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Jours tranquilles à Paris

15 septembre 2019

Extrait d'un shooting

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15 septembre 2019

Déambulation d’une jeune femme éperdue d'amour par Hafsia Herzi

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Tu mérites un amour - Hafsia Herzi
Révélée par La Graine et le Mulet de Kechiche, l’actrice Hafsia Herzi livre sa première réalisation : un conte sentimental d’une bouleversante simplicité.
Tu mérites un amour : ce titre emprunté à un poème de Frida Kahlo ressemble aux mots de réconfort qu’on a tous pu glisser à l’oreille d’un.e ami.e au cœur alangui, enserré.e dans sa solitude ou voué.e à se faire mal en amour. Comme Lila, l’héroïne d’Hafsia Herzi, emberlificotée dans une relation destructrice avec un garçon mythomane et infidèle. Mais au-delà, ce conseil inspiré pose plus sourdement la question du sentiment amoureux. Qu’est-ce que l’amour ? Une absence qui nous affame, et comme l’écrit Blanchot à propos de l’attirance, “un vide qui s’ouvre indéfiniment sous les pas de celui qui est attiré” ? Ou l’hypothèse d’un bonheur partagé ?

Réflexion insoluble

La grande force de ce premier long métrage, dont la fragilité financière n’entame jamais en rien la belle détermination, revient à affronter cette réflexion apparemment insoluble en se laissant guider par une héroïne aussi perdue qu’affligée après une énième tromperie de son copain. Pourtant, de cette plaie ouverte, Herzi tire non pas un film de chambre, un huis clos de larmes, mais plutôt une flânerie, la déambulation existentielle d’une jeune femme qui devient curieuse de tout et surtout des hommes.

Réjouissante drôlerie

Tu mérites un amour déploie un fabuleux talent d’observation braqué sur une pléiade de personnages masculins, dragueur, timide, esthète, libertin, chérubin, et c’est évidemment à travers cette succession de rencontres que Lila va cheminer vers une forme d’oubli et d’estime de soi – la clé pour, sinon faire taire la souffrance, l’amender un peu. Mais il ne faudrait pas oublier que ce film est drôle, scandé de scènes d’une réjouissante tendresse lors de réunions amicales sous la couette (avec le génial acteur débutant Djanis Bouzyani en confident peste) ou de rendez-vous Tinder peu concluants.

Influence “Kéchichienne”

Impossible d’oublier que l’actrice-réalisatrice vient du cinéma de Kechiche, dont elle adopte les codes les plus visibles – caméra à l’épaule, dialogues qui sonnent spontanés... On a même droit à une scène de couscous et de danse du ventre, ainsi qu'au visage “kechichien” de Jérémie Laheurte, l’ancien petit ami délaissé de La Vie d’Adèle. Mais chez Herzi, point d’exubérance : en dépit de ces quelques clins d'œil, tout reste singulièrement nimbé de mélancolie. Des yeux voilés par le spleen, des voix presque chuchotées, la torpeur du manque, une fin en suspension pleine d’audace : Hafsia Herzi mérite un amour, mais aussi amplement les louanges qui affluent déjà en nombre sur son œuvre d'une simplicité et d'une douceur désarmantes.

Tu mérites un amour d'Hafsia Herzi, avec elle-même, Djanis Bouzyani, Jérémie Laheurte (Fr., 2019, 1 h 39)

15 septembre 2019

Le "Bouquet de Tulipes" de Jeff Koons sera inauguré le 4 octobre à Paris

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Les tulipes emballées de Jeff Koons, en atendant l'inauguratin. Elle sont situées sur un terrain vague derrière le Petit Palais tout proche d'une zone de stationnement...J'espère que des jardiniers de la Ville de Paris viendront agrémenter ce lieu car vraiment elles sont cachées et pas facile à trouver ou disons dans un endroit non-passant, même si près des Champs Elysées. Pas terrible comme lieu ! Mais Jeff Koons méritait t'il l'espace entre le MAM et le Palais de Tokyo ?  - Photo pries hier J. Snap.

