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Jours tranquilles à Paris
2 septembre 2020

Procès des attentats de « Charlie Hebdo » et de l’Hyper Cacher : Hayat Boumeddiene et les frères Belhoucine, les grands absents

Par Elise Vincent

L’épouse religieuse du terroriste Amedy Coulibaly, en cavale, et ses soutiens opérationnels, présumés morts, seront jugés en leur absence.

Parmi les quatorze personnes renvoyées devant la cour d’assises spéciale de Paris pour le procès des attentats de janvier 2015, trois devraient être jugées en leur absence et cruellement manquer à l’appel, mercredi 2 septembre, à l’ouverture des audiences.

Comme souvent dans les affaires de terrorisme, ce sont les petites mains qui se retrouvent devant la justice. Le dossier des attaques de Charlie Hebdo, de Montrouge, et de l’Hyper Cacher ne devrait pas échapper à la règle. D’autant que le sort d’un des commanditaires présumés des tueries, Peter Cherif, arrêté fin 2018, a été disjoint.

Les trois grands absents de ce procès historique sont ainsi deux hommes et une femme, tous présumés morts, disparus, ou en cavale dans la zone irako-syrienne. Hayat Boumeddiene, 32 ans, est la figure la plus connue de ce trio. Cette enfant de Villiers-sur-Marne (Val-de-Marne), était l’épouse religieuse d’Amedy Coulibaly, le tueur de l’Hyper Cacher, mort lors de l’assaut des forces de l’ordre. Longtemps présumée morte, elle est réapparue il y a quelques mois sur les radars de la justice après qu’une djihadiste française de retour de Syrie a assuré l’avoir vue vivante dans un camp géré par les Kurdes.

Bien qu’elle se soit envolée pour la Syrie une semaine avant les attentats, la justice accuse Hayat Boumeddiene d’avoir été l’un des soutiens logistiques clé de son mari. Que ce soit en couvrant ses nombreux préparatifs – en prêtant par exemple sa ligne téléphonique – ou en montant, à son nom, des demandes de faux prêts à la consommation pour financer l’achat d’armes ou autres équipements. Plus rigoriste encore qu’Amedy Coulibaly, la jeune femme aujourd’hui en fuite, remariée et mère de plusieurs enfants, a eu, avant les tueries, un rôle moteur dans la radicalisation du couple.

« Ne vous inquiétez pas »

Les deux autres absents majeurs du procès seront les frères Belhoucine. A la différence d’Hayat Boumeddiene, tous les deux sont présumés morts. Depuis cinq ans, aucune preuve de vie n’a filtré à leur sujet.

Mohamed, l’aîné, 27 ans lors des faits, est celui qui est renvoyé avec la plus lourde charge : « complicité » dans l’attaque de l’Hyper Cacher. Cet ancien élève de l’Ecole des mines d’Albi est considéré comme ayant été à la fois le mentor religieux et le soutien opérationnel le plus décisif auprès d’Amedy Coulibaly. C’est à lui que des expertises graphologiques attribuent la rédaction du serment d’allégeance du djihadiste à l’organisation Etat islamique. C’est aussi lui qui aurait fourni l’aide informatique nécessaire aux échanges avec un donneur d’ordre, probablement situé à l’époque hors de France.

Mehdi Belhoucine, le cadet, sera pour sa part jugé en son absence en raison du rôle qu’il a eu dans l’exfiltration d’Hayat Boumeddiene vers la Turquie, puis la Syrie, début janvier 2015. C’est lui qui a notamment été chargé de jouer les compagnons de route auprès de la jeune femme depuis Madrid, où ils ont ensemble pris un vol pour la Turquie, le 2 janvier. Les caméras de vidéosurveillance des aéroports ont permis formellement de l’identifier. La veille, ce garçon de 23 ans était passé chez ses parents pour dire qu’il partait en Egypte « étudier la religion ». Son frère, Mohamed, a pris le même jour un vol pour la Turquie avec sa femme et son fils de 4 ans.

Après avoir fait de l’aide aux devoirs à la mairie d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) jusqu’en septembre 2014, tous les deux étaient sans emploi lors des attentats. Ils pratiquaient aussi de longue date un islam très rigoriste.

Mohamed aimait s’improviser professeur de morale islamique et assumait même ses sympathies djihadistes auprès de son entourage familial. En juillet 2014, il avait été condamné à deux ans de prison dont un ferme – effectué lors de sa détention provisoire – pour son rôle dans une filière d’acheminement de djihadistes vers la région afghano-pakistanaise. « Maman/Papa, ne vous inquiétez pas, on a rejoint le califat. Ne vous inquiétez pas, on préfère vivre dans un pays régi par la charia et pas les lois inventées par les hommes », a-t-il notamment écrit à ses parents après son départ.

Pièce manquante

Celui dont l’absence devrait se faire le plus sentir lors des audiences est Peter Cherif, 37 ans, commanditaire présumé de l’attaque contre Charlie Hebdo. Ce proche des frères Kouachi – auteurs de la tuerie contre l’hebdomadaire satirique – est un vétéran du djihad, et un ex-cadre d’Al-Qaïda dans la péninsule Arabique (AQPA) au nom duquel les Kouachi ont revendiqué leur attaque. Il a été interpellé fin 2018 à Djibouti, puis extradé après plusieurs années de cavale et incarcéré en France. Mais, à cette date, l’enquête principale sur les attentats de janvier 2015 était close. Un nouveau volet des investigations a donc été ouvert.

Peter Cherif est, depuis le début, la pièce manquante du dossier des attentats de janvier 2015. C’est lui qui est soupçonné d’avoir facilité, à l’été 2011, à l’occasion d’un périple au sultanat d’Oman, pays voisin du Yémen, base arrière de l’organisation terroriste, l’intégration de Chérif Kouachi dans les rangs d’AQPA. Or, c’est lors de ce voyage que, soupçonne la justice, Chérif Kouachi a pu être formé au maniement des armes et a pu recevoir pour mission de s’en prendre à Charlie Hebdo.

Elise Vincent

charlie13

Dates-clés des attentats de janvier 2015

7 janvier 2015. Les frères Chérif et Saïd Kouachi attaquent la rédaction de Charlie Hebdo en fin de matinée. Parmi les morts, huit font partie de la rédaction : Cabu, Charb, Tignous, Honoré, Wolinski, Bernard Maris, Mustapha Ourrad et Elsa Cayat. Les autres victimes sont : Frédéric Boisseau (agent d’entretien de l’immeuble), Michel Renaud (ancien directeur de cabinet du maire de Clermont-Ferrand, invité par la rédaction ce jour-là), Franck Brinsolaro ( un des deux policiers qui assurait la sécurité de Charb) et Ahmed Merabet ( un gardien de la paix assassiné dans la rue).

8 janvier 2015. Un homme déclenche une fusillade à Montrouge (Hauts-de-Seine) et tue Clarissa Jean-Philippe, une policière municipale. La police identifiera le lendemain Amedy Coulibaly comme l’auteur de cette fusillade.

9 janvier 2015. Amedy Coulibaly prend en otage, vers 13 heures, une vingtaine de clients d’un supermarché cacher, l’Hyper Cacher de la Porte de Vincennes (Paris 20e). Il tue quatre personnes : un employé, Yohan Cohen, et trois clients, Philippe Braham, François-Michel Saada et Yoav Hattab. Il est abattu par les policiers de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) vers 17 heures. Chérif et Saïd Kouachi sont tués par les militaires du GIGN devant l’imprimerie CTD de Dammartin-en-Goële, en Seine-et-Marne, dans laquelle ils s’étaient réfugiés, à 16 h 50.

