environs de Moscou. Il se tient à très grande distance et abandonne la gestion d’une crise multidimensionnelle aux administrations et aux entreprises, sous contrôle du FSB et des forces de l’ordre, sans vraiment déléguer ni orchestrer. La répression politique continue, par des juges qui condamnent « à distance ». Les grandes voix de l’opposition, reprises par de nombreux sites et blogs, dénoncent l’incurie du pouvoir. Le fameux « ordre poutinien » paraît incapable de mettre le pays en ordre de bataille.

Les administrations locales en première ligne

Les chefs d’administrations provinciales et municipales sont placés en première ligne, alors qu’ils ont presque tous été choisis pour leur loyauté sans faille et leur faible envergure, et n’ont pas les moyens de remplir leur mission. Les informations fiables sur la propagation du virus dans les provinces manquent, et les priorités pour apporter soins et aides aux malades, aux familles et aux personnes privées de revenus ne sont pas explicitées. Les hôpitaux sont pour la plupart livrés à eux-mêmes. Ils réclament des médicaments, des protections pour les soignants et un soutien logistique. Or, les administrations municipales et régionales n’ont pas de budget autonome pour leur prêter main-forte. Chaque province prend des mesures, parfois appropriées, souvent inapplicables. Nijni-Novgorod a été la première région à imposer l’autorisation de déplacement numérique, soumise à acceptation administrative. Le Tatarstan, la Tchétchénie, la province de Tcheliabinsk et quelques autres ont fermé leurs frontières aux déplacements et transports, contre l’avis du gouvernement central.

Les familles attendent de l’aide des administrations locales et de leurs employeurs, qui, à leur tour, attendent le soutien de l’Etat. La crise actuelle contribue à creuser les inégalités économiques et sociales, déjà très marquées. La méfiance envers « celui venu d’ailleurs » s’aiguise. Les conséquences sont dramatiques pour les millions de personnes vivant en Russie sans passeport russe ni permis de résidence.

Les détracteurs affirment que le président n’a endossé aucune décision pénible pour éviter de perdre un peu plus la confiance des Russes. Depuis l’impopulaire réforme des retraites et les manifestations qui ont eu lieu dans toutes les grandes villes de Russie à l’été 2018, le président n’a jamais retrouvé le niveau de soutien dont il bénéficiait précédemment. Dans un sondage de fin avril, le Centre Levada souligne que 46 % des personnes interrogées se disent satisfaites (contre 48 % insatisfaites) de la réponse des autorités à l’épidémie, un faible résultat dans une société où critiquer est risqué.

La célébration du poutinisme triomphant a tourné court. En début d’année, le Kremlin a fait voter au pas de charge une loi de révision constitutionnelle, signée par le président le 14 mars. Le « vote d’approbation populaire », prévu le 22 avril, a été reporté sine die pour cause de pandémie. Ce coup de force a donné à Vladimir Poutine la possibilité de briguer encore deux mandats de six ans, et de rester chef de l’Etat jusqu’en 2036. Tel est le paradoxe d’un système dirigeant qui prétend au pouvoir sans limite, alors qu’il ne sait pas assurer la protection de 140 millions de personnes, privées de visibilité sur leur avenir proche.

Contrairement aux idées reçues, le système Poutine n’est ni un Etat fort ni un Etat-providence. Un chef autoritaire en perte d’autorité, voilà un cas intéressant qui invite à bousculer la croyance en un effet d’aubaine de la pandémie pour les autoritarismes, alors que les démocraties y perdraient leur âme et leur légitimité.

Marie Mendras, politologue au CNRS et au CERI, enseigne à Sciences Po Paris

 

14 mai 2020

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14 mai 2020

Covid-19 : la crainte d’une « deuxième vague psychiatrique »

Par Henri Seckel

La psychiatrie a traversé le confinement dans le calme, mais les effets de l’épidémie sur la santé mentale commencent à se faire sentir.

