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Jours tranquilles à Paris

17 mai 2019

Miles Aldridge

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17 mai 2019

« Grand fraudeur fiscal », « cynique », « menteur » : le réquisitoire sévère du parquet contre Patrick Balkany

Par Henri Seckel - Le Monde

Quatre ans ferme ont été requis jeudi, au dernier jour du procès pour « fraude fiscale ». Celui pour « corruption » et « blanchiment », dans lequel le maire de Levallois et sa femme encourent dix ans de prison, débutera lundi.

Le procureur Arnaud de Laguiche a commencé par rappeler cette phrase qu’avait prononcée Patrick Balkany, un jour de 2013, sur un plateau de télévision : « Je suis l’homme le plus honnête du monde. » Il a conclu, une heure plus tard, en estimant que « ce personnage que Balzac n’aurait pas renié » avait surtout fait sienne « la leçon de vie scandaleuse de Vautrin à Rastignac, dans Le Père Goriot : “L’honnêteté ne sert à rien.” »

Entre les deux, le représentant du Parquet national financier (PNF) a requis, jeudi 16 mai, quatre ans de prison ferme avec mandat de dépôt contre le maire (Les Républicains) de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Si le tribunal suit ses réquisitions, Patrick Balkany sera incarcéré dès le jugement rendu. Contre Isabelle Balkany, hospitalisée depuis le 1er mai et absente à l’audience, le procureur a requis quatre ans de prison dont deux avec sursis – une peine aménageable. Dix ans d’inéligibilité ont aussi été demandés contre les deux époux âgés de 70 et 71 ans.

Le premier procès Balkany, celui pour fraude fiscale, est terminé. Tout au long du second, qui débute lundi 20 mai et dans lequel le couple encourt dix ans de prison pour des faits de corruption et de blanchiment, résonneront les mots sévères mais jamais outranciers d’Arnaud de Laguiche : « Vous êtes un grand fraudeur fiscal, monsieur. Vous avez fait dire par votre avocat que vous n’étiez ni au-dessus, ni en dessous des lois. Mais ce procès est la preuve que vous mentez. » Incandescent à la barre la veille, Patrick Balkany semblait cette fois éteint sur son strapontin, d’où il a encaissé le réquisitoire en disant parfois non de la tête.

Flots d’argent liquide

De 2009 à 2014, alors qu’ils menaient grand train, lui et sa femme n’ont pas versé un euro au fisc. Au contraire, c’est le fisc qui leur en a versé 7 130, souligne le procureur : le total des impôts sur le revenu qu’ils payaient était inférieur à celui des crédits d’impôt dont ils bénéficiaient sur les salaires versés à leurs employés de maison. « C’est de l’argent que le contribuable français a remis dans la poche de Patrick et Isabelle Balkany. »

Par ailleurs, dans ces mêmes années, le duo « n’a pas versé un centime au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune, alors que ses actifs oscillaient entre 16 et 18 millions d’euros ». Le seuil pour payer l’ISF était de 1,3 million d’euros. Montant total de l’impôt (sur le revenu et sur la fortune) éludé selon le fisc : 4,3 millions d’euros. « Et ce n’est qu’une toute petite partie de l’œuvre fiscale des Balkany qui vous est soumise », prescription oblige.

Le procureur énumère alors les désormais célèbres objets du délit, dissimulés ou sous-évalués, y compris ceux que les Balkany contestent avoir possédés ou reçus : le moulin de Giverny, dans l’Eure, la villa Pamplemousse, aux Antilles, la villa Dar Gyucy, au Maroc, et les flots d’argent liquide. Puis il clarifie les choses : peu importe d’où viennent les millions, « ce n’est pas l’origine des fonds qui est jugée ici, c’est la fraude ».

Les explications fournies la veille par Patrick Balkany – notamment les lingots d’or paternels, une nouveauté – ne l’ont manifestement pas convaincu, mais c’est secondaire : « Je ne dis pas qu’il vous ment. Je dis que je ne sais pas. Et je dis que ça doit être taxé. » De même, « il n’est pas interdit d’avoir de l’argent à l’étranger, mais il faut le déclarer ».

La fraude de Cahuzac, « infiniment moindre »

Arnaud de Laguiche prend soin de ne pas trop en faire, mais ne ménage pas pour autant le prévenu. « De tels comportements, notamment de la part d’un élu, ne sont pas tolérables », gronde-t-il, convoquant le souvenir de l’ancien ministre Jérôme Cahuzac, condamné à deux ans ferme en 2018 pour fraude fiscale et blanchiment, coupable d’une fraude « infiniment moindre », et coopératif après ses aveux. Avec les Balkany, « on a rarement vu des élus de la République batailler avec autant de vigueur contre l’administration fiscale de leur pays ».

