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Jours tranquilles à Paris
13 février 2019

Le Congrès enterre le « mur » de Donald Trump à la frontière avec le Mexique

Par Gilles Paris, Washington, correspondant - Le Monde

Le compromis budgétaire auquel sont parvenus les démocrates et les républicains ne prévoit que 1,3 milliard de dollars pour sécuriser la frontière, loin des 5,7 milliards exigés par le président.

Donald Trump s’est dit « très mécontent », mardi 12 février, du compromis auquel sont parvenus des élus démocrates et républicains pour renforcer la protection de la frontière avec le Mexique. Et pour cause. Finalisé lundi, le projet de budget du ministère concerné, le département de la sécurité intérieure, ne comprend que 1,3 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros) au lieu des 5,7 milliards de dollars exigés pour le « mur » promis par le président des Etats-Unis. Il ne permettra en fait de construire que 55 miles (88 kilomètres) de barrières supplémentaires qui s’ajouteront à celles déjà installées en Californie, en Arizona, et dans certaines parties du Texas.

Donald Trump avait refusé un premier projet, en décembre 2018, qui prévoyait 65 miles (110 kilomètres) de clôture. Cette décision avait précipité un gel (shutdown) partiel du gouvernement fédéral qui s’était éternisé pendant trente-cinq jours, érodant son taux d’approbation. Il y a un an, il avait déjà repoussé une offre démocrate de 25 milliards de dollars en échange de la régularisation de sans-papiers arrivés enfants aux Etats-Unis.

Les négociateurs du Congrès, choisis dans les deux camps pour leur pragmatisme, avaient jusqu’au 15 février pour éviter une impasse. Donald Trump ne s’était pas montré très encourageant en qualifiant leurs efforts de « perte de temps ».

Le souci d’éviter un nouveau shutdown l’a emporté, et le président a écarté, mardi, l’option consistant à refuser de signer le compromis, une fois adopté par le Congrès. Le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, ne lui a pas laissé le choix. « Il n’y a pas tout ce que le président espérait obtenir, mais c’est un pas dans la bonne direction. J’espère qu’il décidera de le promulguer », a dit le sénateur du Kentucky, manifestement pressé d’en finir.

L’ultra-droite se déchaîne

En dépit de ce manque flagrant de soutien républicain, Donald Trump n’a pourtant pas renoncé. « Quand on additionne ce que je pourrai ajouter, cela va marcher, nous allons construire un beau mur, grand et solide », a-t-il assuré, mardi, sans donner la moindre indication concernant l’origine de ces fonds.

Il pourrait notamment déclarer un état d’urgence nationale qui lui permettrait de contourner le Congrès. Des sondages convergents ont cependant montré qu’une forte majorité d’Américains interrogés y est hostile, sans parler du peu d’enthousiasme des élus républicains. Une telle initiative, en outre, pourrait déclencher une guérilla juridique qui bloquerait sans doute les travaux.

Ce volontarisme a sans doute pour objectif de désarmer les critiques des figures ultra-conservatrices qui l’avaient poussé, en décembre 2018, à renoncer à un compromis plus favorable. Elles se sont déchaînées contre le résultat du Congrès.

L’animateur de Fox News Sean Hannity, pourtant très proche du président, a dénoncé un « compromis pourri ». « Tout républicain qui le votera devra s’expliquer », a-t-il menacé. Sa collègue Laura Ingraham ne s’est pas montrée plus tendre à l’égard d’un résultat « pathétique », « qui ne donne pas un centime pour le mur ». « Sur l’immigration, Trump ne combat pas seulement les démocrates, il combat également les républicains », a-t-elle pesté. Un autre proche de Donald Trump, Lou Dobbs, qui officie également sur un canal appartenant à la chaîne conservatrice a dénoncé « une insulte » au président.

Renoncements

Lancé dès sa déclaration de candidature, en juin 2015, ce projet de « mur » a constitué la principale promesse de campagne de Donald Trump, qui assurait aussi initialement que le Mexique paierait pour son financement.

Mais une fois élu, le milliardaire s’est heurté tout d’abord à l’hostilité des autorités mexicaines, puis à un Congrès où il ne disposait pas des voix nécessaires au Sénat pour parvenir à ses fins. En dépit de messages alarmistes martelés pendant toute la durée du shutdown, il n’est pas parvenu non plus à retourner une opinion publique majoritairement opposée à ce « mur ».

Donald Trump a progressivement revu ses ambitions à la baisse, en écartant tout d’abord une construction sur l’ensemble de la frontière avec le Mexique encore non équipée, puis en renonçant à un édifice en béton au profit d’un dispositif métallique plus proche d’une barrière. Ces renoncements n’ont cependant pas fait fléchir les démocrates qui ont dénoncé un projet « immoral », daté et coûteux. En position de force à la Chambre des représentants après les élections de mi-mandat, en novembre 2018, ces derniers n’ont finalement concédé que la portion de clôture prévue par le compromis.

A moins d’un coup de théâtre, cet accord interdit désormais la moindre construction d’ampleur d’ici à la fin du mandat du président, en janvier 2021. Donald Trump a tenté de contourner la difficulté au cours d’un meeting électoral à El Paso, au Texas, localité qui jouxte la ville mexicaine de Ciudad Juarez. Venu plaider une nouvelle fois pour ce projet, le président a fait face, lundi soir, à une foule qui a scandé le slogan devenu coutumier de ces rassemblements : « Construisez ce mur ! » Le président, qui venait de prendre connaissance de l’accord du Congrès, a rectifié. « Vous voulez dire en fait finissez le mur », a-t-il assuré, « parce que nous le construisons ».

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