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Jours tranquilles à Paris

9 janvier 2020

Bondage

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9 janvier 2020

Au Japon, la sécurité des Jeux olympiques en question après la fuite de Carlos Ghosn

Par Philippe Mesmer, Tokyo, correspondance

Le départ rocambolesque de l’ex-patron de Renault-Nissan a mis en lumière des failles dans le dispositif sécuritaire de l’Archipel, alors que le gouvernement reste étonnamment silencieux.

LETTRE DE TOKYO

Il aura fallu près d’une semaine pour obtenir une réaction officielle du gouvernement japonais sur la fuite de Carlos Ghosn, alors que l’événement interroge aussi la fiabilité de la sécurité au Japon à quelques mois des Jeux olympiques de Tokyo, l’été prochain. Lundi 6 janvier, la ministre de la justice, Masako Mori, a qualifié d’« injustifiable » le geste de l’ancien patron de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi et promis que les services d’immigration « renforceraient les contrôles pour qu’un tel incident ne se reproduise pas ». Le suivi des libérations sous caution, régime sous lequel se trouvait M. Ghosn, pourrait être renforcé, avec introduction de bracelets électroniques.

Service minimum pour un gouvernement étonnamment silencieux depuis l’annonce du départ rocambolesque de M. Ghosn. Le premier ministre, Shinzo Abe, n’a pas daigné s’exprimer. Sans doute était-il trop occupé par ses parties de golf. Selon son agenda officiel, il y a joué les 29 et 30 décembre, puis les 2 et 4 janvier. Ni les tensions entre Américains et Iraniens – alors qu’il se piquait de jouer les médiateurs entre les deux pays – ni donc la fuite du Japon de M. Ghosn n’auront amené le chef de gouvernement à renoncer à ses loisirs. Certes, le passage d’une année à l’autre est au Japon une période où le pays semble à l’arrêt pendant plusieurs jours. Mais cette discrétion affichée étonne.

Les médias japonais reprochent à M. Ghosn d’avoir fui ses responsabilités et d’« insulter le système judiciaire japonais ». Mais aucun ne s’interroge sur ce qui apparaît comme une faillite des services de sécurité japonais.

Loin d’être un expert de la clandestinité mais aidé par des relations libanaises et sans doute par d’anciens militaires, M. Ghosn a pu sortir de chez lui, parcourir – dans un caisson pour matériel audio, selon les enquêteurs turcs – les 500 kilomètres séparant Tokyo de l’aéroport d’Osaka et embarquer dans un avion, à la barbe des policiers, procureurs, agents de sécurité, douaniers ou encore officiers d’immigration de l’Archipel.

Pénurie d’agents de sécurité

La fuite a de quoi inquiéter, notamment à l’approche des Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo, prévus en juillet et août. Qu’en sera-t-il de la sécurité de l’événement dont le budget atteint aujourd’hui 716 millions d’euros contre 100 millions d’euros au moment du dépôt de candidature en 2013 ? Au total, 12 000 athlètes vont y participer. Près de 180 000 spectateurs y assisteront chaque jour. Les épreuves sont réparties dans l’ensemble du Japon sur 42 sites, dont certains à Sapporo, au nord, et à Fukushima, au nord-est.

Le dossier de candidature prévoyait le déploiement de 50 850 agents de sécurité. Pour l’instant, les organisateurs ne peuvent compter que sur 14 000 agents de sécurité privés, 21 000 policiers et 9 000 bénévoles. La pénurie de main-d’œuvre liée au vieillissement du pays touche particulièrement ce secteur, où il y a huit offres d’emploi par agent disponible.

Conscient de ces difficultés, le comité d’organisation a demandé en janvier 2019 au ministère de la défense d’être prêt à déployer des troupes, en cas de nécessité. Les autorités prévoient également de faire appel aux nouvelles technologies. Des robots de la société de sécurité Alsok assureront des patrouilles. Ils pourront identifier des colis suspects, évaluer les états psychologiques des passants grâce à un système d’analyse de signaux physiques, tels que les tremblements, le changement de teint ou encore les variations de comportement.

