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Jours tranquilles à Paris
18 février 2020

Municipales 2020 : à Paris, Agnès Buzyn ajourne les grands projets de Benjamin Griveaux

Par Sacha Nelken, Denis Cosnard

La nouvelle candidate de LRM donne la priorité aux problèmes du quotidien. Le déménagement de la gare de l’Est et le « chèque logement » de 100 000 euros attendront.

Dans la capitale, la gare de l’Est ne bougera pas de sitôt. Agnès Buzyn, la nouvelle candidate de La République en marche (LRM) à la Mairie de Paris, n’a pas l’intention de reprendre à son compte la promesse la plus spectaculaire de Benjamin Griveaux : abandonner cette gare et transférer le trafic ferroviaire vers une nouvelle infrastructure à construire porte de la Villette ou en banlieue, et ouvrir un vaste parc sur les terrains libérés.

L’ancienne ministre des solidarités et de la santé reste dubitative devant ce type de « projets pharaoniques », selon son expression. C’est ce qu’elle a confié à son équipe de campagne, réunie pour la première fois autour d’elle, lundi 17 février, moins de vingt-quatre heures après sa désignation expresse.

Officiellement, rien n’est encore tranché. Mais tous les participants à ce long déjeuner de travail ont compris le même message. Pour avoir une chance de gagner la difficile bataille de Paris, face à Anne Hidalgo et Rachida Dati, Agnès Buzyn ne veut pas simplement incarner un nouveau visage, en conservant in extenso le programme élaboré par son prédécesseur.

Elle entend revoir assez profondément les grands choix, et laisser de côté les idées les moins pertinentes. « Sa priorité, c’est de régler les problèmes du quotidien, la propreté, la sécurité, la qualité de la vie, et pas de lancer de grands projets », synthétise un des convives.

Des « boulets » aux pieds

Cela n’allait pas de soi. « A part le capitaine, rien ne va changer », assurait Sophie Segond, la tête de liste de LRM dans le 8e arrondissement, dimanche, lors d’une réunion avec ses colistiers. « Nous travaillons depuis de longs mois sur le programme, nous sommes tous convaincus qu’il est le meilleur pour Paris, c’est pour ça que le ou la remplaçante de Benjamin devra le défendre, y compris la gare de l’Est », précisait-elle.

Agnès Buzyn a une autre vision de son rôle. « Elle a sa propre analyse des problèmes de Paris, résume une tête de liste. Elle ne veut pas partir avec aux pieds des boulets qui ne lui appartiennent pas ». A commencer par le fameux déplacement de la gare de l’Est et la création d’un « Central Park » parisien, que Benjamin Griveaux avait brandis fin janvier dans l’espoir de marquer les esprits et de relancer une campagne très laborieuse.

Le projet avait immédiatement suscité une pluie de sarcasmes et de critiques. « Ce serait un non-sens économique, une aberration pour des milliers de voyageurs, et une vraie faute politique », avaient ainsi déclaré les dirigeants des régions Ile-de-France et Grand Est. En réaction, le candidat avait à son tour éreinté « ceux qui se sont habitués à avoir de petites ambitions pour Paris », « appellent sans cesse à faire davantage pour l’écologie, et disent impossible de créer 30 hectares d’espace vert ».

« Je n’ai pas bien compris cette proposition »

Avec d’autres, Agnès Buzyn a néanmoins constaté que le projet passait mal. En outre, « elle juge que la ville a été secouée, striée de travaux, et a surtout besoin d’être pacifiée », ajoute une candidate. Exit donc le déménagement de la gare de l’Est, qui aurait nécessité au moins dix ans de chantier.

Il devrait en aller de même de l’autre proposition choc, dévoilée quelques jours plus tard par l’ancien porte-parole du gouvernement : le chèque allant jusqu’à 100 000 euros que la Ville aurait versés pour aider les ménages des classes moyennes à acheter une résidence principale, malgré la flambée des prix. Benjamin Griveaux prévoyait d’y consacrer 2 milliards d’euros en six ans. En contrepartie de cet apport, la Ville aurait récupéré, au moment de la revente du logement, une part de la plus-value, plafonnée autour de 20 % du prix. Là aussi, la mesure avait provoqué une avalanche de critiques, les uns estimant qu’elle allait accentuer la hausse des prix, les autres que Paris n’avait pas à miser sur la spéculation foncière.

« Je n’ai pas bien compris cette proposition », a reconnu pour sa part Agnès Buzyn, d’après plusieurs participants au déjeuner. Signe, au minimum, que la promesse n’a pas été bien présentée. « Le logement reste une priorité, mais on va sans doute revoir ce dispositif », indique une cheville ouvrière de la campagne.

Un retour aux fondamentaux

La remise à plat du programme ne s’arrêtera peut-être pas là. Lundi, la nouvelle candidate à l’Hôtel de ville a demandé à chaque tête de liste de donner son propre avis sur le sujet, et de lui envoyer très rapidement des notes sur le logement, la propreté, la sécurité, les rythmes scolaires, les étudiants, etc. Le prélude, sans doute, à une présentation par Agnès Buzyn de son propre programme, revu et corrigé.

Une nouvelle ligne se dessine clairement : « pas question de s’engager dans de grands plans “disruptifs” avant d’avoir mis de l’ordre dans la ville », explique un membre de l’équipe. « Beaucoup de personnes âgées ne sortent plus de chez elles, de peur de se faire renverser sur les trottoirs », appuie Pacôme Rupin, tête de liste dans le centre de Paris.

Retour aux fondamentaux, en quelque sorte. La nouvelle candidate devrait ainsi garder la plupart des propositions déjà sur la table concernant la création d’une police municipale armée, le renforcement du nettoyage des rues, mais aussi la végétalisation de la capitale et l’abandon des opérations d’urbanisme considérées comme du « bétonnage ».

A cela devrait s’ajouter une attention plus forte aux questions sociales comme le mal-logement, la précarité, ou le sort des personnes âgées et des familles monoparentales, marquant la touche personnelle de l’ex-ministre des solidarités et de la santé.

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