Une part de l’humanité détruite au marteau piqueur
À Mossoul, 2e ville d’Irak, des djihadistes de Daech ont détruit méthodiquement les œuvres d’art du musée archéologique. Il renfermait des témoignages précieux des périodes assyriennes et hellénistiques, datant de plusieurs siècles avant notre ère.
Dans la mise en scène de la vidéo qu’ils ont mis en ligne jeudi, ils ont « soigné » la musique, sinistre à souhait. Pendant cinq minutes, on y voit les djihadites de Daech détruire à coup de marteau-piqueur et de masse une dizaine d’œuvres d’art du musée de Mossoul. En commençant par l’immense taureau ailé qui en ornait la porte.« Un symbole associé au pouvoir et à la royauté dans la Mésopotamie ancienne », explique l’archéologue Roberto Bertolino, qui a bien connu ce musée de centre-ville. C’était en 1997, après la Guerre du golfe. Il était membre de la première mission archéologique à revenir en Irak, pour l’université de Turin. Moins prestigieux que celui de Bagdad, ce musée était centré« sur une partie spécifique de l’histoire de la Mésopotamie, qui correspond à la Syrie ancienne, à partir du 2e millénaire avant Jésus Christ et jusqu’en 612, date de la prise de Ninive par les Perses (Et donc de la fin de l’empire assyrien).« Il renfermait aussi de nombreux témoignages de la civilisation Parthe, peuple venu d’Iran occuper la Mésopotamie au 3e siècle après JC ». Des objets (sculptures notamment) issus du site archéologique d’Hatra, à 5 km.
Réunion à l’Onu
Une cité inscrite au patrimoine de l’Unesco, dont la responsable, Irina Bokova, craint aujourd’hui pour la sécurité des temples, maisons, fortifications. Jeudi, juste après la diffusion de la vidéo de Daech, elle a appelé à une réunion urgente du conseil de sécurité de l’Onu et attend une réaction de la Cour pénale internationale. L’acte de Daech est« une tragédie » pour de nombreux scientifiques comme Sophie Makariou, présidente du musée des Asiatiques Guimet de Paris, qui avait prévenu que «dans cette guerre, le patrimoine ne serait pas une victime collatérale mais une cible ». « Sans vouloir relativiser » ,Roberto Bertolino souligne que le musée de Mossoul avait souffert depuis 2000 «de nombreux bombardements, pillages et trafic divers ». Et que, dans «ce malheur écrasant » ,« c’est finalement une grande chose » que des musées occidentaux comme le Louvre et surtout le British Museum de Londres conservent aussi de nombreuses sculptures et bas reliefs qui témoignent du passé de l’Irak.« Un passé et un pays qui sont aussi ceux des auteurs de cette folie destructrice. » Article de Pascale VERGEREAU.
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En l'espace d'un mois, l'État islamique a perpétré au moins trois attentats à l'encontre d'objets culturels. Après avoir mis le feu à plus de 2000 livres début février, puis à des instruments de musique en Libye la semaine dernière, l'organisation terroriste récidive en brûlant 8000 ouvrages de la bibliothèque de Mossoul, en Irak.
Les djihadistes auraient utilisé des bombes artisanales, selon The Fiscal Times, malgré la tentative de responsables locaux d'épargner le lieu culturel.
Datant de 1921, année de naissance de l'Irak moderne, la bibliothèque abritait des manuscrits des XVIIIe et XIXe siècles, des livres issus de l'époque ottomane et des journaux irakiens du début du XXe siècle. Une église et l'école de théâtre de la ville auraient également été assaillies par Daesh.
Selon Rayan al-Hadidi, bloggeur et activiste de Mossoul, la colère et le chagrin règnent désormais sur la ville, où les islamistes radicaux sèment la terreur depuis juin 2014.