L'inauguration de cette sculpture controversée se fera en présence de l'artiste

Le Bouquet de Tulipes de l'artiste américain Jeff Koons sera inauguré le 4 octobre, a indiqué la mairie de Paris, lors de la présentation des grandes lignes de la 18e édition de la Nuit blanche qui se tiendra le lendemain. "Le 4 octobre, sauf événement imprévisible, sera inauguré le Bouquet de Tulipes de Jeff Koons. C'est inscrit à l'agenda de la maire de Paris et du mien", a affirmé l'adjoint à la Culture de la Ville de Paris, Christophe Girard.

L'inauguration de cette sculpture controversée (haute de 10 mètres et pesant 30 tonnes) se fera en présence de l'artiste, qui fait régulièrement polémique pour ses oeuvres jugées kitsch et révélatrices d'une marchandisation excessive de l'art contemporain. L'ancienne ambassadrice américaine Jane Hartley sera également présente.

Controverse sur le lieu

A l'origine, cette oeuvre avait été proposée par l'ambassade américaine à la mairie de Paris, au lendemain des attentats de 2015, comme un hommage aux victimes. Jeff Koons avait souhaité qu'elle soit installée près du Trocadéro, entre le musée d'art moderne et le Palais de Tokyo, un lieu fréquenté par les touristes. Devant la levée de boucliers, un emplacement plus discret, visible du petit Palais et à quelques encablures de l'ambassade américaine, avait été choisi dans un jardin municipal.

Cette inauguration aura lieu quelques heures avant une Nuit blanche placée sous le signe du mouvement et de la mobilité, avec une foison de projets, sous la houlette de Didier Fusillier, en tant que directeur artistique, et Jean-Max Colard, conseiller artistique. Parmi eux, l'installation d'un vélodrome sur une portion du périphérique, entre porte de Pantin et porte de la Villette, une traversée à pied ou en petites foulées via deux itinéraires de 8 km environ à travers plusieurs hauts lieux de la capitale (Musée du Louvre, théâtre du Châtelet, palais de Chaillot...) ainsi qu'une parade reliant la place de la Concorde à Bastille, conviant de grands noms de l'art contemporain.

L'occasion d'admirer la pyramide de miroirs imaginée par Daniel Buren, dont c'est la première participation à une Nuit blanche, le Godzilla de la compagnie Les plasticiens volants, des plateformes tirées par des chevaux en costume de fête voulue par la plasticienne Annette Messager ou un propulseur de barbe à papa créé par Vivien Roubaud. Événement gratuit lancé en 2002, la Nuit blanche s'étendra à plusieurs communes autour de Paris, dont Vincennes, Aubervilliers, Gennevilliers.

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Maquette

15 septembre 2019

Le peintre David Hockney quitte les États-Unis pour aller vivre en Normandie

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À 82 ans, l'artiste britannique a troqué Los Angeles et la Californie pour la vie « Made in Normandie ».

David Hockney est considéré comme un des peintres vivants les plus chers. En 2018, son Portrait of an artist s’est vendu à 70 millions de livres (soit 78 millions d’euros) au cours d’enchères chez la maison de ventes Christie’s à Londres. Alors que s’ouvre demain, samedi 14 septembre, à New York l’exposition « David Hockney, La Grande Cour, Normandy », à la Pace Gallery, les médias britanniques ont annoncé que le peintre britannique est parti s’installer en Normandie. David Hockney aurait acheté une propriété datant de 1650, surnommée « La Grande Cour », non loin de Caen. L’artiste quitte ainsi la côte ouest des États-Unis, muse qui l’a inspirée pour sa série d’œuvres représentant des piscines et des scènes de vie californienne. Néanmoins, le choix de cette région française n’est pas le fruit du hasard. Depuis les années 1990, le peintre a séjourné de nombreuses fois dans l’Orne, notamment à Saint-Jean-des-Bois ou encore à Flers, lieu de naissance d’un de ses trois enfants. Que ce soit pour la gastronomie ou pour le mode de vie des Français, en emménageant dans le Calvados, David Hockney se rapproche également de la tapisserie de Bayeux, source d’inspiration de sa dernière œuvre, confiait-il au « Times » en novembre 2018.

Agathe Hakoun

14 septembre 2019

La Biennale de Paris 2019 au Grand Palais - vu aujourd'hui

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C'est LE rendez-vous de septembre pour les acteurs du marché de l'art et les passionnés. Depuis près d’un demi-siècle, la Biennale de Paris a lieu sous la nef du Grand Palais. Exposants nationaux et internationaux s’y réunissent, sans distinction de styles ou d’époques. Une foire géante qui couvre six millénaires d’Histoire de l’art, un véritable musée éphémère.

