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Jours tranquilles à Paris

17 octobre 2019

Crazy Horse de Paris

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17 octobre 2019

Matthias et Maxime - Xavier Dolan

Avec ce huitième film, Xavier Dolan signe une histoire de potes qui dérive en mélo troublant, entre tension érotique et réflexion sur la norme sociale.

Aussi étonnant et paradoxal que cela paraisse, Xavier Dolan, qui tourne depuis l’âge de 18 ans, jeune prodige de cinéma dont les héros et avatars ont presque toujours son âge, ne s’était jamais stricto sensu mesuré à ce thème comme objet d’étude : la jeunesse. Empêtré dans la sienne, creusant plutôt le sillon d’une singularité conditionnée par une précocité insulaire, projetant sa verve et ses arabesques à travers les destins de personnages marginaux et tourmentés (Tom à la ferme, Laurence Anyways). Il a fallu atteindre le grand âge de 30 ans pour rattraper par le col de la fiction ce qui était, dans la vie, déjà en fuite, la belle vingtaine.

Place donc à une génération et ses promesses de collectif : c’est une première pour Dolan, qui nous offre au commencement de Matthias et Maxime une poignée de scènes saisissant par de multiples soubresauts de caméra et de montage la complicité d'une bande de potes, faite de vannes et de private jokes, en rupture avec l’amour grinçant et parfois mortifère des réunions familiales auxquelles Dolan nous a habitués par le passé (Juste la fin du monde, Mommy).

Chez lui, le texte se perd, les dialogues sont rendus sciemment inaudibles, comme si le seul enjeu était de capter une énergie pure, une chorégraphie gestuelle, tout en nerfs, jaillissements et cris, sous des dehors d’assemblée joyeuse et anarchique. Une belle complicité fraternelle/corporelle se dégage de ces scènes – la principale est une longue scène de dîner –, mais pas seulement.

Des amis d’enfance soudain pris au piège de la passion amoureuse

Car très vite le groupe dévoile son lot d’électrons libres : ils sont deux, amis d’enfance soudain pris au piège de la passion amoureuse. Ils ne l’ont pas vue venir, pas plus que la caméra qui a enregistré leur fake kiss pour les besoins d’un court métrage (magnifique plan de baiser mangé par l’objectif, captif à jamais des replis de la fiction comme un secret de cinéma). Catastrophe et double ver dans la pomme : comment maintenir une amitié de façade quand on n’a qu’une envie, sauter sur l’autre ? Faire bonne figure au milieu des copains ? Dès lors, l’amitié se meut en comédie, un simulacre que Dolan relègue au second plan tout en rendant oppressantes ces assemblées de mâles cisgenres hétéronormés, jamais à court de piques et de tapes sur l’épaule. Le cinéma de Dolan est plein d’anticorps, et paradoxal dans ses intentions, ce qui le rend passionnant.

On en revient toujours à l’isolement : deux héros démunis livrés à leurs combats intérieurs. Certains stigmates sont là pour le souligner : une tache de naissance sur la joue en forme de larme de sang. Ou encore certains plans : une multitude de surcadrages qui enferment chacun dans son petit périmètre d’image, sa bulle coupée du monde. Quand la détermination de l’un vacille dans son scénario de vie rangée (bureau et costard, petite amie), l’autre n’est plus si sûr de ses rêves bohèmes et d’une migration imminente en Australie, loin d’une mère toxique.

L’étoffe des histoires d’amour impossibles

Certes un peu schématique, cette dualité existentielle – qui exhorte gentiment chez Dolan à choisir son camp – s’incarne aussi dans ce déchirement amoureux : faut-il assumer socialement ses penchants ? Faire son coming-out, officialiser un amour moins transgressif en raison de son caractère homo que parce qu’il s’agit de son meilleur ami ?