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1 septembre 2020

Rentrée Scolaire - Pas de papy ni de Mamie à l'école....

rentrée papy

1 septembre 2020

La fracture numérique au révélateur du Covid-19

Article de Charles De Laubier

En accroissant la dépendance aux démarches en ligne et en retardant encore le déploiement de la couverture très haut débit du territoire, le confinement a renforcé l’exclusion technologique. L’illectronisme touche entre 16,5 % et 20 % des Français

L’exclusion numérique s’est rappelée subitement au bon souvenir des pouvoirs publics lors de la pandémie historique du Covid-19. Selon une étude de l’Insee de 2019, l’« illectronisme » (difficulté, voire incapacité, à utiliser les outils numériques en raison d’un manque de connaissance) touche 16,5 % de la population française. Voire 20 % – soit 13 millions de personnes –, si l’on se fie à une audition de Jacques Toubon, alors Défenseur des droits, devant une mission d’information sénatoriale en mai 2020. Avec l’école à distance, le télétravail, les téléconsultations, les démarches et déclarations en ligne, le commerce électronique, ou encore l’accès à la culture sur Internet, la République numérique a perdu lors du premier semestre de très nombreux citoyens en route, faute d’avoir su leur apporter le haut débit à domicile ou leur donner un pouvoir d’achat suffisant pour s’équiper d’ordinateurs.

Cette exclusion numérique, qui date de bien avant l’épidémie de Covid-19, s’est constituée au fil des années, au fur et à mesure que les services en ligne se sont imposés dans la vie quotidienne. Mais le confinement l’a mise cruellement en lumière. « Aujourd’hui, la précarité numérique est un phénomène de société majeur, et lutter contre l’illectronisme est devenu une priorité pour le gouvernement. Nous avons la conviction depuis dix ans que le numérique est l’électricité du XXIe siècle », assure Julie Leseur, déléguée générale de la Fondation SFR (filiale télécoms d’Altice).

En 2013, François Hollande, alors président de la République, avait promis « le très haut débit pour tous d’ici à 2022, très majoritairement en fibre optique », moyennant 20 milliards d’euros d’investissement, en réalité sous-estimés (jusqu’à 35 milliards auraient été nécessaires), avec une extinction du réseau de cuivre qu’utilise l’ADSL en 2025. Mais le « plan France très haut débit », lancé par l’Etat français il y a sept ans, n’a pas tenu son calendrier.

Emmanuel Macron, aussitôt à l’Elysée en 2017, avait revu à la baisse les objectifs de 2022 : il n’est plus question que « du bon haut débit pour tous à fin 2020, du très haut débit pour tous à fin 2022 avec un mix technologique [fibre, câble, VDSL2, 4G fixe, satellite…], puis du FTTH [fibre optique de bout en bout jusqu’à la maison, « Fiber to the Home » en anglais] pour tous à fin 2025 ». Mais le coronavirus est venu jouer les perturbateurs. Le confinement a assigné à résidence la population française, comme 4,5 milliards de personnes dans le monde. La fibre reste une chimère pour environ 60 % des abonnés français toujours rattachés à l’ADSL. Et encore, les quelque 40 % restant sont branchés à un très haut débit, mais souvent sans fibre.

« Ralentissement brutal »

Bien que la France atteigne un parc de près de 20 millions de prises FTTH disponibles au 31 mars 2020 (derniers chiffres du régulateur Arcep), sur 31 millions prévues d’ici à fin 2022, le confinement a provoqué « un ralentissement brutal » des déploiements et « plusieurs mois de retard », selon une étude publiée avant l’été par InfraNum. Cette fédération professionnelle réclame « un plan de relance ambitieux » de 11,2 milliards d’euros, dont 7 milliards pris en charge par les pouvoirs publics.

De plus, à ce jour, seuls 39 % des foyers raccordés à la fibre se sont abonnés. L’ADSL de qualité et son prix modique par rapport à la fibre conviennent encore à près de 18 millions de foyers. « On ne parle pas suffisamment du taux de pénétration, la différence entre le raccordable et le raccordé [l’abonné], qui est très important à mes yeux. Cela doit être un de nos chantiers dans les prochains mois », a prévenu Julien Denormandie, alors ministre chargé de la ville et du logement (à l’agriculture depuis le 6 juillet), lors des Assises du très haut débit qui se sont tenues le 2 juillet.

Ainsi, l’absence du très haut débit fixe dans de nombreux territoires le dispute à la fracture numérique mobile illustrée par les zones blanches, où personne ne capte de réseau sur son smartphone. Pourtant, Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free s’étaient engagés auprès du gouvernement, il y a deux ans, à assurer une « couverture 100 % mobile d’ici à fin 2020 », y compris sur les axes routiers (New Deal Mobile), en contrepartie du prolongement du droit d’utiliser leurs fréquences.

L’échéance approchant, et malgré le retard évalué par les intéressés à près de quatre mois à cause du confinement, le régulateur Arcep a prévenu, le 16 juin, qu’il sera « plus pointilleux » sur ce déploiement de la 4G que sur la fibre, qui reste « un chantier à long terme ». Quant au report à septembre des enchères pour l’attribution des fréquences 5G (initialement prévues en avril), il recule d’autant la perspective de la fin d’une France connectée à deux vitesses.

La Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP), soucieuse de la cohésion nationale et de l’inclusion digitale, s’interroge d’ailleurs sur le financement du plan France très haut débit, dans un avis rendu au gouvernement en juillet 2019 : « Le coût de déploiement complémentaire pour arriver à une couverture complète FTTH en 2025 est estimé à une fourchette de 3,1 à 3,4 milliards d’euros. » La fédération InfraNum, elle, parle même de 5,4 milliards d’euros nécessaires. Et Anne-Marie Jean, la secrétaire générale de la CSNP, instance parlementaire trentenaire, de mettre aujourd’hui en garde : « Il est dommage que le gouvernement hésite tant à s’engager sur un programme si attendu par nos concitoyens. Si on n’a pas de certitude maintenant de pouvoir boucler le financement dans de bonnes conditions, les projets de déploiement FTTH, longs sur au moins cinq ans, ne se feront pas d’ici à 2025. »

Double peine

Sans attendre, la fracture numérique s’est greffée sur la fracture sociale du pays. « Les difficultés d’accès au numérique peuvent être liées aux infrastructures, mais aussi à l’accès à des terminaux. C’est ce qu’on a constaté avec le basculement soudain vers l’éducation à distance. Toutes les familles ne disposaient pas de suffisamment d’ordinateurs pour permettre à plusieurs enfants de travailler », souligne Anne-Marie Jean.

Dans l’impossibilité d’assurer l’école à distance pour leurs enfants et/ou le télétravail pour les parents, des millions de foyers ont vécu une double peine : le confinement et l’isolement. Le deuxième opérateur télécoms français assure avoir annoncé « un engagement d’urgence, dès le 25 mars, aux côtés de l’association Emmaüs Connect et du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, au profit de 75 000 personnes exclues du numérique, dont 50 000 élèves ». Cela s’est concrétisé par le don de recharges mobiles prépayées, de 20 000 téléphones et smartphones avec appels et SMS illimités, et 750 000 Go de données Internet « pour que les plus modestes puissent communiquer avec leurs proches, alerter les secours en cas d’urgence, continuer à s’informer et à suivre les cours à distance ».