Les temps forts de cette édition :

L'hommage à Carlos Cruz-Diez
Pour replonger dans l'univers onirique et futuriste du pionner vénézuélien de l'art cinétique récemment décédé, la Biennale accueille une de ses œuvres majeures, inédite à Paris. Transchromie est une expérience immersive dans un espace de 15 mètres carrés où les formes, les couleurs et la lumière se confondent. Incontournable !

Le Bahreïn, invité d'honneur
On connait peu la très riche histoire du royaume du Bahreïn, l'une des plus anciennes du Moyen-Orient. Dans un dialogue interculturel passionnant, vous découvrirez les artistes et les artisans d'excellence, entre traditions et modernité. Vous verrez les plus beaux produits de la sculpture sur métal, la gypserie, le tissage et la céramique, ainsi que les fameuses perles du Bahreïn.

La scénographie de Vincent Darré
Le poumon de verre qu'est le Grand Palais devient le temps de la Biennale le terrain de jeu de l'artiste français. Une obsession : la métaphysique, qu'il dit avoir guidé son projet.Fantasque, baroque et agile, le parcours du visiteur de la Biennale sera à l'image de Darré.

GRAND PALAIS
Du 13 au 17 septembre 2019
3 av. du Général Eisenhower, 75008 - M° Champs-
Elysées (1/13) Du 13 au 16/09 : 11h-22h -
Le 17/09 : 11h-18h De 20 à 35 € - Gratuit -12 ans

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Reportage photographique : J. Snap

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14 septembre 2019

Extrait d'un shooting

14 septembre 2019

J'aime beaucoup... Vu sur internet

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14 septembre 2019

Festival de Deauville 2019 : l’Amérique abandonne ses héroïnes

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Catherine Deneuve (photo ci-dessus)

Par Véronique Cauhapé, Deauville (Calvados)

La 45e édition, qui dure jusqu’au 15 septembre, a mis en avant de beaux portraits de femmes en lutte contre les carcans de la société, à l’heure du mouvement #metoo.

A Deauville, les faits ont pris le pas sur les intentions. La 45e édition du Festival du cinéma américain, dont les festivités s’achèveront dimanche 15 septembre, fut sans conteste féminine. Marqué par la présence de nombreuses comédiennes, réalisatrices, scénaristes, productrices, le festival avait choisi cette année d’attribuer des prix spéciaux à quatre actrices : Kristen Stewart (à l’affiche de Seberg, de Benedict Andrews), Geena Davis (venue présenter le documentaire This Changes Everything, de Tom Donahue), Sienna Miller (dans American Woman, de Jake Scott, projeté à Deauville) et Sophie Turner (l’héroïne de la série Game of Thrones). Le festival avait aussi comme présidente du jury pour les films en compétition Catherine Deneuve, et pour celui de la révélation, Anna Mouglalis.

Marqueur important, cette présence des femmes à Deauville a permis à la plupart d’entre elles de rappeler le combat qu’il restait à mener contre les discriminations et les inégalités dont elles sont victimes dans le cinéma et ailleurs. Cette parole, libérée et assénée depuis le mouvement #metoo, n’était pas nouvelle. Elle a cependant eu une portée particulièrement puissante dans l’écho que lui ont renvoyé, avec force et constance, les films présentés lors du festival. Sur quatorze films en compétition (dont six sont signés par des réalisatrices), dix ont en effet mis en scène des héroïnes, et en particulier des héroïnes qui tentent de se libérer des carcans paternel, familial, social, raciste.

Une Amérique ravagée

« Ce qui surgit dans cette 45e édition, ce sont des actes de création qui portent enfin l’empreinte de ce que les femmes subissent, ce à quoi elles ont à faire face, ce contre quoi elles doivent lutter, souligne le directeur du festival, Bruno Barde. Dans cette compétition, seuls deux films racontent des histoires de mecs [The Lighthouse, de Robert Eggers, sur deux gardiens de phare sur une île reculée de Nouvelle-Angleterre, et The Climb, de Michael Angelo Covino, sur les tourments d’une amitié masculine]. Il semble que #metoo a provoqué une prise de conscience en même temps qu’une réflexion artistique. »

Ce thème s’est, en tout cas, largement exprimé, à travers le regard d’une bonne dizaine de jeunes cinéastes indépendants, dont la majorité d’entre eux présentaient à Deauville leur premier long-métrage. Des cinéastes qui ont choisi de faire évoluer leurs personnages féminins dans une Amérique ravagée par la pauvreté, le racisme et la perte des repères. Avec au premier plan, des adolescentes livrées à elles-mêmes, abandonnées par les institutions, négligées par des parents souvent plus mal en point qu’elles.

