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Jours tranquilles à Paris

4 octobre 2020

Brigitte Bardot

bardot56

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4 octobre 2020

Cabu, éternel gamin et grande figure du petit écran

Patrick Cohen consacre un volet de « Rembob’INA » au dessinateur tué le 7 janvier 2015 dans les locaux de « Charlie Hebdo »

LCP

DIMANCHE 4 - 21 H 00

MAGAZINE

L’humour, c’est un coup de poing dans la gueule, emballé dans un papier de soie, un papier de bonbon. » Le jeune Jean Cabut met la formule à toutes les sauces dans le premier sujet télévisé qui lui est consacré après son arrivée à Paris, lancé à 18 ans par un dessin publié dans Paris Match. « Rembob’INA » rend hommage au dessinateur assassiné dans les locaux de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015 – alors que se tient à Paris le procès des attentats de janvier 2015 – et rappelle qu’il n’était pas qu’un caricaturiste de presse et auteur de bandes dessinées, mais aussi une figure du petit écran : un grand moment d’humour, sans nostalgie.

Constituée d’extraits courts d’archives de l’Institut national de l’audiovisuel (INA), « Le Petit Monde des humoristes », présenté par Remo Forlani, en 1968 ; « Les 4 Vérités », de Jean-Daniel Flaysakier, en 1988, « Apostrophes », « Le Grand Echiquier »… la première partie permet, entre autres, de s’immerger dans l’ambiance inconcevable de la salle de rédaction de Charlie Hebdo première mouture.

Invité de Patrick Cohen, Philippe Val fait, sans le vouloir, une démonstration de la magie de la télé puisque, malgré la tristesse, il plaisante en évoquant son ami « toujours courtois », rencontré au début des années 1970 parce qu’ils partageaient la même passion pour… Charles Trenet – nous les verrons plus tard réunis sur scène, pour un moment d’anthologie.

Avec son pull rayé rouge, son débardeur à gros points mousse bleu et blanc ou sa chemise écossaise, Cabu cultive son côté Grand Duduche, du nom de son personnage de BD. Ce qui ne l’empêche pas d’être engagé, comme il le montre lors d’un face-à-face avec le colonel Bigeard – Jean Cabut est viscéralement antimilitariste. L’INA a également dans ses archives la conférence de presse tenue au Danemark après la sortie de la première caricature de Mahomet légendée « C’est dur d’être aimé par des cons ».

La seconde partie de l’émission est consacrée à « Récré A2 », émission pour la jeunesse à laquelle Cabu a participé durant dix ans, à l’initiative de William Leymergie, en plateau. On y retrouve une autre facette du caricaturiste, heureux et facétieux. Philippe Val est rattrapé par les souvenirs : « Vous vous rendez compte de ce qu’on a perdu ? »

4 octobre 2020

De Jair Bolsonaro à Boris Johnson, les populistes pris à leur propre jeu

coronavirus masques

Par Léa Masseguin — Libération

Avant Donald Trump, d’autres présidents ayant minimisé la pandémie de Covid-19 avaient déjà contracté la maladie, parfois sous une forme grave.

Quel est le point commun entre Boris Johnson, Jair Bolsonaro et Donald Trump ? Ces chefs d’Etat et de gouvernement ont tous les trois été testés positifs au Covid-19 après avoir nié le danger de la pandémie.

Le Premier ministre britannique a été le premier à en payer les conséquences, le 27 mars. Après avoir misé sur une immunité collective et refusé d’arrêter de serrer la main de ses collaborateurs, Boris Johnson, 56 ans, a contracté le nouveau coronavirus. Il a dû être admis dans une unité de soins intensifs. Depuis plusieurs jours, il souffrait de toux persistante et de fièvre.

A 9 000 km de Londres, le président brésilien a lui aussi été testé positif, le 7 juillet, à ce qu’il qualifiait de «grippette». Pour prouver son bon état de santé, Jair Bolsonaro, 65 ans, n’avait pas hésité à retirer son masque lors de l’annonce de la nouvelle : «Comme ça, vous pouvez voir mon visage, constater que je vais bien, que je suis tranquille et en paix !» avait lancé le leader d’extrême droite à des journalistes, aussi surpris que paniqués.