Le trouble vient de là. Et le vertige du film. Son coup de foudre fait d’attente et de suspension, de silence et de déni, ces deux amants qui crèvent de désir, et meurent doucement de ne pas se toucher. Matthias & Maxime a l’étoffe des histoires d’amour impossibles sur le papier qui ont le pouvoir de s’incarner en nous. Titanic, Ghost, Le Secret de Brokeback Mountain, Le Temps d’aimer et le Temps de mourir, Sur la route de Madison. C’est physique. L’étreinte libératrice et si longtemps différée, c’est à soi qu’on se la donne. Elle nous traverse comme une décharge de dopamine, nous plongeant, sur notre écran intérieur, dans le même état de pâmoison que le héros Dolan dans les bras de son amant.

Matthias & Maxime de Xavier Dolan, avec Xavier Dolan, Gabriel D'Almeida Freitas, Anne Dorval (Canada, 2019, 1 h 59)

17 octobre 2019

Musée Quai Branly - Jacques Chirac

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17 octobre 2019

58 des 59 attentats déjoués depuis six ans l’ont été grâce au renseignement humain

Par Jacques Follorou

Alors que la France a justifié la construction et le financement de puissants outils de surveillance et de collecte de données, c’est l’intervention d’une source humaine qui permet quasiment à chaque fois d’éviter le pire.

C’est un simple chiffre répété à l’envi par le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, depuis l’attaque intervenue, le 3 octobre, à la Préfecture de police de Paris qui a fait quatre morts. « Cinquante-neuf attentats ont été déjoués sur le territoire français depuis six ans », a-t-il indiqué à maintes reprises.

On devine aisément son objectif en livrant cette information : montrer l’ampleur du travail accompli face à la menace terroriste. Mais en la révélant, le ministre a aussi, sans s’en rendre compte, démoli un argument avancé depuis des années par l’Etat pour étendre ses moyens de surveillance.

Il apparaît en effet que, sur ces cinquante-neuf attentats déjoués, cinquante-hui ont été évités, selon une source du ministère de l’intérieur, grâce à du renseignement humain. L’un des derniers projets d’attentat déjoué par les services visait l’une des zones les plus protégées de la capitale, aux abords du palais de l’Elysée et de la place Beauvau, siège du ministère, une perspective qui a fait frémir le pouvoir politique.

Si c’est la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) qui a centralisé les investigations sur ces tentatives d’attentats, elle a pu être alimentée en renseignement par le Service central du renseignement territorial (SCRT), la direction du renseignement de la Préfecture de police de Paris (DRPP) ou même par les gendarmes.

L’irruption des ingénieurs dans le monde des espions

Le rôle essentiel joué par le renseignement humain dans la protection du pays invalide un dogme défendu depuis des années. La France a, comme d’autres puissances, justifié la construction et le financement massif de puissants outils de surveillance et de collecte de données au nom d’une lutte efficace contre le terrorisme.

Dans chacun de ces cinquante-huit cas, des techniques souvent classiques sont venues soutenir l’enquête, mais seulement en qualité de support. Et si ces moyens technologiques, y compris de services étrangers, ont pu, en amont, faire naître des soupçons, c’est l’intervention d’une source humaine qui, à chaque fois, a apporté l’élément central et la plus-value permettant d’éviter le pire.

Ce distinguo entre renseignement humain et technique n’est pas une simple question de sémantique. Il a fixé le contenu de la politique publique de renseignement en France et il a conditionné l’architecture légale du pays en matière de surveillance.

La révolution d’Internet, au début des années 2000, avait laissé croire aux principales agences de renseignements occidentales que pour se protéger du danger terroriste il fallait avant tout être capable de surveiller le plus grand nombre de données de communication, nationales et internationales. Un credo renforcé par les attentats du 11 septembre 2001, aux Etats-Unis, qui ont marqué une profonde rupture en matière de culture de renseignement. Considérée comme plus fiable, plus exhaustive et plus rassurante, la technique a prévalu sur une source humaine, jugée plus aléatoire. Ce fut l’irruption des ingénieurs dans le monde des espions.