L’hécatombe n’a pas eu lieu en psychiatrie. Elle était largement redoutée au début de l’épidémie de Covid-19, dans les services hospitaliers concernés et les établissements spécialisés : « Nos patients ont volontiers des facteurs de risques graves – surpoids, diabète –, et le respect des gestes barrières n’est pas très facile pour eux, alors on s’attendait à un désastre, explique Raphaël Gaillard, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne, dans le 14e arrondissement de Paris. Mais ça n’a pas du tout été le cas. »

Le phénomène n’a pas encore fait l’objet d’études, mais la demi-douzaine de psychiatres hospitaliers interrogés par Le Monde l’ont constaté, comme le professeur Gaillard, qui a fait ses propres statistiques : « Dans un pôle comme le mien, qui reçoit 12 000 personnes par an, avec 150 hospitalisées en permanence, on a eu au pic de l’épidémie 3 % des patients qui avaient des symptômes, contre 19 % des soignants. »

Le tabac – les patients en psychiatrie fument plus que la population générale – est une piste pour expliquer ce décalage. La chlorpromazine en est une autre. L’hôpital Sainte-Anne mène actuellement des essais cliniques sur ce vieux neuroleptique – utilisé dans le traitement des troubles bipolaires et de la schizophrénie – pour évaluer ses éventuels effets protecteurs face au Covid-19.

Pour ce qui est des effets du confinement et du contexte général de peur lié au Covid-19 sur le psychisme, il faudra également patienter : personne ne dispose de données épidémiologiques complètes. Une première enquête de Santé publique France (SPF) menée auprès de 2 000 personnes et publiée le 7 mai donne un aperçu rapide de l’impact de l’épidémie sur la santé mentale du pays.

Une semaine après l’instauration du confinement, le 17 mars, la prévalence de l’anxiété chez les enquêtés était de 26,7 %, deux fois plus que dans une enquête menée en 2017 (13,5 %). La prévalence des troubles du sommeil s’élevait à 66 % fin avril, contre moins de 50 % trois ans plus tôt. L’étude montre également une hausse de la consommation de psychotropes au fil du confinement, passée de 10,4 % des enquêtés début avril à 13,7 % à la fin du mois.

« Sidérés par l’ampleur de l’événement »

En revanche, la prévalence de l’anxiété a chuté au fil des semaines, passant de 26,7 % à 18,1 % fin avril. SPF en conclut que « le confinement, envisagé comme un facteur de risque pour la santé mentale, aurait plutôt agi pour une majorité de la population comme un facteur de protection contre l’anxiété, en réduisant efficacement le risque d’exposition au virus ».

Autre conséquence du confinement, l’impact du Covid-19 sur la santé mentale ne s’est pas vu tout de suite dans les hôpitaux. « Il y a d’abord eu un moment d’extrême diminution de la fréquentation des urgences psychiatriques, notamment par peur de venir consulter à l’hôpital », témoigne Michel Lejoyeux, responsable du département psychiatrie et addictologie à Bichat (Paris 18e). « Les gens ont été sidérés par l’ampleur de l’événement, ce qui a peut-être entraîné une moindre fréquence de certains troubles, ajoute Pierre Vidailhet, psychiatrie au CHU de Strasbourg. Et puis la réorganisation des systèmes de soins a fait que le système habituel était moins accessible. »

Depuis la fin avril, les urgences psychiatriques de nombreux hôpitaux retrouvent un rythme normal, et les pathologies du confinement apparaissent, notamment les bouffées délirantes aiguës de patients affirmant être à l’origine du Covid-19 ou en détenir le remède. « Les idées délirantes empruntent à l’air du temps, il n’est pas étonnant qu’elles s’organisent autour du virus, comme elles pourraient le faire autour d’un attentat », note le professeur Gaillard, qui s’étonne en revanche d’en avoir constaté chez des patients de plus de 45 ans et sans aucun antécédent psychiatrique. « C’est très atypique. Habituellement, ces bouffées, c’est entre 15 et 30 ans. On ne comprend pas très bien s’il s’agit de l’angoisse liée au confinement, ou de l’effet du virus lui-même, qui pourrait donner des symptômes neurologiques. »

