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Jours tranquilles à Paris
29 juillet 2015

Batz-sur-Mer et Le Croisic, c’est aussi la Bretagne…

Le Croisic Batz (Loire-Atlantique).

Totalement improbable ! La plage Valentin, dans la petite baie de Batz sur Mer, bourg de paludiers lové entre océan et marais salants, est représentée, sur l’affiche, flanquée de coquettes demeures qui n’existaient pas là-bas… Le Croisic, port coloré, et Batz, ses paludiers, ses rochers impressionnants, réunis dans une image d’Épinal… En revanche, au début du XXe siècle, le vaste hôtel Régina avec son lanterneau caractéristique et les deux manoirs étaient bien là. Laurent Delpire, Croisicais spécialiste du patrimoine classé, rapporte :« Les promoteurs envisageaient de lotir les dunes et de construire plusieurs villas de part et d’autre de l’hôtel pour créer un nouveau quartier …Le projet tombe à l’eau avec l’arrivée de la guerre de 1914-1918. » Pour « appâter » le touriste, l’illustrateur s’est affranchi de tout réalisme en ajoutant sur la plage batzienne le majestueux hôtel d’Aiguillon, la villa Ker Hou (au premier plan) et le manoir XVe de Kervaudu et sa poivrière, tous implantés… au Croisic ! Kervaudu signifie « la demeure de l’homme noir » en breton. Parlonsnous donc, à défaut d’Armorique, de terre bretonne ? Poussons la porte du musée des marais salants de Batz où officie Gildas Buron, conservateur érudit :« Entre Loire et Vilaine, on a longtemps parlé breton. À Batz, au village de Roffiat, c’était la langue communautaire jusqu’en 1914. Les anciens l’ont parlée jusque dans les années 1970. À Piriac-sur-Mer et Mesquer, on l’a parlée jusqu’en 1820. »

Mer promise depuis Montparnasse !

Au Croisic, où« le bilinguisme a prévalu » jusqu’au XVIIIe siècle, ce sont les pêcheurs qui ont relancé le breton avec l’implantation« de Finistériens entre 1920 et 1935 » . On parle encore breton chez quelques vieux Croisicais, dans les bistrots du port. Avec leurs deux clochers en pierre, si bretons d’esprit, l’identité est claire. Le marketing en use : la presqu’île guérandaise est présente dans le Guide Vert de la Bretagne sud . Le sel de Guérande est un « produit en Bretagne ». Sur la plage Valentin, Marie-Christine, Parisienne à la retraite, penche pour le terme« Bretagne sud. Ici, on dit qu’il fait beau. » André, 83 ans, et Liliane, son épouse, quittent Dreux (Eure-et-Loir), tous les étés, depuis 1972, pour un camping du Croisic. C’est breton, ici ? Oui, mais «avant. Il y avait une Bigoudène qui venait vendre sa dentelle il y a 25 ans. Ça a trop changé, depuis ! » Les clichés ont vraiment la vie dure… Jean-Michel Gingueneau, architecte au Pouliguen, ville voisine de Batz, pense« logiquement » la presqu’île comme bretonne :« La Bretagne va jusqu’à la Loire. » L’arrivée du chemin de fer de Paris à Saint-Nazaire, dès 1857, annonce le développement touristique. Le Croisic, novateur, lance la Compagnie de Saint-Nazaire au Croisic, qui fait faillite avec la guerre de 1870. La défunte société est rachetée en 1879 par le pionnier du tourisme, Jules-Joseph Hennecart, l’homme qui fera naître, du sable, La Baule… Le Croisic devient le terminus de Paris, via La Baule. Cette mer promise depuis Montparnasse fait la gloire du port avant même celle de La Baule. Sur la presqu’île guérandaise, Batz est le village qu’on traverse avant l’étranglement qui ouvre sur la presqu’île du Croisic. Une situation géographique qui pourrait expliquer chez le Croisicais un esprit quasi-insulaire, en tout cas très indépendant. Les récents combats pour sauver leur criée, voici cinq ans, l’ont prouvé. Les coriaces Croisicais ont conservé, mordicus, leur outil de travail ! Et si, finalement, c’était quand même un village d’Armorique, celui d’irréductibles Gaulois ? Article de Michel ORIOT.

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