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Jours tranquilles à Paris
agnes varda
25 février 2018

A San Francisco, JR au royaume des sans-abri et du street art

oscar

Par Corine Lesnes, San Francisco, correspondante - Le Monde

L’artiste français est en lice, avec Agnès Varda, pour l’Oscar du meilleur documentaire qui sera décerné le 4 mars. Il termine dans la ville californienne une fresque murale à laquelle 1 000 habitants ont participé.

LETTRE DE SAN FRANCISCO

La star du moment en Californie est le « street artist » français connu sous le surnom de « JR ». Ses gigantesques photos en noir et blanc, découpées dans des morceaux de carton, sont partout. Comme le chapeau et les Ray-Ban dont il ne se sépare jamais : une garantie, dit-il, de son anonymat. Quand il passe les frontières et filme sans autorisation, on ne le reconnaît pas. « Je ne travaille pas que dans des démocraties », insiste-t-il.

JR vient de passer un mois à San Francisco. Il y a photographié les habitants pour son projet de fresque multimédia géante – quarante mètres de long sur six mètres de haut – qui sera exposée en 2019 au SFMoMA, le Musée d’art moderne de la ville. C’est son premier « mural » depuis celui de la cité des Bosquets à Montfermeil (Seine-Saint-Denis), qui l’a fait passer du rang d’auteur de graffitis à celui d’artiste-activiste exposé dans les musées.

Pourquoi San Francisco ? Parce que la ville recèle à la fois « une immense richesse » et un nombre insupportable de sans-abri. C’est aussi la capitale américaine des « murals ». Diego Rivera y a travaillé en 1931 et en 1940 ; le peintre mexicain a laissé trois fresques, dont la légendaire Pan American Unity – et nombre d’émules du côté de Mission Street.

JR n’est pas passé inaperçu dans la Baie. Le 8 février, l’artiste était invité chez Salesforce, le géant du logiciel d’entreprise, pour une rencontre avec le premier ministre canadien, Justin Trudeau, en visite en Californie. Il a réussi à lui glisser dans les bras l’Agnès Varda de carton qui l’accompagne partout depuis que le documentaire qu’ils ont tourné ensemble, Visages, Villages, primé à Cannes en 2017, est en lice pour l’Oscar. Le trophée sera décerné le 4 mars à Hollywood. D’ici là, JR aura commencé à afficher à New York les visages géants de réfugiés syriens saisis dans le camp de Zaatari, en Jordanie. « Si proches » (« So close ») : c’est le nom qu’il a donné à l’exposition qui ouvrira à l’Armory Show.

« Rapprocher les gens »

Le Français a touché le cœur de la Californie lorsqu’il a suspendu l’effigie d’un enfant d’un an au-dessus de la frontière mexicaine, en septembre 2017. « Kikito » (c’est le nom du bambin, dont la famille vit dans le voisinage) est perché sur un échafaudage de 20 mètres de haut et regarde au-dessus du mur, curieux de savoir ce qu’il y a de l’autre côté. Par coïncidence, Donald Trump venait juste d’annoncer qu’il mettait fin au programme DACA protégeant les jeunes « Dreamers » amenés clandestinement aux Etats-Unis par leurs parents.

L’image de l’enfant a attendri le monde entier. Des centaines de visiteurs ont afflué des deux côtés de la frontière. La police a laissé faire. « Les images sont des prétextes pour rapprocher les gens », revendique l’artiste.

Ce 11 février, JR stationne une dernière fois dans les rues de San Francisco avec son camion-studio photo. Il est à Bayview, un ancien quartier noir en voie de gentrification. Pas de casting, tout est laissé au hasard des rencontres.

Voilà Iheem Antone, 17 ans, un acrobate du vélo. JR et lui se sont compris tout de suite. Le jeune Américain passe et repasse sur son vélo jaune, une roue en l’air, un pied sur la selle. JR filme avec son iPhone. Le clip sera aussitôt sur Instagram, où l’artiste compte 1,1 million d’abonnés. Le street art n’a pas de frontières.