Les enfants ont été les premiers à être exposés au confinement brutal dès le lundi 16 mars, et durant deux mois à l’école en ligne obligatoire. Les élèves non équipés ont vite décroché ; certains parmi eux disposaient bien d’une connexion à la maison, mais pas d’ordinateur. C’est le cas de la Violette, 13 ans. « Mon père a dû acheter dans l’urgence un ordinateur portable, témoigne-t-elle, car ma mère s’est retrouvée en télétravail à la maison avec son propre ordinateur sur lequel j’avais l’habitude de faire quelques devoirs et des jeux vidéo. J’ai donc pu suivre les cours d’espagnol et de techno en visio sur Google Meet à partir de Classroom, avec la prof en vidéo et mes camarades de classe en vocal seulement [webcam coupée]. D’autres matières se faisaient par e-mail, lorsque ce n’était pas sur Pronote [logiciel de vie scolaire proposé dans l’Espace numérique de travail (ENT)]. »

Dans la Précipitation

Noham, 8 ans, n’a pas eu cette chance d’être à la fois équipé d’un ordinateur familial et d’avoir un parent à ses côtés pour réceptionner et imprimer les supports de ses cours de CE2, voire pour l’aider à participer à des « visio ». Lui n’a donc pas pu suivre l’école numérique créée ad hoc, comme de nombreux autres élèves victimes de ces circonstances discriminantes.

A la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), les antennes locales n’ont pas eu tous les moyens d’aider des familles dépourvues à s’équiper d’un ordinateur et/ou d’une connexion. Le président de la FCPE de la Drôme, Saïd Zakar, indique que « [son] association n’a pas distribué du matériel informatique ; nous aurions aimé le faire mais notre budget ne le permet pas ». En revanche, la présidente de la FCPE du Val-de-Marne, Nageate Belahcen, a pu « dépanner des familles en ordinateurs et imprimantes, grâce à des dons de matériels du département ou des aides financières du Fonds social lycéen ou collégien ».

Ce manque de plan de soutien, observable en France, prend des proportions dramatiques à l’échelle planétaire : l’Unesco comptabilise 465 millions d’enfants et de jeunes, soit près de la moitié des élèves du primaire et du secondaire, qui n’ont pas d’accès à Internet chez eux. « Le secteur éducatif n’a jamais été confronté à une telle crise mondiale. Les fermetures d’écoles dans plus de 190 pays ont perturbé l’apprentissage de plus de 1,5 milliard d’élèves et 63 millions d’enseignants du primaire et du secondaire », indique Stefania Giannini, ancienne ministre de l’éducation en Italie et actuelle sous-directrice générale de l’Unesco.

Les parents, eux, ont été confrontés par millions au télétravail forcé. Cette activité à distance, sans précédent et souvent improvisée, inspire les sociologues tels que Dominique Boullier, professeur des universités et professeur à Sciences Po : « Tout cela a dû être fait dans la précipitation, et sans aucune réelle validation des conditions requises pour un environnement personnel correct, au domicile comme sur les applications en ligne, pour le lien permanent ou pour des réunions épisodiques. Dans tous les cas, cela ouvre des champs de négociations et d’imagination au management, alors que jusqu’ici tout était un peu figé dans des a priori. »

Failles des infrastructures

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s’interroge, lui, dans un avis du 26 mai, sur les « failles » et les « réseaux vieillissants » des infrastructures de transports, d’énergie ou de télécommunications en France. Entre le #restezchezvous et le #travaillezchezvous, les réseaux ont montré leurs vraies faiblesses. Stéphane Richard, PDG d’Orange, n’a-t-il pas convaincu le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, qui a eu l’oreille du commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, d’exiger dès le 18 mars de Disney, Netflix, YouTube (Google) ou Amazon (Prime Video) qu’ils réduisent de 25 % leur débit en Europe pour sauver le télétravail, voire la télémédecine ?

« La qualité du réseau touche tout autant les zones denses du fait d’une certaine “saturation” du réseau face à une forte demande concomitante – et nous venons de l’expérimenter avec le recours massif au télétravail – que les zones plus rurales ou isolées », relève Fanny Arav, rapporteuse de l’avis du CESE. Et cette économiste et urbaniste de pointer : « Le basculement vers le télétravail a été inédit. Si l’accès à un réseau numérique est la condition nécessaire, elle n’est pas suffisante ! Il y a le niveau d’équipement : si presque tout le monde est équipé d’un smartphone, il n’en est pas de même pour les tablettes ni pour un ordinateur personnel, et encore moins pour une imprimante-scanner qui devient pourtant inévitable pour tous envois de documents. Et l’aisance numérique, elle, n’est pas innée. »

1 septembre 2020

Rentrée scolaire

rentrée classes

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rentrée23

rentrée22

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31 août 2020

Chevaux mutilés : un expert évoque la piste de la sorcellerie

Article de Hervé Chambonnière

Historien des religions et spécialiste des mouvements sectaires, Jacky Cordonnier travaille régulièrement avec la Miviludes et les forces de l’ordre. Sollicité pour le dossier des chevaux mutilés, lui évoque plutôt la piste de la sorcellerie.

Vous avez travaillé sur de nombreux dossiers judiciaires liés au satanisme, notamment en Bretagne, en 2006 et 2008. Mais la série d’agressions et de mutilations de chevaux vous fait spontanément penser à une autre piste ?Oui. Les autorités viennent tout juste de me solliciter à ce sujet. Je n’ai pas encore tous les éléments en main, mais ceux en ma possession me font davantage penser à des rituels de magie noire ou de sorcellerie. Plusieurs éléments, comme l’ablation de l’oreille droite, d’organes génitaux ou de globes oculaires, ou encore la récupération du sang, renvoient à de vieilles pratiques. Mais c’est une piste explorée parmi d’autres.

Ces mutilations n’interviennent que dans certains des nombreux cas signalés depuis le début de l’année 2020 et plus spécifiquement depuis le début du mois d’août (notre édition de ce dimanche). La piste ne vous semble-t-elle pas un peu légère à ce stade ?

Elle a le mérite d’apporter une explication logique à cette série. Difficile de croire que, subitement, des gens perdent la tête et décident de s’en prendre à des chevaux ! Une partie des faits est peut-être l’œuvre d’un groupe ayant des croyances en sorcellerie. Vous savez, dans les mouvements sectaires, tout commence par une personne, qui en persuade d’autres. Il ne faut pas exclure des actes de mimétisme pour les autres faits.

Dans l’un des tout premiers cas suspects recensés en France, en décembre dernier, dans les Côtes-d’Armor (La Méaugon), un morceau de bois sculpté pouvant ressembler à une poupée vaudoue, avait été retrouvé près d’un poney mutilé. Quelle serait la signification de ces mutilations ?

Pour les adeptes de sorcellerie, le sang et certains organes peuvent être utilisés lors de rituels, pour des envoûtements par exemple. Ils peuvent aussi être des symboles de puissance et de sexualité.

Que savez-vous de ce monde de la sorcellerie ?

Il est extrêmement fermé et très secret. On a souvent en tête l’image du chamane ou du sorcier vaudou en tête, mais ses adeptes sont de tous milieux.

On peut porter le costume cravate et être adepte de sorcellerie… J’avais travaillé au début des années 2010 sur une longue série d’agressions et de mutilations de chevaux en Belgique et au Luxembourg. J’avais orienté les enquêtes dans cette direction. Mais, comme dans les centaines de cas survenus dans les années 1980-1990, en Allemagne ou au Royaume-Uni, ces affaires n’ont jamais été élucidées…

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30 août 2020

A Paris, un rassemblement « anti-masques » aux multiples revendications

anti masques

antimasques

Par Lucie Soullier

Entre 200 et 300 personnes se sont retrouvées place de la Nation samedi. Peu après 16 h 30, 123 personnes avaient été verbalisées pour non port du masque.