Menace protéiforme

La reconnaissance faciale sera aussi massivement utilisée, une première pour des Jeux olympiques. Un système développé par le géant nippon de l’électronique NEC, à base de la technologie NeoFace Watch – considérée comme une des meilleures au monde – et de certification biométrique, servira à l’identification aux points d’entrée. Des systèmes de suivi en temps réel des mouvements de foule aideront à améliorer les flux de personnes et l’efficacité des transports en commun.

Des moyens et un budget conséquents, alors que le Japon n’a pas connu d’actes terroristes depuis l’attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995 par la secte Aum Shinrikyo. Mais la menace est complexe et protéiforme. Des ressortissants japonais ont été tués en 2015 par des militants du mouvement Etat islamique. Le regain de tension entre Américains, dont les Japonais sont très proches, et Iraniens pourrait-il faire de l’archipel – qui va par ailleurs déployer un navire et des avions de patrouille maritime au Moyen-Orient – une cible collatérale pour de nouveaux actes terroristes ?

9 janvier 2020

Bande annonce de la série "Une île", diffusée sur Arte les 6 et 16 janvier 2020, avec Laetitia Casta.

9 janvier 2020

Champagne

champagne

9 janvier 2020

Laetitia Casta à l'affiche de la série «Une île» sur Arte

«J'ai hésité avant d'accepter de jouer une sirène en Corse», confie Laetitia Casta à l'affiche de la série «Une île» sur Arte

INTERVIEW -  Arte propose à partir de jeudi soir, et dès ce lundi sur son site, la série inédite «Une île», où Laetitia Casta incarne une sirène pas comme les autres. Un tour de force pour l'actrice, et une interview passionnante pour «20 Minutes»

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Laetitia Casta joue une sirène loin des clichés du genre, dans «Une île», la nouvelle série d'Arte

Il y a maintenant plus d’un an, 20 Minutes était convié en Corse sur le tournage d'une nouvelle série Arte au titre générique mais mystérieux : Une île. Sur place, notre journaliste s’était laissée séduire par cette relecture moderne du mythe de la sirène, en résonance avec les thématiques fortes du moment, le féminisme et l’écologie, et par la sirène elle-même, incarnée par Laetitia Casta. Confirmation quelques mois plus tard à Séries Mania, où Une île était sacrée meilleure série française. C’est également à cette occasion que l’on a retrouvé Laetitia Casta pour tenter de percer l’étrange personnage de Théa, qui débarque sur une île frappée par une pénurie de pêche et dans la vie de la jeune Chloé (Noée Abita). La série sera diffusée les jeudis 9 et 16 janvier sur Arte à 20h55, et les trois premiers épisodes sont d’ores et déjà en ligne sur le site de la chaîne.

J’ai lu que vous aviez hésité avant d’accepter le rôle de Théa. Pourquoi ?

J’avais besoin de réfléchir au projet, de comprendre où je mettais les pieds. Lorsqu’on vous dit que ce sera en Corse, ouhla, moi qui suis corse, j’en ai vu passer de tels projets. Puis on vous ajoute : « C’est une sirène ». Oh, tout de suite, vous pouvez avoir des a priori, ce qui est normal. Mais une fois le scénario lu, j’ai saisi l’essence du message qu’il y avait derrière, quelque chose de profond. J’ai également voulu rencontrer le metteur en scène, savoir où il voulait emmener la série, comment il pensait gérer les effets spéciaux, à quoi la sirène allait ressembler. Des questions importantes pour moi, et qui ont pu prendre un peu de temps, une mise en confiance. Comme aime le dire le réalisateur Julien Trousellier, c’est moi qui lui ai fait passer un casting. (rires)

C’est une première incursion dans le genre pour vous, non ?

J’avais déjà fait Derrière les murs, un film un peu expérimental en 3D, qui n’avait pas marché mais j’avais adoré ça. Il y a une vraie responsabilité envers ce type de personnage, car si on ne croit pas à la sirène, à ma sirène, cela peut tout foutre en l’air. Même pour les autres personnages, les autres acteurs. D’emblée, je voulais quelque chose d’animal. Comment y arriver, faire croire à l’étrangeté, être crédible ? Car il n’y a pas d’effet spécial, pas de maquillage, rien. J’ai trouvé la solution : je peux le faire, avec une chorégraphe. Je n’ai pas lâché cette idée, c’était avec ça, comme ça, ou je ne le faisais pas. On ne peut pas arriver sur un tournage en disant : « Je vais faire une sirène », même si vous avez les plus grandes qualités d’acteur. Il faut amener un mouvement, de l’incarnation, du concret.