La crainte de lendemains douloureux

Il est trop tôt pour tirer des conclusions, mais les urgentistes ont remarqué certains comportements. «J’ai vu des gens qui avaient si peur qu’ils ne pouvaient plus sortir de chez eux, qu’ils se lavaient tout le temps, etc., explique Victor Pitron, psychiatre aux urgences de la Salpêtrière (Paris 13e). Certains ont fait des fixations sur des symptômes physiques – mal au ventre, toux – qui d’habitude seraient passés inaperçus. Si ça perdure, ça peut devenir un trouble psychiatrique à part entière. » Autre particularité de cette épidémie : « Beaucoup de gens sont fragilisés par le fait de n’avoir pu rendre visite à des proches qui sont décédés ou aller à l’enterrement à cause du confinement. »

Phénomène majeur des deux derniers mois, les ruptures de traitement provoquées par le confinement laissent craindre des lendemains douloureux à Matthieu Gasnier, psychiatre à l’Hôtel-Dieu (Paris 4e) : « Du fait de la difficulté de l’accès aux soins, plein de gens avec des maladies chroniques ont décompensé parce que, tout à coup, ils n’ont pas eu un traitement qu’ils devaient avoir, ou n’ont plus bénéficié des soins de proximité qui les aidaient dans leur maladie. »

Beaucoup de patients en psychiatrie ont été renvoyés chez eux en début de confinement. De nombreux centres médico-psychologiques (CMP) ont réduit la voilure. Et le téléphone ne vaut pas toujours un tête-à-tête avec un médecin qui sert de boussole. « Il y a eu une diminution globale des consultations en CMP, poursuit M. Gasnier. Mais les patients et leurs troubles n’ont pas disparu. On va probablement, avec le déconfinement, avoir à traiter une vague de patients qui ont été moins bien soignés pendant le confinement. On s’attend notamment – c’est très théorique, car on n’a pas assez de recul – à une explosion des symptômes des troubles du registre dépressif et anxieux. »

« Augmentation nette des conduites addictives »

L’addictologie, elle aussi, est au cœur des inquiétudes. « Il y a une grosse alerte sur ce sujet, souligne Matthieu Gasnier. On constate une augmentation assez nette des conduites addictives, notamment l’alcool. Le confinement ne crée par une dépendance, mais peut aggraver une vulnérabilité qu’on a déjà, surtout chez les personnes pour qui la vie sociale et le travail étaient des facteurs protecteurs. » « Environ 8 % de nos patients ont rechuté », affirme par exemple Eric Peyron, psychiatre qui suit 200 personnes au centre AddiPsy, à Lyon, et qui estime par ailleurs « entre 10 et 15 % » les patients avec qui le contact a été perdu, et chez qui le risque de rechute est fort. Cela dit, il faut aussi noter que « 5 à 6 % des patients se sont sevrés au cours du confinement ».

Car ce confinement n’a pas été un drame dans tous les domaines en psychiatrie. « Dans l’ensemble, nos patients l’ont plutôt bien vécu », explique même Raphaël Gaillard, à Sainte-Anne. « Par exemple, les patients qui souffrent de troubles schizophréniques, moins sollicités sur le plan social, se sont souvent bien adaptés à l’isolement », constate Pierre Vidailhet. « Mais ils vont avoir des problèmes quand il va falloir ressortir, anticipe Antoine Pelissolo, chef de service de psychiatrie à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne). Leurs troubles initiaux risquent d’être majorés par un contexte très anxiogène. »

« Je pense que la vague psycho-trauma va être aussi importante que la vague infectieuse qu’on a connue », redoute Pierre Philip, directeur de la clinique du sommeil du CHU de Bordeaux. Va-t-on alors vers un engorgement des services de psychiatrie ? Beaucoup le craignent, car la crise économique et sociale est à l’horizon. « Et tans un tel contexte, la psychiatrie est généralement ultra-sollicitée, rappelle Raphaël Gaillard. L’incertitude sur l’emploi et sur les ressources va avoir un impact majeur. »

