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Jours tranquilles à Paris

13 décembre 2019

Greta Thunberg

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13 décembre 2019

Serge Gainsbourg - maison rue de Verneuil

gainsbourg home

13 décembre 2019

RER D - Stade de France/St Denis

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13 décembre 2019

Algérie : abstention record à l’élection présidentielle contestée

Des milliers de personnes sont descendues jeudi dans les rues d’Alger et d’autres villes du pays aux cris de « Pas de vote ! Nous voulons la liberté ! » pour dénoncer la tenue de l’élection.

Plus de six Algériens sur dix ont boudé les urnes jeudi 12 décembre, une abstention record, lors de la présidentielle fermement rejetée par le mouvement populaire de contestation ayant emporté en avril le président Abdelaziz Bouteflika, dont ils étaient appelés à élire le successeur.

Seuls 39,93 % des inscrits ont voté jeudi, selon les chiffres annoncés en fin de soirée à la télévision nationale par Mohamed Charfi, président de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE). Selon M. Charfi, le taux de participation au niveau national s’établit à 41,41 % et celui des Algériens de l’étranger à 8,69 %, a-t-il ensuite expliqué.

Ce taux est le plus faible de toutes les présidentielles pluralistes de l’histoire de l’Algérie. Il est inférieur de plus de 10 points à celui du précédent scrutin – le plus faible jusqu’ici –, qui en 2014 avait vu la 4e victoire de M. Bouteflika.

Election rejetée par le Hirak

Le Hirak, le « mouvement » de contestation populaire massif et inédit du régime qui a contraint M. Bouteflika à la démission, rejetait catégoriquement la tenue de cette élection, vue comme un moyen de se régénérer pour le « système » au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1962. Ce mouvement exige la fin de ce « système » et le départ de tous les anciens soutiens ou collaborateurs des vingt ans de présidence Bouteflika. Ce que sont les cinq candidats : Abdelaziz Belaïd, Ali Benflis, Abdelkader Bengrina, Azzedine Mihoubi et Abdelmajid Tebboune.

Après une première tentative d’élection avortée en juillet, le haut commandement de l’armée, pilier du régime, ouvertement aux commandes depuis le départ de M. Bouteflika, a tenu coûte que coûte à organiser ce scrutin pour sortir rapidement de l’actuelle crise politico-institutionnelle, qui a aggravé la situation économique. Le général Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée, assurait depuis des semaines que la participation serait « massive ».

« Pas de vote ! »

Aucune projection de résultat n’a été publiée, mais le camp d’Abdelmadjid Tebboune, ancien bref premier ministre de M. Bouteflika en 2017, a revendiqué dans la soirée la victoire au 1er tour. « Selon les premiers éléments en notre possession (…), Abdelmadjid Tebboune a remporté la présidentielle avec un score de 64 % » des votants, a déclaré Abdelatif Belkaim, directeur adjoint de la communication du candidat. L’ANIE annoncera les résultats du 1er tour vendredi à 15 heures, a indiqué son président. Un éventuel second tour se déroulera entre le 31 décembre et le 9 janvier, selon l’ANIE.

Morne dans de nombreux bureaux de vote, la journée a été marquée à Alger par une démonstration de force du Hirak qui a bravé un très fort déploiement policier pour défiler en masse. Une foule estimée à plusieurs dizaines de milliers de personnes est parvenue à envahir les rues du centre de la capitale, malgré les interventions systématiques et souvent brutales de la police à chaque tentative de rassemblement. « Makache l’vote » (pas de vote !), a scandé la foule qui s’est séparée en fin d’après-midi, avant que la police ne disperse à coups de matraque la centaine de protestataires restants, selon une journaliste de l’AFP. Dans la journée, un petit groupe de manifestants est parvenu à s’introduire dans un centre électoral du centre-ville, entraînant une brève suspension du vote pour les évacuer.

Affrontements

Mercredi, des personnalités proches du « Hirak » avaient mis en garde sur le contexte de « vives tensions » et rendu le pouvoir « responsable de tout dérapage éventuel ». Elles avaient exhorté les contestataires à « demeurer pacifiques » en refusant de « répondre aux provocations » et en veillant à « ne pas empêcher l’exercice par d’autres citoyens de leur droit à s’exprimer librement » – un mot d’ordre respecté à Alger.

