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Jours tranquilles à Paris

3 novembre 2020

Présidentielle américaine, Jour J - Anxieuse et divisée, l'Amérique se rend aux urnes

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COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

Les Américains doivent élire ce mardi leur président pour les quatre années à venir. Près de 100 millions d’électeurs ont déjà voté par anticipation. A la veille du scrutin, les sondages donnaient toujours Joe Biden en position de force, mais le président Donald Trump pourrait les faire mentir, comme en 2016.

Jour J, ou plutôt dernière ligne droite pour la présidentielle américaine. Les Américains sont appelés aux urnes, ce mardi 3 novembre, pour élire le président des États-Unis pour les quatre années à venir. Mais alors que près de 100 millions d’électeurs ont déjà voté par anticipation – un “stupéfiant” record de participation précoce, note Vox, qui s’explique notamment par la volonté d’éviter la foule en pleine pandémie et “montre que cette élection revêt une importance énorme” –, cette journée a plutôt des airs de sprint final avant la fermeture des bureaux de vote.

A la veille du scrutin, les sondages donnaient toujours Joe Biden en position de force. Mais ceux-ci “nous ont trompés il y a quatre ans”, mettait en garde CNN. Et l’histoire récente semble au contraire suggérer que “Trump devrait gagner” : “seuls trois présidents sortants au cours de la vie de M. Trump ont perdu leur candidature pour un second mandat.”

“Des visions de l’avenir opposées”

Le chef de l’Etat a prévu de rester à la Maison-Blanche ce mardi, alors que l’ancien vice-président de Barack Obama a fait savoir qu’il continuerait sa campagne dans l’Etat clé de Pennsylvanie jusqu’à la dernière minute, avec des interventions le jour même du scrutin à Scranton et Philadelphie.

Le républicain et son adversaire démocrate avaient délivré lundi leurs derniers discours de campagne, “offrant des visions de l’avenir opposées”, dans “un tourbillon de tensions politiques, d’inquiétudes sanitaires et d’incertitude économique”, raconte le Wall Street Journal. Trump s’est déplacé en Caroline du Nord, en Pennsylvanie, dans le Wisconsin et le Michigan, tandis que Biden faisait campagne à Philadelphie et dans l’Ohio.

“Tout le monde tremble”

“Joe Biden était sur scène avec Lady Gaga à Pittsburgh”, complétait un journaliste de CNN dans une analyse. “Ces intermèdes ressemblaient à une campagne politique de terrain qui serait menée dans une année normale, à des initiatives classiques pour inciter les jeunes à aller voter à un moment où l’ensemble du système démocratique pouvait vaciller. (…) Il est clair que Biden essaie de montrer qu’il n’a pas la main qui tremble alors que tout le monde frémit.”

Le journaliste de CNN lui-même confiait lundi soir son “malaise”.

“J’ai l’estomac noué ce soir. Je me demande honnêtement ce qui va suivre et je n’arrive pas à me débarrasser de ce malaise. Y aura-t-il de la violence si Trump gagne ? Y aura-t-il de la violence si Trump perd ? Les villes, les États et les entreprises se sont tous préparés à l’éventualité de troubles civils. Une ‘clôture infranchissable’ a été érigée autour de la Maison-Blanche.”

“La fin de la campagne 2020 est déconcertante : vandalisme, actes d’intimidation” et des précautions en vue d’éventuelles “émeutes”, notait de son côté le New York Times. “Les préparatifs reflétaient une anxiété nationale plus large entourant la compétition entre M. Trump et Joseph R. Biden Jr. et la crainte croissante que, quel que soit le vainqueur, les conséquences de l’élection pourraient inclure la violence.”

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3 novembre 2020

Crazy Horse

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3 novembre 2020

USA Politique - Congrès, élus locaux et champignons hallucinogènes : ces autres élections américaines

COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

Les Américains ne choisissent pas que leur président ce 3 novembre. Le contrôle du Sénat et de la Chambre des représentants est en jeu, ainsi que de multiples mandats. Et les électeurs devront se prononcer sur de nombreuses problématiques locales.

La présidentielle américaine est le principal enjeu de ce scrutin du 3 novembre, mais il n’est pas le seul. Selon les listes électorales où ils sont inscrits, les Américains sont aussi invités à choisir un sénateur, un député, un maire ou à se prononcer sur la légalisation du cannabis ou la fin des libérations sous caution.