« Le masque, c’est la porte d’entrée vers la dictature mondiale. » Masque sous le menton, Christelle prêche des « anti » convaincus devant une affiche « Je suis libre et maître de moi-même » : « On utilise le masque comme symbole de la muselière, c’est un test de soumission du peuple. Depuis des mois, on voit que les politiques en profitent pour faire passer des lois liberticides. » La jeune femme est l’une des animatrices du groupe Facebook « Nous sommes la deuxième vague », qui a relayé l’appel au rassemblement des « anti-masques », samedi 29 août à Paris. Très loin de la marche ayant rassemblé des milliers de personnes à Berlin pour la deuxième fois en un mois, ce sont entre 200 et 300 personnes qui se sont retrouvées place de la Nation, brassant presque autant de revendications différentes.

Le tee-shirt de Christelle refusant la 5G et les vaccins « forcés » côtoie ainsi ceux de quelques « faucheurs volontaires » ; des masques Anonymous frôlent un fourre-tout complotiste dénonçant le milliardaire américain d’origine hongroise George Soros – cible habituelle des complotistes – et les « Big Pharma » ; des insultes envers les « collabos » cohabitent avec des méthodes plus tempérées, comme celle de cet homme s’arrêtant devant chaque policier pour tenter de le convaincre poliment que verbaliser ceux qui ne portent pas de masque serait « illégal ». « Merci de m’avoir écouté et bonne journée. » Peu après 16 h 30, 123 personnes avaient été verbalisées pour non-port du masque et une interpellée pour outrage et rébellion, selon la préfecture de police.

« Liberté, liberté »

Dans les rangs démasqués, les uns se font la bise en se rencontrant pour la première fois – « Tu m’as reconnue ? J’ai pas la même tête sur Facebook ! » – quand d’autres s’échangent des conseils militants. Tous se retrouvent aux mêmes cris de « liberté, liberté ».

« Mais enfin, porter un masque ne restreint pas votre liberté », s’étonnent deux jeunes curieux auprès d’une manifestante. Quant à la nasse policière qui se forme « c’est comme ça dans toutes les manifs », croient-ils savoir. « Vous êtes trop jeunes, mais ça ne finissait pas toujours comme ça, avant. »

Les discours se suivent à la tribune, commentés en direct depuis le parterre de la place de la Nation jusqu’aux réseaux sociaux. Un avocat pointant « le déficit de représentation populaire » se voit interrompu par plus revendicatif que lui : « On ne veut pas plus de représentation, on veut être souverains ! » Quant à la requête d’un « gilet jaune » venu demander « qu’on se fasse tous embarquer, on aura notre revanche ! », elle ne récoltera que quelques refus interloqués : « Ah non mais là, faut pas tout mélanger. »

Indifférent au micro hurlant à la « dictature sanitaire » à deux pas de lui, un jeune homme enlève son masque et déploie une banderole sur la tribune, laissant apparaître une citation de la philosophe Hannah Arendt, tellement actuelle qu’elle se retrouve brandie par tous les camps : « Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges mais que plus personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d’agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et avec un tel peuple, vous pouvez faire ce que vous voulez. »

Protestations des « anti-masques » à Berlin, Londres et Zurich. La journée a été marquée par une grosse manifestation à Berlin. Selon le ministre allemand de l’intérieur de la ville, Andreas Geisel, environ 200 manifestants ont été interpellés devant l’ambassade russe, après avoir lancé des pierres et bouteilles sur les policiers, et la plupart remis en liberté ensuite. Il n’y a pas eu de blessés. Au total, quelque 38 000 personnes selon les autorités ont participé en majorité dans le calme à un meeting au cours duquel les organisateurs ont appelé « à la fin de toutes les restrictions en place » pour combattre le nouveau coronavirus. Auparavant, la police avait interrompu un défilé, faute de respect des gestes barrières. A Londres, un millier de manifestants appelant à « la fin de la tyrannie médicale » se sont retrouvés sur le Trafalgar Square. A Zurich, ils étaient plus d’un millier selon la police à réclamer « un retour à la liberté ».

29 août 2020

Meulière des Dupont de Ligonnès, chalet des Flactif, château de Fourniret…

Des maisons, des crimes, et des déboires immobiliers

Par Isabelle Rey-Lefebvre

Les faits divers sanglants collent souvent aux murs des maisons dont ils ont percuté l’histoire. Ces décors de crimes célèbres peuvent devenir de lourds fardeaux pour leurs propriétaires.

Maison des Dupont de Ligonnès à Nantes, chalet de la famille Flactif au Grand-Bornand (Haute-Savoie), château de Michel Fourniret dans les Ardennes… Les faits divers sanglants ont souvent une adresse.

Appartement, maison, rue, village conservent, avant que le temps ait mis le traumatisme à distance, le souvenir des drames. Les demeures qui ont été le décor d’un crime peuvent devenir d’encombrants fardeaux dont les propriétaires subissent la célébrité malsaine, quand elles ne sont pas, en plus, otages d’une procédure judiciaire sans fin.

« Les maisons ont une âme, en général belle, que l’on met en valeur en conservant, par exemple, des éléments d’architecture, des ornements du passé, témoins de la vie qu’elles ont abritée », estime Chantal Lenoan, conseillère en immobilier à Nantes, installée à quelques rues de la maison où résidait la famille Dupont de Ligonnès – le père, Xavier, est soupçonné d’avoir froidement assassiné sa femme et ses quatre enfants, début avril 2011, avant de les ensevelir sous la terrasse. « Il est évident que cette adresse a un gros passif. Moi, je ne pourrais pas y vivre… », ajoute-t-elle.

« Devoir de transparence »

La maison nantaise, d’allure classique, en meulière, de 100 m2 sur jardin, dans un quartier sagement bourgeois avec écoles privées et près du centre-ville, a été louée par la famille Dupont de Ligonnès jusqu’au drame. Restée inhabitée durant quatre ans, elle a été cédée une première fois en 2015 par ses propriétaires, au prix de 260 000 euros, bien inférieur au prix du marché, plus proche de 450 000 euros.

Remise en vente début 2019 après une rénovation complète, elle n’a pas tout de suite trouvé preneur, provoquant des désistements en série. « Un jeune couple avec un enfant s’était positionné pour l’acheter mais, ne se voyant pas lui expliquer toute l’histoire, dont forcément il aurait entendu parler à l’école par ses petits copains, ce couple a renoncé », se souvient Nicolas Retiere, conseiller du réseau Safti Immobilier, installé à proximité.

Et d’ajouter, amer : « De notre côté, nous devons dévoiler l’histoire aux clients, envers qui nous avons un devoir de transparence, a fortiori s’ils nous posent la question. Mais, selon moi, les journalistes, en médiatisant indéfiniment les affaires, notamment celle-ci, en se plantant devant la maison pour la photographier, harceler les voisins, sont aussi responsables de la persistance de sa mauvaise réputation. »

Cette affaire, loin d’être close, puisque le principal suspect n’a pas été retrouvé, revient en effet souvent sous le feu de l’actualité, suscite des émissions de télévision ou, plus récemment, une enquête remarquée du magazine Society, objet de plusieurs tirages cet été.

