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Jours tranquilles à Paris

14 décembre 2019

Extrait d'un shooting. Photos : Jacques Snap

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14 décembre 2019

Une banane à 120.000 dollars scotchée sur un mur

Accrochez-vous bien ! Une banane collée sur un mur avec du ruban adhésif a été vendue à 120.000 dollars. Je vous assure ce n’est pas une blague ! On vous raconte l’histoire…

L’œuvre intitulée « Comedian » est signée Maurizio Cattelan un artiste italien qui à la base imaginait une sculpture en forme de banane. D’après le galeriste de l’exposition, plusieurs modèles avaient été réalisés, en résine puis en bronze avant qu’il choisisse finalement d’exposer une vraie banane. Cette œuvre était exposée à l’exposition d’art contemporain Art Basel à Miami Beach aux États-Unis quand elle fût dévorée sous les yeux stupéfait des autres visiteurs. David Datuna, un artiste américain s’avance, décolle délicatement la banane, il l'a pèle puis la mange sans scrupule tout en regardant la foule devant lui ! Une action surprenante et audacieuse qui pousse à la réflexion… David Datuna y voit une performance artistique qu’il nomme « Hungry Artist », une interprétation culotée, il faut le dire !

Ceci dit, d’après la Galerie Emmanuel Perrotin qui a d’ailleurs vendu « Comedian », cet homme n’a pas détruit l’œuvre. "Il n'a pas détruit l’œuvre. La banane, c'est l'idée", a expliqué son directeur des relations avec les musées Lucien Terras, au quotidien Miami Herald. L’idée est que toute la valeur de l’œuvre réside dans le certificat d’authenticité surtout en sachant que le fruit est censé être changé fréquemment, car oui un fruit ça pourrit ! La banane a d’ailleurs été remplacée dès sa disparition.

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14 décembre 2019

Grève : à Paris, la ruée sur les pistes cyclables et les limites des vélos et trottinettes en libre-service

Par Olivier Razemon

L’afflux de deux-roues permet d’observer en accéléré la transformation des mobilités dans une grande ville et de mettre en lumière les déficiences du libre-service.

« Inauguration du Vélopolitain ». Les lettres capitales ont été tracées au pochoir sur le morceau de carton que brandit un militant le long de la piste cyclable de la rue de Rivoli, en plein cœur de Paris. Jeudi 12 décembre, au matin du huitième jour de grève dans les transports, les associations Mieux se déplacer à bicyclette et Paris en selle « inaugurent » officieusement le réseau cyclable qu’elles appellent de leurs vœux pour la capitale et sa proche banlieue. Puisque les lignes du métropolitain fonctionnent au ralenti, autant créer des lignes de vélo.

Les activistes effectuent un marquage au sol, à la craie, en respectant le code couleur utilisé par la RATP, noir sur fond jaune pour la ligne 1, V blanc (au lieu du M de métro) sur fond noir. Les dessins s’effaceront rapidement au cours de la matinée. Car sur cette piste à double sens qui longe l’Hôtel de ville, le flux de vélos et trottinettes est incessant. Le compteur installé au bord de la piste s’affole : déjà 1 000 passages à 9 heures du matin. Il avait atteint les 9 000 la veille, un record.

La fréquentation exceptionnelle des pistes cyclables, + 96 % entre le 28 novembre et le 5 décembre, ne nourrit pas seulement les ambitions des associations de cyclistes. Cela constitue une expérience inédite, permettant d’observer en accéléré la transformation des mobilités dans une grande ville.

Le premier constat porte sur les comportements. Il suffit de se poster au bord d’une de ces nouvelles pistes cyclables à double sens pour remarquer que, contrairement à ce que l’on avait l’habitude d’observer jusque-là, rares sont les scooters et motos à emprunter délibérément ces voies réservées. Les radars automatiques disposés à certains carrefours ont fini par forger les habitudes.

Par la même observation attentive, on constate que la plupart des trottinettes empruntent les pistes, avec les vélos, sans heurts majeurs. Le sujet était très discuté ces derniers mois, y compris au ministère des transports et au Parlement : les usagers de la trottinette devaient-ils rouler sur la chaussée, sur les pistes, voire sur le trottoir ? Le bridage de la vitesse maximale à 20 km/h, réclamé par la Mairie de Paris en juin, facilite sans doute cette cohabitation.