La bataille pour le contrôle du Sénat

“Démocrates et républicains vont se battre dans tout le pays pour le contrôle du Sénat”, souligne USA Today. La chambre haute compte actuellement 53 sénateurs républicains pour 47 démocrates. Mais sur les 35 sièges remis en jeu, 23 appartiennent aux républicains, qui risquent de perdre une majorité qu’ils détiennent depuis 2014, de l’aveu même du leader républicain au Sénat, Mitch McConnell.

D’après la BBC, les élections à suivre en particulier concernent le sénateur de Caroline du Sud, Lindsey Graham, un allié de Donald Trump, et la sénatrice du Maine Susan Collins, une républicaine modérée qui pourrait être sanctionnée dans un État “où Trump est profondément impopulaire”.

Vers une majorité démocrate renforcée à la Chambre des représentants ?

Les démocrates devraient “renforcer leur majorité à la Chambre des représentants”, annonce Fox News. En 2018, le parti de Joe Biden avait reconquis la Chambre – réélue intégralement tous les deux ans – en faisant basculer les banlieues de grandes villes comme Los Angeles, New York, Philadelphie, Denver et Washington, rappelle le site de la chaîne conservatrice.

Deux ans plus tard, les démocrates devraient conserver la plupart de leurs acquis et gagner certains sièges dans les banlieues républicaines de Cincinnati, Saint Louis, Omaha, Phoenix, San Antonio ou Indianapolis. “Trump agit de plus en plus comme un repoussoir dans les banlieues traditionnellement conservatrices”, a déclaré à Fox News l’expert David Wasserman.

Pour Vice, il faudra notamment suivre les performances de l’aile gauche du parti démocrate. D’après le site américain, il y a de bonnes raisons de penser que les effectifs du Squad – le nom donné aux groupes formé par les quatre députées progressistes Alexandria Ocasio-Cortez, Ilhan Omar, Rashida Tlaib et Ayanna Pressley – pourraient “doubler le jour de l’élection”.

Gouverneurs, maires et multiples élus locaux

Dans 11 États, les électeurs choisiront également leur gouverneur, rapporte FiveThirtyEight. Des élections locales auront également lieu dans 56 des 100 villes les plus peuplées d’Amérique, dont 29 élections municipales, précise le New York Daily News.

De multiples mandats électifs sont parfois en jeu. À Hawaii, par exemple, les électeurs du comté d’Hawaii doivent choisir leur maire, les membres du conseil d’administration du Bureau des affaires hawaiiennes, et certains électeurs doivent également se prononcer sur les élections au conseil de comté, au Sénat et à la Chambre des représentants de l’État, rapporte le Hawaii Tribune Herald.

Des référendums dans 32 États

Dans quelque 32 États, les électeurs sont également invités à se prononcer sur plus de 100 mesures ou référendums, ajoute la BBC. Dans le Mississippi, ils voteront pour le maintien ou non de l’emblème confédéré sur le drapeau de l’État. En Californie, où 12 “propositions” figurent sur les bulletins de vote, les électeurs doivent choisir entre un système de libération sous caution et des algorithmes prédictifs, rapporte CNN. Mais aussi donner leur avis sur la reclassification des contrats des travailleurs de la “gig economy”.

Il est également question de cannabis en Arizona, dans le Montana, dans le New Jersey et dans le Dakota du Sud, où les électeurs pourraient le légaliser à des fins récréatives – ce qui est déjà le cas dans 11 États américains. Et selon Fox News, les électeurs de l’Oregon décideront s’il faut autoriser l’utilisation médicale réglementée de la psilocybine – le composé psychédélique naturel produit dans les champignons hallucinogènes.

3 novembre 2020

Jean-Marie Périer : Déjà hier : Une année sur Instagram

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J’ai eu envie d’écrire ces chroniques sur Instagram afin de retrouver l’idée de départ d’Internet, du temps où l’on pensait que ce nouveau média allait réunir les gens. Résultat, à cause de l’acceptation des pseudos, cette belle invention est devenue le déversoir de la lâcheté, la bêtise, la haine et le pire des sentiments humains. Seul Instagram a conservé une certaine tenue et puis, au départ, c’est un média visuel plutôt destiné aux jeunes, ils « postent » un selfie, « hashtag » et au revoir. Donc j’ai trouvé intéressant de voir si on pouvait susciter l’intérêt en écrivant des textes. Il semblerait que ce soit le cas. De plus, l’exercice est techniquement intéressant puisque la limite accordée tourne autour de 2170 signes, autrement dit une page de texte. C’est bien quand on n’a rien à dire mais, parfois, pour raconter une histoire, voire évoquer la vie de quelqu’un, c’est court. Dans ces chroniques, mon propos ne vise qu’à mettre en valeur des gens que j’aime ou pour lesquels j’ai de l’estime. On m’a parfois reproché de trop faire d’éloges que voulez-vous, j’aime admirer, voire m’emballer pour certains que le destin a mis sur ma route. Il me semble indispensable de ne pas perdre la faculté d’admiration. Tant pis pour ceux qu’attire la vogue des cynismes. Les petits juges bien calés sur leurs coussins d’ironie qui inspirent des ricanements pour expirer le crachin des rumeurs. J’aime admirer parce que ça me fait plaisir et que, en ce qui me concerne, hors du plaisir, il n’y a pas grand-chose.