La vente du logement occupé par les Dupont de Ligonnès, proposé à 479 000 euros, a finalement été conclue, en juin 2019, au prix de 413 350 euros, selon les données publiques. « Ce type de maison bourgeoise avec jardin, dans ce secteur de Nantes, part d’habitude beaucoup plus vite, en quelques jours, et pour plus cher. Ce bien est compliqué à vendre… », résume Thomas Le Masson, agent immobilier basé dans le quartier.

« Ce n’est pas notre histoire »

Diane Floch, 59 ans, habite depuis 2004 la maison de Prévessin-Moëns (Ain) où Jean-Claude Romand, faux médecin prétendant être employé par l’Organisation mondiale de la santé à Genève a, le 9 janvier 1993, tué sa femme et ses deux enfants – il a également assassiné ses parents, à environ 80 kilomètres de là, et tenté de tuer sa maîtresse, en région parisienne – puis déclenché un incendie.

« Cette ancienne fermette est dans ma famille depuis 1798, explique Mme Floch. Ma grand-mère y a vécu, mes arrière-grands-parents y tenaient un café à l’époque où Prévessin n’était qu’un petit village de 400 habitants. » Prévessin-Moëns en compte aujourd’hui 8 300 et est devenue une banlieue résidentielle de Genève, où se pressent travailleurs frontaliers et fonctionnaires internationaux – ce que prétendait être Jean-Claude Romand.

« C’est une population de passage, qui se renouvelle tous les trois ans et n’est guère attachée au pays de Gex, souligne Mme Floch, conseillère municipale très investie dans la vie de sa commune, dont elle connaît bien l’histoire. Je l’ai aussi habitée, cette maison, lorsque j’étais étudiante aux Beaux-Arts, avant que mon oncle la loue, brièvement et sans formalités, entre 1991 et 1993, à la famille Romand. Donc Romand, ce n’est pas notre histoire et j’en ai d’ailleurs ras-le-bol d’en entendre parler. »

Après le drame et l’incendie, le temps que la lente procédure s’achève par la condamnation de Jean-Claude Romand et sa mise en détention, en 1996, la maison est restée vide, mal bâchée, prenant l’eau. Diane Floch l’a rachetée en l’état à sa tante, en 1998.

« Nous avons, avec mon compagnon d’alors, réalisé les travaux à deux, triplé la surface en rendant les granges habitables. On a tout fait de nos mains, sauf le toit et l’électricité, et nous avons pu emménager en 2004, avec nos quatre enfants. Moi, je la défends cette maison, on s’y sent bien, je la trouve joyeuse. On a un grand jardin, dont 800 m2 accueillent un potager collectif ouvert aux gens du village », raconte-t-elle.

« ON EST ENQUIQUINÉ PAR DES JOURNALISTES OU PAR DES FOUFOUS QUI VEULENT BRÛLER LA MAISON, DES TOURISTES QUI VEULENT LA VISITER », S’AGACE MME FLOCH.

La sortie de prison, en juin 2019, de M. Romand a – tout comme le récit L’Adversaire d’Emmanuel Carrère paru en janvier 2000, aux éditions P.O.L, puis l’adaptation cinématographique de Nicole Garcia, sortie en 2002 – remis ce fait divers dans l’actualité et ravivé la curiosité. « A chaque fois, on est enquiquiné par des journalistes ou par des foufous qui veulent brûler la maison, des touristes qui veulent la visiter, voir si le cerisier qu’ils ont vu dans le film L’Adversaire est toujours là… Quand ce n’est pas un présentateur télé qui veut envoyer un médium ! », s’agace Mme Floch.

Les désagréments ne s’arrêtent pas là : « Les enfants aussi ont été questionnés par leurs copains d’école, certains ne voulaient pas venir dans cette “maison pleine de fantômes”… Moi, les fantômes, je les sens bienveillants, je vis en bonne intelligence avec eux. Dans toutes les maisons anciennes, forcément, il y a eu des morts ! »

Pour rassurer son entourage, Mme Floch a, pratique habituelle dans le pays, fait appel lors de son emménagement à un « guérisseur du Jura, un coupeur de feu qui a nettoyé la maison à la sauge et l’a déclarée saine », se rappelle-t-elle.

Déprécié de 25 %

A une heure et demie de route de là, dans les montagnes des Aravis, d’autres fantômes rodent. « Cet établissement n’est généralement pas disponible. Vous avez de la chance ! », indique le site de réservation touristique en ligne Booking.com, en réponse à une requête pour louer, à la dernière minute du 15 au 22 août, le chalet Les Laurencières, au Grand-Bornand (Haute-Savoie)

Tout de bois clair, luxueusement aménagé pour accueillir, dans ses 230 m2 et ses sept chambres, jusqu’à dix-huit personnes à la fois, avec sa grande terrasse et les vues sur la chaîne de montagnes des Aravis, la maison a vu le massacre, en avril 2003, de la famille Flactif, les parents et leurs trois jeunes enfants, par des voisins jaloux, rapidement identifiés et condamnés.

L’enquête close, les parents et héritiers de Xavier Flactif, promoteur qui avait fait construire ce chalet, l’ont récupéré et mis aux enchères, le 11 juin 2009. Expertisé 825 000 euros en 2006, puis déprécié de 25 % pour « faits criminels », il a été emporté à 315 000 euros par un couple de retraités belges.

« Nous prévenons bien sûr les locataires de ce qui s’est passé ici, mais ce beau chalet, qui a fait l’objet d’une rénovation complète, se loue très bien, 2 500 euros la semaine en été, 5 000 euros en hiver, plutôt à une clientèle internationale », rassure David Gidet, d’Aravis Holidays Immobilier, agence spécialiste des grands chalets, chargée de la gestion de celui des Laurencières.

Est-ce cependant une bonne affaire ? A consulter les plates-formes de réservation, Airbnb, Expedia, Abritel et le site d’Aravis Holidays, le gîte, bien que loué depuis 2011, suscite peu de commentaires de vacanciers, voire quelques réflexions dissuasives de personnes qui n’y ont pas séjourné : « Même gratuitement, on ne dort pas dans le chalet où une famille a été massacrée », lance une internaute.

« Les crimes, surtout de sang, suscitent dans un premier temps une émotion collective, des attroupements, une fascination liée à la violence, notamment s’ils se sont déroulés dans une maison, lieu d’intimité et de sécurité », observe Dominique Kalifa, historien. Cet auteur de nombreux ouvrages, dont Atlas du crime à Paris. Du Moyen Age à nos jours (avec Jean-Claude Farcy, Parigramme, 2015), voit cela comme un rite nécessaire : « Depuis le XIXe siècle et le développement de la presse grand public, les journaux parlent de “drame”, de “scandale”, retraçant en détail le parcours de l’assassin, croquis, dessins puis photos à l’appui. Cette médiatisation est nécessaire pour que le crime existe, et l’émotion peut durer longtemps, marquer les lieux comme lorsque Balzac, dans [son roman] Ferragus, désigne des “rues assassines”. »

« Un aléa de la vie »

Pour arriver au château du Sautou, il faut, depuis Donchery (Ardennes), parcourir des kilomètres de forêt avant de s’engager dans une longue allée privée de plus de 600 mètres. La bâtisse, flanquée de deux tourelles, a été érigée en 1871 par le maire et député radical-socialiste de Charleville-Mézières, Georges Corneau, qui en fit un rendez-vous de chasse au milieu de quinze hectares de forêt. C’est une des demeures du tueur en série Michel Fourniret, isolée à souhait pour y enterrer des victimes – au moins deux y ont été identifiées.

