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Jours tranquilles à Paris
19 avril 2020

La Levrette

levrette

Le bestiaire sexuel est-il universel ? Si l’animalisation des rapports sexuels traverse les continents, chaque culture adopte pourtant ses propres références. Côté levrette, la langue française semble avoir la logique de son côté – comment ne pas associer la femelle du lévrier, aux pattes avant plus courtes que les pattes arrière, à la célèbre position sexuelle ? L’anglais, avec le doggy style, nous accompagne dans les plaisirs canins, quoique de manière moins spécifique. Dans la Rome antique, on parlait de coitus more ferarum, le « sexe à la manière des bêtes sauvages ». Et, dans l’Italie moderne, la levrette est une brebis (pecorina) – moins dangereuse que la lionne proposée par Aristophane. Le Kama-sutra décrit le « congrès de la vache » (congress of a cow). On l’aura compris : la levrette, ça n’est pas pour nous autres humains, censés faire l’amour de manière civilisée, donc de face, en déclamant du Baudelaire.

La levrette garde d’ailleurs, aujourd’hui encore, sa mauvaise réputation : mettre à quatre pattes une femme, une équipe de foot ou une nation… est-ce dégrader ? (Y compris si, pour ce faire, le pénétrant doit lui-même se mettre à genoux ?) A l’heure du triomphe végane, doit-on continuer à considérer l’animalisation comme une insulte ? C’est compliqué : la levrette n’est objectivement pas égalitaire. Le pénétrant a tout contrôle sur les opérations, il peut imposer une pénétration anale et, sans surprise, la pornographie lui adjoint volontiers des fessées et des tirages de cheveux – comme marques de domination et d’humiliation. La personne pénétrée est traitée comme un chien et qualifiée de même – une logique qui se heurte pourtant à l’irrationnel du désir : la sulfureuse levrette reste la position préférée des Français (enquête Zava, 2017).

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