« Vous faites un truc bizarre, et vous trouvez des gens qui font la même chose à l’autre bout du monde, s’amuse-t-il. On a l’impression de faire partie de la même famille. »

« Une fresque, c’est le miroir d’une ville »

Dans son camion, JR a installé un studio, avec un panneau tendu sur un fond vert sur lequel les gens posent dans la tenue de leur choix. Les volontaires enregistrent d’abord une brève déclaration. Nom, âge, présentation. Jeanice Smith, 57 ans, chaussures vermillon à talons, ne savait pas quoi dire. Elle sortait de la messe, elle a chanté Amazing Grace. Le suivant est un PDG, Joe Gebbia, le cofondateur d’Airbnb, qui est venu avec son chien Bélo.

« CE N’EST PAS UNE PHOTO DE GROUPE. C’EST UN GROUPE DE PHOTOS. CHACUN A UNE PLACE. PERSONNE N’A PLUS DE PLACE QU’UN AUTRE »

JR

Les photos sont immédiatement imprimées en miniature et découpées. JR les place sur un panneau où il compose la fresque. Il déroule une histoire, un scénario comme si les inconnus du monde étaient reliés les uns aux autres sans s’en douter.

En tout, plus de mille habitants de San Francisco ont fait la queue pour figurer sur le « mural ». L’équipe avait compté sur 700 participants. Plutôt que de refouler des candidats, elle a décidé d’agrandir l’œuvre. « Une fresque, c’est le miroir d’une ville », explique JR. En noir et blanc, les inégalités sont estompées. « Ce n’est pas une photo de groupe. C’est un groupe de photos. Chacun a une place. Personne n’a plus de place qu’un autre », insiste-t-il.

JR dit qu’il n’a jamais vu autant de sans-abri qu’à San Francisco. Il s’est mis à les photographier, en marge de son « mural ». Aussitôt imprimées, les photos géantes de homeless étendus sont collées sur le toit du semi-remorque. Filmées par un drone, les images sont postées sur les réseaux sociaux. On y voit des sans-abri qui flottent dans la ville, endormis au milieu des véhicules en mouvement. Dans le monde de JR, tout fait art, et sens, même le toit d’un camion.

 

 




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21 février 2018

Agnes Varda et JR

agnes

24 janvier 2018

Agnès Varda et JR

15 janvier 2018

Agnes Varda et JR

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12 janvier 2018

Agnès Varda et JR

jr et

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19 novembre 2017

Agnes Varda

 

Agnes Varda / Venice #selfportrait



1,236 Likes, 14 Comments - michelgaubert™ (@michelgaubert) on Instagram: "Agnes Varda / Venice #selfportrait"

 

15 novembre 2017

Agnès Varda reçoit un Oscar d’honneur pour l’ensemble de sa carrière

agnes varda

Photographe, cinéaste, puis plasticienne, la Française de 89 ans a réalisé, en juin, un documentaire avec le photographe street-artiste JR. La réalisatrice Agnès Varda a reçu, samedi 11 novembre, un Oscar d’honneur, la plus grande récompense du cinéma américain, à l’occasion de la cérémonie des Governors Awards, à Hollywood. Cette distinction qui salue l’ensemble de sa carrière – Cléo de 5 à 7, L’une chante, l’autre pas ou encore Les Glaneurs et la Glaneuse – lui a été remise par l’actrice américaine Angelina Jolie.

Ces dernières années, l’Académie du cinéma a souvent utilisé ces prix pour honorer les cinéastes qui n’avaient pas obtenu la précieuse statuette. « Je suis un gadget cinématographique pour Hollywood, qu’est-ce que vous voulez, je ne suis pas “bankable” », a plaisanté Mme Varda en marge de la réception organisée en son honneur, dimanche à la Résidence de France à Los Angeles.

« Je n’ai jamais cherché à travers mes films à faire de grosses audiences. Ce qui me plaît c’est de réfléchir à de nouvelles façons de communiquer, de surprendre, d’émouvoir. Mes films n’ont pas généré d’argent, mais des souvenirs. Ils ne sont pas oubliés. »

« Je suis très émue, malgré le fait qu’il s’agisse d’un prix pour l’ensemble de ma carrière [Lifetime achievement] comme si celle-ci était terminée, Je n’ai pas perdu mon envie, ni ma curiosité », poursuit-elle.