«Mensonge»

Contrairement aux 186 882 personnes décédées à ce jour des suites de la maladie dans ces deux pays (144 680 au Brésil et 42 202 au Royaume-Uni), le virus a laissé la vie sauve aux deux populistes. Les dirigeants semblent même avoir été immunisés contre la perte de popularité. Malgré sa gestion calamiteuse de la crise, le taux d’avis favorable à l’action de Bolsonaro a gagné 5 points entre juin et août, notamment grâce à la distribution d’aides sociales aux plus précaires. Du côté du 10, Downing Street, 66 % des électeurs avaient une bonne opinion du Premier ministre à la fin de sa convalescence, malgré des dizaines de milliers de morts. «Ces leaders populistes veulent être considérés comme des dirigeants capables de renverser les normes, y compris en passant par le mensonge. Ils souhaitent que le virus soit perçu comme un ennemi qu’ils sont capables de terrasser physiquement, explique Catherine Fieschi, politologue et spécialiste des populismes. Le Covid-19 apporte de l’eau à leur moulin.»

Facteurs de risque

Ont-ils pour autant appris de leurs erreurs ? Au Royaume-Uni, pays le plus endeuillé d’Europe, Johnson a fait marche arrière en revenant sur sa stratégie. Face à une seconde vague de contaminations, il a annoncé début septembre l’interdiction des rassemblements de plus de six personnes. Au Brésil, qui déplore le deuxième bilan le plus meurtrier derrière les Etats-Unis, Bolsonaro n’affiche, lui, pas de remords quant à sa gestion de la crise, allant jusqu’à traiter de «dictateurs» les gouverneurs et les maires ayant pris des mesures de confinement.

Aux Etats-Unis, le test positif de Trump sonne comme un coup de tonnerre. Miné dans les sondages, il est désormais en quarantaine. A 74 ans et considéré comme obèse (110 kg pour 1,90 m en 2019), le Président combine plusieurs facteurs de risque. Et les chefs d’Etat ne sont pas tous invincibles : à 55 ans, l’ex-président burundais Pierre Nkurunziza, qui assurait que son pays était protégé par la «grâce divine», est mort le 8 juin d’un arrêt cardiaque, possiblement des suites du Covid-19.

4 octobre 2020

Trump positif au Covid : symptômes légers, lourdes conséquences

trump covid22

Par Isabelle Hanne, Correspondante à New York et Frédéric Autran — Libération

Après des mois à minimiser la pandémie, le président américain a annoncé, jeudi, avoir contracté la maladie. Hospitalisé «pour quelques jours», il voit s’effondrer sa stratégie de fin de campagne.

On peut reconnaître une chose aux Américains : sur le plan scénaristique, leur suprématie est indiscutable. Deux semaines après la mort de la juge Ruth Bader Ginsburg, qui fait craindre une dérive conservatrice et liberticide à la Cour suprême, et à un mois des élections cruciales du 3 novembre, Donald Trump et son épouse Melania ont été testés positifs au coronavirus. Le Président l’a annoncé sur Twitter dans la nuit de jeudi à vendredi. «Nous allons entamer notre quarantaine et le processus de rétablissement immédiatement. Nous nous en sortirons ENSEMBLE !» a-t-il écrit, optimiste.

Le médecin de la Maison Blanche a annoncé vendredi que Donald Trump était soigné par un traitement expérimental contre le Covid-19, des anticorps de synthèse, et souffrait de fatigue, sans donner plus de détails sur les symptômes du président. En fin de journée, il a été admis à l’hôpital militaire Walter Reed, dans la banlieue de Washington, «pour quelques jours» selon sa porte-parole Kayleigh McEnany, «dans un souci d’extrême prudence, et sur recommandation de son médecin et d’experts médicaux». «Je pense que je vais très bien, mais nous allons nous assurer que les choses se passent bien», a déclaré Trump dans un message vidéo publié sur Twitter peu après son départ.

Ce coup de tonnerre survient au pire moment pour l’ancien magnat de l’immobilier, qui n’a cessé depuis le début de l’année de minimiser la gravité de l’épidémie. Et de pester contre les restrictions sanitaires et leur impact sur une économie dont il espérait vanter la santé éclatante pour conquérir un second mandat.