14 mai 2020

Anna Johansson

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14 mai 2020

Macron-Philippe : la règle du jeu

alain duhamel

Par Alain Duhamel

Les relations souvent conflictuelles entre président et Premier ministre de la Ve, surtout si ce dernier a des ambitions présidentielles, conduisent à se demander si un régime aussi présidentiel ne fonctionnerait pas mieux sans Premier ministre…

En France, il n’y a pas de tandem politique heureux au sommet de l’Etat. C’est la malédiction de la dyarchie qui nous gouverne, quelle que soit la couleur politique, quelles que soient les circonstances : les tensions entre le président de la République et le Premier ministre sont inévitables. Dans les régimes parlementaires européens où le chef de l’Etat n’a qu’un rôle modeste et où le chef du gouvernement détient l’essentiel du pouvoir exécutif, les relations sont en général apaisées. Les difficultés viennent plutôt des rapports entre partenaires au sein des coalitions. Ici, avec notre régime néoprésidentiel, les tiraillements, les crispations, voire les orages entre l’Elysée et l’Hôtel de Matignon affleurent ou s’affichent éternellement. Le couple Macron-Philippe a beau être l’un des plus soudés, comme le furent ceux que formaient le général De Gaulle et Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing et Raymond Barre ou encore François Mitterrand et Pierre Mauroy, il n’échappe pas à la règle. Edouard Philippe est la loyauté même, Emmanuel Macron le consulte sans cesse, leurs rapports sont directs, cordiaux, bien moins protocolaires qu’à la génération précédente, cela n’empêche en rien les désaccords. Qu’ils s’agissent des gilets jaunes, des retraites ou du coronavirus, chaque crise provoque des divergences : Macron est plus fluctuant, Philippe est plus raide. Le Président aime le risque, le Premier ministre préfère la méthode. L’un choisit de s’exposer, l’autre préfère exposer. La hiérarchie est toujours respectée mais la décision n’en est pas moins partagée. Le Président est créatif, voire téméraire, le Premier ministre est réaliste, voire vétilleux. Les modalités de l’entrée en confinement n’avaient pas évité les couacs, le déconfinement relatif ne les évite pas plus. Le duumvirat n’est pas un chemin tranquille. Il ne l’a jamais été.

Le Général et Michel Debré, même si le second éprouvait une passion politique absolue pour le premier, se sont durement affrontés sur l’Algérie. Le Général et Georges Pompidou, quelle qu’ait été la force de leurs liens, ont franchement divergé en mai 1968. Le président Pompidou et Jacques Chaban-Delmas, deux gaullistes gaulliens, ont divorcé avec fracas. Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac, que tout distinguait, ont rompu violemment. Valéry Giscard d’Estaing et Raymond Barre, que tout rapprochait, ont mal vécu leurs dernières années communes. François Mitterrand et Pierre Mauroy, si proches, n’ont pas eu les mêmes réflexes lors de la grande crise monétaire de 1983. Avec Laurent Fabius, son dauphin de cœur, l’homme de Latche a plus d’une fois grincé. Avec Michel Rocard, il a formé le pire couple de gauche. Le tandem Chirac-Villepin a été ponctué d’éclats incessants. Nicolas Sarkozy a asservi François Fillon. François Hollande et le fidèle Jean-Marc Ayrault se sont opposés sur la réforme fiscale. Avec Manuel Valls, les crispations se sont peu à peu durcies. Sous la Ve République, entre le président et le Premier ministre, la règle du jeu est l’alliance conflictuelle.