« Une petite Française déterminée »

Dans une interview au Monde, à la question si cette « récompense est un acte féministe », la réalisatrice connue pour ses engagements répond :

« Non, c’est une affai­re de ciné­ma. Mais avec beaucoup de femmes en jeu. Lena Dunham [réalisatrice de la série Girls] m’invitera à entrer en scène et Angelina Jolie me remettra la statue. Et, dans le débat qui décide de ces Oscars, c’est Laura Dern [actrice dans Blue Velvet], dit-on, qui m’a proposée. »

Durant sa carrière, Mme Varda, 89 ans, a été photographe, cinéaste, puis plasticienne. Elle essaye désormais d’orchestrer la restauration de ses œuvres et celles du cinéaste Jacques Demy, mort en 1990, dont elle a partagé la vie.

En juin, elle a réalisé un documentaire avec le photographe street-artiste JR intitulé Visages Villages qui a reçu l’Œil d’or du meilleur documentaire du Festival de Cannes.

Ce dimanche, son Oscar d’honneur posé à côté de sa tasse de thé, la cinéaste a rappelé son ambition de créer des œuvres qui ont du sens. « Je n’ai jamais souffert d’être dans la marge, au contraire. Je veux marquer les esprits différemment, aider à donner une indépendance d’esprit. » Et de conclure : « Je veux qu’on se souvienne de moi comme une petite Française déterminée. »

11 novembre 2017

Entretien - Agnès Varda : « L’humiliation est toujours du côté des femmes »

Par Laurent Carpentier - Le Monde

La réalisatrice, étudiée dans les écoles de cinéma américaines, reçoit, ce 11 novembre à Los Angeles, un Oscar d’honneur.

D’Agnès Varda, on connaît la réalisatrice féministe (Cléo de 5 à 7, L’une chante, l’autre pas, Sans toit ni loi), qui filme au plus près des gens ordinaires (Les Glaneurs et la glaneuse, Visages Villages). On ignore souvent la face californienne de celle qui débarqua en 1967 à Los Angeles avec son mari, Jacques Demy, y resta deux ans, y reviendra toujours. Elle y a tourné deux longs-métrages et des documentaires. Etudiée dans les écoles américaines de cinéma, la « dinosaure de la Nouvelle Vague », comme elle dit, s’y voit remettre, le 11 novembre, un Oscar d’honneur.

Cette récompense, est-ce un acte féministe ?

Non, c’est une affai­re de ciné­ma. Mais avec beaucoup de femmes en jeu. Lena Dunham [réalisatrice de la série Girls] m’invitera à entrer en scène et Angelina Jolie me remettra la statue. Et, dans le débat qui décide de ces Oscars, c’est Laura Dern [actrice dans Blue Velvet], dit-on, qui m’a proposée.

Quand on évoque les Oscars, on pense forcément à Harvey Weinstein, poursuivi pour ­ harcèlement sexuel et viols…

Ce type-là me débecte. Je n’ai jamais voulu le rencontrer. Autour de lui, les gens savaient, on n’a jamais freiné. Pourquoi ? Car c’était le patron. Tout le temps, c’est une histoire de pouvoir. Dans les usines, on disait autrefois « le droit de cuissage ». Bien sûr, il y a aussi des filles qui se jetaient à sa tête, mais là où c’est terrible, c’est quand le big boss abuse des jeunes femmes. J’ai 89 ans, j’en ai vu et entendu.

On ne vous a jamais harcelée ?

Non, je ne me prête pas à ça. Je suis une peau de chien dans les cas délicats. Bien sûr, c’est compliqué, on veut plaire. Les hommes comme les fem­mes. Dans ce jeu de la séduction, où sont les limites qui n’offensent pas les femmes ? Dans les rapports sexués, l’humiliation est toujours du côté des femmes. Ça ne changera que si on fait bouger les opinions des hommes. On peut crier mais il faut convaincre, cela commence par l’éducation, l’école, les mères… Je suis d’une nature révoltée et radicale. Sans cela, il n’y a guère de salut.