Avec la figure de la sirène, il y a une notion de sensualité qu’il fallait représenter à l’écran.

Et ne pas tomber dans la caricature, que la nudité ne soit pas voyeuriste, mais un outil. Théa arrive comme elle est, son corps est une arme. C’était très intéressant à chercher dans l’attitude, la gestuelle. Mais très vite, je me suis rendu compte qu’avec ce personnage, tout passait par le regard, encore plus que par le corps. Et au contact des humains, de Chloé, elle va se perdre, sortir des règles qu’elle s’était fixées, et découvrir l’émotion, l’empathie… Des choses qu’elle n’avait jamais ressenties avant.

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Comment est-ce d’accompagner un personnage si longtemps, sur six épisodes, voire une saison 2 ?

Quand j’ai démarré le cinéma, j’avais la sensation de rentrer dans la peau du personnage. J’imaginais une silhouette dans laquelle je me glissais. Maintenant, c’est l’inverse, c’est le personnage qui entre en moi. Je vais chercher des choses en moi, c’est très intéressant. Être actrice, c’est comme un phare qui éclaire tout, partout, en haut, en bas, sur les côtés. Je trouve cela extraordinaire, c’est une connaissance de soi, de la vie. On peut puiser en soi, mais aussi chez les autres, ce qu’on a vu des autres, ceux qui nous ont inspiré, ce qu’on a envie de devenir.

Pour moi, souvent, dans les films ou les séries, il y a un petit côté visionnaire, mystique. Comme si ce que je joue pouvait arriver, et c’est toujours bon signe. Regardez ce qu’il se passe en ce moment, avec les femmes, il y a une sorte de prise de conscience. Je pense au livre Sorcières, la puissance des femmes de Mona Chollet. Comment se reconnecter à soi, mais aussi à la nature. Le rôle de Théa participe à cela également.

Comment s’est passée votre relation et collaboration avec Noée Abita, avec qui vous formez un vrai duo ?

Ma rencontre avec Noée m’a aussi encouragée à faire la série. Elle était parfaite, inspirante, pour mon personnage. Cela fonctionnait, ils ont réussi à créer quelque chose d’extrêmement juste avec le casting. Si on ne croit au couple d’amis, d’amours, d’âmes sœurs, ce n’est pas possible. J’ai été très à l’aise très vite, je n’ai pas eu besoin de plus avec elle et j’ai ainsi pu exprimer toute la dimension émotionnelle dans mon personnage. Après, il y a eu un moment, où la connexion de nos personnages s’est retrouvée sur le plateau, il s’est produit la même chose que dans la série. Cela a été un tournage difficile, pour une question de temps et d’argent, et il y a eu cet accompagnement, ce soutien, cette confiance entre nous. J’ai eu ce rôle de mentor, de marraine, de grande sœur.

TÉLÉVISION

«Une île»: Une série sur les sirènes et l'écologie qui, contrairement aux apparences, donne envie

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8 janvier 2020

Toilet Paper

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8 janvier 2020

James P. Rubin : « Une guerre entre les Etats-Unis et l’Iran est aujourd’hui une réelle possibilité »

Par James P. Rubin, conseiller stratégique à Washington

L’assassinat du général iranien Ghassem Soleimani était justifié mais pas judicieux. Pour l’ancien secrétaire d’Etat adjoint de Bill Clinton, les Etats-Unis sont aujourd’hui isolés diplomatiquement et n’ont pas de stratégie claire même si leur capacité de dissuasion est rétablie.

Les tirs de drones américains de la semaine dernière, qui ont causé la mort du général iranien Ghassem Soleimani, suscitent de fiévreuses spéculations quant à la possibilité d’une nouvelle guerre au Moyen-Orient, une guerre entre les Etats-Unis et l’Iran. Contrairement à l’Irak, qui était l’adversaire des Américains lors des deux guerres du Golfe de 1991 et 2003, l’Iran a réellement la capacité de développer des armes nucléaires et a relancé des programmes à cette fin. Et, contrairement à Saddam Hussein, qui était peu ou pas impliqué dans le terrorisme international, la République islamique d’Iran est le premier Etat à soutenir le terrorisme au Moyen-Orient et possiblement dans le monde.