Leçon embarrassante

Une étude de la Cornell University publiée jeudi, qui a analysé 38 millions d’articles traitant de la pandémie, montre que le président américain est même «le plus grand vecteur de désinformation sur le Covid», avec des «implications sanitaires désastreuses dans le monde réel» . Alors que des millions d’électeurs ont commencé à voter, en personne ou par correspondance, la nouvelle de sa contamination délivre une leçon aussi limpide qu’embarrassante : Trump n’est pas davantage parvenu à se protéger lui-même qu’à protéger son pays, le plus endeuillé au monde avec plus de 208 000 décès du Covid-19. La Speaker de la Chambre, la démocrate Nancy Pelosi, a noté vendredi que l’attitude de Trump, allant «dans des foules sans masque», était une «invitation insolente» à être infecté par le virus.

L’ampleur des conséquences du test positif de Trump, sur la campagne électorale et pour les Etats-Unis, dépendra bien sûr de la sévérité de sa maladie. A 74 ans et avec un indice de masse corporelle supérieur à 30, ce qui le classe en «obésité modéré», il fait partie des profils à risque. Mais contrairement à de nombreux malades du Covid, victimes des disparités en matière d’accès à la santé, le président américain bénéficiera, lui, de la meilleure prise en charge possible. Souhaitant qu’il en soit de même pour tout le pays, Nancy Pelosi a souligné que le diagnostic du Président, «aussi triste soit-il», sera peut-être «un moment pivot pour nous permettre de lutter différemment contre ce terrible virus, en se basant sur la science, et non sur la politique».

Avec Donald Trump en quarantaine, la dernière ligne droite de la campagne, d’ordinaire si foisonnante, s’en trouve définitivement bouleversée. Son rival démocrate Joe Biden avait annoncé fin juin qu’il ne tiendrait aucun meeting électoral, afin de limiter les risques sanitaires. Accusant au passage son rival de «tourner le dos» à ses responsabilités. Car le milliardaire, lui, avait renoué quelques jours plus tôt avec ses fans à Tulsa, dans l’Oklahoma, au cours d’un meeting controversé qui, sans déplacer les foules, avait déclenché une flambée de cas de coronavirus, y compris parmi son staff de campagne et les agents chargés de sa protection. Depuis, le Président a essentiellement tenu des meetings en plein air sur des tarmacs d’aéroports, comme mercredi à Duluth, dans le Minnesota. Mais mi-septembre, il avait prononcé un discours à l’intérieur d’une usine du Nevada devant des milliers de partisans, en violation des restrictions en vigueur dans cet Etat pivot de l’ouest du pays.

Débat compromis

La Maison Blanche a annoncé l’annulation d’un déplacement en Floride prévu vendredi pour un meeting de campagne. S’il respecte les recommandations du Centre pour le contrôle et la prévention des maladies, Trump est censé rester isolé dans sa résidence pendant «au moins dix jours» après le test positif ou après l’apparition des premiers symptômes. Sa participation au second débat télévisé face à Joe Biden, prévu le 15 octobre, pourrait donc être compromise. Le vice-président Mike Pence, testé négatif vendredi mais qui a participé à au moins une réunion avec le président Trump lundi, pourrait être contraint à une forme d’isolement, surtout si d’autres cas apparaissent à la Maison Blanche. Cela menacerait son débat avec la colistière de Biden, la sénatrice Kamala Harris, prévu la semaine prochaine.

Politiquement, les tests positifs du couple présidentiel, auxquels pourraient s’ajouter ceux d’autres membres de leur entourage - Ronna McDaniel, la présidente du Parti républicain qui était avec Trump vendredi dernier, a été testée positive, avec légers symptômes -, vont en outre torpiller les efforts du Président pour détourner l’attention de la pandémie de Covid-19, qu’une majorité d’Américains lui reproche d’avoir mal gérée. «La fin de la pandémie est en vue et l’année prochaine sera l’une des meilleures années de l’histoire de notre pays», déclarait-il encore jeudi soir. Comme il l’a fait mardi lors de son premier débat chaotique avec Biden, le président sortant cherche à mettre l’accent sur les violences survenues dans le sillage du mouvement antiraciste, l’influence supposée de la «gauche radicale» sur le candidat démocrate, sur une prétendue fraude liée au vote par correspondance ou sur sa nomination d’une juge conservatrice à la Cour suprême.

Dans un tweet posté peu avant l’annonce de la contamination du milliardaire, Biden avait mis en garde les Américains : «Donald Trump fera tout pour détourner l’attention du fait qu’en raison de sa réponse ratée au Covid-19, plus de 200 000 Américains sont morts, 26 millions sont au chômage et une petite entreprise sur six est menacée de fermeture définitive. Nous ne pouvons pas le laisser faire.» Selon le rapport du département du Travail publié vendredi, le chômage aux Etats-Unis a baissé un peu plus qu’attendu en septembre, et s’établit à 7,9 %. Mais le nombre d’emplois créés est plus de deux fois inférieur à ceux du mois d’août.