Enfin, selon un comptage empirique, les vélos semblent bien plus nombreux que les trottinettes électriques. Celles-ci demeurent pourtant très demandées. Lime, premier opérateur parisien, annonce depuis le début de la grève une progression moyenne de 90 % du nombre de trajets quotidiens par rapport à une journée normale. Dott, qui a disposé 3 000 exemplaires dans Paris intra-muros, effectue un constat similaire : « + 50 % le jeudi 5 décembre, premier jour de grève, par rapport au jeudi précédent, + 100 % le week-end et même + 230 % lundi 9 », indique Matthieu Faure, responsable du marketing.

« Challenge opérationnel » pour les opérateurs

Pour les opérateurs, « c’est un vrai challenge opérationnel », relève M. Faure : « Chaque trottinette est utilisée six à huit fois par jour. Elles se déchargent plus rapidement, en une matinée plutôt que trois jours. » Les nouveaux modèles de Lime, mis en service en septembre, affichent une autonomie de 50 km et « sont rechargés quotidiennement », signale l’opérateur. Pour faire face à cet afflux, les deux sociétés mobilisent tout leur personnel, 100 personnes chez Dott, 300 chez Lime.

Côté vélo, l’application de guidage Geovelo enregistre « deux à trois fois plus de téléchargements qu’en temps normal », indique Antoine Laporte Weywada, directeur du développement. Le nombre de kilomètres parcourus avec l’aide de l’application a bondi de 300 % mardi par rapport à une journée équivalente en novembre. « Par ailleurs, les trajets sont plus longs que d’habitude. Les gens viennent de loin », souligne le responsable.

Une partie des usagers se sont équipés d’un Véligo, la bicyclette électrique bleu turquoise proposée par la région Ile-de-France pour un forfait de 40 euros par mois. Leur nombre a bondi, de 3 200 juste avant la grève à 4 000 le 12 décembre. D’autres ont recours au service Vélib’ : 160 000 courses ont été enregistrées mardi, mais c’est moins que le 13 septembre, première journée de fronde à la RATP contre la réforme des retraites, lorsque 180 000 trajets avaient été effectués.

Le « free-floating » ne fait plus recette

De nombreux utilisateurs, dont une part de néocyclistes qui ne disposent pas de leur propre vélo, se retrouvent face à des stations vides ou avec un vélo endommagé ou aux pneus crevés. A certaines stations fréquentées, des files d’attente se forment. Le service montre ses limites. Le vandalisme à l’encontre des Vélib’ n’est pas un problème nouveau à Paris, mais il est exacerbé par la surutilisation du parc ces derniers jours, ainsi que par les stations fermées en prévention des manifestations. « La grève a un impact direct sur la régulation du parc », admet l’opérateur Smovengo.

Le « free-floating », en outre, ne fait plus recette. Lors de leur disposition dans les rues, début 2018, ces vélos en libre-service, Gobee, Mobike ou Ofo, étaient présentés comme des acteurs susceptibles de dominer le marché de la mobilité. Ils ont pratiquement disparu. Seuls ont survécu les vélos rouge écarlate estampillés Jump, proposés par le transporteur Uber sur son application.

Sur les pistes, mais aussi les avenues, aux carrefours, aux portes de Paris, on voit surtout une masse de vélos personnels, sortis des caves ou dénichés sur Leboncoin. Il y en a de toutes sortes, plus ou moins customisés, plus ou moins grinçants, avec ou sans assistance électrique, pas toujours éclairés, parfois dépourvus de garde-boue, ce qui n’est pas du tout recommandé quand on roule sur une chaussée mouillée.

Cet afflux inattendu amène les associations franciliennes à réclamer avec davantage d’insistance la concrétisation du réseau Vélopolitain, ainsi que l’installation d’arceaux de stationnement. « En l’état, l’infrastructure n’est pas faite pour accueillir un doublement de la pratique », déplore Charles Maguin, président de Paris en selle.

14 décembre 2019

GREVE

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14 décembre 2019

La une du Parisien...

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14 décembre 2019

Lanceurs d'alertes

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14 décembre 2019

Enquête - Déclaration d’intérêts : les oublis en série du haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye

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Par Anne Michel, Samuel Laurent

La liste des omissions ne cesse de s’allonger. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique devrait décider le 18 décembre, selon nos informations, de saisir ou non la justice.

Après la découverte de défauts de déclaration d’activités et d’irrégularités dans sa déclaration d’intérêts, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) devrait se prononcer mercredi 18 décembre, selon nos informations, sur la transmission à la justice du dossier du haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye.