Ce qui fait dire à beaucoup que, en 2003, le président George W. Bush s’est trompé de cible s’il s’inquiétait réellement d’empêcher que des armements nucléaires ne tombent entre les mains d’un groupe terroriste ou d’un Etat voyou. Car l’Iran est le seul pays au monde à mener un programme de développement d’armes nucléaires viable, à massacrer des civils en orchestrant des actions terroristes sanglantes par dizaines et, lors de la crise des otages de 1979, à s’être montré prêt à violer toutes les règles internationales en matière de civilité.

Téhéran étant ces dernières années monté en puissance sur la scène géopolitique, une guerre entre les Etats-Unis et l’Iran est aujourd’hui une réelle possibilité. Mais, malheureusement pour les Etats-Unis et leurs amis, le contexte d’une éventuelle troisième guerre du Golfe est très différent de celui des deux premières.

CETTE FOIS, LES AMÉRICAINS N’ONT PAS D’AUTRE OBJECTIF MILITAIRE CLAIR QUE CELUI, FLOU, DE RÉALISER UNE DÉMONSTRATION DE FORCE POUR DISSUADER TÉHÉRAN DE MENER DES REPRÉSAILLES

Car, cette fois, ce sont les Américains qui se trouvent isolés sur la scène internationale, et non leurs adversaires. Cette fois, ils n’ont pas d’autre objectif militaire clair que celui, flou, de réaliser une démonstration de force pour dissuader Téhéran de mener des représailles. Et, cette fois, aussi héroïque que soit la diplomatie, il ne sera pas possible de la synchroniser avec l’action militaire. Souvenez-vous de 1991 et de 2003 : à ces époques, le recours à la force armée était légitimé, car il venait soutenir les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU sur l’invasion du Koweït, puis sur le refus de l’Irak de se plier au contrôle de ses armements – condition qui faisait partie du cessez-le-feu qui avait mis un terme à la première guerre.

Ce sont ces trois facteurs – l’isolement des Américains, un objectif militaire vague et l’absence de stratégie diplomatique – qui font que cette opération militaire, autrement louable, visant à éliminer le chef militaire le plus impitoyable d’Iran, celui dont les mains sont le plus tachées de sang, est en réalité une opération extrêmement dangereuse pour l’Occident et irritante pour les alliés traditionnels des Américains.

Le contexte et la méthode

De fait, le général Soleimani conduisait depuis plus de dix ans une campagne militaire brutale contre les Etats-Unis et leurs alliés au Moyen-Orient. Ses unités paramilitaires ont armé et entraîné en Irak des milices qui, selon les estimations de l’armée américaine, ont causé la mort de quelque 600 soldats américains. Ses cellules terroristes sont responsables de la disparition de centaines de civils en Iran, mais aussi de dissidents établis dans des capitales européennes. Et, politique la plus pernicieuse dans tout cela, peut-être, Soleimani a personnellement mené sur le terrain la campagne qui a permis à Bachar Al-Assad de faire basculer la situation en sa faveur (avec l’aide précieuse des attaques aériennes russes) et de vaincre la rébellion, dans une guerre civile qui fait des ravages depuis maintenant huit ans en Syrie.

SOLEIMANI ET SON ALLIÉ BACHAR AL-ASSAD MÉRITENT LEUR PLACE DE CRIMINELS DE GUERRE DANS LE MÊME CERCLE DE L’ENFER QUE LE CHEF CAMBODGIEN POL POT

Outre le déplacement de plusieurs millions de civils, la violence des campagnes de massacres systématiques menées par Assad et ses alliés a fait entrer la guerre civile syrienne dans l’histoire. Soleimani et son allié Bachar Al-Assad méritent leur place de criminels de guerre dans le même cercle de l’enfer que le chef cambodgien Pol Pot, les responsables hutu au Rwanda et la hiérarchie nazie qui a organisé l’Holocauste. Et pour cette simple raison, son assassinat est indubitablement justifié. La question est de savoir s’il est judicieux.

