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Jours tranquilles à Paris

27 novembre 2019

Photos diverses que j'aime beaucoup - vu sur internet

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27 novembre 2019

Comment Céline Dion s’impose comme une icône des temps modernes

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Par Pierre Bouvier

Au-delà du succès commercial, elle prouve qu’à 51 ans elle peut définitivement « larguer les amarres » en s’affranchissant des critiques.

C’est son moment. Avec Courage, son douzième disque en anglais sorti le 15 novembre, Céline Dion squatte la première place du Billboard 200 (le classement des meilleures ventes d’albums sur le territoire américain). La dernière fois qu’elle s’était hissée à cette place, c’était en 2002 avec son disque A New Day Has Come. Surtout, Billboard rappelle que la star internationale est l’une des rares artistes à être parvenue à classer un de ses albums en haut des charts au cours des trois dernières décennies (1990, 2000 et 2010). Elle y côtoie désormais Janet Jackson, Jay-Z, Metallica, Nas, Pearl Jam, Bruce Springsteen, Barbra Streisand, Britney Spears et U2.

Sur les réseaux sociaux, « Céline » a remercié ses fans :

« Je suis tellement reconnaissante envers les auteurs-compositeurs, réalisateurs, ingénieurs et musiciens qui ont partagé leur talent avec moi. Merci à tous mes fans extraordinaires pour leur soutien. Vous ne saurez jamais ce que ça signifie pour moi. Je vous aime ! »

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Déferlante Dion en 2020

Mais tout cela n’est qu’un prélude à la tempête Dion appelée à s’abattre sur le monde entier au cours des prochains mois. En France, les billets pour son concert au festival des Vieilles Charrues, le 16 juillet 2020, se sont vendus en 9 minutes, et ceux pour ses six concerts à Paris La Défense Arena, fin juin et début juillet, en… 1 h 30. Pour son concert à Monaco, le 8 juillet, le prix des billets s’est envolé, allant de 600 à 1 600 euros.

Et pour ceux dont la foi aurait besoin d’être raffermie ou qui n’ont pas encore percé le mystère « Céline », ils auront droit à une session de rattrapage : Aline Dieu, un biopic en français, joué et réalisé par Valérie Lemercier, sortira dans les salles le 11 novembre 2020. Parallèlement, Céline Before Celine, un long-métrage en anglais, soutenu par la famille Dion, se concentrera sur l’enfance de la star, avant le succès.

A 51 ans, elle prouve qu’elle peut désormais se payer le luxe de s’affranchir des critiques de ceux qui ne voyaient en elle qu’une chanteuse de karaoké des années 1990 ou pour spectacles ringards à Las Vegas. Trois ans après la mort de René Angélil, elle a aussi définitivement explosé l’image de la chanteuse cornaquée par son pygmalion de mari.

Pour la promotion de Courage, à New York, elle a choisi de reprendre une version karaoké de son Flying On My Own que l’on pourrait traduire par « Voler de mes propres ailes ». Sur le titre Perfect Goodbye, qui clôt Courage, elle prend la liberté de lancer « this shit is perfect » (« ce truc est parfait ») quelque 2 minutes 50 après les premières mesures de la chanson.

Reine des karaokés, et alors ?

C’est progressivement que la star s’est installée au rang d’icône, Céline Dion ne s’est pas construite en un jour. En 2014, elle est adoubée par le réalisateur Xavier Dolan qui a utilisé On ne change pas (1998), pour l’une des scènes les plus fortes du film Mommy. Il avouait alors aux Inrocks : « J’ai grandi avec Céline Dion ! ». En 2017, MTV notait qu’elle avait atteint un autre niveau de « cool », qu’elle « n’avait même plus besoin de chanter, qu’elle pouvait se contenter de continuer à vivre ». Cette année, elle se retrouve à supplier le rappeur Drake de ne pa se faire tatouer son visage sur le corps. Cette phase marque ce que certains comme Harper’s Bazaar appellent la « Dionaissance », tandis que la chaîne CBC tente de promouvoir le terme « Celinaissance ».

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La force de « Céline », c’est aussi qu’elle est là où on ne l’attendait peut-être pas. Après avoir porté tout et parfois n’importe quoi, Vanity Fair relève qu’elle s’est assagie, vestimentairement parlant, mais qu’elle sort toujours du lot. Le Guardian note qu’elle évite les « fashion faux pas » comme personne : pour cela, elle a embauché Law Roach, un styliste de Chicago qui a pour clients les chanteuses Mary J. Blige, Ariana Grande ou encore l’actrice Zendaya. Il a fait d’elle une icône de la mode qui ne s’habille pas comme une quinqua, lui faisant prendre tous les risques vestimentaires.