Globalement, le vote s’est également déroulé normalement à travers le pays sauf dans la région traditionnellement frondeuse et majoritairement berbérophone de Kabylie, théâtre de graves incidents.

Le scrutin a été interrompu, parfois à peine ouvert, dans les trois principales localités de la région : un centre de vote a été saccagé, une antenne de l’ANIE a été incendiée et les forces de l’ordre ont dû repousser à coup de grenades lacrymogènes des manifestants tentant de pénétrer au siège de la wilaya (la préfecture) de Tizi-Ouzou (90 km à l’est d’Alger). Des affrontements entre forces de l’ordre et manifestants, qui ont fait plusieurs blessés dans les deux rangs, s’y sont poursuivis dans la soirée, a indiqué à l’AFP un élu local.

A Tichy, près de Béjaïa (180 km à l’est de la capitale), des affrontements ont opposé dans la soirée des manifestants à des gendarmes, a indiqué à l’AFP Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme.

Selon une source sécuritaire, ayant requis l’anonymat, les gendarmes ont dû employer la force pour repousser des manifestants ayant pénétré dans la gendarmerie et ces heurts ont fait six blessés dans les rangs des forces de l’ordre.

13 décembre 2019

NON à la censure !

censure

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13 décembre 2019

Royaume-Uni : victoire historique pour les conservateurs aux législatives

brexit libé

Par Cécile Ducourtieux, Londres, correspondante

Le premier ministre Boris Johnson va pouvoir rester à Downing Street cinq ans, et surtout réaliser comme promis le Brexit au 31 janvier 2020, ayant totalement renouvelé un Parlement jusqu’alors dans l’impasse.

On l’aime ou on le déteste, avec sa fausse allure brouillonne, son mépris des détails et surtout pour son slogan « Get Brexit done » (« réalisons le Brexit »), simpliste, répété ad nauseam durant toute la campagne des élections générales au Royaume-Uni. Pour autant, Boris Johnson a magistralement réussi son pari. Son camp conservateur a remporté une victoire historique, jeudi 12 décembre, avec 362 sièges à la Chambres des communes (évaluation à 5 heures du matin, heure de Londres), soit 36 sièges au-delà de la majorité absolue (326), une avance jamais vue depuis 1987, lors de la troisième victoire d’affilée du parti sous le leadership de Margaret Thatcher.

Le premier ministre sortant va pouvoir rester à Downing Street cinq ans, et surtout réaliser comme promis le Brexit au 31 janvier 2020, ayant totalement renouvelé un Parlement jusqu’alors dans l’impasse, sans majorité pour (ou contre) le divorce avec l’Union européenne (UE). Les nouveaux députés feront leur entrée à Westminster dès mardi 17 décembre et pourraient avoir à se prononcer sur le « Withdrawal bill », l’acte législatif de retrait de l’Union européenne (UE) avant Nöel. « On nous a donné un mandat fort pour unir ce pays et réaliser le Brexit » a martelé Boris Johnson vers 3 h 45 du matin, depuis sa circonscription d’Uxbridge, dans le nord-ouest de Londres.

Débâcle du parti travailliste

Le parti travailliste, deuxième force politique du pays, encaisse en revanche une véritable débâcle, passant juste au-dessus des 200 sièges (selon les estimations du début de la matinée, vendredi), contre 262 jusqu’en novembre dernier. Il paie lourdement un message flou sur le Brexit – le parti s’engageait à renégocier l’accord de divorce puis à organiser un référendum, un programme très radical (plus de 400 milliards de livres de dépenses publiques supplémentaires, environ 482 milliards d’euros) et surtout, l’image très dégradée de son chef, Jeremy Corbyn, accusé de n’avoir pas sérieusement lutté contre l’antisémitisme rampant dans le parti. A 3 h 30 du matin, juste après avoir appris sa réélection dans le nord de Londres, à Islington, M. Corbyn a d’ailleurs annoncé qu’il renonçait à mener d’autres campagnes électorales et qu’il quitterait la tête du parti, mais « après une période de réflexion » au sein de ce dernier. C’est la quatrième élection générale d’affilée perdue par le parti travailliste.