LES ADOLESCENTES DE « MICKEY AND THE BEAR » ET « BULL » ONT IMPOSÉ DEUX BEAUX ET ÉMOUVANTS PORTRAITS EN DEVENIR, QUI ONT MARQUÉ LA COMPÉTITION

Mickey Peck (Camila Morrone), l’héroïne lumineuse de Mickey and the Bear, d’Annabelle Attanasio, et Kris (Amber Havard), la jeune fille butée de Bull, d’Annie Silverstein, sont de celles-là. La première porte à bout de bras un père devenu dépendant des opiacés et de l’alcool depuis la mort de sa femme. Alors qu’elle rêve de quitter le Montana pour la Côte ouest afin de poursuivre ses études, la jeune fille devra s’extraire de l’emprise paternelle pour réaliser ses propres désirs.

La seconde, privée de sa mère qui séjourne dans une prison du Texas, ne sait comment exprimer sa colère. C’est un acte de vandalisme auquel elle s’est livrée qui la conduira à se construire et à trouver sa voie dans un monde d’hommes, le rodéo. Filmées avec une acuité sous haute tension, tant le scénario et la caméra s’attachent à décrire, dans les moindres soubresauts, un lien affectif qui se heurte à la frustration et à la violence, ces adolescentes ont imposé deux beaux et émouvants portraits en devenir, qui ont marqué la compétition.

Machisme et patriarcat

Il en fut d’autres, adultes cette fois, qui ont semblé pousser plus avant, creuser plus profond, les marques de la souffrance et de l’isolement des femmes, face à l’oppression qui les contraint ou parfois les enferme. Cet emprisonnement, le jeune réalisateur Alistair Banks Griffin l’a mis en scène de manière radicale dans The Wolf Hour qui, durant toute la durée du film, met en scène une femme, June Leigh (Naomi Watts), retranchée dans son appartement situé dans le Bronx, à New York, où un inconnu parvient encore à la harceler à travers son interphone. Un récit où le danger réel se superpose au délire paranoïaque, et en se confondant, finit par troubler notre propre perception.

CARLO MIRABELLA-DAVIS, RÉALISATEUR : « L’AMÉRIQUE DE TRUMP FONCTIONNE COMME UN PAYS AVEC, À SA TÊTE, UNE SORTE DE BEAU-PÈRE ABUSIF, RACISTE ET SEXISTE »

Carlo Mirabella-Davis s’est, quant à lui, inspiré de l’histoire de sa grand-mère pour son premier long-métrage, Swallow, qui raconte l’histoire de Hunter (interprétée par la troublante Haley Bennett), femme au foyer en apparence heureuse, jusqu’au jour où elle apprend qu’elle est enceinte. La jeune femme développe alors un trouble compulsif du comportement alimentaire (maladie de Pica). Son mari et sa belle-famille décident de l’interner. Si le film se déroule dans le décor d’une maison proprette des années 1950, il inscrit ses personnages dans une réalité contemporaine, établissant une passerelle entre les époques qui tient lieu de propos.

« J’ai voulu montrer par la mise en scène le retour du machisme et du patriarcat des années 1950 dans l’Amérique d’aujourd’hui, explique Carlo Mirabella-Davis qui revendique la portée féministe de son long-métrage. En tant que réalisateur, il semble impossible de ne pas s’engager sur ce terrain et, au fond, ne pas être influencé par l’Amérique de Trump qui fonctionne comme un pays avec, à sa tête, une sorte de beau-père abusif, raciste et sexiste. J’ai le sentiment que la maison dans laquelle vit Hunter, dans mon film, est celle dans laquelle les Américains sont enfermés par les soins d’un président qui les empêche d’en sortir. » Les films en compétition, à Deauville, précisons-le, ont montré des héroïnes qui, toutes, parvenaient à s’échapper.