Avec néanmoins deux versions, selon qu’émerge ou pas une ambition présidentielle chez le Premier ministre. Si oui, l’entente se disloque. Si non, les tensions se supportent. Entre Pompidou et le Général, la confiance s’est érodée lorsque le meilleur Premier ministre de la Ve a commencé à songer, tout l’y poussait, à l’Elysée. Même chose avec Chaban-Delmas qui piaffait, puis Chirac qui ruait. En revanche, pas d’objectif présidentiel chez Pierre Messmer, Raymond Barre (en 1981) ou Pierre Mauroy, donc des tensions ou des crispations beaucoup plus maîtrisables. Les cohabitations (Mitterrand-Chirac, Mitterrand-Balladur, Chirac-Jospin) ont, elles, par principe, opposé deux logiques présidentielles et ont donc été tumultueuses. Michel Rocard, Premier ministre de François Mitterrand sous son second septennat, n’était pas un rival direct puisque le Président n’allait pas se représenter en 1995 mais son ambition présidentielle assumée aigrissait ses rapports déjà difficiles avec un chef de l’Etat qui le soupçonnait de ne songer qu’à sa popularité personnelle. De même, si Chirac terminait lui aussi son second mandat et s’il avait plus d’amitié pour Villepin que Mitterrand pour Rocard, l’appétit présidentiel du Premier ministre rendit plus ambigus les rapports entre les deux hommes. Un chef de gouvernement qui regarde fixement en direction de l’Elysée est un Premier ministre à problèmes. Emmanuel Macron et Edouard Philippe n’en sont pas là. Même si l’extrême instabilité, l’extrême imprévisibilité de la période actuelle interdit d’exclure quelque hypothèse que ce soit, le Président et le Premier ministre ne se situent pas jusqu’ici en position de rivalité. Leurs dissentiments relèvent beaucoup plus, outre leurs profondes différences de tempérament, de la fatalité des tensions entre deux têtes pour un seul pouvoir. Ce qui incite à se demander, comme l’a fait Hollande, si un régime officiellement présidentiel, donc sans Premier ministre, n’est pas dans la logique de la Ve République, a fortiori depuis l’instauration du quinquennat.

14 mai 2020

SERPENT ROUGE UNE HISTOIRE VISUELLE DE MINHIA DEFOY {EDITORIAL EXCLUSIF / NSFW}

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Minhia Defoy est une jeune photographe vivant à Paris (FR). Elle a toujours été attirée par l'art, d'abord avec le dessin et la danse lorsqu'elle était enfant, mais en grandissant, elle a toujours découvert de nouveaux intérêts dans le domaine de l'art, comme la photographie et la mode. Aujourd'hui, elle se soucie toujours de travailler sur toutes ces compétences différentes car elles sont essentielles pour elle, mais la photographie a pris une place plus importante ces derniers temps car elle lui permet de réaliser les images qu'elle crée dans son esprit tout en pouvant rencontrer de nombreuses personnes et avoir cette faim. découvrir de nouveaux lieux de tournage, de nouvelles façons de voir les choses mais toujours composer avec une réalité concrète.

«Mon travail est une représentation de ma façon très esthétique de voir le monde et les gens, car je peux voir la beauté et le mystère dans chaque chose ou personne. Il est souvent lié à des thèmes comme la réflexion, la mélancolie, l'érotisme, la psychologie et le féminisme, toujours avec une touche d'atmosphère rêveuse. »

«Dans la Bible, le Serpent est représenté comme une tentation, un péché, qui a fait honte à la femme Eve qui l'a approchée. Ici, je voulais éclairer une femme embrassant ces serpents pour protester à nouveau contre la "salope-honte" et la "honte corporelle". Elle assume complètement et en phase avec ses désirs sexuels et son corps nu, dans une société où trop de gens pensent encore que les femmes devraient cacher leurs désirs et leur nature animale pour ne montrer qu'un attendu, accepté Le modèle Nayeon est une étudiante en art principalement concentrée sur le féminisme radical faisant des performances, des collages et des projets de photographie. La voici dans un lieu hors du temps, en totale harmonie avec elle-même, entourée de rouge, couleur de la passion, de l'érotisme et des menstruations.

VOIR PLUS DU TRAVAIL DE MINHA 

https://www.instagram.com/minhia_/?hl=fr

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13 mai 2020

La Sainte Chapelle

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13 mai 2020

L’Europe face à ses nouveaux pauvres

Article de Isabelle Mandraud

La crise fait basculer dans le dénuement des milliers de citoyens de l’ouest du continent. Dans les pays les plus touchés par le virus, la demande d’aide alimentaire s’est accrue de 25 % à 30 %

Pour la première fois depuis sa création en 1971, une équipe de Médecins sans frontières (MSF) intervient au Royaume-Uni, une autre en Allemagne. Dans la capitale britannique, onze employés de l’ONG, en partenariat avec un hôpital universitaire londonien, fournissent ainsi depuis le 11 avril un soutien médical et logistique aux sans-abri, devenus encore plus vulnérables avec la pandémie de Covid-19. Et cette aide inclut, désormais, des nouvelles populations qui ont perdu leur emploi – ou un job précaire – avec la fermeture des bars, restaurants et commerces, et dont les conditions de logement, la promiscuité, sont devenues sources aggravantes de contamination.