Les Libéraux démocrates (Libdem) qui en début de campagne espéraient capter l’essentiel du vote Remain, ont complètement raté leur pari, reculant de sept sièges (à treize sièges, évaluation de 5 heures du matin). Leur promesse d’annuler purement et simplement le Brexit s’est révélée une erreur tactique majeure : les électeurs ont jugé que c’était antidémocratique. Cruellement symbole : Jo Swinson, leur jeune leader, qui prétendait vouloir devenir première ministre en début de campagne, a perdu son siège de Dunbartonshire East, au sud-ouest de l’Ecosse, à 150 voix près, au profit d’une toute jeune candidate du SNP, le parti indépendantiste écossais. Combien de temps tiendra t-elle à la tête de sa formation, s’interrogeaient déjà les commentateurs politiques vendredi matin ?

« Une note de bas de page dans l’histoire »

Nigel Farage, ex-fondateur du Ukip, grand promoteur du Brexit, n’a une fois de plus décroché aucun siège pour son « parti du Brexit » à Westminster, les Britanniques s’en détournant largement pour le parti conservateur. Il devrait aussi, logiquement, perdre son poste de député européen, une fois le Brexit réalisé. « Vous allez rester comme une note de bas de page dans l’histoire » lui a lancé Andrew Neil, le redoutable interviewer de la BBC.

Les Britanniques ont donc tranché : ils ont largement confirmé le résultat du référendum de 2016, confirmé qu’ils voulaient le Brexit ou du moins que le résultat du référendum devait enfin être honoré, après trois années et demi d’atermoiements. On a aussi assisté jeudi à un grand réalignement de la politique britannique autour de la fracture du Brexit. Le fameux « mur rouge » du centre et nord de l’Angleterre, bastion travailliste depuis des décennies, mais ayant voté en majorité pour quitter l’UE en 2016, a préféré le vote conservateur.

Sur ces terres traumatisées par les années Thatcher, paupérisées par la fermeture des mines et des usines dans les années 1980, les votants n’ont même pas fait payer le parti Tory pour ses neufs années de politique d’austérité. Première circonscription rouge à tomber, jeudi dans la nuit : Blyth Valley, dans l’extrême nord est de l’Angleterre, était aux mains du Labour depuis les années 1970. Puis sont successivement devenues bleues (la couleur des conservateurs) : Bolsover, Workington ou Leigh. A Bishop Aukland, dans le nord-est, une toute jeune candidate Tory, Dehenna Davison (25 ans), a même gagné avec 8 000 voix de majorité sur la députée labour sortante. « Ce vote prouve qu’on ne peut pas oublier la démocratie [et le référendum de 2016] » a déclaré Ian Lavery, président du Labour.

Le parti travailliste ne s’est maintenu que dans le Pays de Galles et sur Londres, qui avait largement voté pour rester dans l’UE. Mais même dans la capitale, le parti a échoué à décrocher l’énorme trophée d’Uxbridge et South Ruislip, la circonscription de Boris Johnson. Le Premier ministre n’y a quasiment pas mis les pieds de toute la campagne, mais son jeune concurrent travailliste Ali Milani n’a pas réussi à le défaire, malgré la très forte mobilisation des activistes du Labour sur le terrain.

Election « focalisée sur le Brexit »

M. Corbyn réussira t-il à maintenir son leadership dans les jours qui viennent ? John McDonnell, un de ses très proches, ministre des finances de son cabinet fantôme, a tenté de ralentir sa chute, vendredi dans la nuit, en mettant l’échec de son camp sur le dos d’une élection « focalisée sur le Brexit », une manière de ne pas parler du programme, très radical et de la personnalité de Jeremy Corbyn, très mal perçue sur les pas-de-porte un peu partout dans le pays.