45e Festival du cinéma américain de Deauville. Jusqu’au dimanche 15 septembre.

14 septembre 2019

Helmut Newton - photographe

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14 septembre 2019

A Hongkong, la police face au peuple

Par Florence de Changy, Hongkong, correspondance

Autrefois adulés, les agents de la ville cristallisent désormais la haine des manifestants, qui réclament une commission d’enquête indépendante sur les violences policières.

Le torchon brûle entre les Hongkongais et leur police. La colère des habitants de la région administrative spéciale se cristallise désormais sur les forces de l’ordre – au moins autant que sur le gouvernement, qui a attendu trois mois de la pire crise qu’ait connue la cité depuis son retour dans le giron chinois pour enterrer un projet de loi permettant les extraditions, notamment vers la Chine. Les manifestants exigent à présent une commission d’enquête indépendante sur les violences policières, que le gouvernement refuse.

Face aux agents, des protestataires que la presse ne qualifie plus de « pacifiques » : les éléments les plus radicaux érigent des barricades, lancent des cocktails Molotov, allument des feux et résistent aux charges à coups de barres métalliques. Plusieurs stations de métro ont été partiellement vandalisées. L’hostilité est telle qu’un déploiement de routine d’une petite unité peut suffire à déclencher, sinon des heurts, au moins une cascade d’insultes à l’égard des policiers : « Assassins », « parasites », « triades » (mafieux), « chiens » et autres injures épicées dont le cantonais regorge. Lors des face à face avec les manifestants, les policiers se voient également adresser des slogans comme : « Les hommes bien ne deviennent pas policiers ». De leur côté, les policiers traitent ouvertement les protestataires de « cafards », malgré plusieurs rappels à l’ordre de leurs supérieurs.

« Une insulte à leur serment »

Les réseaux sociaux et les médias locaux abondent de vidéos documentant des abus flagrants, y compris sur des passants, des secouristes, des journalistes, ou même des adolescents. « En ce moment, ils sont complètement fous, constate un ancien policier de 34 ans, qui a quitté la police pendant le “mouvement des parapluies” – trois mois d’occupation de grandes artères de la troisième place financière mondiale en 2014, pour réclamer l’élection des dirigeants politiques au suffrage universel. Ils ne contrôlent plus leurs émotions ni leurs armes. On nous apprend très clairement à éviter la tête avec les matraques, car cela peut tuer. Mais on dirait qu’ils font tout ce qu’ils peuvent pour blesser le suspect. La manière dont je les ai vus jeter un suspect au sol après lui avoir lié les mains dans le dos, en lui cassant même les poignets, c’est totalement contraire à ce que l’on apprend. Et c’est devenu routinier. Leur comportement est une insulte à leur serment. » Lui était déjà alarmé par la mentalité qui commençait à régner chez ses collègues. « Ils sont convaincus que leurs dérives ne seront jamais punies. Pékin et le gouvernement ne font que les encourager », ajoute-t-il.

Cette haine basique à l’encontre des manifestants, partagée d’après lui par près de 80 % de la force, n’a toutefois aucun fondement idéologique. « Ils ne sont pas particulièrement prochinois, pas du tout même. Ils sont généralement peu politisés, parce qu’assez peu instruits. Ils voient surtout ces manifestants comme des bons à rien qui sèment la pagaille, qui détruisent la réputation de Hongkong et les obligent à faire des heures supplémentaires », ajoute-t-il.

« La police doit répondre de ses abus »

Avec deux oncles et un cousin dans les rangs, il est d’une vraie « famille de policiers ». Il rappelle qu’un emploi de policier est convoité à Hongkong, car il offre un salaire relativement élevé, ainsi que des avantages en matière de logement ou de retraite, malgré le peu de qualification exigé.

« 12.6, 21.7, 31.8. Tout le monde connaît ces dates. Ce sont celles des trois pires actions commises par la police contre les Hongkongais », s’offusque Andy Se, manifestant de 28 ans, à nouveau dans la rue, en ce dimanche 8 septembre, pour dire et redire que « rien n’est réglé » et que « la police doit répondre de ses abus ».