En 1967, vous vous êtes ­installée à Los Angeles…

La Columbia avait invité Jacques [Demy] pour tourner Model Shop, j’avais suivi. Un choc culturel, cet éclatement de liberté, de couleurs, d’habits… Il y avait les wo­men studies [études féministes] et une nouvelle conscience du succès. L’intellectuel Marshall McLuhan lançait « Le message, c’est le médium » : l’espace qu’on occupe dans les médias importe plus que ce qu’on y exprime. Triste et réel. Mais on évoluait et on s’amusait beaucoup.

C’est l’époque du Flower Power, de Polanski…

En 1968, j’ai fait un film tout à fait américain, Lions Love (… and Lies). L’amour était à l’époque le credo de tout. Même les directeurs des studios portaient des colliers peace and love. Mais, comme tous les gens de pouvoir, ils abusaient des jeunes personnes.

L’affaire Weinstein, c’est bien qu’elle éclate, parce qu’elle autorise les femmes à parler, et parce que les hommes sont secoués. J’ai trouvé intéressante la façon dont Tarantino, qui travaillait avec Weinstein depuis toujours, a demandé quelques jours de délai avant de dire : « Oui, au fond je réalise que je n’ai rien dit, que j’ai laissé passer. » C’est cette complicité des milieux ­ambiants qui est terrible.

A la manifestation devant la ­Cinémathèque, le 30 octobre, contre la rétrospective Polan­ski, accusé de viol sur mineure à cette époque-là, une militante s’étonnait que vous ayez, jadis, signé une pétition de soutien au cinéaste…

Il me semble bien que je n’ai pas signé cette pétition. Je suis connue pour ne pas signer quoi que ce soit. A part, en 1971, le manifeste pour le droit à l’avortement, car c’était un acte politique, qui avait du sens, qui a fait bouger les choses.

Votre opinion sur cet hommage rendu à la Cinémathèque ?

La mission de la Cinémathèque est de faire connaître le cinéma, il faut s’en tenir à ça, mais il est vrai que c’est un cas difficile. Et puis Polanski suivi de [Jean-Claude] Brisseau [la rétrospective a été déprogrammée et reportée sine die], ce n’était pas très malin. Le problème, c’est : est-on là pour juger les autres ?

Se taire ou pas ?

C’est la timidité des femmes qui a été dramatique. Leur silence est presque congénital, douloureux, et le silence des milieux, et celui des familles… C’est pour ça que les féministes ont raison de gueuler ! Tant qu’il y aura des femmes en colère, cela bougera tout doucement dans la société.

Dix ans après avoir quitté Los Angeles, en 1979, vous vous y êtes réinstallée…

Un Los Angeles très différent, assagi. Et un moment diffici­le de ma vie, mais très créatif. Avec Jacques, ça n’allait pas. Il était déçu aussi car il n’arrivait pas à se faire produire. Là, j’ai fait un film qui est l’ombre du premier, Documenteur, peut-être mon film le plus triste, le plus personnel, sur une femme seule avec son enfant après une séparation. La ville elle-même était peuplée de gens déçus. Une ville d’ombres, de désespérés. J’ai tour­né un film – plein de vie –, Mur murs, sur ceux qui font des peintures mu­rales et ceux qui les regardent.

L’inspiration vient de ce que l’on voit, dites-vous. Le cinéma, c’est aussi toucher aux limites…

C’est tout le problème de la création. Il y a des auteurs de cinéma qui veulent écrire sur la perversion, ou tourner des histoires de violen­ce. Cela fait partie de la liberté d’expression. Quand Orange mécanique, de Stanley Kubrick, est sorti, en 1972, nous sommes allés le voir avec Jacques et Catherine Deneuve. Elle et moi étions enceintes. Nous sommes sortis au bout de vingt minutes.

Le film fut un grand succès, et il est aujourd’hui étudié. Moi, je n’arrive même pas à le considérer comme un spectacle qui m’intéresse. Avec mon cinéma, je n’offense pas les femmes. Je sais que je ne vais pas les découper en petits morceaux de peau désirable.

19 octobre 2017

Agnès Varda et Angelina Jolie

varda et angelina jolie

15 octobre 2017

Agnès Varda et JR

jr et

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