Mais la guerre de succession a commencé dans le parti de la gauche britannique. Caroline Flint, députée sortante de Don Valley, qui a perdu son poste jeudi, twittait dans la nuit : « nous allons entendre les Corbynistas blâmer le Brexit, et les Remainers du Labour, blâmer Corbyn. Mais tous ont tord et cette nuit est affreuse pour le parti. » Pour Gloria De Piero, ex-députée Labour ayant renoncé à se représenter le 12 décembre, « mon parti n’a pas tenu compte des signaux d’alerte […] et a échoué à reconnaître que les gens qui ont voté pour quitter l’UE méritaient que leur voix soit entendue ». Très remonté, Ian Murray, le seul élu Labour à avoir réussi à conserver son poste en Ecosse, a fait remarquer vendredi matin : « à toutes les portes auxquelles j’ai frappé durant la campagne, mon équipe et moi avons parlé à 11 000 personnes, tous ont mentionné Corbyn. Pas le Brexit, mais Corbyn. Le résultat, c’est que nous avons laissé tomber le pays, nous devons changer de direction et vite ».

La victoire écrasante de Boris Johnson et de son « Get Brexit done », signifie aussi la fin de l’espoir pour beaucoup de Britanniques proeuropéens, qui depuis trois ans et demi, refusaient la fatalité du résultat du référendum de 2016, réclamaient un deuxième référendum. En raison de la résistance d’une partie d’entre eux à Westminster, la date du Brexit avait été déjà repoussée trois fois. Significatif : même Kensington, circonscription très remainer du centre de Londres (elle a voté à 69 % pour rester dans l’UE en 2016), a choisi une députée conservatrice pro-Brexit, Felicity Buchan. Le candidat Libdem, Sam Gyimah a probablement fait perdre des points à la députée sortante travailliste, signant une défaite cuisante pour le camp du Remain.

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Mains libres

Boris Johnson a désormais les mains libres, avec une majorité assurée, un Parlement renouvelé, des leaders des partis d’opposition sur le départ ou très affaiblis. Le traité de retrait de l’UE est prêt, il a été négocié en octobre entre Londres et Bruxelles, il avait même passé la barre de la première lecture à la Chambre des communes avant sa dissolution. Il doit être définitivement validé à la majorité par le Parlement dans les jours qui viennent – peut-être même avant Nöel. Le Parlement européen aura encore à le ratifier de son côté, mi-janvier. Dès début février, le Royaume-Uni sera devenu un « pays tiers », et entamera la négociation de sa relation future avec l’UE. Boris Johnson a assuré qu’il l’aura bouclée avant fin 2020.

Saura t-il tenir ce délai ? Surtout : pour quel type de relation optera t-il ? Personne n’en sait encore rien. Une chose, cependant : sa majorité aux Communes lui permettra de renier des promesses, pour, par exemple, réclamer plus de temps à Bruxelles afin de négocier la relation future. Il pourrait aussi passer outre les exigences des plus extrêmes des brexiters, qui exigent un Brexit dur et une relation la plus distante possible avec Bruxelles. Après tout, M. Johnson n’était-il pas considéré comme un conservateur « libéral » quand il était maire de Londres ?

Il ne devrait plus non plus dépendre du DUP, les unionistes irlandais, qui ont tenu la dragée haute à Theresa May pendant deux ans (elle dépendait d’eux pour sa majorité), mais sont sortis abîmés du scrutin de jeudi : Nigel Dodds, leur tête de file à Westminster, a perdu son siège au profit du Sinn Fein.

Mais jeudi soir, tous les commentateurs s’interrogeaient sur ce que signifiait cette impressionnante vague bleue en Angleterre alors que le SNP, le parti indépendantiste écossais, a enregistré de son côté une très belle performance, regagnant le terrain perdu lors des élections générales de 2017, et trustant 48 des 59 sièges réservés à l’Ecosse à Westminster. M. Johnson avait beau insister, vendredi aux aurores, sur le concept de parti conservateur « One Nation », tous les commentateurs politiques s’inquiétaient d’un risque accru d’éclatement du Royaume-Uni.