Retard persistant

Trump va devoir renoncer aux prochains meetings sur lesquels il comptait pour rattraper son retard persistant dans les intentions de vote sur son rival démocrate. La portée de ce rebondissement est difficile à anticiper. Un Trump malade et affaibli pourrait nuire à l’image d’homme fort qu’il cultive avec zèle auprès de ses soutiens - au diapason, Vladimir Poutine a salué vendredi sa «vitalité naturelle» et sa «vigueur d’âme» pour vaincre le virus. Il s’est souvent moqué de personnes handicapées ou malades, notamment Hillary Clinton, atteinte d’une pneumonie avant l’élection de 2016. S’il n’a que de légers symptômes, Trump pourrait à l’inverse se servir de son expérience pour, à nouveau, minimiser la gravité du virus. Et ses proches, tenter d’humaniser un président qui n’a eu aucun mot ou presque de condoléances pour toutes les victimes du coronavirus.

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4 octobre 2020

Philippe et Macron à l’heure des retrouvailles

Article de Olivier Faye

Emmanuel Macron peine à tourner la page Edouard Philippe. Trois mois après l’avoir poussé vers la sortie, le chef de l’Etat doit retrouver son ancien premier ministre, lundi 5 octobre, lors d’un dîner organisé spécialement pour l’occasion à l’Elysée. Les deux hommes ne se sont pas vus depuis le départ du juppéiste de Matignon, le 3 juillet. En nommant Jean Castex à sa place, le président de la République comptait marquer une césure dans son quinquennat. Las, le maire du Havre ne cesse de se rappeler à son bon souvenir en cette rentrée. Auréolé d’une popularité au zénith, ce dernier occupe la scène médiatique avec une jubilation non feinte. Le 29 septembre, il dialoguait amicalement à propos du Grand Paris avec la maire socialiste de la capitale, Anne Hidalgo, candidate putative de la gauche à l’élection présidentielle de 2022. Quelques jours plus tôt, devant un aréopage de maires de droite réunis à Angers, il résumait le dilemme dans lequel est aujourd’hui enfermé Emmanuel Macron face à la crise sanitaire et économique : faut-il réformer à tous crins la société ou bien simplement la soigner ? L’ancien chef du gouvernement s’est bien gardé de trancher.

Selon son entourage, Edouard Philippe, âgé de 49 ans, veut être « libre », « compter dans le débat public » et « produire des solutions ». Il imagine donner des cours à l’étranger, tout en revenant faire des incursions sur la scène nationale. « Un politique, ça ne ferme pas sa gueule. Edouard est dans une logique de plaisir », assure un proche. Officiellement, il ne s’agit pas d’une forme de revanche après cette drôle de semaine du début de juillet, quand Emmanuel Macron a maintenu son premier ministre dans l’incertitude sur son sort tout en négociant en coulisse avec Jean Castex. « Si j’avais été Macron, je n’aurais pas fait ça. On n’humilie pas en politique. Surtout qu’Edouard a été loyal, souligne un ami du maire du Havre. Tous les gens que Sarkozy et Hollande ont humiliés se sont retournés contre eux. »

La plupart des philippistes, pour autant, répètent que leur champion veut contribuer à la réélection du président en 2022 en l’aidant à élargir sa majorité. Le juppéiste aura sans doute l’occasion d’évoquer ce sujet avec M. Castex, qu’il doit retrouver mardi lors d’un dîner à Matignon. Trois jours plus tard, l’ex-premier ministre est attendu aux Rendez-vous de l’histoire de Blois, où il a été invité à partager son « imaginaire historique ». Le soir, un montage provisoire du troisième volet de la série documentaire Edouard mon pote de droite, réalisée par Laurent Cibien, sera diffusé aux participants. Une plongée au cœur de la première année d’exercice du pouvoir d’Edouard Philippe à Matignon. Le maire du Havre n’a vraiment pas fini de se rappeler au bon souvenir d’Emmanuel Macron.