Pour ceux qui me reprochent parfois de faire un texte trop long, je fais cadeau de cette phrase de Blaise Pascal dans une lettre à une femme qui lui reprochait un texte trop long à lire : « Je vous prie, Madame, de pardonner l’excessive longueur de mon texte, mais je n’ai vraiment pas eu le temps de faire court. »

Jean-Marie Périer

Jean-Marie Périer : Déjà hier : Une année sur Instagram

Avec la contribution de Patrick Modiano (Préface)

Éditeur : Calmann-Lévy (28 octobre 2020)

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3 novembre 2020

A l’université ­d’Ottawa, le mot qui ne doit jamais être prononcé

Par Hélène Jouan, Montréal, correspondance - Le Monde

Pourtant cité avec précaution dans un contexte académique, le terme « nègre » a valu à une professeure d’histoire une campagne de dénigrement et une suspension. De quoi enflammer le débat sur la liberté d’expression.

Un mot prononcé lors d’un cours et jugé « ­offensant », le nom d’un prof jeté en pâture sur les réseaux sociaux, une hiérarchie qui renonce à défendre la liberté d’expression. C’est une histoire canadienne. Verushka Lieutenant-Duval est professeure d’histoire et théorie de l’art à l’université d’Ottawa (Ontario), spécialisée dans la représentation des ­identités sexuelles dans les arts visuels.

Le 23 septembre, elle aborde dans son cours le concept de « resignification subversive », expliquant que le terme « queer », insultant à l’origine pour les homosexuels, avait été repris par la communauté LGBT pour en faire un puissant marqueur identitaire. « D’autres mots peuvent faire l’objet d’une telle réappropriation », explique-t-elle alors, citant à l’appui « la façon dont des artistes de la communauté afro-américaine tentent à leur tour de détourner l’insulte raciste “nègre” ».

« Une Blanche ne devrait jamais utiliser ce mot »

Nigger, en anglais, quatre consonnes et deux voyelles prononcées dans leur entièreté, en lieu et place de la circonvolution de langage déjà en usage sur les campus américains : on ne dit plus « nègre » mais « le mot en n » (N word, en anglais). Dans la soirée, une de ses élèves lui écrit pour lui faire part de son malaise, « une Blanche ne devrait jamais utiliser ce mot », lui intime-t-elle. La professeure s’excuse. Trop tard.

Une poignée d’élèves bientôt rejoints par le syndicat étudiant de l’université appellent à des sanctions, diffusent son adresse et son numéro de téléphone sur les réseaux sociaux. Elle reçoit des tombereaux d’insultes et de menaces. « J’ai peur, avoue-t-elle le 21 octobre à la radio publique canadienne. Si j’avais su qu’il y avait des mots interdits dans le cadre d’un cours universitaire, (…) je l’aurais dit d’une autre façon. Mais je croyais qu’on était protégé par la liberté académique. »

« EN TANT QUE SPÉCIALISTE D’ALEXANDRE DUMAS, JE ME DEMANDE SI JE M’AUTORISERAIS À PARLER DE LA GRAND-MÈRE DE L’ÉCRIVAIN, ANCIENNE ESCLAVE, PUISQUE MES AÏEUX N’ONT PAS SUBI L’ESCLAVAGE. » MAXIME PRÉVOST, PROFESSEUR DE FRANÇAIS À L’UNIVERSITÉ D’OTTAWA

Illusion. Le recteur de ­l’université, Jacques Frémont, la suspend trois semaines, propose pour son retour un « accommodement » aux étudiants désireux de se soustraire à ses cours, en leur offrant la possibilité de suivre un autre module. Il cède surtout à l’injonction bruyante de cette minorité « blessée ». Arguant que cet incident intervient dans une prise de conscience globale des agressions ou micro-agressions racistes que subissent les étudiants noirs et racisés de l’université, il affirme dans un communiqué que « les membres des groupes dominants n’ont tout simplement pas la légitimité pour décider ce qui constitue une micro-agression ». Le simple fait que des personnes se disent « offensées » suffit, selon lui, à caractériser l’offense : la fautive est désignée.