Dans l’édition de septembre du magazine CR Fashion Book, elle prouve néanmoins qu’elle a encore les pieds sur terre, affirmant ne pas se voir comme la « nouvelle reine de la mode ». « Je suis la mère, je suis la patronne, je suis responsable de mes décisions avec mon équipe », explique-t-elle :

« J’essaie de faire de mon mieux, d’accomplir quelque chose, de toujours placer la barre aussi haut que possible. »

Le magazine canadien The Walrus relève enfin que les parents l’aiment, les grands-parents l’adorent et que les jeunes découvrent qu’en plus d’avoir un incroyable talent, elle est une source inépuisable de mèmes. Désormais il est interdit de regarder avec commisération tel ou telle collègue qui avoue benoîtement à midi : « La VHS de son mariage avec René, je l’ai rayée tellement je l’ai vue. » A elle seule, Céline Dion pourrait résoudre tous les différends intergénérationnels à base de « Ok boomer ».

27 novembre 2019

ça fait pschitttt !

sein gonfke

27 novembre 2019

Extrait d'un shooting. Dans un Donjon. Photos : Jacques Snap

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shoot 20 (93)

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27 novembre 2019

Enquête - Paul Marchand, reporter en guerre

Par Raphaëlle Rérolle, Sarajevo, envoyée spéciale

Le film « Sympathie pour le diable », en salle le 27 novembre, revient sur le destin de ce journaliste français blessé durant le conflit en Bosnie.

On dit des femmes de Sedrenik qu’elles ont les plus belles jambes de Sarajevo. Et pour cause : dans ce quartier construit à flanc de colline, les rues sont tellement pentues que le taxi lui-même semble avoir du mal à grimper jusqu’à la fontaine, près du sommet. Mais une fois là-haut, quel panorama ! C’est assis sur la margelle de pierre, avec vue sur la capitale bosnienne et les tombes flambant neuves de ses cimetières, que Paul Marchand aimait embrasser d’un seul regard son théâtre des opérations – ou, peut-être, son théâtre tout court.

La guerre faisait rage en ex-Yougoslavie. Entendait-il siffler les balles des snipers ? Exploser les centaines d’obus tirés chaque jour sur la cité ? Sans doute. Durant quinze mois, de juillet 1992 à octobre 1993, ce journaliste français a été correspondant de plusieurs radios francophones dans la ville encerclée (le siège de Sarajevo par les nationalistes serbes a duré, lui, de mai 1992 à février 1996).

Une situation très particulière, comme le rappelle Rémy Ourdan, qui a couvert ces événements pour Le Monde : « Ce qui différenciait Sarajevo de toutes les autres guerres, c’est qu’il n’y avait pas d’arrière. Comme chaque endroit de la ville pouvait être atteint à tout moment par les tirs et les bombardements, la ville entière devenait un front, pour les civils comme pour les combattants, et pour les reporters qui décidaient d’y vivre… »

Personnalité flamboyante

Rapatrié en France à cause d’une grave blessure au bras, Paul Marchand n’est pas retourné travailler en Bosnie mais a écrit plusieurs livres où il est question du conflit. L’un d’eux, Sympathie pour le diable, vient d’être réédité chez Stock (304 p., 18,50 €) après une première parution au Québec (Lanctôt, 1997) puis chez Florent Massot, un an plus tard. Aujourd’hui, dix ans après le suicide de son auteur, cet essai donne son nom à un film qui doit sortir en France le 27 novembre. Réalisé par le Canadien Guillaume de Fontenay, il évoque la personnalité flamboyante de Paul Marchand, mais aussi le quotidien d’une cité en guerre et l’étrange métier des journalistes chargés de le raconter.

En tendant un peu le cou, depuis la fontaine, Paul Marchand pouvait apercevoir au loin l’hôtel Holiday Inn, qui fut son QG. Le réalisateur a fait de ce gros cube jaune d’or, baptisé « l’œuf » en raison de son éclatante couleur, l’un des décors importants du film. « Un lieu bizarre, presque invraisemblable », observe l’écrivain et ancien correspondant de guerre Jean Hatzfeld.

C’est là que les journalistes s’étaient regroupés durant la première partie de la guerre, mettant en commun des moyens logistiques dans une ville où tout manquait, eau, électricité, carburant. Combien étaient-ils ? Vingt, trente ? Les chiffres varient selon les périodes et la réactivité des médias, parfois réticents à l’idée d’envoyer leurs salariés en plein milieu d’un conflit meurtrier. Rédacteurs, cameramen ou photographes, beaucoup de ceux qui couvraient le siège travaillaient d’ailleurs en free-lance.