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4 octobre 2020

Jean Paul Gaultier

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4 octobre 2020

Tibétains, Ouïghours : en Chine, l’assimilation à marche forcée

Par Laurence Defranoux - Libération

Camps de rééducation, déplacement des populations, destruction du patrimoine… Malgré les protestations de la communauté internationale, Pékin accentue encore la répression à l’encontre des minorités.

Plus une semaine ne passe sans qu’une nouvelle enquête ne jette une lumière implacable sur l’assimilation brutale imposée par Pékin aux peuples ouïghour et tibétain. Pour contourner la chape de plomb de la censure, sinologues, journalistes, analystes, sociologues ou anthropologues de tous les pays croisent les témoignages, épluchent l’abondante production de la bureaucratie chinoise (statistiques, discours, directives…), étudient les photos satellites. Et mettent au jour toujours plus de violations massives des droits de l’homme.

Après chaque nouvelle révélation, Pékin crie à la désinformation et au complot «antichinois», calomnie les chercheurs, expulse les journalistes, refuse que des enquêtes indépendantes soient menées sur son sol (comme le réclame pourtant l’ONU), martèle que tous les peuples de Chine sont «heureux» puisque le Parti l’a décidé, et en veut pour preuve les photos de paysages majestueux et de jeunes filles souriantes postées jusqu’à la nausée par ses diplomates sur les réseaux sociaux. On aurait pu penser que les protestations des dirigeants européens, les sanctions américaines, les appels au boycott des JO d’hiver de 2022 ou la décision de grandes marques d’arrêter de produire au Xinjiang auraient poussé Pékin à adoucir le traitement réservé à des pans entiers de sa population. Au contraire.

Fin août, le président Xi Jinping a appelé à de «nouveaux efforts pour assurer la sécurité nationale au Tibet», soit un renforcement du contrôle policier. Et samedi, il a exigé que la politique menée au Xinjiang depuis 2014, qui, selon ses termes, «a généré une situation saine où les gens vivent et travaillent dans le contentement», soit prolongée.

Cimetières et mosquées rasés

On savait qu’au Xinjiang, appelé aussi Turkestan oriental, une immense région de l’ouest de la Chine qui compte 25 millions d’habitants, dont environ la moitié de musulmans, des mosquées, sanctuaires ou cimetières sont rasés et remplacés par des parkings, des parcs ou des terrains vagues. Mais l’ampleur des destructions était difficile à évaluer. Dans une enquête publiée sur le site de l’Australian Strategy Politic Institute (Aspi) la semaine dernière, le chercheur Nathan Ruser estime qu’environ 8 500 mosquées, anciennes ou récentes, ont été démolies dans le Xinjiang depuis 2017. Soit un tiers des lieux de culte recensés. 8 000 autres auraient par ailleurs été endommagées, comme la grande mosquée de Kargalik, datant du XVIe siècle, dont la porte monumentale a été détruite en 2018 et remplacée par une reconstitution miniature. D’autres ont été amputées de leur minaret et de leur coupole, ou transformées en magasins ou en bars branchés.

L’architecture est aussi ciblée. Les rues anciennes de Kashgar, carrefour commercial d’Asie centrale depuis des siècles, sont restaurées à la pelleteuse, les maisons de bois et de torchis remplacées par des alignements de façades façon Disneyland. La sphère privée n’est pas épargnée. Dans son article «Transformer l’espace domestique ouïghour», l’universitaire américain Timothy Grose a révélé cet été qu’une politique de «civilisation» des foyers ouïghours était menée depuis 2018. Des centaines de milliers d’intérieurs meublés de tentures, tapis, tables basses et niches de prière sont redécorés par les fonctionnaires chinois, avec des meubles modernes impersonnels, massifs et tape-à-l’œil.

Cet effacement physique s’ajoute à celui du patrimoine immatériel (langue, histoire, arts, littérature) et à la folklorisation des Ouïghours eux-mêmes, présentés par les médias d’Etat comme de braves paysans dansant et mangeant des pastèques dans un décor de far-west exotique. «L’objectif premier est de faire du Xinjiang une partie économiquement productive de la nation chinoise en éliminant ce que les autorités de l’Etat considèrent comme le "problème ouïghour". Ce qui arrive répond aux définitions du génocide culturel, mais aussi aux processus plus longs et plus vastes de domination et de dépossession de la colonisation, explique Darren Byler, anthropologue à l’université Cornell. Le génocide et la colonisation ne s’excluent pas, car l’occupation de la terre entraîne souvent l’élimination totale ou partielle du peuple colonisé.» Les intellectuels ouïghours qui auraient pu s’élever contre cette destruction programmée, comme la célèbre anthropologue Rahile Dawut ou le géographe et ex-président d’université Tashpolat Tiyip, ont disparu par centaines dans les limbes d’un système carcéral construit à marche forcée.