La justification de la lutte contre le terrorisme

Cette évolution a eu des conséquences majeures au sein des services de renseignement. Les services techniques, traditionnellement cantonnés à des tâches peu valorisantes, sont devenus des acteurs incontournables de l’espionnage.

En France, la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) concentre l’ensemble des moyens français de surveillance des communications au sein de sa Plateforme multimodale (PTM), créée en 2008 et considérée aujourd’hui, avec la dissuasion nucléaire, comme le deuxième pilier de la sécurité nationale. La PTM est mutualisée avec les principaux services du pays, la DGSI, les douanes ou la direction du renseignement militaire, même si chacun conserve des moyens propres.

Le sujet mis sur la place publique par Christophe Castaner fait écho aux dires de l’ancien contractuel de l’Agence nationale de sécurité (NSA) américaine, Edward Snowden. Selon lui, les vastes systèmes de surveillance bâtis par les principales démocraties occidentales ne servent pas, en premier lieu, à lutter contre le terrorisme.

Ces moyens techniques sont avant tout utilisés en matière d’espionnage économique ou politique ou de contre-prolifération. Pourtant, les dispositifs légaux qui encadrent ces outils et leur financement ont été justifiés, face aux opinions et aux élus, par la seule lutte antiterroriste.

« Extension de la surveillance de masse »

Fin octobre 2018, Edward Snowden, qui n’était pas qu’un simple contractuel mais bien l’un des concepteurs du système de surveillance mondiale de la NSA, pouvait ainsi déclarer : « La surveillance ne protège pas des actes terroristes ; elle a, en revanche, une utilité pour la collecte de renseignements après que l’acte a été commis (…).

La question que les Français devraient se poser, ajoutait-il, comme toute personne appartenant à un pays dont le gouvernement étend la surveillance de masse malgré son coût et son inefficacité, est : pourquoi poursuivons-nous dans cette voie alors que nous pourrions investir ces ressources dans des moyens traditionnels qui sauvent des vies. »

17 octobre 2019

Vu sur internet - j'aime bien

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17 octobre 2019

Cédric Villani : «J’irai jusqu’au bout»

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Candidat dissident LREM à la mairie de Paris, Cédric Villani s’organise et tacle au passage ses deux principaux rivaux : la maire Anne Hidalgo et Benjamin Griveaux.

« Mon projet complet sera présenté en janvier, […] il sera béton », promet Cédric Villani, candidat à la mairie de Paris. 

Par Olivier Beaumont et Julien Duffé

Cinq semaines après sa déclaration de candidature, Cédric Villani se dit plus déterminé que jamais. Pas question de se rallier à son rival Benjamin Griveaux, dit-il, promettant de présenter son projet complet en janvier.

Vous avez réuni samedi 400 personnes pour un « atelier citoyen » consacré au Grand Paris. Ce sujet, on en parle depuis plus de dix ans, mais ça traîne à venir…

CEDRIC VILLANI. Maire de Paris, je bâtirai le Grand Paris dont les habitants ont besoin. Si on veut résoudre le problème des embouteillages dans Paris, évidemment qu'il faut l'envisager à l'échelle métropolitaine. Pareil pour la lutte contre la pollution ou le logement. On a perdu beaucoup trop de temps par rapport à certaines métropoles régionales et à des capitales comme Londres et Berlin. Et ce ne sera pas une construction politique alambiquée mais du concret. Parallèlement, je veux que les compétences de proximité comme la propreté soient exercées par les maires d'arrondissement au plus près du terrain.

Mais concrètement, comment l'organiser ?

Ces derniers jours, j'ai rencontré beaucoup de maires des communes limitrophes : tous m'ont dit que le dialogue avec la Ville est rompu. Bertrand Delanoë l'avait engagé, mais ce dialogue n'existe plus aujourd'hui. Je veux créer un Conseil du Nouveau Paris, qui se réunirait très régulièrement et dans laquelle le maire de Paris, les maires d'arrondissement et les maires des 28 communes limitrophes puissent bâtir ensemble des solutions pour mutualiser nos services, par exemple sur la petite enfance.