Maxime Prévost, professeur de français à l’université d’Ottawa, a signé avec trente-trois de ses collègues une lettre de soutien à Verushka Lieutenant-Duval, car il craint que ce renoncement n’entraîne d’autres censures ou autocensures. « En tant que ­spécialiste d’Alexandre Dumas, je me demande si je m’autoriserais à parler de la grand-mère de l’écrivain, ancienne esclave, puisque mes aïeux n’ont pas subi l’esclavage. » Soupçons d’appropriation culturelle, mots interdits… Ces professeurs redoutent de devoir passer sous silence des pans entiers de réalités historiques, contraints de ne plus dispenser que le savoir autorisé par des étudiants devenus prescripteurs.

Accusés à leur tour d’être « racistes » dans une tribune relayée par 559 de leurs collègues de sciences sociales en appui aux étudiants outragés, les trente-quatre signataires ploient sous des centaines de Tweet appelant à leur « rééducation ». L’un de ces professeurs a préféré confier ses enfants à son ex-compagne, le temps de laisser passer la tempête. Un autre confie : « Je me refuse à faire le parallèle avec ce qui vient de se passer en France, mais ­ forcément, j’ai pensé à ce qui venait d’arriver à Samuel Paty. »

Des précédents

« Le mot qu’on ne peut pas dire » a déjà valu à l’animatrice Wendy Mesley la perte de son émission sur la chaîne de radio publique anglophone CBC. Une enseignante de l’université Concordia, à Montréal, Catherine Russell, fait l’objet d’une cabale pour le même motif. Les deux s’étaient aventurées à citer le titre du pamphlet de l’indépendantiste Pierre Vallières, Nègres blancs d’Amérique, publié en 1968, livre fondateur et controversé, dans lequel il établissait un parallèle entre les francophones canadiens et les Afro-Américains, victimes d’un même processus de colonisation.

« COMMENT PEUT-ON EXPLORER TOUT CE QUE CE MOT CHARRIE COMME HISTOIRE DOULOUREUSE SI ON LE PURGE DU LEXIQUE ? » DOMINIQUE ANGLADE, PREMIÈRE FEMME NOIRE À DIRIGER UN GRAND PARTI POLITIQUE AU CANADA

Dominique Anglade, première femme noire à diriger un grand parti politique au Canada, le Parti libéral du Québec (PLC), s’insurge contre cet interdit qui obère toute possibilité d’apprentissage et de débat. « Comment peut-on explorer tout ce que ce mot charrie comme histoire douloureuse si on le purge du lexique ? Comment enseigner les poètes et ­penseurs de la négritude comme Aimé Césaire ou Frantz Fanon en usant de circonvolutions ? », s’interroge-t-elle. Et que conseiller à ceux qui voudront se pencher sur l’étude du premier roman de l’écrivain canado-haïtien Dany Laferrière, Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, une satire féroce de tous les stéréotypes racistes ?

La « n omerta » a enflammé tout le pays, laissant face à face ceux qui considèrent que l’effacement de la distinction entre l’utilisation raciste d’un mot et son usage pour en dénoncer le racisme est une première lâcheté qui viendra restreindre la liberté d’enseigner et ceux qui estiment que la seule utilisation du mot tabou équivaut à un racisme insupportable. Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, semble avoir choisi son camp : interrogé à la Chambres des communes le 21 octobre, il n’a pas eu un mot de soutien pour la professeure harcelée, se contentant de rappeler que sa priorité « restait de combattre le racisme sous toutes ses formes ».

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3 novembre 2020

Sean Connery, jamais plus jamais

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Par Léo Soesanto — Libération

L’acteur devenu star internationale dans les «sixties» avec son rôle dans le premier James Bond, «Dr No», était l’archétype du séducteur à poil dur et au flegme loustic. Il venait d’avoir 90 ans.