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« C’est pas un chien, Balkany », avait dit son avocat Me Eric Dupond-Moretti, à l’ouverture du procès. « Vous n’êtes pas un chien, mais vous êtes un cynique », a lancé Arnaud de Laguiche, rappelant un épisode dévastateur pour l’image du prévenu : le 11 juin 2013 à l’Assemblée nationale, le député Balkany interrogeait le gouvernement (socialiste) sur ses intentions en matière de fraude fiscale. Quelques semaines plus tard, il créait Unicorn Business, une société-écran aux Seychelles, pour y dissimuler des fonds.

Face à tout cela, dans ce qui ressemble à une défense impossible, les avocats font ce qu’ils peuvent. Me Pierre-Olivier Sur, conseil d’Isabelle Balkany, tente de démontrer que les biens du couple sont surévalués par le fisc – qui oublie la crise des subprimes, la tempête Irma qui a détruit la villa de Saint-Martin, ou bien ce parking géant à côté de la résidence de Giverny qui la rend « invendable ».

Me Dupond-Moretti, lui, ne cherche même pas à contester les estimations « qui ne sont pas définitives », et n’a plus l’énergie pour batailler sur le strict plan de la procédure – ces « deux procès en un » où l’accusation va piocher dans le dossier de blanchiment des éléments pour nourrir celui de la fraude. Lui qui fut l’avocat de Georges Tron ou de Jérôme Cahuzac concentre ses coups contre « les nouveaux moralisateurs », le « poujadisme judiciaire », « l’époque de la transparence absolue », et des « procès symboles ».

« J’ai fait des fautes »

Il cite une étude démontrant que la fraude fiscale serait une passion française dans toutes les professions : « Chez les déménageurs, il y a 30 % de fraudeurs, 30 % qui n’aiment pas le fisc plus que lui ! Chez les dentistes, 20 %. Les chirurgiens, 50 %. Les boulangers, 25 %. Les taxis, 50 %, etc. Un Français sur cinq se dit prêt à pratiquer la fraude fiscale, et Patrick Balkany serait l’exemple ? Celui qu’il faudrait envoyer en prison pour que le peuple se régale ? La justice de classe, c’est scandaleux. La justice de classe à rebours, aussi », conclut-il, dénonçant « l’humiliation » du mandat de dépôt.

Les derniers mots reviennent à Patrick Balkany qui, pour la première fois, concède : « J’ai fait des fautes. » Puis, se tournant vers le procureur : « Je l’ai trouvé excessif. J’espère que le tribunal en tiendra compte. » Le jugement sera rendu le 13 septembre.

17 mai 2019

Lutte contre l'homophobie

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17 mai 2019

Critique « Douleur et gloire » : dans le labyrinthe d’Almodovar, la beauté à chaque détour

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Par Thomas Sotinel

Avec son dernier long-métrage, en compétition à Cannes, le cinéaste espagnol livre son film le plus achevé depuis « Volver », et le plus étourdissant depuis « Parle avec elle ».

SÉLECTION OFFICIELLE – EN COMPÉTITION

L’AVIS DU « MONDE » – CHEF-D’ŒUVRE

Les petits maux qui minent un homme vieillissant sont assez répandus pour n’intéresser que les intéressés et – dans le meilleur des cas – ceux qui l’entourent.

Pedro Almodovar, 70 ans le 25 septembre, les a placés au service de son cinéma. De cette mise au pas de contrariétés quotidiennes il a fait naître son film le plus achevé depuis Volver, le plus doux depuis La Fleur de mon secret, le plus étourdissant depuis Parle avec elle.

On trouvera au centre de Douleur et gloire un réalisateur vieillissant et fameux, Salvador Mallo. Pour l’incarner, Antonio Banderas s’est un peu vieilli (il a une bonne dizaine d’années de moins qu’Almodovar), beaucoup ébouriffé, affirmant, dès les premières séquences, la proximité entre auteur et personnage. On peut s’amuser à rechercher les détails empruntés à la vie quotidienne de Pedro Almodovar qui, depuis la sortie triomphale de son film en Espagne, le 22 mars, s’amuse à semer des petits cailloux dans tous les sens.