17 octobre 2019

Pierre et Gilles

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17 octobre 2019

Chronique - « Pour l’image des Etats-Unis, il y aura un avant et un après octobre 2019 »

Par Sylvie Kauffmann, Editorialiste

En abandonnant les Kurdes en Syrie et en tentant de corrompre le président ukrainien, Donald Trump a mis fin à l’idéal américain de la guerre froide, celui du pays exemplaire, souligne Sylvie Kauffmann, éditorialiste au « Monde », dans sa chronique.

Ce fut l’un des grands moments de l’éloquence reaganienne. Le 11 janvier 1989, le président républicain s’adresse à ses concitoyens pour la dernière fois depuis la Maison Blanche, où il achève son second mandat.

Revenant sur huit ans passés à la tête des Etats-Unis, Ronald Reagan fait un poignant éloge de la liberté, rend un ultime hommage à la démocratie et termine par une référence qui lui est familière, celle de la « ville qui brille sur la colline ». Cette lumière, c’est celle qu’imaginait le pèlerin John Winthrop en 1630, dans sa quête de l’Amérique idéale, à bord de l’embarcation qui le dirigeait vers ses rivages.

« Dans mon esprit, dit Ronald Reagan, c’était une ville haute et fière, (…) grouillant de gens de toutes sortes qui vivaient en harmonie et en paix, une ville avec des ports libres bruissant de commerce et de créativité. Et si elle devait avoir des murs, ces murs avaient des portes, et les portes étaient ouvertes à tous ceux qui avaient la volonté et le cœur d’y venir. » Cette ville, conclut-il tandis que la caméra zoome sur son visage ému, elle est toujours là, brillant de tous ses feux. « Elle reste un phare, un aimant pour tous ceux qui cherchent la liberté, pour tous les pèlerins des endroits perdus qui cinglent dans les ténèbres, vers leur foyer. »

C’était il y a trente ans et l’Amérique faisait parfois sourire, dans cette apparente naïveté qui pouvait aussi dissimuler une certaine dose d’hypocrisie mais allez, c’était si joliment emballé ! Lorsque le communisme rendit l’âme, quelques mois plus tard, Ronald Reagan n’était plus aux commandes ; il voulut bien en prendre sa part cependant, tant il avait célébré les valeurs qui triomphaient de cette guerre froide.

L’abandon des Kurdes de Syrie

Trente ans plus tard, la ville sur la colline ne brille plus et le mot « valeurs » a disparu du vocabulaire de la Maison Blanche. Le président des Etats-Unis ne fait plus ni rêver ni même sourire, il tweete « Bullshit » en lettres capitales et claque les portes de la cité.

Ses opposants sont des « traîtres », les journalistes « corrompus » et « falsificateurs ». Depuis une semaine, il a accroché un autre exploit à son tableau : l’abandon des combattants kurdes dont il s’était servi en Syrie, les amenant à conclure avec l’agresseur un pacte aux conséquences dramatiques. Au passage, Donald Trump abandonne aussi ses alliés français et britanniques, avec lesquels il n’a pas coordonné le départ des troupes américaines. Il cède la place aux Russes, renforce Damas et redonne de l’air à l’organisation Etat islamique (EI).

En l’espace de quelques jours, le locataire de la Maison Blanche a réduit à zéro la valeur de la parole de Washington. Il a montré qu’un engagement dont dépend la vie de centaines de milliers de personnes peut être rayé d’un tweet. « Ils nous ont fait confiance et nous avons trahi cette confiance, a confié au New York Times un officier américain qui avait travaillé aux côtés des Kurdes dans le nord de la Syrie. C’est une tache sur la conscience américaine. »

LES ETATS-UNIS N’ONT PAS SEULEMENT TRAHI LES KURDES, ILS ABANDONNENT TOUTE PRÉTENTION À LA MORALE ET À L’EXEMPLARITÉ, QUI FUT LEUR MARQUE DE FABRIQUE

Quels que soient les efforts de rétropédalage ou les manœuvres de rattrapage d’autres structures du pouvoir américain, on aurait tort de sous-estimer l’impact de cette volte-face : pour l’image des Etats-Unis, il y aura un avant et un après octobre 2019.