«La préoccupation d’un acteur ou un auteur n’est pas la crédibilité mais de faire disparaître le temps. Je pense vraiment que les seules occasions où vous vous amusez, êtes heureux, swinguez, comme on dit, c’est lorsque vous ignorez l’heure qu’il est…» : Sean Connery se définissait ainsi en 1965 dans une interview à Playboy. Et, face à la nouvelle de la mort de l’acteur à l’âge de 90 ans, le temps se fige dans les sixties. Connery aura beau avoir des rapports amour-haine avec un rôle qui fit sa gloire il y a plus d’un demi-siècle, c’est bien le séminal James Bond qu’on met en bière. Le parangon d’une virilité franche, décontractée, épaisse et touffue comme sa pilosité. Qui demeure insubmersible même lorsqu’il porte de peu seyants combishort en éponge bleu (Goldfinger, 1964) ou slip rouge et bottes de cuir (Zardoz, 1974). Quelque chose dépassait toujours chez lui. Les pectoraux de culturiste sous le smoking, la rugosité sous le cool, le bouillonnement intérieur derrière la démarche féline. L’homme le plus sexy du XXe siècle, selon le magazine People en 1999, aura aussi beaucoup fait pour être l’Ecossais le plus célèbre de son temps. Les Highlands dans la peau (au point d’arborer un tatouage «Scotland Forever» fait pendant son service militaire), dans l’accent dont il n’a jamais voulu se départir et dans les stéréotypes associés que sont la bougonnerie, l’envie d’indépendance et qu’on lui fiche une paix royale.

Testostérone suintante

On ne vit que deux fois, titrait le Bond cuvée 1967. Né en 1930 à Edimbourg d’une mère femme de ménage et d’un père ouvrier, Sean Connery a été, lui, livreur de lait, chauffeur routier, sauveteur, manœuvre, modèle pour artistes, baby-sitter et vernisseur de cercueils («je n’étais pas très bon à ça»). Sa carrure et son mètre 88 le prédisposent au sport - Manchester United lui proposera même un contrat. Travailler dans les coulisses d’un théâtre en 1951 lui inocule un intérêt pour les planches et, de figurations en petits rôles, il finit par percer à la télévision et au cinéma. Il partage l’affiche avec Lana Turner dans le mélo Je pleure mon amour (1958) de Lewis Allen, dont la péripétie la plus célèbre eut lieu hors champ : le petit ami de Turner était à l’époque le mafieux Johnny Stompanato. Jaloux de Connery, il débarqua sur le tournage arme à la main. Connery le désarma et l’assomma.

Cette testostérone suintante n’en fait pas un candidat évident lorsqu’il s’agit de porter les aventures de l’agent secret James Bond sur grand écran. Son créateur littéraire, Ian Fleming, envisageait un gentleman tueur à la David Niven, pas un «cascadeur surdimensionné» selon ses termes. Une femme tranchera : l’épouse du producteur Albert R. Broccoli, qui rêvait, lui, de Cary Grant, aidera donc à faire de Connery une star grâce à ce qui n’est alors qu’une série B : James Bond contre Dr No (1962). Son réalisateur, Terence Young, aidera à polir le diamant brut en lui faisant faire le tour des tailleurs, bons restaurants et cercles de jeux londoniens et lui enjoignant, selon la légende, de dormir habillé en costume-cravate pour s’y habituer. C’est une franchise qui s’installe, lançant une Bond mania mondiale, avec moult spectateurs, produits dérivés et publicités. Séduit par surprise, Fleming ira jusqu’à incorporer des origines écossaises à James Bond.

Connery est en phase avec la génération d’acteurs issus des classes populaires faisant florès à la même époque : les Michael Caine (dont il deviendra très proche), Albert Finney ou Richard Harris comme signaux d’une jeunesse britannique socialement mobile, énergique, énervée, prenant d’assaut la culture british. Connery apporte quant à lui une touche physique de star US, à la Humphrey Bogart. Dans Goldfinger, écoutez le jauger une fine de 30 ans d’âge et prononcer «Bons Bois» d’une voix dure comme l’écorce. Le dédain de l’expert est là, jamais aristocratique mais placé pour taquiner son aîné et supérieur chef des services secrets, présent.

Panthère grise

Toujours échaudé d’être confondu avec son rôle, il avouait pourtant à Playboy partager avec 007 son attitude parfois brutale avec la gent féminine : «Il n’y a rien de particulièrement grave à frapper une femme… même si je ne recommande pas de le faire comme lorsque vous frappez un homme. Une gifle est justifiée… si toutes les alternatives ont échoué et que vous l’ayez mise en garde. Si une femme est une salope, hystérique ou toujours butée, alors, je le ferai.» Des propos outrancièrement machistes qu’il ne réfutera jamais vraiment.