Mieux vaut faire connaissance avec Salvador Mallo, comme si on ne savait rien de lui. Ce qui lui arrive dans Douleur et gloire – la peur à l’approche d’une fin pourtant encore lointaine, le doute sur la distance déjà parcourue, les consolations fugaces et les douleurs nouvelles – est tout à fait commun. Mais parce que Pedro Almodovar lui a conféré le privilège de vivre dans la fiction, Salvador Mallo bénéficie de l’opération magique par laquelle la beauté s’impose au monde, si trivial et cruel soit-il.

Flash-back lumineux

Du Labyrinthe des passions (1982) à Douleur et gloire, Antonio Banderas n’a jamais été meilleur que chez Almodovar. C’est l’un des plus jolis traits d’esprit de ce film que de donner à cet acteur qui dépend tant du réalisateur qui le dirige, justement, le rôle d’un cinéaste, et de lui permettre d’atteindre une complexité et une profondeur inédites dans sa carrière.

On découvre Salvador vivant en reclus dans un bel appartement qui ressemble un peu à un musée, beaucoup à une chambre funéraire – c’est comme ça que l’éclaire le chef opérateur José Luis Alcaine. Salvador ne tourne plus, il passe du temps à flotter entre deux eaux à la piscine pour soulager son dos et avale des théories de petites pilules. Il est surveillé par une femme de ménage immigrée et une assistante dévouée, qui s’inquiètent de le voir se détacher peu à peu de la vie.

Il rêve au passé, et d’abord à son enfance, qui surgit en flash-back lumineux, au centre desquels brille la figure de sa mère, Jacinta (Penélope Cruz). On voit l’artiste se tordre de douleur sous les coups de l’âge et du manque d’inspiration sans que cette souffrance, somme toute ordinaire, envahisse le film.

La beauté est à portée de main, dans les objets qui entourent l’artiste stérile, dans les souvenirs par lesquels il se laisse envahir, pour se réfugier dans l’illusion que le cours du temps peut s’inverser.

Coïncidences magiques

C’est une femme aussi, une actrice, Zulema (Cecilia Roth, qui jouait déjà dans Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier, il y a bientôt quarante ans), qui administre au reclus un premier électrochoc. Elle lui apprend qu’Alberto (Asier Etxeandia) est revenu à Madrid. Alberto, l’interprète d’élection avec qui Salvador s’est fâché, le mauvais garçon qui jouait dans un des plus grands succès du cinéaste, que l’on s’apprête justement à projeter dans une copie restaurée.

La réconciliation avec Alberto rapproche un peu Salvador de la société des vivants. Le calumet de la paix qu’ils se choisissent est un souvenir du garnement prodigieux que fut Almodovar en ses débuts.

Une fois franchi ce pas, les coïncidences magiques prennent les commandes du récit. Ces retrouvailles en amènent d’autres, avec un amant argentin (Leonardo Sbaraglia). Dans un mouvement parallèle, les retours en arrière atteignent de nouvelles régions de la vie du réalisateur de fiction, comme les derniers jours de sa mère ou ses premières émotions amoureuses, à l’orée de l’adolescence.

Pour interpréter la vieille femme, Almodovar a fait appel à l’extraordinaire Julieta Serrano, aujourd’hui octogénaire. On a vu Julieta Serrano plus jeune, dans Femmes au bord de la crise de nerfs, par exemple, elle n’a jamais ressemblé à Penélope Cruz. D’ailleurs, le personnage de la mère mourante, sèche, indifférente aux succès et aux tourments de son artiste de fils, n’a presque rien à avoir avec la déesse protectrice des souvenirs d’enfance : ici, la fiction engendre d’autres fictions, les souvenirs se cristallisent et deviennent des histoires, sans que jamais on ne se perde en chemin, jusqu’à entrevoir, tout au bout, l’apaisement.

« Douleur et gloire », film espagnol de Pedro Almodovar. Avec Antonio Banderas, Penélope Cruz, Asier Etxeandia, Leonardo Sbaraglia, Julieta Serrano (1 h 52). Sortie le 17 mai.

17 mai 2019

Crazy Horse de Paris

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17 mai 2019

Love, Ren Hang, l'exposition à la MEP

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La Maison Européenne de la Photographie (MEP) consacre une exposition à l'un des artistes chinois les plus influents de sa génération, Ren Hang, jusqu’au 26 mai 2019.