Doté d’un statut de ministre délégué dans le gouvernement d’Edouard Philippe depuis le 3 septembre, M. Delevoye est fragilisé pour avoir remis à l’instance garante de la probité des décideurs publics une déclaration incomplète, et dont une mention le place de surcroît en infraction vis-à-vis de la Constitution. La réunion du collège de la HATVP va devoir décider de saisir, ou non, le parquet, au plus fort du conflit social autour de la réforme des retraites, sujet explosif dont Jean-Paul Delevoye a la charge.

Sans attendre l’issue de la procédure de contrôle, le procureur de Paris Rémy Heitz a également adressé un courrier à la HATVP pour s’enquérir des faits, a révélé l’Agence France-Presse (AFP) vendredi 13 décembre. La Haute Autorité a fait savoir dans la foulée qu’elle suivait son calendrier de contrôle, et répondrait au parquet « en temps et en heure », « dans les meilleurs délais ».

Identifier les possibles conflits d’intérêts

La déclaration d’intérêts est le document que doivent remplir tous les membres de gouvernement, comme bon nombre de responsables publics, afin d’y recenser tous leurs liens d’intérêts et permettre ainsi à la HATVP d’identifier de possibles conflits d’intérêts. Or, des révélations successives du Parisien et de Capital, depuis lundi 9 décembre, ont permis d’établir que M. Delevoye avait omis de déclarer deux mandats toujours actifs d’administrateur bénévole : l’un à l’IFPASS, l’école de formation aux métiers de l’assurance, l’autre à la Fondation SNCF, qui pilote les actions de mécénat du groupe ferroviaire.

Surtout, la déclaration d’intérêts du « ministre des retraites » mentionne une fonction de président d’honneur d’un think tank, Parallaxe, rémunérée 64 420 euros net en 2018 et en 2019. Ce que la Constitution lui interdit depuis son entrée formelle au gouvernement en septembre : « Tout emploi public ou toute activité professionnelle » sont proscrits aux membres du gouvernement durant leur mandat, dit l’article 23.

Moins graves en apparence, les deux omissions de M. Delevoye n’en posent pas moins la question du respect de la loi de 2013 sur la transparence de la vie publique. Le texte impose aux décideurs publics (ministres, élus…) de faire état de toutes leurs fonctions bénévoles (comme président, trésorier, administrateur d’une entité…) « susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts ». Cette liste ne doit pas être exhaustive, mais aucune fonction susceptible d’influencer les futures prises de décision du déclarant ne doit manquer.

Liste plus longue encore

Or il semble que ce travail d’analyse scrupuleux de possibles conflits d’intérêts, exigé par la loi de tout décideur public, n’ait pas été correctement fait, loin s’en faut, par l’artisan de la réforme des retraites en France. Car à son tour, Le Monde est en mesure de révéler que la liste des mandats non déclarés du haut-commissaire aux retraites est plus longue encore. Et qu’au moins deux fonctions bénévoles supplémentaires auraient mérité de figurer dans la déclaration d’intérêts du ministre délégué.

Le Monde a trouvé trace d’un autre mandat important détenu par M. Delevoye, pourtant lui aussi omis dans sa déclaration d’intérêts : celui de président de l’Observatoire régional de la commande publique des Hauts-de-France, une structure rattachée à la région et à la préfecture qui vise notamment à améliorer la visibilité et la transparence des marchés publics dans la région. M. Delevoye n’y a pas renoncé malgré son entrée au gouvernement. Or ce poste donne au ministre délégué un regard sur les investissements locaux, ce qui peut poser question. « Il est question de marchés, d’argent et de commande publics, c’est typiquement un mandat à déclarer », relève un connaisseur des lois de transparence.

Jean-Paul Delevoye apparaît également comme membre du Conseil d’orientation de l’Institut de recherche et de débat sur la gouvernance (IRG). Peu actif depuis 2018, ce think tank dépend de l’influente Fondation Charles-Leopold-Mayer pour le progrès de l’homme. Détenue par la famille Calame, cette organisation à but philanthropique, installée en Suisse, totalise 250 millions d’euros d’actifs. Selon son objet, elle « finance par l’octroi de dons ou de prêts des recherches et des actions qui concourent au progrès de l’homme par les sciences et le développement social ». Des thématiques suffisamment larges pour qu’elles soient signalées.

De manière plus anecdotique, l’ancien chiraquien, qui fut ministre de la fonction publique sous Jean-Pierre Raffarin, était également, en 2018, cité comme président d’une « coalition divisons les délais administratifs par deux », adossée à une agence de communication, 40 degrés sur la banquise… Et la liste n’est vraisemblablement pas exhaustive.