Vivre à Sarajevo était dangereux, y travailler aussi. L’hôtel offrait certes un minimum de commodités, mais il se trouvait pratiquement sur la ligne de front : pour en sortir, il fallait bien souvent foncer sous les balles. A l’extérieur, il était longé par la fameuse « Sniper Alley », l’avenue devenue la cible des tireurs serbes. A l’intérieur, la façade tournée vers les lignes serbes était désaffectée, la cage d’escalier hors service et les vitres réduites en miettes, y compris celles du hall surmonté par un immense chapiteau rayé façon cirque. Inauguré en 1983, l’Holiday Inn avait été bâti sur la place où s’installaient traditionnellement les spectacles ambulants.

Le vrai boss de l’hôtel

L’actuel propriétaire a gardé la toile de tente, mais remplacé le mobilier typique des années 1980 par des canapés club et supprimé la moquette violette. Restent les cinq étages de galeries sur lesquelles s’ouvrent les chambres, y compris celle de Paul Marchand – la 517, choisie pour sa proximité avec la sortie de secours – et la gigantesque suite 530, où Radovan Karadzic, premier chef d’Etat de la République serbe de Bosnie, a résidé avec son chat juste avant les hostilités.

S’il n’occupait pas la suite présidentielle, Paul Marchand n’en était pas moins le vrai boss de l’hôtel. C’est en tout cas ce qu’affirme Boba, de son vrai nom Slobodanka Lizdek, une très belle Sarajévienne de 53 ans qui fut l’interprète et l’amante du journaliste pendant la guerre. « Paulo était le roi de l’Holiday Inn. » Grâce à un arrangement avec les casques bleus français, raconte-t-elle, il obtenait des surplus d’essence permettant de faire fonctionner le groupe électrogène de l’hôtel.

Mais ce n’est pas tout : pour Boba, comme pour tous ceux qui l’ont approché, « Paulo » était un homme hors du commun. « Il rendait le quotidien supportable », a dit de lui le correspondant britannique du New York Times John Fisher Burns. Fascinant, détestable, généreux, téméraire, caustique, solitaire, provocateur, les adjectifs lancés par les uns et les autres se bousculent et, parfois, se télescopent.

Avec une constante : Paul Marchand était intransigeant, il vomissait les tièdes. Chaque jour, dans les reportages diffusés par les radios française, canadienne, belge ou suisse dont il était le correspondant, il fustigeait avec violence l’inaction de la communauté internationale face au drame de Sarajevo. « Il était d’une réelle colère, se souvient Jean Hatzfeld. Quelques-uns l’ont beaucoup aimé, mais la plupart l’ont beaucoup détesté. »

D’un conflit à l’autre

Né à Amiens d’une famille qu’il a passée sous silence, s’inventant des mères et surtout des pères de rechange, l’un diamantaire belge, l’autre colonel dans l’armée israélienne. « A son enterrement, au Père-Lachaise, tout le monde comparait les différentes histoires sur ses parents. Aucune ne coïncidait », raconte en souriant un ami journaliste. La vérité, enfin l’une des vérités disponibles (même là, les avis divergent), serait qu’il fut un enfant battu, dans un milieu misérable du nord de la France.

De sa prime jeunesse, ses confrères savent au fond très peu de choses, comme si Paul Marchand n’était né qu’à 23 ans, en 1984, au moment où il est parti au Liban. D’une certaine manière, croit-on comprendre en écoutant ceux qui l’ont connu, les guerres avaient fini par devenir son véritable nord magnétique. A Beyrouth d’abord, où il est resté huit ans, puis à Sarajevo où il s’est rendu directement, filant d’un conflit à l’autre sans repasser par la case paix.

De retour à Paris, après sa blessure en Bosnie, il avait fini par s’étioler, comme s’il manquait d’oxygène. L’aide de ses amis (ceux avec qui il n’était pas fâché), mais aussi le soutien sans faille de son éditeur, Manuel Carcassonne, n’ont pas suffi à le maintenir en vie. Pas plus que le projet de film amorcé dès 2007 avec le réalisateur Guillaume de Fontenay, lequel a ensuite mis dix ans à trouver les fonds nécessaires pour porter à l’écran le scénario écrit avec Marchand lui-même.