Le portrait vu sous une autre approche... La MEP (Maison Européenne de la Photographie) consacre une exposition à l'un des photographes les plus influents de sa génération, Ren Hang, du 6 mars au 26 mais 2019. Intitulée Love, Ren Hang, cette rétrospective expose pas moins de 150 portraits d'amis et de proches de l'artiste, issus de collections d'Europe et de Chine.

Portraits, paysages, nus... une oeuvre immédiatement identifiable et des clichés pris sur le vif pour donner à l'ensemble légèreté, poésie et humour. Et une exposition qui propose, à travers une approche chromatique, de plonger dans "les différentes constellations oniriques de l'artiste" avec "la présence du rouge, les couleurs acidulées, une salle consacrée à sa mère, un autre, plus sombre, dédiée à des prises de vue nocturnes". La dernière salle, quant à elle, rassemble "ses travaux les plus osés sur le corps", créant ainsi un lien fort entre érotisme et nature.

L'objectif ? Questionner "la relation à l'identité et à la sexualité", avec un ton souvent considéré comme subversif, voire même pornographique. Et un moyen d'exprimer ce désir de "liberté de création" dans un contexte politique plutôt répressif. L'occasion également de rendre hommage à un artiste malheureusement décédé en 2017, à l'âge de 29 ans.

INFORMATIONS PRATIQUES

Du 6 mars 2019 au 26 mai 2019

Lieu

Maison Européenne de la Photographie

7 Rue de Fourcy

75004 Paris 4

Accès

Métro Saint Paul (ligne 1)

Métro Pont Marie (ligne 7)

Tarifs

Tarif réduit : 6 €

Plein tarif : 10 €

Site officiel

www.mep-fr.org

Plus d'information

Ouvert les Mercredis et vendredis de 11h à 20h, les Jeudis de 11h à 22h et le week-end de 10h à 20h

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17 mai 2019

Publicité : silhouettes plus naturelles...

17 mai 2019

Vu au Festival Européen de la Photo de Nu à Arles

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Christian Coite

Mon passé de danseur, mime puis homme de théâtre, se retrouve dans mon aventure photographique. Après des années d’œuvres de découpage de mes photos (toujours centrées sur les yeux ou le regard), j’ai commencé ces « Montages A4 » toujours avec un sens de la chorégraphie, en obligeant le regard à un parcours à travers l’âme de celles (et ceux) qui, bout à bout, se sont prêté(e)s.

Dans mes photos, je raconte l'histoire de ma vie, je raconte l'histoire, capture le mouvement et l'émotion, joue avec la variabilité des expressions pour approcher l'essence de la nature humaine ...

Des découpages aux « Montages A4 », une seule quête : élargir le champ de vision de chacun par une série de perceptions à la fois sélectives et simultanées, en cherchant toutes combinaison nouvelles susceptibles de modifier le champ de conscience.

Nîmois depuis toujours, Christian Coite, de par son métier d’expert hydraulicien a pu découvrir le monde et se familiariser avec les hommes, les coutumes, les racines de tout ce qui fait notre univers d’être humain.

Mais cette activité lui a permis de conserver une part de temps importante pour des rencontres artistiques décisives comme Nicole Canonge à Nîmes, Philippe Decouflé, Pierre Doussaint et Isabelle Dubouloz, ou encore Wladislaw Znorko.

Les œuvres de découpage ont été stimulées par la rencontre avec Sylvie Fourrier avec laquelle a été créé le « Groupe C » (Cadrer, Casser, Cacher, Couper, Composer, Coller, Chorégraphier).

Tous ces apports se retrouvent évidemment dans les travaux qui sont présentés aujourd’hui.

En savoir plus sur l’artiste : www.christian-coite.com

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17 mai 2019

Playboy

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17 mai 2019

Nécrologie : Ieoh Ming Pei, l’architecte de la pyramide du Louvre, est mort

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Par Frédéric Edelmann

Mondialement connu, originaire de Chine, il avait été choisi en 1983 par François Mitterrand pour concevoir l’entrée principale du musée parisien. Parmi ses bâtiments remarquables, l’extension de la National Gallery of Art, à Washington. Il avait 102 ans.