Bond et les paparazzis collent vite comme un sparadrap à un Connery impatient. Il traque les rôles ailleurs, si possible à contre-emploi, comme mari pervers narcissique violeur dans Pas de Printemps pour Marnie (1964) de Hitchcock ou prisonnier militaire violenté, condamné à monter et descendre un monticule sous un soleil de plomb dans la Colline des hommes perdus (1965) de Sidney Lumet. Il refusera de jouer dans Blow-Up (1966) parce que Michelangelo Antonioni ne veut pas lui montrer le scénario complet. Il quitte 007 une première fois en 1967, revient pour les Diamants sont éternels (1971) et pour le chèque (1 million de livres sterling qu’il reversa intégralement à une œuvre caritative écossaise). Dans l’intérim des seventies, il s’ingéniera à malmener la statue du commandeur Bond dans lequel le public l’avait figé. Jouer les gros bras pour mieux les dégonfler, dans un geste sadomasochiste pas si éloigné du style Clint Eastwood. Dans le méconnu The Offence (1972) de Sidney Lumet encore (ils collaboreront cinq fois ensemble), il est brillant en policier traumatisé par la violence de ses enquêtes, finissant par exploser lors de l’interrogatoire d’un pédophile. Rôle éprouvant, mise en scène radicale à base de ralentis et d’images mentales ambiguës. Il trouve d’autres rôles plus grands que la vie mais cabossés aussi, en Robin des Bois vieillissant dans la Rose et la Flèche (1976) de Richard Lester et, dans son rôle favori, un aventurier affligé d’hubris cherchant fortune en Afghanistan au côté de Michael Caine dans le bien nommé l’Homme qui voulut être roi (1975) de John Huston.

Vers le milieu des années 80, sa carrière s’enlise un peu (le navet l’Epée du Vaillant en 1984), justifiant un ultime retour à James Bond pour se renflouer dans Jamais plus jamais (1983), mais aussi à un point où les distributeurs américains du Nom de la rose (1986) de Jean-Jacques Annaud renâclent lorsqu’il est engagé comme premier rôle. En détective médiéval dans cette adaptation d’Umberto Eco - lui aussi peu convaincu initialement par Connery, comme le fut Fleming auparavant -, Connery assume enfin sa calvitie précoce, planquée sous une perruque dès les années Bond. Et comme dans Highlander de Russell Mulcahy la même année, il se complaît dans des rôles de mentors paternels, vieux briscard chapeautant avec panache de jeunes héros : dans les Incorruptibles (1987) de Brian De Palma, qui lui vaut son unique oscar comme meilleur second rôle ; dans Rock (1996) de Michael Bay ; dans A la Rencontre de Forrester (2000) de Gus Van Sant, où il est parfait en avatar bourru d’un J.D. Salinger, écrivain ayant arrêté d’écrire après le succès de son premier roman. Steven Spielberg, qui avait commis les Indiana Jones pour soulager sa frustration de ne pouvoir réaliser un James Bond, assurera la filiation comme père de l’archéologue fouettard interprété par Harrison Ford dans Indiana Jones et la Dernière Croisade (1989) où les deux stars se livrent à un véritable concours de flegme sourire en coin sous le déluge de péripéties et les successions de chausse-trapes.

Connery saura encore jouer de son sex-appeal de panthère grise, plus effectif sur le public que sur ses jeunes partenaires féminines - Michelle Pfeiffer dans la Maison Russie (1990) de Fred Schepisi, Catherine Zeta-Jones dans Haute Voltige (1999) -, avec lesquelles l’alchimie à l’écran tient de l’amour courtois. Il devient un genre institutionnel : besoin d’un roi Richard ou Arthur ? Embauchez-le pour Robin des Bois, prince des voleurs (1991) et Lancelot (1995). Lui-même est myope sur les genres montants et se plante à plusieurs reprises sur la bonne perche à saisir : il décline les rôles de Gandalf dans le Seigneur des Anneaux et celui de l’Architecte dans Matrix Reloaded (2003) parce qu’il juge les scénarios incompréhensibles. Mais c’est bien le vieux lion à la voix sûre et réconfortante que les réalisateurs viennent chercher pour donner profondeur et noblesse à leurs films.