Sur les photos, ce grand garçon filiforme (presque 2 mètres) jette un regard de défi aux photographes derrière ses lunettes à montures noires. Son éternel cigare cubain vissé aux lèvres, il a l’air de dire : « Vous ne saurez jamais qui je suis vraiment. » Une chose est sûre, pourtant : sa mythomanie ne débordait jamais sur son métier. Son goût pour la précision prenait même des dimensions légendaires. Chaque jour, à Sarajevo, il se rendait à la morgue pour compter les cadavres, tâtant les corps pour estimer leur degré de rigidité, afin de ne pas inclure dans ses additions des morts de la veille.

« IL AVAIT TROUVÉ LA PAIX DANS LE CHAOS, LA DESTRUCTION ET LE DÉSESPOIR »

JEAN HATZFELD, ÉCRIVAIN

« C’était un vrai correspondant de guerre, explique l’ancien reporter de guerre Philippe Lobjois, présent dans la voiture de Paul Marchand lorsque celui-ci fut blessé. Il arrivait dans un pays, il posait ses valises et il y restait. Il faut être installé quelque part pour avoir la vérité. » Ce siège fut, selon Philippe Lobjois, « un délire, une folie totale » pour de « jeunes mecs suradrénalinés », les combattants bosniaques, mais aussi les journalistes dont Paul Marchand faisait partie. Rappelons à ce propos que le conflit fut aussi couvert par de nombreuses femmes, parmi lesquelles la célèbre Britannique Christiane Amanpour, star de la chaîne américaine CNN, représentée dans le film sous un nom d’emprunt.

« A Sarajevo, Paulo était dans son élément », conclut Philippe Lobjois, qui vient de publier une BD intitulée Les Tambours de Srebrenica avec le dessinateur Elliot Raimbeau (Nouveau Monde éditions, « Nouveau Monde Graphic », 162 p., 24,90 euros). « Il avait trouvé la paix dans le chaos, la destruction et le désespoir », estime Jean Hatzfeld. Comme en écho, Boba ajoute même qu’il a été « très heureux » dans cette ville où l’on côtoyait la mort à chaque seconde. Lui la défiait, roulant à toute allure le long de Sniper Alley dans sa Ford Fiesta sur laquelle il avait écrit, en anglais : « Ne gaspillez pas vos balles : je suis immortel. » Le courage, bien sûr, était une question centrale pour tous ces professionnels. Doit-on risquer sa vie pour son métier ? Mais peut-on le faire convenablement sans risquer sa vie ?

Conception radicale du courage

Certains sortaient de l’hôtel, traversant même les lignes de front pour se rendre du côté serbe comme Paul Marchand l’a fait souvent, tandis que d’autres restaient au chaud en attendant les nouvelles. « Tous les jours, quand nous rentrions, nous retrouvions des gens qui avaient passé la journée à l’intérieur », affirme Jean Hatzfeld qui a perdu une jambe à Sarajevo, avant d’y retourner pour Libération. « Je n’avais jamais pensé sortir vivant de cette histoire, dit-il. Ni mort, du reste. »

Paul Marchand, lui, avait une conception radicale du courage, dont les gilets pare-balles étaient exclus. Dans le film, on voit les reporters anglo-saxons porter ces protections, sur ordre de leurs supérieurs hiérarchiques. Certains utilisaient même des casques et des voitures blindées, quand Paul Marchand roulait dans sa voiture ordinaire, comme l’immense majorité des reporters sur place, et arborait un bonnet ou un chapeau de paille. Tous ces accessoires de guerre le révoltaient, il « trouvait cela ignoble », selon Boba. Elle ajoute : « Pour sentir la peur et la vulnérabilité des autres, disait-il, il faut avoir peur et être vulnérable soi-même. »

Avait-il peur ? En tout cas, « il était très courageux, dit aujourd’hui Izet Vatranjak, un serveur de l’hôtel Holiday Inn qui faisait partie des policiers chargés de garder l’établissement, à l’époque du siège. Il était respecté par tous, notamment parce qu’il sortait sous les bombes. » Durant la guerre d’ex-Yougoslavie, 70 journalistes ont perdu la vie en fonction.

Aujourd’hui, Boba Lizdek travaille à constituer, dans l’Holiday Inn, un musée en mémoire de la vie à l’hôtel pendant le siège. Ordinateurs, caméras, gilets pare-balles de CNN, carnets de notes, assiettes ou téléphones, boîtes à cigares et coupe-cigares, l’endroit rassemblera des objets rappelant cette époque. Quelques années terribles et intenses durant lesquelles une curieuse communauté s’était formée, presque une famille unie par des liens d’adrénaline. A la vie, à la mort.