Ieoh Ming Pei est mort dans la nuit du mercredi 15 mai au jeudi 16 mai à New York, à l’âge de 102 ans, a annoncé son fils Li Chung Pei au New York Times

Enigmatique derrière un perpétuel et aimable sourire, l’architecte de renommée internationale s’était hissé à un niveau de notoriété sans doute supérieur à ce que représente réellement son œuvre, dominée par le Louvre, à Paris, et par la National Gallery of Art, à Washington. Comme Oscar Niemeyer, disparu fin 2012, Ieoh Ming Pei avait reçu le Pritzker, en 1983, cinquième lauréat d’un prix maintenant considéré comme le Nobel de l’architecture, mais alors fortement américanisé. Pei représentait bien alors l’intelligentsia constructive des Etats-Unis, et la Chine était loin.

Sous la direction de Walter Gropius

Né à Canton le 26 avril 1917, Ieoh Ming Pei était issu d’une famille fortunée, ancrée dans la Chine traditionnelle, très formaliste, établie à Suzhou (province de Jiangsu), près de Shanghaï. Une ancienne ville impériale, surnommée en Occident « la Venise de Chine » en raison de ce qu’étaient alors ses innombrables canaux et son paysage urbain homogène, connue aussi pour ses jardins et ses particularités architecturales, comme les ouvertures qui ornent les cours intérieures.

Ce n’est que plusieurs décennies après son départ, alors que la ville avait déjà été sévèrement modernisée, que Pei eut l’occasion de retrouver le paysage de son enfance.

Son père, banquier, acceptait cependant l’influence occidentale. Sa mère bouddhiste, musicienne, mourut alors que le jeune Ieoh Ming avait 13 ans. Très affecté par cette disparition, il part en 1935 aux Etats-Unis pour y commencer des études au Massachusetts Institute of Technology (MIT), à Cambridge, école réputée où il recevra son diplôme d’architecte en 1940. Il éprouvera vite le besoin de renforcer ses connaissances par une maîtrise à Harvard sous la direction de Walter Gropius, un des fondateurs du Bauhaus, et de Marcel Breuer, autre grand maître du Mouvement moderne, dont il restera très proche jusqu’à partager plusieurs voyages en Europe.

Après avoir travaillé pour William Zeckendorf, fameux promoteur de l’époque, Ieoh Ming Pei est naturalisé Américain en 1954, et ouvre sa propre agence à New York l’année suivante, à l’enseigne I.M. Pei and Associates, qui deviendra I.M. Pei and Partners, enfin Pei Cobb Freed & Partners en 1989, l’une des plus importantes des Etats-Unis.

« Les pères sèment, les fils récoltent »

En 1964, Jackie Kennedy, après l’assassinat du président, avait obtenu qu’il soit choisi comme architecte pour construire le mémorial et la bibliothèque dédiés à son mari. Ce choix, alors qu’il est encore presque inconnu, propulse Pei sous les projecteurs, mais la marque de confiance de l’ancienne First Lady sera une première occasion d’éprouver sa patience. Car la bibliothèque John F. Kennedy, à Boston, ne sera pas achevée avant 1979, après de longues années de controverses mêlant opposition locale, problèmes de pollution et difficultés budgétaires.

Boston, où Pei avait fait une partie de ses études, ne réussit d’ailleurs pas vraiment à l’architecte et à sa firme : la John Hancock Tower (241 mètres), dessinée en 1971, ne sera achevée qu’en 1976, après être restée longtemps une simple enveloppe de verre.

Mais c’est déjà l’époque où les signatures des différents partenaires de l’agence deviennent interchangeables : la plus haute tour de Boston est ainsi principalement due à Henry Cobb. Ce sera aussi le cas en 1992 pour la tour de la Bank of China à Hongkong (305 m), qu’un des deux fils de Pei – Chien Chung et Li Chung, l’un et l’autre étant partenaires de l’agence – a édifié à la demande de son père : « Les pères sèment, les fils récoltent », résumera Ieoh Ming interrogé par Le Monde en 2002…

Batailles homériques

La grande affaire et le tournant de la carrière sera la transformation du Louvre en Grand Louvre, aventure souvent et abusivement réduite à la seule pyramide de la cour Napoléon.

Ieoh Ming Pei a été choisi en 1983 par François Mitterrand, conseillé notamment par Emile Biasini, président de l’Etablissement public du Grand Louvre. Pas de mise au concours, pas même une de ces mises en concurrence à l’américaine, qui amènent la maîtrise d’ouvrage à comparer ad libitum les mérites de plusieurs maîtres d’œuvre. Le Louvre, palais royal, restera le fait du prince. L’architecte s’est adapté : il reçoit la presse à l’Hôtel Crillon, toujours sobrement mais impeccablement habillé, d’une politesse et d’une patience inépuisables.