Voir débarquer une armada de gendarmes et d’experts venus, sur réquisition judiciaire, retourner le parc et la forêt alentour ne doit pas être un moment très joyeux pour les propriétaires », admet Didier Seban, avocat de plusieurs victimes du tueur. Il est, notamment, le conseil des parents de la jeune Estelle Mouzin, disparue depuis le 9 janvier 2003. Monique Olivier, l’ex-femme de Michel Fourniret, vient récemment de le désigner devant la justice comme le tueur.

Fourniret avait acheté la propriété en 1989 pour 1,2 million de francs (soit environ 292 000 euros, en tenant compte de l’inflation), payés en liquide avec une partie du trésor du « gang des postiches », dont il avait découvert la cachette grâce à la confidence d’un codétenu. Il l’a occupée peu de temps, redoutant, non pas la police qui n’était pas encore à ses trousses, mais les représailles des membres de ce gang. Elle fut revendue, dès 1991, à un couple d’Ardennais qui en a fait un gîte de luxe.

En 2003, le château est à nouveau cédé, pour 500 000 euros, à la société civile immobilière familiale d’un couple de pharmaciens belges habitant tout près, de l’autre côté de la frontière, près de Namur. A cette époque, nul ne se doute du parcours criminel de Fourniret ni n’imagine que ce coin de forêt des Ardennes recèle tant de secrets. « C’est un aléa de la vie qui nous est tombé dessus », confie, philosophe, la pharmacienne belge, qui ne veut pas en dire plus. Même discrétion à la mairie de Donchery et chez les agents immobiliers du cru.

Imbroglio juridique

Nul crime de sang, en revanche, au château Martel, près du joli village classé de Monflanquin (Lot-et-Garonne), mais un fait divers glaçant qui a marqué la mémoire collective. Un huis clos infernal où onze personnes d’une même grande famille de l’aristocratie bordelaise, les de Védrines, ont été, entre juin 2001 et octobre 2009, soumis, dans cette demeure puis dans une autre propriété familiale à Oxford (Angleterre), à l’emprise d’un gourou, Thierry Tilly. Ce dernier les a manipulés et spoliés, leur faisant vendre tous leurs biens pour un total estimé de 4,5 millions d’euros, dont ce château de 1 000 m2 et son parc d’agrément de 1,7 hectare.

Le tourmenteur a été condamné, le 4 juin 2013, à dix ans de prison ferme par la cour d’appel de Bordeaux et les de Védrines, rétablis, ont voulu racheter le château Martel, « berceau de la famille depuis 1732, précise leur avocat, Daniel Picotin. Le récupérer est donc une affaire d’honneur plus que d’argent ».

Mais la bâtisse est depuis dix ans au cœur d’un imbroglio juridique toujours pas dénoué. Estimée à 850 000 euros, elle a été vendue une première fois, en janvier 2008, au prix décoté de 460 000 euros, du fait de son occupation passée par la famille, à la SCI YIFE de Soufiane Besbes, sur ordre du gourou et selon « un montage juridique particulièrement déséquilibré, à la défaveur des consorts de Védrines », précisent les magistrats de la cour d’appel d’Agen dans leur arrêt du 17 décembre 2015, qui annule cette vente.

Mais entre-temps, le 20 juin 2009, le château a été cédé une seconde fois, pour 540 000 euros, à une jeune femme venue du Calvados et souhaitant s’installer à Monflanquin avec conjoint et enfant. Or, dans le même arrêt, la cour d’appel d’Agen non seulement n’annule pas cette seconde vente, mais la conforte, considérant la nouvelle propriétaire « de bonne foi », exonérant au passage de toute faute professionnelle le notaire des deux ventes, Me Jean-Jacques Boué.

Les de Védrines se sont donc pourvus en cassation. La décision est attendue en septembre. « Ma cliente, la propriétaire et occupante actuelle, regrette évidemment cet achat, explique son avocat, Basile Mery-Larroche, car elle est, depuis plus de dix ans, non seulement importunée par des journalistes, des touristes, des curieux, mais surtout bloquée dans ses projets, ne pouvant ni se lancer dans des travaux, ni revendre en raison de la procédure même, signalée aux hypothèques et qui risque de remettre en cause son statut de propriétaire. »

27 août 2020

Les couleurs du sexe : le vert, au risque du greenwashing

Par Maïa Mazaurette

Cet été, la chroniqueuse et illustratrice de « La Matinale » Maïa Mazaurette sort chaque dimanche son nuancier pour raconter la sexualité et prodiguer ses conseils. Aujourd’hui, le vert et les sextoys écoresponsables ou les applications de rencontres dédiées aux végans.

LE SEXE SELON MAÏA

Notre série d’été touche à sa fin : avec ce dernier épisode, nous entrons dans le domaine des couleurs délaissées par le monde de la sexualité – et en particulier le vert, surpolitisé, évocateur de plaisirs champêtres, du végétal (en opposition à l’animal), mais aussi de la maladie et de la putréfaction (moyennement sexy).

Ce désamour se repère à vue d’œil : en 2014, quand le journaliste Jon Millward (spécialiste en analyse de données) s’amusait à classer par couleurs tous les godemichés, vibromasseurs et plugs de la plate-forme LoveHoney, trois teintes brillaient par leur absence : le jaune, l’orange et le vert. Six ans plus tard, le nuancier reste tout aussi conservateur : sur Amazon, on trouve 58 résultats pour la recherche « sextoy jaune », 127 pour « sextoy orange », 137 pour « sextoy vert »… mais 376 résultats pour des jouets sexuels roses, et plus de 1 000 pour des jouets sexuels noirs !

Attention, cependant, car si le vert semble abandonné, c’est pour mieux se concentrer sur une niche en expansion : l’écolo-bio-équitable. Commençons donc par les sextoys, qui ont entamé il y a quinze ans une solide cure de greenwashing (pardon, d’écoblanchiment). Si les bonnes pratiques sont aujourd’hui largement répandues (la plupart des marques sérieuses ne risqueraient pas un potentiel bad buzz), ça n’a pas toujours été le cas.

Recycler les sextoys

Concrètement, le minimum exigé consiste à proposer des sextoys rechargeables et sans phtalates. Rechargeables pour ne pas laisser traîner des piles partout (les vibrateurs à mini-panneau solaire intégré existent), et sans perturbateurs endocriniens comme les phtalates ou le bisphénol A, aux conséquences néfastes sur la testostérone et la fertilité masculine.

Vous cherchez une solution écoresponsable pour votre prochain achat ? Il y a trois possibilités. Tout d’abord les sextoys en bois (Dee Lee Doo, Teatiamo, Idée du désir), en verre (Icicles) ou en métal (Njoy). Ensuite les sextoys 100 % silicone : ils demeurent non biodégradables, mais au moins la composititon n’est dangereuse ni pour la santé ni pour l’environnement. Vous trouverez de quoi vous amuser chez des marques spécialisées comme Leaf Vibes, Praline & Priape ou Point-Q, mais aussi chez les poids lourds européens que sont Lelo et Fun Factory. Faites particulièrement attention aux sextoys bon marché : quand un produit est beaucoup moins cher que les autres, il y a une raison.

Enfin, vous pouvez recycler ! La marque Passage du désir a lancé cette année un programme spécifique : si vous leur renvoyez vos sextoys, vous recevrez 10 euros de bon d’achat, et 1 euro sera reversé à l’association Coeur de forêt. Si cette option vous semble trop chronophage, n’oubliez pas que les sextoys font d’excellents cale-portes, et de très bons jouets pour vos animaux domestiques (je plaisante).

