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Jours tranquilles à Paris
19 mars 2019

L’effet « gilets jaunes » menace la reprise du tourisme

Par Jean-Michel Bezat

Le secrétaire d’Etat au tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, s’attend à une année 2019 plus difficile et promet une augmentation des crédits de communication alloués à la promotion de la destination France.

Les exactions perpétrées sur les Champs-Elysées au cours des manifestations parisiennes des « gilets jaunes » en décembre 2018, puis samedi 16 mars, ont de nouveau dégradé l’image de la France et freiné la reprise du tourisme international qui s’était amorcée en 2017 et fortement amplifiée en 2018.

Si le gouvernement espère que le chiffre record de 90 millions de voyageurs a été atteint l’an passé, « nous nous attendons à une année 2019 plus difficile », confie Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’Etat au tourisme.

« Pugnacité »

« Il y avait une accalmie qui a permis un repositionnement de la destination France, poursuit-il. Les derniers événements renvoient de très mauvaises images. On s’en prend à l’outil de travail de gens qui contribuent au rayonnement de notre pays dans le monde. »

M. Lemoyne réunira, jeudi 21 mars, les professionnels du secteur en Ile-de-France avec Atout France, l’organisme public de promotion de l’Hexagone, pour « faire le point et réfléchir ensemble à une relance de la destination France ».

LE SECTEUR REPRÉSENTE 2 MILLIONS D’EMPLOIS DIRECTS ET INDIRECTS, 250 000 OFFRES CHAQUE ANNÉE (DONT 50 000 NON POURVUES) ET 7,2 % DE LA RICHESSE NATIONALE

Dès mardi, il sera à Marseille afin d’adresser « un message de réassurance » aux 915 tour-opérateurs de 73 pays réunis dans la cité phocéenne pour la quatorzième édition du salon Rendez-vous en France. « Ils en ont besoin », assure-t-il.

En amont, le gouvernement avait mobilisé les ambassadeurs dans les dix pays qui fournissent, notamment en Asie, de gros bataillons de touristes. Et les treize régions s’étaient activées en invitant les « prescripteurs » étrangers de séjours en France à découvrir leurs richesses propres.

« Nous sommes très attentifs à la situation du secteur », qui représente deux millions d’emplois directs et indirects, 250 000 offres chaque année (dont 50 000 non pourvues) et 7,2 % de la richesse nationale.

Les images des affrontements et des incendies survenus sur « la plus belle avenue du monde » ont fait le tour de la planète. Et la région parisienne, qui attire une grande partie du tourisme international dans l’Hexagone, est particulièrement touchée par « l’effet gilets jaunes ». Il amplifie, selon M. Lemoyne, un ralentissement touchant plusieurs pays européens très touristiques. Au mois de janvier, le nombre d’entrées internationales a chuté de 7,8 %, contre – 4,6 % en Italie et – 2,5 % en Espagne.

« Nous allons augmenter de 25 % les crédits de communication des trois acteurs Atout France, Région Ile-de-France et Ville de Paris », annonce M. Lemoyne. « Pas d’abattement, de la pugnacité », ajoute-t-il. Le gouvernement travaille aussi à une augmentation du seuil de détaxation des produits achetés par les touristes extra-européens, la TVA pouvant déjà être récupérée en liquide et réinjectée dans des achats en France.

Baisse des ventes détaxées

Les parités euro-dollar, euro-yen ou euro-yuan jouent évidemment un rôle important. Mais la corrélation est aussi très forte entre les événements politiques et le « business » du tourisme. Les données du shopping détaxé sont parlantes, note Denis Leroy, directeur pour l’Hexagone de Planet, numéro deux mondial du secteur de la détaxe. Elles concernent pour moitié des touristes asiatiques, friands de produits de luxe made in France.

La baisse des ventes de ces produits avait été particulièrement sensible entre les attentats du Bataclan et du Stade de France (novembre 2015) et la tuerie de Nice (juillet 2016), avant de remonter puis de reculer à nouveau après l’attaque commise contre un fourgon de police sur les Champs-Elysées, en avril 2017.

Depuis la première manifestation des « gilets jaunes », le 17 novembre 2018, « les ventes détaxées enregistrent en moyenne des baisses de 10 % à 30 % », s’inquiète-t-il, alors qu’il faut « de six à neuf mois pour se relever d’une telle situation ».

« Les touristes étrangers ont été les moteurs de la croissance en 2018 », constate Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme, qui croit à « un retour de la dynamique de croissance à compter du deuxième trimestre ».

Relever le défi d’un tourisme plus rentable

Cependant, ces perspectives optimistes, publiées le 13 mars, sont fondées sur une enquête menée auprès de professionnels (opérateurs, chaînes hôtelières, indépendants…) en janvier-février. Avant les actes de violence du 16 mars que les casseurs, black blocs ou « gilets jaunes » radicalisés veulent rééditer dans les semaines à venir.

Il est peu probable que la France atteigne dès la fin 2020 l’objectif de 100 millions de touristes que Laurent Fabius avait fixé en 2015, lorsqu’il était ministre des affaires étrangères et du tourisme. « Mais ce genre d’objectif pousse à se mobiliser », affirme le secrétaire d’Etat.

D’autant plus que la France figure en tête des destinations touristiques d’ici à 2027, avec un bond attendu du nombre de voyageurs venus de Chine, de Russie et du Moyen-Orient.

Elle devra aussi relever le défi d’un tourisme plus rentable, prévient M. Lemoyne. Les 90 millions d’étrangers de passage dépensent 57 milliards d’euros. Loin derrière l’Espagne, qui encaisse 80 milliards d’euros pour 83 millions de voyageurs.

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