Le 12 juin, en moins d’une heure, le quartier d’Admiralty est sens dessus dessous. Outre les gaz lacrymogènes et les gaz poivre, la police sort les redoutables bean bags (« sacs à pois »). Facteur aggravant : les policiers ne portent pas leur badge d’identification, une anomalie que le ministre de la sécurité, John Lee, justifiera ensuite par un « manque de place sur les uniformes ».

« Un nouveau degré d’indignation est franchi le 21 juillet », estime le député du Parti démocratique, Lam Cheuk-ting, avec l’attaque de manifestants par une horde de voyous en tee-shirt blanc, liés aux triades locales, dans la station de métro de Yuen Long. La police tarde à intervenir et rechigne à effectuer la moindre arrestation, sous des prétextes douteux. « Même ceux parmi les Hongkongais qui jusqu’alors n’avaient pas d’opinion sur l’attitude de la police ont constaté qu’il y avait un problème », estime le député, lui-même blessé dans ces affrontements, qui lui valurent dix-huit points de suture à la bouche.

Enfants de policiers humiliés à l’école

Le 31 août, l’opération a lieu dans une autre station de métro, Prince Edward. Les policiers sont notamment filmés matraquant des protestataires au sol. Les manifestants portent de plus en plus souvent des cache-œil ou de faux bandages à la tête, par solidarité avec les blessés.

Le divorce entre les Hongkongais et leur police est d’autant plus douloureux que cette dernière a longtemps été adulée. « Dans les années 1990, les policiers étaient nos héros. On les respectait, les jeunes les vénéraient pour leur bravoure », rappelle un avocat engagé dans l’assistance aux personnes arrêtées. C’est alors qu’elle gagna son appellation « Asia’s finest », autrement dit la référence et le modèle de toutes les polices du continent. Elle revenait pourtant de loin. Jusqu’au milieu des années 1970, la police de Hongkong était notoirement corrompue. Elle doit sa métamorphose au gouverneur britannique Murray MacLehose (1971-1982), grand réformateur, qui, en 1974, mit en place la commission indépendante anticorruption (ICAC), saluée à l’époque comme un retentissant succès.

Aujourd’hui, il n’y a plus que Pékin, le gouvernement de Hongkong et le ministre de la sécurité, John Lee, lui-même ancien policier, pour faire l’éloge de cette force. Ailleurs, c’est la haine, y compris dans les quartiers traditionnellement « bleus », progouvernement. Les agents et leurs familles s’en disent victimes. La presse s’est fait l’écho d’incidents lors desquels des enfants de policiers ont été humiliés à l’école et des briques ont été lancées dans les logements de fonction des familles. Fin août, dans le quartier de Kwai Fong, un policier de 45 ans qui rentrait chez lui a été poignardé par trois hommes masqués. « Il y a un nombre inhabituel de démissions et de suicides », affirme par ailleurs une source réclamant l’anonymat.

Le « héros » qui n’a pas tiré

En revanche, un policier qui avait pointé son revolver sur les manifestants a été qualifié de « héros » par les médias chinois, pour la maîtrise dont il fit preuve en ne tirant pas. Il a été invité à participer au grand défilé du 1er octobre, à Pékin, pour le 70e anniversaire de la République populaire de Chine.

« Objectivement, la police a réussi à maintenir l’ordre à Hongkong. La ville a continué de fonctionner à 99 % pendant tout l’été, à l’exception du blocus de l’aéroport pendant quarante-huit heures, et de stations de métro momentanément fermées. Avec plus de 30 000 hommes, la police a largement de quoi maîtriser la situation », temporise, confiant, un ancien haut gradé de la police de Hongkong, à la retraite depuis peu. Il admet que les bavures, largement exposées par les médias, sont inacceptables, mais il les explique par le rôle-clé que joue la police dans cette crise, faute de solution politique acceptable. « Le gouvernement n’a compté que sur la police pour gérer cette crise. Ce n’est pas normal, mais cela explique qu’il ne puisse à aucun prix s’en désolidariser. »

Un groupe constitué de quelques centaines de membres des familles de policiers, « Police Relatives Connection », a déjà défilé deux fois dans l’espoir de dédiaboliser la police, dans un esprit de réconciliation. Il souhaite que les torts soient reconnus des deux côtés, avec des slogans comme « La police n’est pas l’ennemie des Hongkongais ». Il est pour le moment dénigré tant par les syndicats de police que par les manifestants.

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