Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
26 janvier 2016

"Une journée particulière" de Ettore Scola

En 1938, alors que tout Rome célèbre Hitler, une femme au foyer et un homosexuel, exclus de la fête fasciste, se rapprochent l'un de l'autre. Un film crépusculaire, dans lequel deux acteurs bouleversants (Sophia Loren et Marcello Mastroianni) se confient sous fond d'hymnes militaires et de déclarations belliqueuses. Une oeuvre poignante signée Ettore Scola, décédé le 19 janvier.

Rome, le 8 mai 1938. Toute la ville s'apprête à défiler devant Hitler, accueilli en grande pompe par son allié Mussolini. Exclus de cette journée historique et restés presque seuls dans leur immeuble déserté de la banlieue romaine, une femme au foyer exténuée, Antonietta, et un homosexuel consigné dans son appartement par la police, Gabriele, se rencontrent, se confient, se rapprochent… La concierge, tout en épiant leurs faits et gestes, fait retentir dans la cour les rugissements de la radio nationale, qui retransmet en direct tous les détails de la grande fête fasciste.

Pas de deux et pas de l'oie

Ettore Scola orchestre avec sa finesse coutumière, teintée d'humour et de mélancolie, la rencontre improbable de ces deux exclus si dissemblables - la mère de six enfants dont rien n'allège l'épuisant quotidien, hormis le culte qu'elle voue à Mussolini, le célibataire cultivé honni par le régime et rendu suicidaire par son isolement forcé. Une journée particulière leur offre un émouvant pas de deux, ou plutôt un pas de côté, en marge du défilé gigantesque matérialisé par les commentaires belliqueux de la radio, entrecoupés d'hymnes militaires. Faisant oublier leur statut de monstres sacrés, Sophia Loren et Marcello Mastroianni insufflent à ce moment suspendu une grâce, un rayonnement particuliers. À travers leur rencontre, Ettore Scola, qui à 6 ans, sanglé dans son uniforme de "Fils de la Louve", avait lui-même défilé devant le Führer, peint avec subtilité un fascisme qui n'est pas seulement celui des dictateurs, mais aussi celui de l'homme de la rue.

Publicité
Commentaires
Publicité