Comme il y a eu, réalise-t-on aujourd’hui, un avant et un après août 2013, lorsque le président Barack Obama a renoncé à mettre à exécution sa menace de punir Bachar Al-Assad, dont le recours à l’arme chimique était avéré. C’était la première étape du renoncement américain – mais, au moins, celui-ci tentait-il de sauver les apparences, derrière un habillage de procédures démocratiques.

Donald Trump, lui, n’a que faire des apparences et des procédures démocratiques. Avec lui, les Etats-Unis n’ont pas seulement trahi les Kurdes, ils abandonnent toute prétention à la morale et à l’exemplarité, qui fut leur marque de fabrique pendant la guerre froide et l’après-guerre froide. Même lorsque Nixon et Kissinger fomentaient leurs basses œuvres contre Salvador Allende au Chili, ils le faisaient, officiellement, au nom de la défense du monde libre contre le communisme international. Donald Trump, lui, pratique le cynisme à l’état pur : America First. Seul compte pour lui son électorat.

Une politique reniée aussi en Ukraine

La Syrie n’est pas le seul écueil sur lequel s’abîme l’Amérique. En Ukraine, en essayant de corrompre Volodymyr Zelensky, un jeune président élu, précisément, pour vaincre le fléau de la corruption, Donald Trump a discrédité la démocratie américaine.

Pendant trente ans, les administrations américaines successives se sont vues comme le porte-drapeau, devant l’Union européenne, du soutien aux transitions démocratiques et à l’Etat de droit dans le monde post-communiste. Cette politique est aujourd’hui reniée. Que dire aujourd’hui aux militants démocrates ukrainiens qui s’engagent, parfois au péril de leur vie, pour bâtir un Etat de droit et éradiquer la corruption, lorsque le président des Etats-Unis se comporte avec leur propre président comme un vulgaire oligarque ?

Quel exemple offrent à la nouvelle génération de hauts fonctionnaires de ce jeune pays le sort de l’ambassadrice américaine Marie Yovanovitch, rappelée prématurément à Washington sous de fausses accusations, ou la démission de l’envoyé spécial pour l’Ukraine Kurt Volker qui, au lieu de favoriser les efforts de paix avec la Russie, servait d’entremetteur à Rudy Giuliani, avocat de Donald Trump, pour de sordides manœuvres de politique intérieure américaine ?

Lundi 14 octobre à Hongkong, des manifestants pro-démocratie se sont rassemblés pour demander l’aide des Etats-Unis, au bout de quatre mois de mobilisation sans faille. « Président Trump, aidez-nous à libérer Hongkong », implorait une banderole. Ce monde-là n’est plus, mais ils l’ignorent encore.

17 octobre 2019

Palais de Tokyo

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17 octobre 2019

Pertes et gaspillage alimentaires : 14 % de la nourriture est perdue avant d’atteindre les étals

Par Mathilde Gérard

Jusqu’à présent, la FAO évaluait qu’un tiers de la nourriture produite n’était pas consommée. Dans un nouveau rapport, l’agence affine sa méthodologie et distingue pertes et gaspillage alimentaire.

Terres agricoles et eau mobilisées pour rien, gaz à effet de serre émis en pure perte : environ 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont jetées ou perdues chaque année à l’échelle mondiale. Mais, selon que l’on est un pays à faible revenu ou un pays riche, la lutte contre ce fléau, qui figure parmi les Objectifs de développement durable fixés par les Nations unies (ONU) pour 2030, ne poursuit pas les mêmes buts : pour les uns, il s’agit d’assurer la sécurité alimentaire de leurs populations, pour les autres de réduire l’empreinte environnementale de la chaîne alimentaire.

