Sacrilège ! Michel-Ange, Pasolini... Une histoire de l'art blasphématoire
Le site de CIVITAS
Extrait de l'article de METRO
Chacun des comédiens entame de longs monologues. Les textes sont acérés, cyniques et désillusionnés sur le monde contemporain. Tout le monde en prend pour son grade : la religion "Jésus multiplia la nourriture pour le peuple au lieu de travailler coude à coude avec lui. Autant qu'on sache : il n'a jamais travaillé", mais aussi les journalistes : "ils se sentent comme des protagonistes alors qu'ils n'ont rien fait pour qu'il y ait du changement, à peine un clic sur leur Nikon". La société de consommation est disséquée et critiquée sans pincettes : "le travail est tellement funeste qu'il a conduit les hommes à inventer cette phrase - 'j'ai de la chance car j'ai un travail qui me plait' - juste pour pourvoir le supporter".
Autour des comédiens, la mise en scène est foutraque et dépasse souvent les limites du "présentable". Les acteurs se recouvrent de peinture, se déshabillent, se montent dessus. Ils fabriquent une tour de Babel en hamburgers et vers de terre, filment leur bouche en gros plan en train de se gaver ou sont cloués en croix sur le tapis de hamburgers pour réciter leurs textes.
En face, le public réagit bruyamment : éclats de rire, applaudissements ou cris de dégoût, la pièce est cathartique et Rodrigo Garcia vise juste. Au bout d'une heure et quart, le pianiste Marino Formenti monte sur scène. Il se déshabille intégralement et entame les 9 mouvements de la version pour piano des Sept dernières paroles du Christ sur la croix de Joseph Haydn, en tenue d'Adam. Le public 'blasphémateur' en est donc réduit à écouter de la musique sacrée. Quarante cinq minutes de musique plus tard, les applaudissements sont nourris et plusieurs personnes sont debout. A la sortie de la salle, si le public est partagé, c'est entre les inconditionnels du metteur en scène et les autres. Certains ont adoré, d'autres trouvent la pièce trop "gratuite" mais tous sont unanimes : ils ne voient pas le blasphème.
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Je suis allé voir samedi soir la pièce de théâtre « Golgotha picnic » qui défraie tant la presse. Conformément au mail que j'avais reçu suite à ma réservation, je suis arrivé sur les Champs-Élysées vers 19:00 alors que la représentation ne commençait qu’ à 20:30.
Dès ma sortie du métro je suis intrigué par le nombre impressionnant de CRS qui interdisent l'accès à l'entrée du métro et à une partie du trottoir le plus fréquenté des Champs-Élysées. Une petite manifestation, dont je n’ai pas su l’objet, a déclenché l'intervention d'une compagnie entière de CRS. Je me suis donc rendu sur le trottoir habituellement le moins animé, pour descendre jusqu'au rond-point des Champs-Élysées. Le théâtre du rond-point était complètement cerné par les CRS. Pour accéder au théâtre, il fallait montrer son billet, son invitation ou sa contremarque puis subir un contrôle des sacs et une fouille par palpation. Enfin un portail électronique détectait tout objet suspect. Un deuxième portail électronique était installé à l'entrée de la salle Jean-Louis Barrault où devait se dérouler la représentation.
Je dois dire que cette salle est particulièrement bien conçue et quelque soit la place que vous occupez la vue est dégagée. De loin, je ne pouvais pas distinguer les centaines de hamburgers qui recouvrait la scène et formait ainsi une espèce de moquette. Quelques vigiles de sécurité se promenaient à l'intérieur de la salle tandis que d'autres surveillaient le public, cachés dans la pénombre côté cour et côté jardin.
L'œuvre de Rodrigo Garcia déclamé par des acteurs espagnols, et donc en espagnol, était sous-titré sur un écran géant en fond de scène. Images en direct ou séquences filmées de l'ange déchu ponctuaient le jeu des comédiens.