Laissons maintenant les sextoys de côté, car c’est du côté des produits périssables que le souci écologique prend son envol. Si les Etats-Unis ont commercialisé leur premier lubrifiant bio en 2004, la France suit le mouvement avec des marques comme Divinextases, Goliate, My Lubie, Baûbo, qui proposent des lubrifiants, crèmes et huiles méticuleusement composées. Selon les produits, vous trouverez des emballages recyclables, des formules sans paraben, colorants, parfums, alcools, etc. Pensez aussi au Green Condom Club pour les préservatifs.

Les œufs en jade de Gwyneth Paltrow

Ce marché de la consommation sexoresponsable est essentiellement dirigé vers un public féminin : les femmes ont en effet tendance à faire plus attention à l’environnement que les hommes, au point qu’on parle d’un eco-gender gap – un fossé des genres en termes de conscience écologique. La même inflexion green s’observe et se prolonge dans le monde des cosmétiques en général, mais aussi des produits intimes comme les cups menstruelles et les protections périodiques lavables.

Bien sûr, la tendance peut aussi prendre des formes extrêmes : on s’était amusé en 2017 quand Gwyneth Paltrow avait lancé ses œufs vaginaux en jade qui coûtaient un bras (et qui sont toujours en vente pour 66 dollars l’unité), mais il existe de nombreuses marques proposant des godemichés en cristal ou pierres semi-précieuses, destinés à ouvrir vos chakras (et pas que). Chez Chakrubs, vous pouvez ainsi acquérir un dildo en quartz rose pour la modique somme de 160 dollars. Entre autres promesses, cette pierre permet apparemment de « guérir les blessures d’enfance et de reprogrammer son cœur pour l’amour » (quel programme !).

Tout cela vous semble trop bon enfant ? Très bien, passons à la pornographie, grosse consommatrice de stockage de données, donc grosse émettrice d’empreinte carbone (82 millions de tonnes de gaz à effet de serre en 2018, selon un rapport du think tank The Shift Project en 2019). De ce côté-là, c’est simple, non seulement rien ne bouge, mais la situation a tendance à s’aggraver à mesure que les audiences s’envolent.

Même les militants jettent l’éponge ! L’association norvégienne Fuck for Forest, fondée en 2003 et dévolue à l’éco-porn, a mis la clé sous la porte en 2016. La cultissime performeuse féministe Annie Sprinkle, qui se définit comme écosexuelle, semble sur Twitter avoir diversifié ses activités (par curiosité, vous pouvez toujours parcourir son site SexEcology ou lire son Ecosex Manifesto).

GreenLovers, Tendrils... Des sites de rencontres pour végans

Pour les écolos convertis, mieux vaut donc renoncer au porno pour se tourner du côté des applis de rencontres dédiées : Veggly, Vegandr ou Tendrils pour les végans (les plaisirs de la chair peuvent bien se passer de la chair animale), GreenLovers, Amours Bio ou Ecolo Rencontre pour les autres (sachant que l’offre est pléthorique). On remplacera alors le premier rendez-vous au zoo par un verre de vin biodynamique ou un atelier compost. Avant d’organiser, en temps voulu, un mariage bio (comme le propose Marc Dannam dans Osez… le sexe écolo, réédité l’an dernier aux éditions La Musardine).

Pas glamour ? Le monde de l’érotisme entretient en effet un rapport contrarié à l’écologie. Côté face, le sexe est présenté comme absolument naturel – un loisir gratuit, échappant aux flux capitalistiques mondiaux, donc résolument vert. Côté pile, notre liberté de parole repose essentiellement sur les géants d’Internet et leurs data centers, l’indépendance des femmes serait compliquée sans les supports chimiques nécessaires à la contraception… et nous sommes bien contents quand le commerce global nous donne accès aux préservatifs et au lubrifiant.

Faut-il abandonner tout espoir de concilier planète et galipettes ? Certainement pas. Déjà parce que, comme le montre l’exemple des sextoys, nous pouvons faire bouger les lignes. Ensuite parce que la créativité humaine ne connaît aucune limite : nous pourrions par exemple profiter de l’occasion pour mettre au goût du jour la dendrophilie, soit l’attraction pour le sexe avec les arbres. Bien sûr, ce n’est pas précisément la paraphilie la plus répandue au monde… mais pour sauver la Terre, pourquoi ne pas, effectivement, tenter le sexe vraiment nature ?

26 août 2020

Environnement - L’eau en bouteille, un scandale écologique et social

eau en bouteille

COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

L’eau en bouteille est un marché juteux. Mais l’exploitation commerciale de cette précieuse ressource commence à susciter des protestations. Ainsi, aux États-Unis, les impacts environnementaux de la mise en bouteille d’eau par Nestlé font l’objet d’une enquête lancée par la Chambre des représentants, en mars dernier.

Mars 2020. Alors que l’épidémie de coronavirus se répand aux États-Unis, les ventes d’eau en bouteille augmentent de 57 % par rapport à l’année précédente, rapporte le Guardian. Même si la période a accentué le phénomène, celui-ci est en fait le reflet d’une tendance plus profonde : le marché mondial de l’eau en bouteille a connu un développement rapide ces dernières décennies.

Ce qui profite à une myriade de compagnies privées, mais surtout à quatre sociétés qui dominent le secteur, selon l’International Bottled Water Association : la suisse Nestlé et la française Danone, et les américaines Coca-Cola et PepsiCo.

Un prix 133 fois plus élevé que le coût d’achat

Aux États-Unis, “le modèle économique est extrêmement rentable”, souligne le quotidien britannique, qui a consacré une série d’articles à “La crise de l’eau en Amérique”. La plupart des bouteilles d’eau qui y sont vendues proviennent des mêmes sources que l’eau du robinet. Or, “le coût d’achat de l’eau municipale est extrêmement bas et, une fois mise en bouteille, le prix peut être 133 fois plus élevé”, indique le Guardian.

Coca-Cola fabrique ainsi Dasani, sa marque d’eau en bouteille, dans son usine de Détroit en achetant, traitant et conditionnant de l’eau municipale avant de la vendre aux consommateurs avec une marge significative. Et Pepsi produit Aquafina à Detroit de la même manière.

Beaucoup de plastique

L’eau en bouteille est principalement conditionnée dans des bouteilles en plastique, souvent emballées à leur tour dans des films de plastique souple. La fabrication, le recyclage ou la dispersion de ces emballages dans la nature contribuent à la pollution de l’environnement, de même que le transport des bouteilles jusqu’à leurs points de vente.

Mais, surtout, les sociétés qui vendent cette eau exploitent des ressources naturelles, ce qui menace parfois leur pérennité. C’est ce qui se passe en Floride. Selon le Florida Springs Institute, de 1950 à 2010, les débits moyens des sources en Floride ont diminué de 32 %, alors que l’exploitation des eaux souterraines a augmenté de 400 %. Selon le même organisme, les prélèvements d’eau souterraine devraient être “réduits de 50 % ou plus dans le nord de la Floride pour ramener le débit moyen des sources à 95 % de leur niveau antérieur”.

En Floride, Nestlé pompe la nappe phréatique

Dans une tribune publiée en septembre 2019, le New York Times pointait du doigt le rôle joué par Nestlé, détenteur de 48 marques d’eau minérale (dont Pure Life, Poland Spring et Ice Mountain). Alors que certains de ses concurrents achètent l’eau de sources municipales, le groupe puise directement dans la nappe phréatique.