Comme pour beaucoup d’actions entreprises par l’administration américaine, le problème n’est pas le résultat, mais le contexte et la méthode. En matière d’affaires internationales, la manière de procéder et la préparation des choses ont leur importance. Avant l’assassinat de Soleimani, il n’y a pas eu de campagne diplomatique visant à isoler Téhéran au motif des agressions qu’il a commises contre les Américains au Moyen-Orient, en Irak, au Liban et en Syrie. Il n’y a pas eu non plus d’offensive diplomatique coordonnée qui aurait explicité la responsabilité de Soleimani dans divers crimes de guerre et actes terroristes. Au contraire, ces frappes aériennes semblent constituer un (compréhensible) geste d’exaspération de la part de Washington, las de la détermination de Téhéran à s’en prendre aux intérêts et aux ressortissants américains.

Le fait est que toutes les mesures de dissuasion ont échoué. Il est bien possible que, à terme, ces tirs de drones contribueront à redonner du poids aux politiques de dissuasion américaines. Alors que l’Iran s’est vu imposer une ribambelle de sanctions économiques douloureuses, le pays a continué de mener des attaques terroristes et militaires en toute impunité militaire. Cette époque est désormais révolue. Et maintenant ?

Revoir l’accord nucléaire iranien

Même s’il n’y a guère de chances que l’administration Trump entende ce conseil venant d’un démocrate, la voie de la sagesse est très simple. Après avoir tué l’artisan de nombre des politiques que Trump et son équipe invoquent lorsqu’ils s’opposent à un accord nucléaire, de promptes tentatives de négocier un retour des Américains dans cet accord contribueraient largement à mettre fin à l’isolement des Etats-Unis et à rediriger la pression diplomatique internationale sur Téhéran, comme il se doit.

Si le gouvernement Reagan, qui a dénoncé l’Union soviétique lorsqu’elle envahissait l’Afghanistan et soutenait les rebelles communistes d’Amérique latine et d’Afrique, a pu parallèlement négocier avec Moscou des accords sur le contrôle des armes, alors l’administration Trump pourrait elle aussi mener de front deux politiques avec Téhéran. Cela signifie s’opposer par tous les moyens appropriés aux tentatives iraniennes d’asseoir une hégémonie régionale, et ce, en exerçant une influence sur les gouvernements et territoires du Liban, d’Irak et de Syrie (autrement dit, une bande de terre allant de la Méditerranée au golfe Persique), tout en retournant à la table des négociations pour rapidement revoir l’accord nucléaire iranien et définir un nouveau calendrier.

Si l’Amérique sort de son isolement, Washington pourra bénéficier d’un soutien en Europe et au Moyen-Orient afin de mettre en place des mesures de plus en plus fortes pour contrer l’agressivité iranienne dans la région. Le fait que tant de pays arabes applaudissent le décès de Soleimani signifie qu’un tel objectif diplomatique ne serait pas très difficile à atteindre – à condition que la position absurde de Washington sur l’accord nucléaire ne bloque pas toute avancée.

Traduit de l’anglais par Valentine Morizot

James P. Rubin a été secrétaire d’Etat adjoint aux affaires publiques de Bill Clinton. Il est aujourd’hui conseiller stratégique à Washington et collabore au site « Politico ».

8 janvier 2020

Bouche de métro

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8 janvier 2020

Récit - Carole Ghosn, une épouse sans concessions

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Par Simon Piel, Eric Béziat, Laure Stephan, Beyrouth, correspondance

Depuis l’arrestation de l’ex-PDG de Renault-Nissan au Japon, jusqu’à sa fuite au Liban, sa compagne s’active pour le réhabiliter. A tel point que l’influente épouse se trouve désormais dans le collimateur de la justice nippone.

Depuis l’arrivée de Carlos Ghosn à Beyrouth, le 30 décembre, lui et son épouse, Carole, guettés par les ­photographes, évitent les sorties. Mais ne s’interdisent pas de recevoir leurs amis. Lors d’un des tout premiers dîners que le couple a donné, ils étaient huit. Chaque convive n’avait qu’une question à la bouche : comment Carlos, l’ancien magnat de l’automobile, est-il parvenu à s’échapper du Japon, où il était assigné à résidence ? Mais aucun n’ose la poser. Ce serait malvenu. Alors, on parle de la famille, des enfants, et, surtout, on dit à Carlos que le vin d’Ixsir qu’il sert ce soir-là, produit, dans le nord du Liban, par les vignes dans lesquelles il a investi, est vraiment excellent.