Au Xinjiang, des camps aux prisons

Après des émeutes qui avaient fait environ 200 morts en 2009 et une série d’attentats en Chine attribués à des séparatistes ouïghours, le président chinois avait, en 2014, ordonné aux autorités locales d’être «sans pitié». Chen Quanguo, un de ses proches, nommé à la tête de la région en août 2016, a appliqué les ordres avec un zèle inouï. En 2017, 20 % des arrestations policières en Chine ont eu lieu au Xinjiang, qui ne représente pourtant que 1,8 % de la population. Parallèlement, un réseau de détention extrajudiciaire, où règnent l’arbitraire et la torture, a été créé ex nihilo.

On estime qu’au moins un million de personnes ont été envoyées dans des camps de rééducation pour être «déradicalisées». Ces camps ont été rebaptisés en cours de route «centres de formation professionnelle». Pour la première fois, le 17 septembre, dans son livre blanc sur le Xinjiang, Pékin a livré un indice sur l’ampleur de sa campagne de «lutte contre l’extrémisme religieux via l’éducation», écrivant que «1,29 million de personnes ont été formées en moyenne par an au Xinjiang entre 2014 et 2019».

Depuis l’été 2019, les autorités répètent que «tous les étudiants ont été diplômés et ont trouvé un emploi». Beaucoup sont sortis des camps et ont été envoyés travailler à la chaîne, mais de nombreux Ouïghours n’ont fait que passer d’une forme de détention à une autre.Dans une enquête publiée fin août sur le site américain Buzzfeed, la journaliste Megha Rajagopalan a décompté 268 centres de détention construits depuis 2017 au Xinjiang, dont certains très récemment. Un mois après, les chercheurs australiens de l’Aspi ont allongé la liste, identifiant en tout 380 lieux de privation de liberté (camps extrajudiciaires, centres de détention classiques et prisons de haute sécurité). Selon eux, seuls quelques camps ont été désaffectés et, surtout, 47 nouvelles prisons ont été créées ou agrandies l’année passée, et 14 sont encore en construction. Pour Gene Bunin, qui gère la Xinjiang Victims Database, qui compile les signalements de Ouïghours disparus, «le fait que plus de 300 000 personnes ont été récemment condamnées à de très longues peines de prison est un problème beaucoup plus grave que les camps de rééducation».

Les nomades tibétains envoyés à l’usine

Depuis quelques jours, les projecteurs se braquent à nouveau sur le Tibet, une des régions les plus contrôlées et les plus sensibles depuis son invasion par les troupes chinoises en 1950. Entre 2011 et 2016, la région autonome a été dirigée par le même Chen Quanguo puis confiée à son adjoint. La Jamestown Foundation, basée à Washington, vient de publier un nouveau rapport du chercheur allemand Adrian Zenz, portant cette fois sur le transfert massif de nomades et de paysans tibétains à des fins économiques, mené depuis le début de l’année 2020. D’après une centaine de sources chinoises, vérifiées et complétées par l’agence Reuters, 543 000 personnes, soit un Tibétain sur sept, ont été déplacées entre janvier et juillet pour être formées à des emplois dans les secteurs de la construction, du textile, de la sécurité ou du nettoyage.

Sur un modèle rappelant celui du Xinjiang, où a été mis à jour ces derniers mois un sysème de travail forcé à grande échelle, des «centres de formation» au «style semi-militaire», où des photos montrent les stagiaires habillés en treillis, ont été construits pour l’occasion. D’après Vinayak Bhat, ancien colonel de l’armée indienne spécialisé dans l’imagerie, qui avait repéré trois de ces camps en construction l’année dernière, «on voit clairement sur les photos satellites que ces camps sont encadrés par la police armée du peuple», une force paramilitaire. Les objectifs officiels sont d’«éliminer les paresseux», «guider les masses vers une vie heureuse grâce au travail», leur inculquer «la gratitude envers le Parti» et atteindre les objectifs chiffrés d’éradication de l’extrême pauvreté imposés par Xi Jinping pour la fin de l’année.