Extrait de "Golgota picnic"
Extrait :
« Le baiser que ta mère te donnait dans ton lit, chaque soir avant de dormir, quand tu étais petit, était une prémonition de la mort. C'était un baiser d'adieu, la nuit tombait et on ne pouvait pas savoir ce qui adviendrait pendant la nuit. Tout bien regardé, nous étions plus en sécurité que dans la rue, nous étions au lit, de nuit, quand il n'y a pas de danger car les gens dorment, la porte de la maison était fermée à clef, nous ne courions pas le moindre risque. Mais la tombée de la nuit, le fait de s'endormir nous laissait entendre que le sommeil nous mènerait tout droit à la disparition, qu'entre dormir et mourir la distance était insignifiante et qu'en dormant, n'importe qui pouvait mourir. Voilà pourquoi je me souviens du verre d'eau et du baiser du soir dans mon lit d'enfant comme de l'antichambre quotidienne de la mort, comme de la meilleure des préparations pour mourir, un verre d'eau sur la table de nuit pour ne pas aller en enfer les lèvres sèches, la langue pâteuse. Toute mère ressent la proximité de la mort de son enfant quand elle lui lit une histoire ou qu'elle remonte la couverture roulée en boule à ses pieds. Ce n'est pas que le sommeil nous arrache la vie, le sommeil sème la confusion dans notre vie, et ce que l'on nomme repos ou sommeil réparateur n'est rien d'autre qu'un entraînement à disparaître. Nous nous endormons car la réalité nous offense. »
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Source AFP. Catholiques traditionalistes mobilisés contre la pièce de théâtre Golgota Picnic et défenseurs de la "liberté de création" opposés à ce qu'ils appellent "l'ordre moral" ont manifesté ce dimanche à Paris dans deux marches distinctes. Quelque 2 000 catholiques traditionalistes selon la police, 3 000 à 4 000 selon les organisateurs, ont marché de la place de l'Alma (8e arrondissement) au théâtre du Rond-Point où se joue la pièce de l'Argentin Rodrigo Garcia. Dans le même temps, environ 250 personnes, selon un journaliste de l'AFP, protestaient contre "l'ordre moral" défendu par l'Institut Civitas mobilisé contre cette pièce de théâtre. Elles ont défilé de la place Saint-Michel (5e arrondissement) à Jussieu, à l'appel d'une vingtaine d'organisations dont le Parti de gauche, le Parti communiste, le NPA et le syndicat Sud.
Les catholiques traditionalistes, venus de partout en France et des pays voisins, ont dénoncé la "christianophobie" et affirmé leur foi en Jésus-Christ, blasphémé à leurs yeux par la pièce. Une banderole placée en tête de cortège proclamait : "La France est chrétienne et doit le rester". "Christianophobie, ça suffit" ou "Christ blasphémé, chrétiens indignés", ont-ils aussi scandé. "Ce spectacle est une injure au Christ. Les scènes et les dialogues sont viscéralement antichrétiens, sordides, pervers et humiliants, les Évangiles y sont présentés de façon ordurière", a lancé Alain Escada, secrétaire général de l'Institut Civitas, organisateur depuis plusieurs mois de manifestations "contre les spectacles blasphématoires". "On ne peut supporter de le voir insulté, humilié, souillé, recrucifié", s'est-il indigné.
De leur côté, les opposants à "l'ordre moral" se sont dispersés dans le calme vers 16 h 30 après avoir marché derrière une banderole rouge où l'on pouvait lire : "Nos libertés contre leur ordre moral". Ils ont aussi scandé : "Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers", "Non à la censure, tous pour la culture", ou encore "Ni Dieu, ni maître, ni ordre moral". "Il est hors de question que la liberté de création soit restreinte ou censurée au nom d'une vérité révélée", a déclaré Alexis Corbière, secrétaire national du Parti de gauche et conseiller de Paris, en s'élevant contre le fait que "Civitas veuille réhabiliter le délit de blasphème".
Manifestation le soir de la Première de la pièce "Golgota picnic" (10 décembre)