Depuis les retrouvailles avec son époux, Carole Ghosn reste discrète. Certes, elle a remué ciel et terre pour son mari, au cours des mois précédents, interpellé Emmanuel Macron ou Donald Trump, multiplié les interviews, mais sans jamais rien laisser échapper d’elle. « Belle », « intelligente », « une battante », « un couple très amoureux », voilà tout juste ce que confient ceux qui la connaissent. Car l’important pour l’establishment libanais est de rester prudent, de ne ­surtout pas faire de gaffe. L’« affaire Ghosn » n’est pas finie. Et Carole est maintenant au cœur de la tourmente : la justice japonaise a émis un mandat d’arrêt contre elle mardi 7 janvier.

Née en 1966 au Liban, Carole Nahas, de son nom de jeune fille, a toujours vécu dans un milieu aisé. Sa mère appartient à une famille libanaise provenant de la grande bourgeoisie syrienne. Carole Ghosn a trois enfants de son premier mariage avec un financier, qui vit entre New York et Beyrouth. Diplômée en sciences politiques, la Libano-Américaine a passé une grande partie de sa vie aux États-Unis, évoluant dans la haute société de la diaspora libanaise. C’est « à New York, lors d’un gala de bienfaisance, qu’elle et Carlos Ghosn se rencontrent », raconte le journaliste libanais Ricardo Karam. Leur relation devient publique en 2013.

« Ce n’est ni l’executive woman insupportable ni la bimbo »

Quand elle entre dans la vie de Carlos, une foule de petits détails commencent à changer chez le patron de Renault-Nissan : les cravates se font discrètes, les costumes plus cintrés, le cheveu est plus discipliné et en même temps plus rock’n’roll avec un discret allongement des pattes. Cela ne fait de doute pour personne, Carole a ajouté sa touche au look de son amoureux. Elle-même ne manque pas d’allure. Elle a le style de la New-Yorkaise élégante, le chic sans sophistication.

Le couple se marie en 2016 à Paris, dans l’intimité. Peu après, il y aura cette fête flamboyante pour l’anniversaire de Carole au Grand Trianon du château de Versailles, dont le financement fait aujourd’hui l’objet d’une enquête. « Ce n’est ni l’executive woman insupportable ni la bimbo. Et ce n’est pas l’intrigante qui a tiré le gros lot », assure Anne Méaux, la patronne d’Image 7, devenue sa communicante.

« MALGRÉ UNE DÉTRESSE PALPABLE, ON NE L’A JAMAIS ENTENDUE MURMURER LE MOINDRE REPROCHE OU EXPRIMER LE MOINDRE DOUTE ENVERS SON MARI », UN TÉMOIN

La seconde épouse du grand patron restait plutôt à distance des activités professionnelles de son mari. La garde rapprochée du big boss ne la voit jamais aux assemblées générales des groupes ou dans les grands salons de l’industrie automobile. En revanche, elle fait quelques apparitions lors d’événements festifs : au carnaval de Rio ou encore au Festival de Cannes. Elle sera beaucoup plus présente auprès de l’équipe de communication de crise de Renault lors des semaines qui suivront l’arrestation de son époux au Japon, le 19 novembre 2018. « Elle est passée par tous les états lors de ces journées de tension, de l’abattement le plus total à la plus grande combativité, raconte un témoin. Néanmoins, malgré une détresse palpable, on ne l’a jamais entendue murmurer le moindre reproche ou exprimer le moindre doute envers son mari. »

Changement de stratégie

Elle va plonger à corps perdu dans l’affaire, par l’entremise d’un businessman franco-sénégalais d’origine libanaise Abbas Jaber, ami commun d’Anne Méaux et de Carole Ghosn, qui les présente l’une à l’autre lors d’un dîner parisien fin novembre 2018. À l’époque, Carlos Ghosn est en prison et les avocats américains qu’il a embauchés ont donné consigne à son entourage de ne pas s’exprimer publiquement. Les révélations sur les possibles malversations de l’ancien patron se succèdent dans la presse. Carole en est convaincue, Nissan est à la manœuvre derrière ces fuites. À l’issue du dîner chez Abbas Jaber, elle décide de changer de stratégie et de confier la communication à Image 7, la société d’Anne Méaux. Elle part au combat.