Nicola Sturgeon réclame depuis des mois un deuxième référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, pour cause de Brexit, après celui de 2014 (perdu au profit de l’Union). Le résultat de jeudi va donner de très forts arguments à la cheffe du SNP. Au détail près qu’elle a besoin d’une majorité à Westminster pour que son deuxième référendum soit autorisé. Boris Johnson a déjà fait savoir, qu’il refuserait ce nouveau scrutin aux Ecossais. Mais combien de temps pourra t-il résister ? « Les conservateurs ont perdu des voix en Ecosse, j’ai un mandat pour offrir aux Ecossais le choix, cela ne fait pas de doute » a réagi Mme Sturgeon, vendredi matin.

13 décembre 2019

Toilet Paper

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13 décembre 2019

Cinéma : Dans l’antre de Jean-Luc Godard

godart

La Fondazione Prada à Milan vient d’ouvrir « Le Studio d’Orphée », une exposition consacrée à Jean-Luc Godard. Exposition ? Plutôt une installation, qui reproduit un peu de l'intimité du réalisateur. Vanity Fair a dépêché Olivier Séguret pour rendre compte de l'événement.

Le mot griffe est peut-être, dans un premier temps, le plus adéquat pour décrire le double mouvement, le double effet, produit par « Le Studio d’Orphée », qui recompose à la Fondazione Prada de Milan l’intérieur privé de Jean-Luc Godard. La griffe JLG, c’est ce qui est garanti par ce dispositif : les meubles et tapis, les livres et tableaux, les objets et photos sont tous en provenance directe du repaire du vieux lion nouvelle vague. Ce décor intime était le sien, il meublait le rez-de-chaussée de la maison suisse que Godard occupe à Rolle, canton de Vaud ; il est désormais la propriété de la Fondazione qui en a fait l’acquisition pour une somme non divulguée. C’est un décor intime mais pas tout à fait inconnu: c’est l’endroit où JLG reçoit ses visiteurs et qu’il a plus d’une fois filmé, notamment dans un court métrage où il feint de s’effondrer…

Tout est donc griffé Godard ici, et même le plafond, sur lequel le cinéaste, s’exprimant en peintre, a tracé au rouleau des volutes noires. Ces traces peintes sont une création, elles n’existent pas dans la version originale de la pièce. Dans le vestibule qui précède la salle elle-même, des photos, affiches, poèmes et reproductions tapissent maigrement les murs. Dans son coin, une chaise longue sur laquelle repose une raquette de tennis ressemble à un plan de film oublié.

La griffe, c’est aussi le geste moqueur de l’emmerdeur perpétuel Jean-Luc Godard : alors, plutôt hygge ou feng shui l’intérieur de Jeannot le Fou ? A tous ceux que le cinéaste incommode déjà, cette délocalisation de son home helvétique à Milan semblera un comble de moquerie. Mais le dispositif ne fuit pas davantage les coups qu’il ne les cherche. Seulement, que cherche-t-il ?

Le studio d’Orphée est aussi une salle de projection : sur le vaste écran du téléviseur du salon, une sélection de films est diffusée en boucle, pilotée par l’ordinateur posé sur le bureau. Sur le seuil, une rangée de chaises attend les spectateurs, qui ne pourront pas être trop nombreux puisque nous sommes « comme à la maison ». Et en effet, chez lui, Godard diffuse et regarde en permanence des films et images qui sont souvent les mêmes.

Ce que propose l’endroit, c’est une sorte d’impression réaliste : jusqu’à l’odeur de cigare, il donne la plus fidèle idée accessible de l’aquarium dans lequel l’artiste évolue depuis de longues années. Mais attention aux illusions : ceux qui espèrent saisir ici l’homme Godard repartiront bredouille. Cet environnement est son biotope de cinéaste, son atelier si l’on veut, son nid conceptuel. Sa vie réellement privée se passe ailleurs, au-dessus d’ici et pas loin de là, en compagnie d’Anne-Marie Miéville (dont les visiteurs de l’expo pourront néanmoins s’amuser à trouver une trace ou deux). Techniquement, c’est plutôt la partie « son » de l’atelier godardien qui est la mieux représentée : l’équipement audio est, là encore, celui de l’artisan JLG, sur lequel a été notamment mixé son dernier long-métrage, Le Livre d’image, qui est aussi régulièrement projeté sur l’écran 4K de la salle.