« Il aurait dû déclarer »

Sollicité, l’entourage du haut-commissaire aux retraites a confirmé l’existence de ces mandats, tout en précisant que M. Delevoye va notamment « très peu » à l’Observatoire régional de la commande. « Tout est bénévole. Mais oui, il aurait dû déclarer », ces postes à la Haute Autorité, reconnaît-on, en avançant cette explication : « Lorsqu’il a quitté le Conseil économique social et environnemental (CESE) et la vie politique », M. Delevoye a accepté nombre de propositions, pour la plupart bénévoles. « Il s’est beaucoup investi dans le monde associatif sur des sujets qui lui tenaient à cœur, il a souhaité maintenir ces liens. » Et de justifier : « Nous sommes en contact avec la HATVP » pour expliciter ce qui doit l’être.

Dès les premières révélations dans la presse, M. Delevoye a plaidé l’oubli et la bonne foi s’agissant des omissions de mandats bénévoles et pour éteindre la polémique, promis de rembourser l’argent indûment perçu (plus de 120 000 euros au total). Mais cette défense se trouve aujourd’hui considérablement affaiblie par des découvertes qui se multiplient. Le ministre des retraites a-t-il fait preuve de négligence ? A-t-il sous-estimé l’importance et le poids de ses obligations auprès d’une HATVP pourtant bien installée dans le paysage politique depuis sa création en 2013, après l’affaire Cahuzac ? Doit-il être poursuivi au titre de ces manquements ? Il appartiendra à la HATVP de se prononcer, mercredi, sous réserve toutefois qu’elle ait reçu les précisions demandées ces jours derniers à M. Delevoye.

De fait, l’autorité administrative indépendante n’a pas attendu ces révélations pour interroger le ministre sur sa déclaration d’intérêts, comme d’ailleurs sur sa déclaration de patrimoine. Des contrôles étaient en cours quand ces informations ont été publiées et une liste de questions précises, que la HATVP garde confidentielles, a été adressée à M. Delevoye, afin de l’amener à préciser certains points.

L’échange, qui se poursuit actuellement, a toutes les chances de déboucher sur une déclaration rectificative – et ce quelle que soit l’issue judiciaire du dossier. L’usage veut que les contrôleurs de l’autorité vérifient par exemple ce que le déclarant a fait précisément dans le cadre de ses mandats, ou si les activités bénévoles n’ont pas donné lieu à des prestations rémunérées cachées (cours, conférences…).

14 décembre 2019

Helmut Newton

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14 décembre 2019

Fraîchement élu, le président algérien Abdelmadjid Tebboune déjà face à la contestation

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Abdelmajjid Tebboune à son bureau de vote à Alger, jeudi. 

Photo Ryad Kramdi. AFP

Par Madjid Zerrouky

L’ancien premier ministre a obtenu 58,15 % des voix lors du scrutin de jeudi, avec seulement 39,83 % de participation. Et dès vendredi, il a fait face à des manifestations de masse.

A peine proclamé, c’est un président d’ores et déjà conspué par des marches gigantesques. C’est le paysage politique qu’offre sans surprise l’Algérie au lendemain de la tenue de la très contestée présidentielle du 12 décembre, sur fond de boycott et de manifestations.

Donné vainqueur par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), vendredi 13 décembre vers 11 h 30, Abdelmadjid Tebboune est arrivé en tête avec 58,15 % des voix pour une participation annoncée officiellement à 39,83 %. Soit le niveau le plus bas de l’histoire des scrutins présidentiels organisés dans le pays que l’opposition dénonce comme étant quand même artificiellement gonflé.

Ephémère premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika et représentant de la vieille bureaucratie d’Etat, M. Tebboune, 74 ans, passait pour le plus proche de l’homme fort du pays, le général Ahmed Gaïd Salah, parmi les cinq candidats en lice. Il aura connu un état de grâce d’à peine deux heures. Une marée humaine a envahi le centre de la capitale et d’autres villes à l’annonce des résultats pour dénoncer sa victoire. Jamais un président algérien n’avait eu droit à un tel d’accueil…

Lors d’une conférence de presse tenue à Alger en fin de journée, le nouveau président a dit « tendre la main au Hirak [le mouvement de protestation en cours contre le régime] pour un dialogue afin de bâtir une Algérie nouvelle et restaurer la confiance entre les enfants du pays ». Il s’est également engagé à « amender la Constitution qui sera soumise à un référendum populaire » sans en préciser ni le contenu ni les modalités.

