Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
3 décembre 2011

Le Crazy Horse nous dévoile ses dessous |

69840437_pSource : Jean-Daniel Sallin de La Tribune de Genève

Ne rentre pas qui veut dans les coulisses du Crazy Horse… Le mâle n’y est en tout cas pas le bienvenu. Surtout s’il a un appareil photo entre les mains. La règle, historique, a été instaurée par Alain Bernardin. Créateur du cabaret parisien en 1951, il n’a fait qu’une entorse à cette loi inflexible. Le jour où il a convié Antoine Poupel à découvrir le saint des saints à travers son objectif. Les deux hommes s’étaient rencontrés par hasard. Au gré d’un portrait organisé au Louvre «à côté d’un sarcophage égyptien». Une image qui servit de sésame pour le temple du strip-tease.

Vingt ans après, Antoine Poupel continue de promener son œil poétique et admiratif dans les loges du Crazy Horse. Témoin privilégié de la métamorphose de ces jeunes femmes, souvent réservées, toujours dénudées, en divinités inaccessibles. «L’émotion est la même à chaque fois que je pénètre dans ce lieu si petit: un mélange de fébrilité et d’appréhension», admet-il. «Je suis quelqu’un de timide, j’essaie de ne pas gêner, de me faire oublier… C’est peut-être pour cette raison que les filles m’ont accepté!»

Ni drague, ni confidences

Le Français travaille léger. Avec un flash d’appoint comme seul accessoire. Il se refuse surtout à être trop directif. Antoine Poupel recherche avant tout la spontanéité, la force de l’instant, sans violer l’intimité des danseuses. «Je leur montre toujours les images après», souligne-t-il. «Je le fais naturellement pour les mettre en confiance. Quand une femme s’habille, elle n’est pas toujours à son avantage. Or, mon but est de les mettre en valeur, de leur rendre hommage…»

Ses relations avec les Crazy Girls restent cependant 100% professionnelles. Pas de drague. Pas de rendez-vous à l’extérieur du saloon. Pas de confidences. «On parle ensemble, évidemment, mais jamais rien de personnel», sourit le photographe. «Cela évite bien des problèmes! Si j’entretenais une trop grande amitié avec l’une ou l’autre des danseuses, cela pourrait créer des difficultés.» Antoine Poupel le répète à l’envi: il entretient surtout une histoire d’amour avec le lieu. Les filles passent, la direction change, mais lui est resté fidèle au Crazy Horse. A cet écrin de velours rouge qui a bâti son mythe – comme l’avait pensé son père fondateur – sur la frustration et sur l’art délicat de l’érotisme.

Ode à la féminité

En publiant ce livre, Crazy Inside, l’année du soixantième anniversaire du cabaret, le photographe français offre une ode magnifique à la féminité. Un voyage sur une île où la tentation n’est pas une fin en soi. Mais n’y a-t-il pas un risque de désacraliser le Crazy Horse en dévoilant ainsi ses dessous? Au fil des pages, on découvre les danseuses dans le plus «simple» appareil. En pleine répétition. Devant leur miroir. Parfois sans leur perruque fétiche. Et les lumières ne sont plus là pour les habiller… Ne commet-il pas un crime de lèse-majesté?

«Je ne crois pas», martèle Antoine Poupel. «La magie et le mystère du spectacle perdurent. Par le choix des images, on a privilégié la beauté. Et, franchement, la direction n’aurait jamais accepté que l’on égratigne la réputation des lieux…» Le Français, lui, ne se lasse pas de ce «cheval fou». Il y retourne régulièrement. Pour ressentir encore et encore cette petite émotion au moment de pousser la porte des loges.

«Crazy Inside», photographies d’Antoine Poupel. Editions du Chêne (224 pages).

A noter «Forever Crazy», du 8 au 12 février au Théâtre du Léman. Billets: Ticketcorner et Fnac.

Voir mes précédents et nombreux billets à propos du Crazy Horse en cliquant ICI

Publicité
Commentaires
Publicité