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Jours tranquilles à Paris
3 août 2020

La jeunesse thaïlandaise manifeste sans relâche contre le pouvoir

(REUTERS/Athit Perawongmetha)

«Rendez-nous notre futur.» Entamé il y a plusieurs mois, le mouvement de manifestations étudiantes en Thaïlande a pris de l’ampleur ces deux dernières semaines, le ton s’est durci et les revendications se sont précisées. Le 18 juillet, ils étaient plusieurs milliers, rassemblés autour des quatre ailes géantes du monument à la Démocratie, dans le quartier historique de Bangkok.

Jusqu’à la nuit tombée, ils ont réclamé «la dissolution du Parlement, de nouvelles élections, la fin du harcèlement policier et un changement de Constitution». Un événement a cristallisé la colère : l’enlèvement et la disparition, le 4 juin à Phnom Penh (Cambodge), d’un jeune activiste, Wanchalerm Satsaksit, après la diffusion d’une vidéo particulièrement critique à l’égard de «l’absence totale de compétences» du gouvernement et de son Premier ministre, Prayuth Chan-o-cha. Depuis, les manifestations se multiplient, à Bangkok, Chiang Mai, Khon Kaen et Ubon, les universités du nord-est agricole et contestataire du pays.

Quelques semaines plus tôt, à Bangkok, les étudiants avaient orchestré une reconstitution de la chute de la monarchie absolue en 1932 et relu des textes d’époque, critiquant ces monarques «qui déposent leur argent à l’étranger et s’apprêtent à fuir en laissant le peuple mourir de faim tandis que le pays s’écroule». Des propos qui résonnent avec le contexte de dure crise économique traversée aujourd’hui par le royaume, alors que le souverain Rama X a décidé de passer toute la durée du confinement en Allemagne.

Pour la première fois dans l’histoire récente, des pancartes et des slogans ouvertement antimonarchistes ont été vus dans ces rassemblements, tenus bien haut par des manifestants enhardis par le port généralisé du masque. Mais la plupart préfèrent s’en prendre aux injustices du système thaïlandais, à l’omniprésence de l’armée dans la vie politique et à un système judiciaire qui «garantit l’immunité aux riches et aux puissants», selon une jeune manifestante.

Les contestataires s’en prennent surtout à la légitimité du gouvernement en place, un groupe de militaires arrivés au pouvoir par un coup d’Etat en 2014, puis élus lors d’un scrutin très controversé, surtout depuis que la crise du coronavirus a laissé entrevoir les lacunes considérables de ses ministres en matière d’économie.

Pour l’instant, les manifestations restent circonscrites aux milieux étudiants urbains, souvent issus de familles des classes moyennes supérieures, elles-mêmes favorables aux militaires, ce qui en fait plus un clash générationnel qu’une révolution. Mais c’est peut-être ce qui pourrait faire toute la différence avec les précédents mouvements de rue en faveur d’une démocratisation, écrasés jusqu’ici dans le sang.

Le Premier ministre Prayuth a d’ailleurs adopté un ton beaucoup plus conciliant envers «les petits frères», affirmant «comprendre leur colère», comparé à celui qu’il employait contre les Chemises rouges, paysans riziculteurs du Nord-Est. Ceux-là sont régulièrement accusés d’être «des communistes», et de ne pas être assez éduqués pour comprendre les enjeux du système politique.

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