Retraite définitive

Sa tentative de se raccrocher à une franchise superhéroïque dans la Ligue des gentlemen extraordinaires se solde par un échec cuisant au box-office et un dégoût face à Hollywood après les problèmes sur le plateau (décors détruits par une inondation, disputes avec le réalisateur Stephen Norrington, tournage précipité). De quoi lui donner des envies de retraite définitive. Rien ne sera assez bien pour lui, même lorsque Spielberg lui propose de revenir pour Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal (2008). En paix avec James Bond, il acceptera d’être sa voix pour l’adaptation en jeu vidéo de Bons Baisers de Russie en 2005. Un sondage en 2020 le consacrait encore interprète favori du rôle par les Anglais. Jusqu’à la fin de ses jours, le lion sera surtout retranché aux Bahamas pour échapper aux impôts britanniques, occupé à soutenir financièrement et publiquement le Parti national écossais indépendantiste ou sur les greens. Le golf, découvert sur le tournage de Goldfinger et devenu plus qu’un sport, un enjeu existentiel : «J’ai commencé à voir le golf comme une métaphore de la vie», dit-il dans son autobiographie, Being a Scot : «Vous êtes tout seul, en compétition avec vous-même et essayant de faire toujours mieux.»

3 novembre 2020

Azzedine Alaïa

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3 novembre 2020

Séparatisme, caricatures : Emmanuel Macron sur la défensive à l’international

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Par Olivier Faye - Le Monde

La tempête se déchaîne dans de nombreux pays musulmans depuis que le chef de l’Etat a répété dans son hommage au professeur d’histoire-géographie Samuel Paty, le 21 octobre, que la France ne renoncera pas aux caricatures du prophète Mahomet.

Il y a le front intérieur et le front extérieur. Deux jours après l’attentat contre Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), survenu le 16 octobre, une source haut placée à l’Elysée s’inquiétait de l’effet produit hors des frontières françaises par le projet de loi contre les séparatismes, présenté par Emmanuel Macron, deux semaines plus tôt. « Il faut construire un contre-discours face à ceux qui disent, notamment à l’étranger, que le propos du président de la République aux Mureaux est dirigé contre les musulmans », estime alors ce conseiller. Le sujet apparaît suffisamment sérieux pour atterrir ce jour-là sur la table du conseil de défense réuni à l’Elysée.

Mais cela n’a pas empêché la tempête d’éclater dans de nombreux pays musulmans. Surtout depuis que le chef de l’Etat a répété dans son hommage au professeur d’histoire-géographie, le 21 octobre, que la France ne renoncera pas aux caricatures du prophète Mahomet.

Grimé en diable dans la presse iranienne, Emmanuel Macron a vu son portrait foulé aux pieds lors de manifestations en Cisjordanie, son effigie brûlée au Bangladesh ; il a été la cible d’attaques virulentes de la part de nombreux dirigeants, du Pakistan à l’Indonésie. Un appel au boycottage des produits français – encouragé par le président turc, Recep Tayyip Erdogan – a aussi été lancé, mais finalement peu suivi, selon un diplomate.

Expliquer et défendre le modèle républicain français

S’il reste soutenu en bloc par l’Union européenne, cette vague de critiques marque un tournant pour le président de la République, qui voulait afficher à l’étranger l’image positive d’un héraut du progressisme et de la lutte pour le climat. Elle attise surtout la menace. L’ancien premier ministre malaisien, Mahathir Mohamad, a écrit sur Twitter que « les musulmans ont le droit d’être en colère et de tuer des millions de Français pour les massacres du passé », et critiqué l’attitude du président français, « très primitif » selon lui.

Pour tenter d’éteindre l’incendie – et répondre à ce que l’exécutif perçoit comme une campagne organisée contre la France et le président de la République –, le locataire de l’Elysée a accordé un long entretien, samedi 31 octobre, à la chaîne qatarie Al-Jazira. Un média choisi en raison de son audience – entre 35 millions et 40 millions de téléspectateurs –, mais aussi des messages émis récemment sur son antenne au sujet du président français.

« Beaucoup de choses fausses ont été dites », a déploré Emmanuel Macron, qui voulait apporter à travers cette interview « un message d’apaisement et de paix ». « Je comprends et respecte qu’on puisse être choqué par ces caricatures, mais je n’accepterai jamais qu’on puisse justifier une violence physique pour ces caricatures. Je défendrai toujours dans mon pays la liberté de dire, d’écrire, de penser, de dessiner », a assuré le chef de l’Etat, tout en rappelant que ces dessins ne sont pas « le projet ou l’émanation du gouvernement français ou du président de la République ».

Au-delà, Emmanuel Macron a tenté d’expliquer et de défendre le modèle républicain français, fondé sur la laïcité, « ce terme si compliqué qui donne lieu à tant de malentendus ». « Les sociétés anglo-saxonnes ont un multiculturalisme qui fait que les religions cohabitent », a-t-il rappelé avant de défendre « la beauté du modèle français », « qui est l’idée qu’au fond on peut avoir la même représentation du monde parce qu’on est citoyens d’un même pays ».