À Ginnie Springs, en Floride, près de la rivière Santa Fe, Nestlé jouit d’une autorisation d’extraction qui “permet au groupe d’extraire jusqu’à 3,78 millions de litres par jour, en n’ayant à payer que 115 dollars de frais administratifs”.

Des citoyens mobilisés

La multinationale se heurte toutefois à l’opposition de plus en plus fréquente de groupes de citoyens. Le quotidien new-yorkais cite les cas de San Bernardino, en Californie, où Nestlé extrait de l’eau dans une forêt touchée par une sécheresse importante, et d’Osceola County, dans le Michigan, où l’autorisation accordée à Nestlé de pomper à un rythme de 1 500 litres par minute est contestée devant la justice.

Dans cet État du nord-est du pays, “les habitants de Flint [ville touchée par une contamination au plomb du réseau d’eau potable en 2014] ont remarqué que quand Nestlé ne paie presque rien pour l’eau, ils sont eux-mêmes contraints d’acheter de l’eau en bouteille”. En mars 2020, la Chambre des représentants des États-Unis a par ailleurs lancé une enquête sur les impacts environnementaux de la mise en bouteille de l’eau par l’entreprise.

Le 11 juin dernier, la société suisse a finalement annoncé dans un communiqué de presse qu’elle envisageait de vendre ses activités dans les eaux nord-américaines, pour se concentrer sur des produits à plus forte rentabilité (eaux enrichies et marques internationales). Elle a également déclaré s’engager à rendre son portefeuille mondial de l’eau neutre en carbone, à réduire de moitié son utilisation de plastique vierge et à reconstituer les bassins versants d’ici à 2025. Une première victoire pour les communautés locales. Et un premier pas vers la reconnaissance de l’eau comme bien commun ?

25 août 2020

« Je crois que de Ligonnès a refait sa vie ailleurs »

Article de Jacques Chanteau

Auteure d’un livre consacré à l’affaire Dupont de Ligonnès, Anne-Sophie Martin revient sur les révélations des deux numéros de Society portant sur cet incroyable fait divers.

Les deux numéros de Society se sont écoulés à 300 000 exemplaires, contre 47 000 en moyenne habituellement. Pourquoi l’affaire de Ligonnès suscite-t-elle toujours un tel engouement ?C’est une histoire dont on ne connaît pas la fin. Il y a aussi cette famille dorée bon chic bon genre, où tout d’un coup survient l’horreur.

Cela devient fascinant, car les faits divers ne se produisent pas dans ce genre de famille, mais plutôt dans les milieux socialement difficiles.Les deux meilleurs amis de Xavier Dupont de Ligonnès, Michel Rétif et Emmanuel Teneur (lire par ailleurs), ont-ils joué un rôle dans la fuite du tueur  ?

Bien sûr que non. J’ai passé de nombreuses heures avec Michel Rétif, qui était atterré et démonté par ce crime. Quant à Emmanuel Teneur, il m’avait confié : « Je préfère que Xavier se soit suicidé, sinon j’aurais eu envie de le tuer ».

La moitié des policiers, qui ont travaillé sur le dossier, estiment que Xavier Dupont de Ligonnès est mort, tandis que l’autre moitié pense qu’il est encore en vie. Quel est votre sentiment ?

J’ai souvent dit qu’il n’y a pas que la moitié des policiers qui croient qu’il n’est pas mort mais la moitié de tous les gens concernés par le dossier : les magistrats, les avocats, les amis, la famille…

J’ai rencontré plusieurs fois la mère de Xavier Dupont de Ligonnès qui ne pouvait pas croire une seconde à son suicide. Personne de son entourage le plus proche ne pense qu’il a mis fin à ses jours. Même son meilleur ami, Michel Rétif, était sûr qu’il était vivant.

À la fin de leur dossier, les journalistes annoncent que « des enquêteurs vont bientôt mener une opération inédite dans cette affaire et qu’un voyage à l’étranger est prévu ». Savez-vous dans quel pays ?

Non. Je ne vois pas bien d’ailleurs le sens que ça a de laisser ouverte l’enquête puisqu’ils ne trouvent rien et qu’il n’y a pas plus de pistes.

Et continuez-vous à croire qu’il est toujours en vie et peut-être en Argentine, comme vous l’aviez évoqué dans nos colonnes, en septembre 2016 ?

Oui, je crois qu’il est toujours vivant et qu’il a refait sa vie ailleurs. Il a pu se faire une petite cagnotte de quelques milliers d’euros et s’installer quelque part. Il ne se serait pas donné autant de mal s’il avait été dans un état suicidaire. Je crois sa sœur aînée quand elle dit que son frère souhaitait qu’on ne connaisse jamais la vérité et que l’on ne puisse jamais mettre le mot fin, car il ne voulait pas salir le nom de famille.

J’avais cité l’Argentine car je cherchais un endroit où un être intelligent pouvait chercher à se planquer.

Mais aujourd’hui, les spécialistes des services secrets affirment que c’est désormais en Algérie qu’il est plus facile de disparaître. Je pense qu’il n’est pas aux États-Unis car son visage est trop connu. En Europe, il fait l’objet d’un mandat Interpol. Et je ne crois pas qu’il ait fait appel à de la chirurgie esthétique pour changer de visage, car ce n’est pas le genre de personnage à le faire.

Le retrouvera-t-on un jour ?

Je l’espère mais ce n’est pas très bien parti. Je pense qu’ils ont sous-estimé l’adversaire.

« Le Disparu », d’Anne-Sophie Martin (Ring Éditions), sorti en 2016.

xavier dupony

« Ce que vous n’avez jamais lu », promet Society

1 Ses deux meilleurs amis

Emmanuel Teneur et Michel Rétif étaient les deux meilleurs amis de Dupont de Ligonnès. Le premier était amoureux du tueur présumé, mais aurait été éconduit. Les deux hommes s’étaient rencontrés sur l’île de Bréhat (22). Le second aurait participé à « des parties à trois », en compagnie de Xavier de Ligonnès et d‘Agnès, la femme du tueur présumé. Des scènes que ce dernier filmait. Après la disparition du fugitif, Michel Rétif, se suicide, le 2 mars 2018, et Emmanuel Teneur décède d’une crise cardiaque, le 18 janvier 2020.

2 L’église de Philadelphie

Fondée par Geneviève Dupont de Ligonnès, la mère du fugitif, l’Église de Philadelphie a, selon les écrits d’un prêtre repris dans la revue, « toutes les caractéristiques d’un petit groupe sectaire manipulé par une personne malade ». La fille de la fondatrice, Christine, aurait été désignée pour porter dans son ventre le « Sauveur » afin que ses disciples soient protégées « de l’apocalypse ». En 1995, dans un château d’Illifaut (22), Christine, âgée de 29 ans, se serait offerte à tous les hommes présents afin que naisse « Le Sauveur ». Au mois de janvier 2020, le parquet de Versailles a ouvert une enquête pour abus de faiblesse, visant l’Eglise de Philadelphie, dirigée désormais par Christine.

3 Le monastère

Selon le magazine, « les enquêteurs ont toujours cru à la possibilité que Ligonnès se soit réfugié dans un monastère du Var. Ils ont envisagé de les fouiller un par un avant de comprendre qu’il existe des dizaines de confréries et de fraternités. Le juge d’instruction a vite décrété l’opération impossible ».

4 Une « opération inédite » à l’étranger ?

Selon les journalistes de Society, les policiers vont bientôt mener une opération inédite dans cette affaire : « un voyage à l’étranger ».

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