Le vaste ensemble souterrain, éclairé par la fameuse pyramide, et les nouveaux espaces réorganisés dans les espaces du palais autour de la Cour Napoléon et de la Cour carrée seront inaugurés en 1989, après avoir connu des batailles homériques.

Après des années de méfiance, le nouveau musée (qui sera agrandi encore à plusieurs reprises par l’équipe de Pei ou d’autres) est reçu de façon globalement favorable : la France est fière de son « plus grand musée du monde » et Pei, qui a puisé dans toutes les réserves de son flegme sino-américain pour ne pas se laisser atteindre par des querelles de spécialistes souvent politisés, peut être enfin rassuré : il est bien (avec son associé français Michel Macary) l’architecte de cet immense ensemble.

Simplicité et équilibre

De fait, le long chapitre du Louvre modifie en partie la carrière du constructeur. D’un côté, à New York et dans ses nombreuses succursales, une puissante agence dont le nom Pei est la principale enseigne, qui multiplie les chantiers aux Etats-Unis et dans le monde entier. Le tout sans qu’il soit possible de reconnaître une « signature » ni un style cohérents, ni même une qualité constructive très éloignée des grandes firmes « corporate », efficace spécialité américaine. En témoigne le colossal centre de conférences Jacob K. Javits (signé par son partenaire Freed), inauguré en 1986 sur la rive ouest de Manhattan.

Et d’un autre côté, un architecte qui, tandis que ses associés et ses proches font tourner l’impressionnante machine à projets, cherche à se concentrer sur des chantiers plus personnels, plus symboliques. En 1997, il signe ainsi au Japon le Miho Museum, à Shiga, dans les montagnes de Shigaraki (région du Kansai), musée quasi secret où Pei s’essaye à une architecture paysagère qui lui tient vraisemblablement à cœur depuis sa jeunesse.

A la même époque, il travaille sur le Rock and Roll Hall of Fame, fameux « Panthéon » de la musique rock, à Cleveland (Ohio), une sorte de collage architectural où, en 1995, l’agence continue d’expérimenter, entre autres, le principe de la pyramide de verre.

En 2003, surgit à Berlin près de l’avenue Unter den Linden, le Musée historique allemand signé par l’architecte sino-américain, extension pittoresque d’un édifice classique, remarquable par ses références hétérogènes, notamment une sorte de tour de Babel, dont il propose une transcription abrégée, en verre.

En 2008, ce sera le Musée d’art islamique de Doha (Qatar), édifice simple, équilibré, qui frappe plutôt par sa fidélité aux références historiques locales, assez éloigné en tout cas des montages techniques de verre et d’acier que propose l’agence ailleurs. Un schéma presque « postmoderne » à l’instar de celui mis en œuvre en 2006 au Musée d’art de Suzhou, la ville de son enfance. Comme à Doha, le principe formel est fondé sur la simplicité et l’équilibre, sur l’association de motifs de l’architecture de la région du Jiangsu et d’un vocabulaire « moderne » très réservé, la disposition des édifices et des cours relevant, par ailleurs, d’un élégant classicisme chinois.

Le lien se fait alors avec l’Hôtel des Collines parfumées, un édifice apparu en 1982 tout au nord de Pékin, près d’un ensemble de temples majeur, où Ieoh Ming Pei avait été appelé pour construire un lieu qui allait se révéler, faute d’accès, comme une forme de piège à congressistes, très éloigné du centre de la capitale.

L’architecte s’était vivement insurgé sur les altérations apportées au projet qu’il avait pourtant dessiné à la demande des autorités et dans lequel il voyait l’amorce d’une possible réconciliation. Car de Suzhou à… Suzhou via New York, il n’aura jamais cessé de penser au raffinement subtil de son pays natal. De la Venise de Chine, il avait toujours conservé un remarquable souci d’élégance, de luxe, de politesse, d’humour léger mais sans frivolité.

Dates

26 avril 1917 Naissance de Ieoh Ming Pei à Canton (Chine)

1935 Part aux Etats-Unis

1964-1979 Réalise la bibliothèque John F. Kennedy à Boston (Etats-Unis)

1978 National Gallery of Art, à Washington

1983 Choisi par François Mitterrand pour la réalisation du Grand Louvre, à Paris

1983 Reçoit le Pritzker Prize

2003 Musée historique allemand, à Berlin

2008 Musée d’art islamique de Doha (Qatar)

16 mai 2019 Mort à New York

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