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Jours tranquilles à Paris
8 octobre 2018

Interpol a reçu la démission de son président chinois, porté disparu depuis dix jours

Par Harold Thibault - Le Monde

Plus tôt dans la journée, Pékin a annoncé soupçonner M. Meng d’avoir « violé la loi », tandis que sa femme assure qu’il est « en danger » dans son pays.

L’organisation internationale de police Interpol, dont le siège est à Lyon, a annoncé, dimanche 7 octobre, la démission « avec effet immédiat » de son président chinois Meng Hongwei, porté disparu depuis plus de dix jours.

Le 25 septembre à 12 h 26, Meng Hongwei, qui venait d’arriver sur le sol chinois, avait envoyé un message de trois caractères sur WhatsApp à son épouse restée dans la capitale des Gaules : « Attends mon appel. » Puis quatre minutes plus tard, il envoyait un couteau en émoticone. C’est le dernier signe que Grace Meng a reçu de son mari. Sept minutes plus tard, il ne répondait pas à son appel. Des signes évidents qu’il se considérait « en danger », a précisé Mme Meng, dos aux caméras, dimanche, dans un hôtel lyonnais. Elle s’exprimait pour la première fois depuis qu’elle a fait part, jeudi, aux autorités françaises de ses inquiétudes. Elle a été placée depuis sous protection policière.

Moins d’une heure après cette conférence de presse, le Parti communiste chinois (PCC) a confirmé que Meng Hongwei, qui est également vice-ministre chinois de la sécurité publique, est « suspecté d’avoir enfreint la loi et est actuellement sous supervision et enquête » de l’organe disciplinaire ayant autorité sur toute la fonction publique du pays. Sans aucune précision quant aux faits qui lui sont reprochés.

« Clarifications »

Samedi, le secrétaire général d’Interpol, l’Allemand Jürgen Stock, qui conduit les opérations de l’organisation au quotidien, avait demandé à Pékin d’apporter des « clarifications » sur le sort de M. Meng, 64 ans.

Dimanche soir, Interpol a précisé que son successeur serait désigné lors de sa prochaine assemblée générale, en novembre à Dubaï. Elle n’a pas détaillé comment elle avait vérifié l’authenticité de cette démission, alors qu’elle a perdu contact avec M. Meng. Elle ne s’est pas non plus interrogée sur la recevabilité d’un tel renoncement de la part d’une personne détenue au secret par un régime autoritaire.

chinois

Moins de deux ans plus tôt, en novembre 2016, l’élection d’un officiel chinois à la tête de l’organisation chargée de la coopération des polices de 192 Etats avait été accueillie avec le plus grand scepticisme par les organisations de défense des droits fondamentaux, telles qu’Amnesty International.

Les Etats membres étaient restés largement silencieux et ils avaient élu à une très grande majorité M. Meng, équivalent d’un vice-ministre de l’intérieur d’un pays connu pour l’emprisonnement sans procès équitable de ses dissidents et des memebres de minorités jugées « problématiques », ou de ses officiels corrompus ou victimes des luttes de factions.

Meng Hongwei était le premier Chinois à prendre la tête d’une grande organisation internationale. « Je ne suis pas sûre de ce qui lui est arrivé », a ajouté son épouse dimanche. « Tant que je ne le vois pas en face de moi, en train de me parler, je ne peux pas avoir confiance », a confié Grace Meng, qualifiant ces événements se déroulant sous le regard de l’opinion mondiale de « ruine politique ». « Cette affaire relève de la justice. Elle concerne la communauté internationale. Elle concerne le peuple de mon pays », a-t-elle encore déclaré.

Purge

Une enquête pour disparition a été ouverte vendredi en France et le ministère de l’intérieur a dit son « interrogation » sur le sort de Meng Hongwei et sa « préoccupation » du fait de menaces qu’a reçues son épouse.

Les disparitions de personnalités chinoises se sont multipliées depuis l’arrivée au pouvoir, en 2012, de Xi Jinping, qui a mené une campagne de lutte contre la corruption également perçue comme une purge de factions concurrentes.

Meng Hongwei a fait son ascension politique dans le sillon de Zhou Yongkang, « tsar » de l’appareil sécuritaire sous le précédent président chinois, et dont le réseau a été l’une des principales cibles de la campagne menée par Xi Jinping.

M. Zhou avait été condamné en 2015 à la prison à perpétuité pour corruption, abus de pouvoir et divulgation de secrets d’Etat. Mais Meng Hongwei avait néanmoins été appuyé par la Chine de Xi Jinping pour prendre la tête d’Interpol en 2016.

Toutefois, un signe avant coureur de ses difficultés était apparu dès le mois d’avril : Meng Hongwei avait été démis de ses fonctions au sein du comité du parti chargé de superviser le ministère de la sécurité publique, après la nomination, à l’automne 2017, d’un nouveau ministre, ultra-loyal à M. Xi.

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