Déclarations de bonnes intentions

Une main tendue dans le vide ? Pas sûre que ces quelques déclarations de bonnes intentions rassurent pour l’instant les Algériens qui se mobilisent massivement depuis maintenant dix mois et qui considèrent que rien ne répond aux revendications exprimées par le Hirak. A savoir un renouvellement des figures politiques et une mise à plat du fonctionnement des institutions pour qu’elles soient transparentes et démocratiques.

Des cinq candidats, Abdelmadjid Tebboune est celui qui est resté le plus vague concernant ses projets de réformes institutionnels ou relatifs aux libertés publiques. « On cherchait quelqu’un pour traduire politiquement et dans les institutions l’agenda du Hirak, lui traduit l’agenda de Gaïd Salah », résumait, amer, le journaliste Ihsane El Kadi sur Radio M. « Jour d’après », ce vendredi était attendu avec fébrilité. Parmi les Algérois hostiles au vote rencontrés les jours précédents, certains disaient avoir réservé cet après-midi-là pour contester le nouvel élu et préférer ne pas manifester le jour de la tenue du scrutin, par peur de violences et de provocations.

Au petit matin, Alger a sa mine des mauvais jours. Le ciel est bas et gris, des files interminables de véhicules de police sont garés le long des avenues, des passants sont résignés et des opposants accusent le coup. « C’est à pleurer », admet un sympathisant du RAJ, un mouvement éprouvé par la répression. On commente avec appréhension les événements en Kabylie, secouée par des émeutes après la dispersion des marches du jeudi qui ont vu des dizaines de bureaux de vote fermés par les manifestants, urnes et bulletins dispersés dans les rues.

« Cette élection est illégitime »

C’est après l’annonce du vainqueur par l’ANIE que tout bascule. Vers 14 h 30. Ils arrivent, par quartiers, en groupes, en famille. Une foule immense prend d’assaut les principales artères de la capitale avec un parfum des grandes heures du mois de février. Dans une ambiance bon enfant mais avec un florilège de colères : « Cette élection est illégitime, le chiffre de participation est une insulte au peuple. On se fiche de nous mais on ne s’arrêtera pas. On ne peut pas rester muselés comme ça. On veut vivre dignement », prévient Réda Ouhib, un cadre dans l’assurance enveloppé dans le drapeau national, rencontré près de la Grande Poste.

« Cette élection, c’est un non-événement pour l’Algérie. On s’y attendait. Mais le scénario est tellement idiot. Ils se sont surpassés. L’Algérie veut se libérer. Le premier préalable, c’est la libération des détenus. Sinon on ne s’arrêtera jamais », ajoute Madjid Azla, un cadre dans la fonction publique.

Avenue Assalah-Hocine, une immense procession s’écoule depuis le quartier populaire de Bab El-Oued : « Elections militaires, ils ont fait voter les soldats jour et nuit ! » Plus loin, les jeunes de la banlieue populaire d’El Harrache remontent vers la rue Didouche-Mourad avec tambours et drapeaux.

Compagnon des colères algéroises, l’humour fraye son chemin dans les cortèges. Nez poudrés de farine, déversée par paquets depuis les balcons, de nombreux manifestants moquent « l’affaire de la cocaïne » dans laquelle le fils d’Abdelmadjid Tebboune, Khaled, est impliqué. Il est en détention provisoire dans une affaire de trafic d’influence liée à la saisie de 700 kg de cocaïne en mai 2018. Sur l’air des printemps arabes – Le peuple veut la chute du régime –, on s’époumone : « Le peuple veut de la blanche gratuitement ! »

Un drapeau berbère, interdit dans les manifestations par le pouvoir, est brandi par défi devant le commissariat du 6e arrondissement. Une scène inimaginable depuis ce printemps, quand le chef d’état-major a interdit l’emblème, réprimant sévèrement les manifestants qui bravaient cette consigne. « La Kabylie, bravo à vous, l’Algérie est fière de vous », crie-t-on du côté de Bab El-Oued.

Avec humour ou rage, les rues algériennes posent un immense défi à Abdelmadjid Tebboune. Et loin de ses déclarations apaisantes, la répression s’abat sur Oran. Dans la capitale de l’ouest algérien, près de 400 manifestants ont été arrêtés ses trois derniers jours, a dénoncé la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme. Les témoignages sur les violences policières se multiplient.

Depuis la convocation du corps électoral, le 15 septembre, le seul horizon de l’armée aura été l’organisation de l’élection du 12 décembre, maintenue contre vents et marées dans un climat de plus en plus tendu. Sans parti ni base sociale, c’est un président mal élu qui fait face aujourd’hui à un pays en ébullition.

 

14 décembre 2019

Laetitia Casta

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