Pour appréhender le Studio d’Orphée, il faut aussi se débarrasser du souvenir laissé par Voyage(s) en utopie, l’exposition à la fois superbe et naufragée qu’il avait conçu pour le Centre Pompidou en 2006. Le projet n’a cette fois rien à voir : à Milan, Godard ne démontre rien, n’invente rien, ne propose aucune pédagogie révolutionnaire du cinéma. Il fait un geste. Un geste curieux, étonnant, mais aussi très émouvant, parce qu’il porte en lui-même sa propre contestation, parce que cela lui donne le goût mélangé de la tendresse et de l’ironie et parce que le résultat dit au final quelque chose qui nous touche.

Il montre d’abord le détachement presque stoïque d’un homme entré dans sa 90ème année qui se sépare de ce qui constitue son environnement immédiat, fabriqué dans le temps, ce temps dont les éléments exposés portent aussi les strates. Cette caverne dont il soigne le décor et la mise en scène depuis la nuit de ses propres rêves, est un véritable prolongement de lui-même : la couveuse de ses films, l’estrade de son éloquence, l’atelier de son orfèvrerie. Dans la maison de Rolle comme à la Fondation Prada, l’endroit ne témoigne en actes que d’une seule chose : cet espace suffit à faire des films. Disons-le autrement : c’est dans cette grotte que l’un des plus grands poètes du cinéma a allumé les derniers feux d’une œuvre qui n’a pas fini de nous embraser. Oui, il y a une dimension crépusculaire dans le geste par lequel Godard s’assure que la preuve de son cinéma sera ainsi longtemps disposée à témoigner. C’est pour cela qu’avec le temps, toujours lui, le studio d’Orphée gagnera en valeur, en profondeur, en sens. Surtout si, comme c’est probable, l’expérience se prolonge dans de nouveaux développements à la mesure que Godard lui-même souhaitera lui donner : une sonorisation spécifique de l’ascenseur menant au Studio est déjà prévue...

Il ne faut pas non plus négliger l’effet d’aile protectrice que Godard obtient en signant un pacte avec Prada. Il n’a plus l’âge, ni l’envie, de jouer au bras de fer avec les producteurs. Avec la Fondazione, il y a comme un troc symbolique et paradoxal : Godard y trouve un abri en lui offrant son propre nid.

Car au fond, si le Studio d’Orphée n’est pas à proprement parler une œuvre de Godard, son existence, sa conception et sa mise au monde, peuvent être tenues pour l’œuvre de Miuccia Prada.  C’est en effet la créatrice (et esthète, et intellectuelle, et femme d’affaires, et cinéphile) italienne qui a  témoigné d’une flamme ardente pour Godard, lui a fait une cour discrète mais assidue durant de longues années et l’a finalement convaincu. Pas besoin de fréquenter Godard pour connaître sa méfiance ou sa ruse à l’égard des maîtres du monde ; il semble que cette fois une forme de sincérité du mécène a croisé au bon moment la volonté émue mais lucide de l’artiste.

Fondazione Prada, Largo Isarco, 2, Milan

Du mercredi au lundi, de 13h à 19h

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13 décembre 2019

Musée des Arts Décoratifs

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L’exposition « Marche et démarche. Une histoire de la chaussure » s’interroge sur le statut de cet accessoire indispensable du quotidien en visitant les différentes façons de marcher, du Moyen Âge à nos jours, tant en Occident que dans les cultures non européennes. Comment femmes, hommes et enfants marchent-t-il à travers le temps, les cultures et les groupes sociaux ? Près de 500 œuvres : chaussures, peintures, photographies, objets d’art, films et publicités, issues de collections publiques et privées françaises et étrangères, proposent une lecture insolite d’une pièce vestimentaire parfois anodine souvent extraordinaire.

13 décembre 2019

Dans une grande surface à Belz - morbihan

belz noel (1)

belz noel (2)

belz noel (3)

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