Environ 50 000 travailleurs ont déjà été envoyés «par lots» dans divers endroits du Tibet et 3 000 autres dans le reste de la Chine selon Adrian Zenz. Le Global Times, organe de propagande du Parti, assure qu’il s’agit de «transfert des travailleurs excédentaires des zones rurales vers d’autres lieux sur la base du volontariat». Certes, l’exode rural est un des moteurs de la croissance économique chinoise, et on n’a encore que peu de données sur cette campagne de «formation» menée au Tibet. Mais le fait que des quotas de travailleurs soient imposés aux cadres locaux sous peine de punition et que, en quelques mois, un demi-million de nomades ou d’agriculteurs ont envisagé d’abandonner leurs alpages, leur mode de vie et leur famille pour embrasser des métiers peu qualifiés dans des villes inconnues laisse penser que cette politique relève, au moins en partie, du travail forcé.

4 octobre 2020

Bettina Rheims

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4 octobre 2020

Vu du Royaume-Uni - Ce que les mystérieux cas de chevaux mutilés révèlent de notre état d’esprit

chevaux

THE GUARDIAN (LONDRES)

Et si c’était un phénomène naturel ? Alors que les signalements de chevaux mutilés s’accumulent en France, cette journaliste britannique explique que si cette piste ne semble pas véritablement explorée, c’est que nous sommes devenus plus réceptifs aux théories du complot.

Les animaux ont été retrouvés amputés de leurs parties génitales et de leurs oreilles, les yeux arrachés ou le corps tailladé d’entailles nettes et profondes. La récente vague de mutilations d’équidés signalées à travers l’Hexagone a causé l’effroi et l’indignation. On a évoqué des cultes sataniques ou l’œuvre d’imitateurs isolés. Et si ce vent de panique en disait plus long sur notre état d’esprit collectif en 2020 qu’un éventuel comportement déviant d’un nouveau genre ?

Les premiers signalements datent de janvier, mais ils se sont multipliés durant l’été, au point d’accompagner d’une sinistre litanie une trêve estivale qui était déjà inhabituelle pour les Français. Environ 150 enquêtes pour “acte de cruauté envers un animal” sont en cours dans plus de la moitié des 96 départements de la métropole. D’après certains cyberdétectives amateurs, le nombre de mutilations serait en réalité proche des 200.

À la vive émotion suscitée sur les réseaux sociaux se sont ajoutés des appels à organiser des rondes de surveillance et à diffuser les photos de véhicules suspects rôdant autour des pâtures et des écuries. Le 7 septembre, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, est allé voir des éleveurs dans l’Oise et leur a rappelé de ne pas faire justice eux-mêmes. Deux jours plus tard, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, annonçait qu’une ligne téléphonique dédiée avait été ouverte afin que les éleveurs puissent communiquer des signalements. Un homme a été arrêté puis relâché après vérification de son alibi. Entre-temps, son portrait-robot a été partagé près de 500 000 fois sur Facebook.

Un phénomène naturel ?

Pour quelques voix discrètes – pas du genre à être écoutées sur Facebook –, il est possible qu’il ne faille chercher aucune responsabilité pour ces blessures atroces. Le 3 septembre dernier, Le Monde faisait remarquer qu’il pouvait s’agir d’un phénomène naturel – les chevaux se seraient blessés eux-mêmes ou seraient décédés de mort naturelle et auraient été entaillés par des prédateurs, comme des renards ou des corvidés.

C’est la conclusion à laquelle sont arrivés les enquêteurs dans d’autres affaires du même type aux États-Unis ou en Allemagne. Au Royaume-Uni, pendant dix ans, à partir de 1983, une série de mutilations d’équidés a été imputée à un “éventreur de chevaux”, mais, en dépit d’enquêtes poussées, personne n’a jamais été condamné – les experts ont conclu que la plupart des blessures avaient été provoquées par des accidents ou étaient survenues après la mort. Les dents du renard coupent à ce qu’il paraît comme un rasoir et sont capables de causer des blessures semblables à celles que ferait un couteau.

