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Jours tranquilles à Paris
19 août 2020

Michelle Obama sonne l’état d’urgence contre Trump

obama michelle

Article de Corine Lesnes

L’ex-First Lady a clôturé la première journée de la convention en appelant les Américains à voter « comme si leur vie en dépendait »

SAN FRANCISCO - correspondante

Ceux qui s’attendaient à un discours fort n’auront pas été déçus. Intervenant en clôture de la première journée de la convention démocrate, lundi 17 août, Michelle Obama a fait passer un sentiment d’urgence sur l’élection présidentielle du 3 novembre, appelant les Américains à voter pour le candidat démocrate Joe Biden « comme si leur vie en dépendait ».

Dans une intervention de vingt minutes, parfois poignante, empreinte de « l’empathie » manquant cruellement, selon elle, à Donald Trump, l’ex-First Lady s’est déclarée révoltée par la réponse de la Maison Blanche à une pandémie qui a fait plus de 170 000 morts. Les Etats-Unis n’ont « pas été à la hauteur », a-t-elle jugé. Ni sur le plan de la santé publique ni sur celui de la défense de leurs valeurs.

« Laissez-moi être aussi honnête et claire que possible, a -t-elle déclaré, assise dans son bureau de Washington, dans une vidéo enregistrée pour éviter tout incident technique. Donald Trump n’est pas le bon président pour le pays. Il est dépassé, incapable d’être à la hauteur du moment. Et tout simplement incapable d’être celui dont nous avons besoin. » Avant d’ajouter, fixant la caméra : « C’est comme ça » (« It is what it is »). Une référence à la réponse − glaciale − de M. Trump interrogé le 4 août sur le nombre de victimes de la pandémie.

« Le chaos et la division »

Pour la première fois, Michelle Obama a semblé désespérer de son pays. Citant les incidents qui se sont multipliés depuis l’apparition de la pandémie – les querelles autour du port du masque, l’absence de solidarité, les appels à la police pour dénoncer des concitoyens –, elle s’est inquiétée d’un climat moral dégradé, comme si les Américains avaient oublié leurs valeurs traditionnelles, sous l’influence d’un président qui est adepte du « chaos et de la division ».« Les jeunes voient ce qui se passe quand nous cessons d’avoir de l’empathie les uns pour les autres. Ils se demandent si nous leur avons menti depuis tout ce temps sur nos valeurs et qui nous sommes. C’est triste. Voilà l’Amérique telle qu’elle se présente à la prochaine génération. »

Le discours de celle qui est devenue la plus populaire des démocrates était très attendu. C’était sa quatrième intervention dans une convention du parti depuis 2008 et l’investiture de son mari, le jeune sénateur de l’Illinois, pour la course à la Maison Blanche. A l’époque, elle était apparue intimidée, mais joyeuse, sous les colonnades du temple de faux marbre reconstitué dans un stade de Denver (Colorado). Huit ans plus tard, à Philadelphie, en 2016, elle avait plaidé pour Hillary Clinton et balayé les attaques pernicieuses du milliardaire des casinos. « Quand ils s’abaissent, nous nous élevons », avait-elle défié. « Michelle » a répété qu’elle croyait toujours, malgré la défaite, à ce slogan qui a fait le tour du monde (« When they go low, we go high »).

L’élection 2016 a été perdue par M. Trump par 3 millions de voix, a-t-elle rappelé : « Dans les Etats déterminants, la marge gagnante a été de deux voix par bureau de vote. Deux voix ! » Tout en répétant qu’elle ne tient pas à s’engager dans la bataille − « vous le savez, j’ai horreur de la politique » −, elle a appelé à voter massivement « dans des nombres qui ne pourront pas être ignorés ». Par correspondance mais aussi en personne, en arrivant la veille devant les bureaux de vote s’il le faut.

« Si vous pensez que les choses ne peuvent pas être pires, faites-moi confiance, c’est possible, et elles le deviendront si nous ne changeons pas de direction. Si vous avez le moindre espoir de mettre fin à ce chaos, il faut voter pour Joe Biden comme si notre vie en dépendait. » Elle a décrit l’ancien vice-président comme l’homme de la situation, qui « sait comment sauver une économie, lutter contre une pandémie » ; qui « écoute », « dira la vérité », « accordera crédit à la science ». Lui qui a perdu sa première épouse et plusieurs de ses enfants sait ce que c’est que de « s’asseoir à une table où il y a une chaise vide ». Empathie toujours.

« Dépression légère »

Depuis son départ de la Maison Blanche, « Michelle » est devenue un phénomène littéraire. Son livre Becoming, publié en novembre 2018 (Devenir, Fayard), une semaine après des élections de mi-mandat qui ont vu un nombre record de femmes et de représentants de minorités élus au Congrès, s’est vendu à 11 millions d’exemplaires et a été traduit en 33 langues. Netflix en a fait un documentaire. Elle participe aussi à une ONG d’encouragement au vote.

La pandémie l’a vue confinée dans leur résidence de Washington (un manoir à 12 millions de dollars, soulignent les critiques du couple) avec les deux filles, de retour chez leurs parents. Comme tout le monde, elle a pris un coup au moral, comme elle en a fait l’aveu dans le podcast qu’elle tient depuis le 29 juillet sur la plate-forme de streaming Spotify. « Je sais que je suis aux prises avec une forme de dépression légère, a-t-elle confié à la journaliste Michele Norris dans l’enregistrement mis en ligne le 5 août. Pas seulement à cause du confinement mais aussi à cause du contentieux racial. Voir chaque jour l’hypocrisie de cette administration est démoralisant. » Comme se réveiller avec les informations : « Une autre personne noire déshumanisée, blessée, tuée, faussement accusée. » Une « partie de cette dépression », ajoute-t-elle, vient de là : cet éternel problème racial « qui plombe le pays depuis sa fondation ».

Devant la convention, sa voix a paru s‘étrangler lorsqu’elle a évoqué les meurtres de George Floyd et de Breonna Taylor, deux Afro-Américains tués par la police. « Dire que les vies noires comptent continue d’être traité avec dérision à la Maison Blanche », a-t-elle protesté. Au cou, elle portait un collier marqué des lettres « Vote ».

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