« S’il est très inhabituel pour MSF de lancer de grandes activités dans des pays à revenu élevé, il est tout à fait normal que nous apportions une aide humanitaire d’urgence vitale là où elle est nécessaire », souligne Rosamund Southgate, coordinatrice médicale pour MSF au Royaume-Uni. Inédite aussi, l’initiative prise depuis le 14 avril, à Bruxelles, par le Parlement européen de mettre à disposition sa cantine pour concevoir et délivrer 1 000 repas par jour aux personnes en difficulté, avant de faire de même, quelques jours plus tard, à Strasbourg, et dans ses locaux au Luxembourg. « Pour l’instant, en accord avec les municipalités, ce dispositif est prévu jusqu’à fin juin, mais sans doute sera-t-il prorogé jusqu’à fin juillet, voire au-delà », avance Jaume Duch, porte-parole du Parlement européen.

La crise sociale et économique prend le relais de la crise sanitaire, et elle n’épargne pas les pays développés. Partout, en Europe ou aux Etats-Unis, l’arrêt brutal d’activités lié au confinement a fait basculer des milliers de personnes dans le dénuement, qui viennent grossir les rangs des plus démunis. La reprise progressive de l’activité ne devrait apporter qu’un répit très limité, devant la catastrophe annoncée dans le tourisme, les spectacles ou la restauration. Conséquences : les files s’allongent pour la distribution d’aide alimentaire. Des coupons ont fait leur apparition. Et sur les sites des associations caritatives, les appels aux dons se font plus pressants.

« La crise sociale est devant nous »

Dans un appel commun lancé fin avril, la Fédération européenne des banques alimentaires (FEBA), Feeding America (FA) et The Global FoodBanking Network (GFN) se disent engagées dans une « lutte massive » pour « nourrir un nombre toujours croissant de familles et de personnes », dans un contexte d’autant plus difficile que « les canaux de distribution alimentaire sont perturbés par les interruptions de transport et les mesures de quarantaine ».

« La crise sociale est devant nous, et d’expérience, nous savons qu’elle dure plus longtemps. Si l’Europe de l’Est semble un peu plus épargnée, en Italie, en France, en Espagne, en Belgique, la demande d’aide a déjà augmenté de 20 % à 25 %. En Grande-Bretagne, c’est encore plus difficile. Partout, les mises au chômage s’amoncellent », confirme Jacques Vandenschrik, président de la FEBA, un réseau présent dans vingt-neuf pays européens. « Avant, poursuit-il, 30 millions de personnes se trouvaient déjà en situation matérielle de pauvreté en Europe. Et dire qu’on pensait que ce chiffre tomberait à 20 millions en 2020… »

Dans la seule ville de Milan, épicentre de l’épidémie en Italie, huit hubs de distribution d’aide alimentaire organisés par une multitude d’associations ont vu le jour ; à Barcelone et Madrid, en Espagne, les demandes ont triplé, dont 40 %, selon Caritas Madrid, provenant de personnes qui n’avaient jamais eu recours à ce type d’aide jusqu’ici ; dans le nord-est du pays, le journal El Periodico de Aragon faisait état, au 6 mai, de 24 000 personnes secourues à Saragosse et dans toute la région, un « chiffre qui ne cesse de croître ».

