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Jours tranquilles à Paris
5 avril 2020

Jeux de rôles érotiques : échappée belle pour soirées confinées

Par Maïa Mazaurette

Les fantasmes échappent au rétrécissement de nos existences, c’est donc le moment ou jamais d’oser s’amuser à changer de peau ou de décor, conseille la chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette, mode d’emploi à l’appui. Vous hésitez encore ? Dites-vous qu’au pire cela se terminera en fou rire.

LE SEXE SELON MAÏA

Partenaires confinés, sexualité réduite à peau de chagrin ? Pas forcément. Les fantasmes échappent au rétrécissement de nos existences, et peuvent même générer une jouissive distance entre des partenaires cohabitants. Par quel miracle ? Celui du jeu de rôles, qui réinjecte du mystère dans le couple - et qui permet, pendant une soirée, de changer de peau, de personnalité… et peut-être même de pratiques.

Que vous préfériez les soubrettes ou les pilotes de ligne, les gladiatrices ou les cruels esclavagistes, les possibilités sont illimitées. Ce n’est pas compliqué, et au pire, l’expérience terminera en fou rire. On essaie ?

1. Le choix de scénario

Quelle histoire raconter ? Je vous rassure : sauf programme ambitieux, vous n’avez pas besoin d’un arc narratif en cinq actes et quatorze rebondissements (« surprise, cette baguette magique était un pénis ! »). Le scénario érotique se limite le plus souvent à un contexte, sur lequel vous broderez quelques phrases avant de vous lancer.

Mais comment choisir ? Adressons la question à une professionnelle, Flore Cherry, autrice et patronne de MySweetFantasy, une entreprise spécialisée dans la réalisation de fantasmes (oui, ça existe). Pour elle, « un bon scénario est ponctuel (on ne pratique pas tous les soirs), il fait envie aux deux partenaires, et surtout, il respecte les limites de chacun ». « Si vous n’avez pas d’idée, choisissez un jeu de rôles qui demande une compétence maîtrisée par votre partenaire. C’est plus rassurant », recommande-t-elle. Quelques exemples ? « Votre conjoint peut vous enseigner quelque chose, et éventuellement vous punir si vous apprenez mal. S’il maîtrise la comédie, il prendra le rôle actif, et vous pouvez vous laisser porter. Ou encore, un adepte de bondage peut jouer aux Indiens et aux cow-boys : inutile de discuter (on ne parle pas la même langue), je te ligote autour d’un poteau – et on finit par faire l’amour, évidemment. ».

Notons au passage que si les archétypes viennent spontanément à l’esprit, rien ne vous oblige à piller la liste des fantasmes « prêts à consommer » habituels (est-ce réellement le bon moment pour jouer un examen médical qui dérape ?). En même temps, certains scénarios archi-classiques se retrouvent adaptés à notre nouveau quotidien : pour un effet cathartique maximal, imaginez que vous êtes codétenus, dans un sous-marin ou sur une île déserte, ou qu’un contrôle policier tourne mal (« votre attestation est dans votre slip ? Au poste, jeune homme »).

Pour d’autres propositions, inspirez-vous de films, de livres, de clips, d’expériences de votre passé… ou d’Internet (hop, voici une liste bien fournie de fantasmes).

2. La négociation

Sans surprise, le nerf de la guerre consiste à trouver un scénario-prétexte motivant pour les deux partenaires… or nous ne sommes pas toujours à l’aise en termes de divulgation de nos préférences (« attache-moi au radiateur et fouette-moi avec un hareng »). Pour contourner ce problème, pourquoi ne pas commencer la partie par un scénario de confession ? Si cette idée perturbe votre sensibilité en ce jour du Seigneur, vous pouvez utiliser des applications mobiles fonctionnant sur le même principe que Tinder : seuls les fantasmes communs « matchent » (si vous avez des envies de cuir, d’urine ou de couches-culottes, votre partenaire n’aura accès à ces informations que s’il ou elle les partage). Sur smartphone : FantasyMatch, UnderCovers, Kindu. Sur ordinateur : Mojo.

boule

Bien sûr, tomber d’accord sur la nature du fantasme ne suffit pas : encore faut-il l’être sur sa réalisation. Pour éviter les dérapages, Flore Cherry fait valider (ou refuser) une liste de pratiques sexuelles. Ce procédé rassure ses clients. Ensuite, si vous optez pour des fantasmes BDSM ou techniquement complexes, deux options :

1) le consentement continu : vous vous assurez du confort physique et psychologique de l’autre, plusieurs fois, verbalement et clairement, tout au long de la séance : « Ça te plaît ? Ça ne te fait pas mal ? »).