Une manière de répondre, aussi, aux critiques d’une partie de la presse américaine. Le Washington Post a ainsi dépeint une France plus soucieuse de « réformer l’islam » que de « combattre le racisme systémique » sur son sol − rhétorique dont le chef de l’Etat s’est agacé lors du dernier conseil des ministres. « Pour lui, il n’y a pas de projet commun dans le multiculturalisme, c’est une juxtaposition de communautés, le contraire de ce qu’on défend », souligne un membre du gouvernement.

« La laïcité n’a jamais tué personne »

Signe de cette fracture, l’exécutif déplore la faiblesse du soutien exprimé par le premier ministre canadien, Justin Trudeau, suite aux attaques de Conflans et de Nice. Ce dernier a estimé que la liberté d’expression n’est « pas sans limites » et ne doit pas « blesser de façon arbitraire et inutile ». « Il semble que nous ayons des exigences qui soient plus importantes que celles de M. Trudeau », grince un interlocuteur régulier d’Emmanuel Macron.

« Ce n’est pas simplement l’opposition des modèles communautaristes ou non-communautaristes, relativise François Heisbourg, conseiller spécial à la Fondation pour la recherche stratégique. Les débats français n’intéressent les Etats-Unis que dans la mesure où ils peuvent servir de miroir à leurs propres débats, en l’occurrence ceux sur Black Lives Matter [« les vies noires comptent »]. »

De la même manière, l’interview d’Emmanuel Macron à Al-Jazira ne s’adressait pas seulement au public étranger, mais aussi aux Français, dont il affirme vouloir défendre la « souveraineté » de leur modèle. « La laïcité n’a jamais tué personne », a-t-il martelé.

Certains voudraient remettre en cause l’égalité entre les femmes et les hommes au nom d’une religion ? « Pas chez nous », a répété à deux reprises le chef de l’Etat : « Les gens qui croient ça, qu’ils aillent le faire ailleurs, pas sur le sol français ». Ou comment se poser en protecteur à l’heure où, pour reprendre les termes d’un proche, « la France est attaquée comme jamais, ici et à l’étranger ».

Olivier Faye

Les Emirats arabes unis soutiennent Macron face aux critiques. Les Emirats arabes unis ont pris la défense du président français dans la polémique qui a enflé ces derniers jours dans le monde musulman à son encontre, au sujet des caricatures du prophète Mahomet. Dans un entretien paru lundi 2 novembre dans le quotidien allemand Die Welt, le ministre émirati des affaires étrangères Anwar Gargash a rejeté l’idée selon laquelle Emmanuel Macron aurait exprimé un message d’exclusion des musulmans. « Il faut écouter ce que Macron dans son discours a vraiment dit, il ne veut pas de ghettoïsation des musulmans en Occident et il a tout à fait raison », a-t-il déclaré. Les musulmans doivent mieux s’intégrer, et l’Etat français est en droit de chercher des moyens d’y parvenir tout en luttant contre le radicalisme et l’enfermement communautaire, a ajouté le chef de la diplomatie. Les protestations anti-françaises dans certains pays musulmans ont éclaté en réaction aux déclarations d’Emmanuel Macron défendant le droit à la caricature au nom de la liberté d’expression. Il réagissait à la décapitation le 16 octobre par un islamiste d’un enseignant français qui avait montré à ses élèves des caricatures du prophète de l’islam, en plein procès de l’attentat de 2015 contre Charlie Hebdo. Pour le ministre émirati, la controverse est surtout le résultat d’une récupération politique orchestrée par le chef de l’Etat turc Recep Tayyip Erdogan. « En tant que musulman, je me sens offensé par certaines caricatures », précise M. Gargash. « Mais en tant que personne réfléchie, je vois les politiques qui sont menées autour de ce sujet. Avec ses attaques contre la France, Erdogan manipule une question religieuse à des fins politiques », dénonce-t-il. Selon M. Gargash, les propos du président français ont été sortis de leur contexte. « Dès que Erdogan voit une faille ou une faiblesse, il l’utilise pour accroître son influence. C’est seulement lorsqu’on lui montre la ligne rouge qu’il se montre prêt à négocier », a ajouté M. Gargasch.

2 novembre 2020

Tour de France 2021

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Sabine Pigalle - photographe

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