Dans un rapport, publié lundi 14 octobre, l’Agence de l’ONU pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) a cherché à identifier où et pourquoi la nourriture est perdue, afin de proposer un éventail de solutions aux Etats.

« Comment pouvons-nous nous permettre de jeter de la nourriture lorsque, chaque jour, plus de 820 millions de personnes souffrent de la faim à travers le monde ? », écrit Qu Dongyu, directeur général de la FAO, en préambule de cette étude publiée à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre.

Mauvaises infrastructures

Jusqu’à présent, la FAO évaluait qu’un tiers de la nourriture produite dans le monde n’était pas consommée, une estimation qui remonte à 2011.

L’agence onusienne a cette fois affiné sa méthodologie pour distinguer deux notions : les pertes alimentaires – tout ce qui est perdu entre la récolte et la vente au détail, pendant les étapes de stockage et de transport notamment – et le gaspillage – qui intervient lors de la vente aux particuliers et de la consommation.

Selon les calculs de la FAO, 14 % de la nourriture mondiale est perdue avant d’atteindre les étals de distribution. En revanche, l’agence ne donne pas, à ce stade, d’estimation précise du gaspillage lors de la distribution et chez les particuliers, qui fera l’objet d’une étude séparée par le Programme des Nations unies pour l’environnement.

La question des pertes alimentaires affecte en premier lieu les pays à faibles revenus. Mauvaises infrastructures, manque de connaissances techniques et de moyens financiers pour assurer un bon stockage des produits sont notamment en cause.

La FAO chiffre ces pertes à 400 milliards de dollars (360 milliards d’euros) : « C’est un effort de production et des dépenses encourues par les agriculteurs, les transporteurs et les industriels, qui n’aboutissent pas à une vente et donc à un revenu », note Carola Fabi, statisticienne à la FAO. Le chiffre de 14 % de pertes n’englobe pas les produits alimentaires non récoltés, du fait d’événements exceptionnels comme les inondations, le gel ou autres aléas climatiques, car le pourcentage de pertes se rapporte à la production, qui se calcule après la récolte.

« Scinder le problème »

Si les pertes alimentaires affectent directement au portefeuille les différents acteurs de la chaîne alimentaire, le gaspillage alimentaire, lui, concerne surtout les pays développés et les consommateurs.

« Le gaspillage est dû à des comportements individuels, à l’abondance de l’offre, à la préférence esthétique pour certains produits, etc. Le fait de scinder le problème du gaspillage et des pertes en deux tronçons, l’un centré sur l’offre, l’autre sur la demande, permet de proposer des solutions plus ciblées », estime Mme Fabi.

La FAO met bien en garde sur le fait que certaines actions prises pour lutter contre les pertes pourraient entraîner des effets boomerang, notamment sur les prix des denrées agricoles et sur les volumes de vente des agriculteurs.

« Réduire le gaspillage des consommateurs et des distributeurs dans les pays riches pourrait affecter négativement les fermiers pauvres des pays à faible revenus », écrit la FAO. De même, de meilleures capacités de stockage par le froid entraîneraient une plus forte protection des denrées, mais augmenteraient en parallèle la consommation d’énergie.

D’un pays à un autre, le calcul coût-bénéfice à agir contre les pertes et le gaspillage n’est pas le même, montre l’étude. « Dans les pays sujets à une plus forte insécurité alimentaire, il vaut mieux agir au début de la chaîne dans le but d’augmenter la disponibilité des aliments, explique Mme Fabi. Mais, au fur et à mesure que le niveau d’industrialisation d’un pays augmente, c’est au niveau de la consommation qu’il y a le plus d’avantages au niveau de l’impact environnemental. »

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