2) le consentement enthousiaste : vous observez que votre partenaire participe activement à l’action, par ses gestes et/ou ses paroles (si Alice au pays des merveilles continue de caresser le chat du Cheshire, a priori, sa motivation est intacte).

Cependant, attention : certains fantasmes, comme le viol ou le bondage, ne permettent ni verbalisation ni participation. Il vous faudra alors un safe-word (un mot-limite qui siffle la fin de la récréation). Donc si vous testez des choses nouvelles, n’utilisez pas de bâillon !

3. Les costumes et accessoires

Je vous entends déjà protester : « Mais Maïa, je n’ai rien à me mettre ». Ah bon ? Pas de costume banal pour ressembler au héros de Fifty Shades of Grey ? Pas de foulard léopard pour incarner Tarzan ? Aucune vieille cravate à transformer en bandeau, aucune chemise démodée pour faire de vous un D’Artagnan ? Je ne vous crois pas une seule seconde.

Le costume peut aussi préexister au fantasme : un boa vous emmène dans l’univers du burlesque, une salopette vous métamorphose en plombier – l’occasion fait le larron. De toute manière, c’est symbolique.

Pour Flore Cherry, ces éléments fonctionnent comme une « autorisation à entrer dans un jeu imaginaire. Peu importe que les vêtements soient bon marché ou les accessoires improvisés : ce sont eux qui nous identifient comme personnage. Et ça marche aussi dans l’autre sens : quand on n’a plus envie de jouer, on retire son masque ou on lâche son accessoire ».

Au royaume de l’imaginaire, tout est permis ? En théorie, absolument. Dans les faits, attention aux limites du fait maison : on ne s’attache pas avec des câbles (ça peut couper la circulation), on ne pénètre pas avec le premier objet venu (figurez-vous qu’on peut se blesser avec une banane). Les urgences ont déjà suffisamment de pain sur la planche ! Maintenez votre effort citoyen, et n’allez pas vous déchirer une muqueuse.

4. Le décor

Créer un environnement stimulant avec des bouts de ficelle, mission impossible ? Ce n’est pas l’avis de Clémence Gueidan, médiatrice ludique et conceptrice d’escape games : « Sans réorganiser votre intérieur, vous pouvez tendre vos draps pour créer des alcôves. Un vidéoprojecteur peut permettre de construire un environnement riche. Enfin, celles et ceux qui n’ont vraiment rien sous le coude peuvent miser sur la dimension sonore, quitte à trouver la bande-son de film qui correspond : le son peut faire toute la différence. » Pour les abonnés à Spotify, voici une playlist spécialement dédiée aux jeux de rôles érotiques.

5. Les dialogues

Si vous parvenez à improviser, fantastique. Si vous arrivez à tenir un vocabulaire et un niveau de langage spécifiques, merveilleux. Cependant, personne ne vous demande une performance digne de comédiens professionnels : essayez seulement de suivre le scénario ! Si votre performance dérape en rigolade, vous n’aurez pas perdu votre soirée (« Tu te rappelles la pandémie de Covid-19, quand tu as voulu imiter un panda ? »). Nous touchons là un énorme avantage du jeu de rôles : vous gagnez quand ça marche ET quand ça ne marche pas.

Pour Flore Cherry, « rire montre que la situation est en décalage, qu’on brise nos habitudes. C’est très bien de pouvoir l’exprimer. Mais avec l’expérience du jeu de rôle, ce passage devient naturel. On sait que rentrer à deux dans ce monde-là nous fait du bien, on en connaît les bénéfices. On sait où on va, ce qu’on vient chercher. Et on en rigole beaucoup moins. »

Conseil bonus : les adeptes de « vrais » jeux de rôles (comme le fameux Donjons & Dragons) peuvent jeter un œil à leurs versions X. Vous en trouverez une liste ici (malheureusement en anglais). En temps normal, les francophones pourraient se tourner vers l’offre pléthorique de dés, jeux de plateau, jeux de cartes érotiques, disponibles dans les commerces non-essentiels que sont les sex-shops. Mais en temps de pandémie, il va falloir utiliser votre imagination. Vous ne perdez rien au change.

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