Dès janvier 2019, elle prend la parole dans Paris Match. Elle fustige le système judiciaire japonais mais, surtout, assure alors qu’« une des raisons invoquées par ses juges pour maintenir [Carlos] en détention est leur peur de le voir fuir à l’étranger. Je peux vous dire que ce n’est absolument pas le genre de mon mari de se dérober. Carlos est un homme d’une grande intégrité et je sais qu’il va faire face, se battre de toutes ses forces pour son honneur ». Elle sollicitera aussi l’ONG Human Rights Watch. Et d’autres, encore. Puis elle fait changer l’équipe d’avocats de l’ex-PDG de Renault. « C’est elle qui a trouvé les derniers avocats japonais », affirme Anne Méaux.

L’entente entre les deux femmes est si bonne que, en plus des confortables émoluments versés à Image 7, Carole lui offre une tunique de sa ligne de vêtements, co-créée à New York en 2009.

Elles mobilisent tous leurs réseaux. Et au plus haut niveau. Dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, on confirme que l’ex-président de la République l’a rencontrée à plusieurs reprises alors qu’elle menait « un combat solitaire » pour informer de la situation de son époux. Même si les relations furent parfois « raides » avec Carlos Ghosn, quand Sarkozy occupait l’Élysée, c’est ensuite, le 21 octobre, avec l’autorisation d’Emmanuel Macron, que l’ancien chef d’État rend visite à l’homme d’affaires à l’ambassade de France au Japon. Un entretien d’une heure et demie, dont rien n’a filtré.

Son nom apparaît dans un montage financier

À sa façon, Carole Ghosn aussi a pris la fuite quelques mois plus tôt, reconnaît l’entourage du couple. Nous sommes le 4 avril 2019. Après avoir obtenu une libération sous caution, Carlos Ghosn est à nouveau interpellé au petit matin par les autorités japonaises. Il est cette fois soupçonné d’avoir transféré 3,5 milliards de yens (environ 28 millions d’euros) à un concessionnaire omanais, Suhail Bahwan Automobiles. L’argent ne proviendrait pas directement de Nissan mais d’une enveloppe mise à sa disposition par le constructeur nippon et baptisée la « réserve du PDG ».

« C’EST UNE FEMME FORTE, QUI A MULTIPLIÉ LES CONTACTS DANS L’ENTOURAGE PRÉSIDENTIEL AU LIBAN POUR QUE SON MARI NE SOIT PAS LÂCHÉ », UN JOURNALISTE

Prudemment, son épouse décide de quitter l’Archipel. Privée de son passeport libanais par le Japon, elle utilise son titre américain. L’ambassadeur de France l’accompagne à l’aéroport. Les autorités nipponnes auraient souhaité l’entendre notamment parce que son nom apparaît dans le montage financier qui a permis à la famille Ghosn d’acquérir un yacht avec des fonds dont l’origine n’a pas encore été établie.

« C’est une femme forte, qui a multiplié les contacts dans l’entourage présidentiel au Liban pour que son mari ne soit pas lâché », rapporte un journaliste. Une semaine avant sa fuite spectaculaire, Beyrouth avait encore réclamé que le Japon lui remette l’ex-grand patron de l’industrie automobile afin qu’il soit jugé dans le pays de ses ancêtres. Quel rôle a pu jouer Carole Ghosn dans l’évasion de son mari ? Aucun, assure la garde rapprochée du couple. Mais elle a été tenue au courant en temps réel de l’arrivée de Carlos sur le sol libanais. « C’est vrai ? », lui demandent alors ses amis de Paris, New York ou Beyrouth, apprenant la nouvelle par la presse le 30 décembre au soir. « Oui ! », répond-elle simplement. Au cours de l’enquête, les ­procureurs japonais ont été jusqu’à la soupçonner d’avoir contacté, pour son époux, des personnalités liées à l’affaire, notamment au Moyen-Orient. À quelles fins ? Mystère.

8 janvier 2020

Johnny Depp au Lido de Paris (fin 2019)

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