En France, « nous sommes confrontés à la même situation », déplore le président de la Banque alimentaire, Jacques Bailet, qui cite l’une des opérations menées fin avril dans un lycée professionnel de Seine-Saint-Denis, au cours de laquelle « plus de 600 bénéficiaires ont reçu une aide alimentaire en moins de trois heures ». « Il est trop tôt pour comprendre pleinement l’impact de la crise sur le revenu des ménages, mais on assiste à une énorme augmentation du chômage à la suite des mesures prises pour ralentir la propagation du Covid-19, note de son côté l’eurodéputée (PPE, centre droit) irlandaise Maria Walsh. Selon les dernières estimations en avril, nous sommes passés en Irlande d’un taux de chômage modeste de 5,4 % à 28 %. »

« Même si les Pays-Bas ne sont jamais entrés dans un confinement complet comme Italie ou en Espagne, l’économie a aussi considérablement ralenti, témoigne de son côté l’eurodéputée (S&D, centre gauche) néerlandaise Agnes Jongerius. Beaucoup de personnes avec des contrats flexibles ont été licenciées, des indépendants ont vu leurs activités réduites. Et même si le gouvernement néerlandais a pris certaines mesures, comme, par exemple, la possibilité de reporter le paiement de certaines taxes, un nombre croissant de personnes aux Pays-Bas sont obligées de recourir aux banques alimentaires. Et ce n’est qu’un début. Dans certaines villes, comme Amsterdam, cette augmentation est déjà de 30 %. »

A Londres, l’Olympia Center, une salle de spectacle située à West Kensington, a mis ses locaux à disposition pour distribuer des colis à 250 personnes par jour en moyenne. Au bout d’un mois de confinement, la Food Foundation, au Royaume-Uni, a publié les résultats glaçants d’une étude réalisée du 24 au 29 avril, selon laquelle 5 millions de Britanniques avec des enfants de moins de 18 ans se trouvaient alors en situation d’insécurité alimentaire, soit le double du niveau établi par la Food Standards Agency en 2018. Parmi les 621 000 enfants qui avaient accès à des petits déjeuners gratuits avant la crise, seuls 136 000 ont pu bénéficier d’un substitut.

Moyens jugés insuffisants

Associée à la distribution alimentaire menée à Genève, en Suisse, par l’association La Caravane de la solidarité, MSF est arrivée à la même conclusion sur la base d’un questionnaire distribué dans les longues files d’attente qui se sont formées devant la patinoire olympique de la ville réquisitionnée pour l’occasion. « Quarante pour cent des personnes présentes possédaient un travail mais avec des droits sociaux insuffisants, rapporte Patrick Wieland, chef de projet chez MSF Suisse. Ce sont des aides à domicile, des femmes de ménage, des employés de restaurant dont les petites économies ont fondu en peu de temps et qui basculent dans l’indigence. »

Les répercussions de l’isolement et de l’arrêt d’activités ont été d’autant plus violentes qu’elles ont eu lieu dans un contexte tendu, depuis la crise financière de 2008. « On ne peut pas dire qu’on partait de zéro. Avant l’épidémie, le budget européen aidait déjà 13 millions de personnes à se nourrir grâce au Fonds européen d’aide aux plus démunis [FEAD] », indique Jaume Duch, porte-parole du Parlement européen. Les moyens alloués aux Etats par le FEAD, créé en 2014 et doté de 3,8 milliards d’euros, sont aujourd’hui unanimement jugés insuffisants.

« En Italie, selon des données récentes, nous estimons que nous aurons une augmentation de près de 1 million de pauvres, soit au total près de 4 millions de personnes en situation de pauvreté absolue », affirme l’eurodéputée (S&D) italienne Elisabetta Gualmini. « L’introduction d’une forme de revenu minimum à partir de 2016 avait réduit le nombre de personnes dans le besoin avant la pandémie,mais aujourd’hui, ajoute-t-elle, le gouvernement s’apprête à adopter des mesures d’urgence supplémentaires, en plus des 80 milliards d’euros déjà débloqués. Jamais, dans l’histoire italienne des cinquante dernières années, il n’y avait eu une telle intervention financière de l’Etat. »

En dépit des sommes colossales annoncées par les gouvernements pour tenter d’endiguer les conséquences sociales et économiques de l’épidémie, la situation ne fait qu’empirer.

13 mai 2020

Anna Johansson

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