Si l’on veut aborder l’affaire d’un point de vue scientifique, il faut commencer d’abord par se demander combien de chevaux sont retrouvés mutilés en moyenne chaque année et mesurer l’excès de mortalité de 2020 – comme l’ont fait les épidémiologistes pendant la pandémie. Cela permettrait déjà de savoir s’il se passe effectivement quelque chose d’anormal cette année. Si tel est le cas, il faut ensuite avancer un certain nombre d’hypothèses susceptibles d’expliquer cette augmentation et les étudier avec méthode. C’est ce qu’ont fait les vétérinaires du Botswana qui enquêtaient sur une vague de morts suspectes d’éléphants. Ayant écarté la piste des braconniers ou d’un virus transmis par des rongeurs, leur enquête a fini par établir la responsabilité d’algues toxiques – la hausse des températures avait causé leur prolifération dans les points d’eau fréquentés par les pachydermes.

L’erreur des enquêteurs français

En France, à ce jour, les enquêteurs semblent avoir commis l’erreur classique – qui est au cœur de bon nombre de séries policières, mais aussi d’erreurs judiciaires bien réelles – de se focaliser trop vite sur une seule hypothèse. Personne ne semble même savoir si le nombre de mutilations relevées cette année s’écarte de la norme. Pourtant, les ministres ont demandé aux Français d’être vigilants – attirant ainsi l’attention sur le phénomène –, parlant de “barbares” et de “justice”. Difficile de ne pas voir là un cercle vicieux : le nombre de signalements augmente, les ministres réagissent en promettant de mettre la main sur les coupables (avec l’aide des Français), les signalements se multiplient [380 le 28 septembre].

Il ne fait aucun doute que des individus souffrant de troubles mentaux pourraient figurer parmi les hypothèses dans l’affaire qui nous intéresse. Phil Kavanagh, psychologue clinicien à l’université de Canberra, en Australie, et auteur de publications sur la cruauté envers les animaux, explique que ces mutilations pourraient être le fait d’une personne psychotique – comme l’adolescent qui, selon une histoire sans doute apocryphe, a crevé les yeux de six chevaux dans le Suffolk, inspirant Peter Shaffer pour sa pièce Equus (1973). Seulement, il se trouve que l’affaire française couvre une très vaste zone géographique. Phil Kavanagh doute qu’une seule personne puisse être responsable de toutes les mutilations et ne connaît aucun précédent de personnes psychotiques s’organisant entre elles. En réalité, poursuit-il, très peu d’études ont été réalisées sur la cruauté envers les animaux, alors que les mythes abondent à ce sujet. L’un d’eux est appelé la “triade Macdonald” – selon ce mythe, il existerait entre l’énurésie nocturne au-delà d’un certain âge, la pyromanie et la cruauté envers les animaux un lien qui serait annonciateur de violences à venir contre des personnes. Exposée pour la première fois dans les années 1960 sur la base d’une étude menée à petite échelle, la “triade Macdonald” ne résiste pas à l’épreuve de la science.

L’exposition au flot continu sur les “ingérences étrangères”

Pourquoi les enquêteurs français ont-ils focalisé leurs efforts sur une hypothèse unique et ténue à l’exclusion de toutes les autres ? Peut-être n’est-ce pas si surprenant quand on sait l’état d’esprit dans lequel se trouvent les Français – et pas qu’eux. Des mois durant, tandis que la pandémie faisait rage, nous avons tous absorbé un flot continu d’allégations sur les “ingérences étrangères” et les intrigues de “l’État profond” [transcription de l’américain deep state, qui désigne, dans les théories conspirationnistes, une organisation détenant secrètement le pouvoir de décision dans un État]. Une hypothèse abracadabrantesque originaire des États-Unis, selon laquelle Donald Trump serait aux prises avec un réseau de suppôts de Satan pédophiles, se propage ainsi en Europe, notamment en France et au Royaume-Uni.

Certains complots sont bien réels. En ce moment se déroule par exemple à Paris le procès des complices présumés des attentats de 2015 [de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher]. Mais il existe aussi une corrélation étroite entre le fait de croire à ces complots et celui de voir un schéma cohérent là où il n’y en a pas. Les mutilations d’équidés ont peut-être été commises par des humains, mais elles ne sont peut-être aussi qu’une élucubration d’un monde à cran, enclin à voir une forêt là où il n’y a que quelques arbres. Dans ce second cas, le danger est double : des innocents risquent d’être punis et l’on risque de passer à côté de la véritable explication. La seule manière d’avancer est ici de garder l’esprit ouvert et de s’en tenir aux faits.

Laura Spinney

Source : The Guardian

LONDRES www.theguardian.com

4 octobre 2020

Kourtney Roy

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