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27 novembre 2019

Les tulipes de Jeff Koons à Paris

tulipes

27 novembre 2019

Instagram détourné...

insta

27 novembre 2019

Marre de ce tutoiement obligatoire (et de la bise qui va avec)

Bruno Lavillatte est ancien professeur de philosophie, spécialiste de la Renaissance et poète. Il a publié plusieurs articles remarqués dans Médium. Dernier livre paru : Lelouch (Claude), Retenez bien ce nom... Petite histoire d'une incompréhension critique, éd. Ocrée, avril 2019.

Sympa le tutoiement ? Pas sûr. Il s’approprie l’autre sans ménagement (tu es des nôtres !), abolit la durée requise par une relation vraie, dont il efface les nuances. Un comble : en effaçant la distance, il ruine aussi l’intimité, dont il n’est plus le marqueur. Parfait pour les faux amis Facebook, mais pour le reste…

Cet article est à retrouver dans le "Carnet des médiologues", où vous pourrez retrouver Régis Debray et sa bande chaque semaine.

Nous ne sommes ni Romains ni Anglo-saxons ! Le « tu » latin est de mise jusqu’au 2ème siècle, moment où apparaissent certains vouvoiements dans quelques formules de politesse et le you anglais sert au singulier comme au pluriel ; c'est l'usage du prénom qui joue le rôle distinctif entre tu et vous ! Du reste, le prénom a tout autant la cote. Il parachève le tutoiement dès la première prise de contact, comme si on s’était quitté la veille.

Tutoiement obligatoire

La palme en revient à une émission de mi-journée sur RMC. Le tutoiement est obligatoire. Et forcé. Il y a quelques jours un auditeur qui prenait la parole était réticent au tutoiement : ce n’est pas dans mes habitudes ! Il a fini par céder sous la pression de l’animateur ! Et tout sonna faux.

Alors que dire de cette mode ? D’abord, que le tutoiement est l’appropriation de la conscience de l’autre. Dans sa totalité. Aucune mise à distance, aucun écart entre moi et l’autre. Je te parle donc tu m’appartiens, tu es des nôtres. Cette appropriation est immédiate et elle efface toute temporalité, toute durée vraie, toute inscription dans une histoire personnelle qui fonde le tutoiement, c’est-à-dire le temps.

L’allure générale de ce tutoiement fait démocratique et fait forum ! le débat ne se joue pas sur le fond mais sur l’incise du tu comme marqueur de vérité. Et paradoxe médiologique : cette fausse intimité, ce « fake », se trouve requis comme preuve d’authenticité !

Le vouvoiement est rejeté parce qu’il a l’indécence de la distance, donc de l’erreur possible et de l’insupportable principe d’autorité. Et portant de Gaulle vouvoyait Yvonne ! Entre eux, pas le moindre écart, au propre comme au figuré.

Ce tutoiement généralisé compense à l’oreille la pauvreté de notre débat politique et médiatique. Il fait croire que la proximité supposée du tu est proportionnelle à la profondeur de notre réflexion collective. On s’tutoie donc on pense.

Pis encore, il s’est transformé, à notre insu, en vrai marqueur totalitaire de notre pensée unique - je veux dire d’une opinion qui est nécessairement vraie parce que mienne – en une preuve que pour débattre, vaut mieux ne pas se connaître et faire comme si l’on se connaissait. De courte date, et ce sera encore mieux.

On s’tutoie donc on pense

Quant à l’invective qui doit faire le buzz sur les réseaux sociaux, elle est permise grâce au tu qui lui donne ses conditions d’existence. Sa légitimité. Après tout, on peut bien s’insulter puisqu’on est pote ! Pardon, ami !

Au fond, mon exaspération, due à certaines émissions de télé et de radio, vient de ce que le tutoiement n’est pas le gage d’une proximité interindividuelle ou de la valeur d’un débat mais plutôt son exact contraire. Je le trouve profondément suspect, ce tutoiement, faussement démocratique, mensongèrement populaire, politiquement faux-cul, à l’image de ce que les dirigeants fascistes de l'Italie, en interdisant dès1938 l'utilisation du Lei de politesse italien, avaient tenté de faire pour des raisons nationalistes. En supprimant le Lei, ce vous de politesse et d’histoire, ils avaient voulu faire du tu le faisceau linguistique convergeant et forcé d’individualités devenues insupportables à leur projet politique. Tiens, tiens !

27 novembre 2019

Guerre ?

guerre

27 novembre 2019

Couple

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