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Jours tranquilles à Paris
13 décembre 2014

Diaporama : Gainsbourg parmi nous

Derrière beaucoup de photos de Serge Gainsbourg se cache souvent Pierre Terrasson, photographe accompli et complice de Gainsbourg comme de Gainsbarre, actuellement exposé à la Galerie Open Cage de Belleville. retour sur une amitié très « parce que c’était lui, parce que c’était moi ».

« Serge a remarqué que nous avions le même appareil, un Nikon F2 24mm… »

En 1984, Pierre Terrasson s’affirmait comme une étoile montante de la photographie quand Serge Gainsbourg se contentait d’être un artiste sur la pente descendante à cause de ses excès. La rencontre eut pourtant lieu sans grande difficulté : à l’époque, les deux hommes fumaient chacun trois paquets par jour et avaient une fâcheuse tendance à ne pas sucer que des glaçons en s’adonnant à de longues discussions. D’abord sur la peinture, la première passion de Serge Gainsbourg et qu’il avait en commun avec le photographe, pur produit de l’École nationale supérieure des beaux-arts dans les seventies.

Les deux hommes partagent aussi une passion commune pour la sculpture, la musique classique et évidemment la photographie. « Serge était un bon photographe, un véritable artiste. Lors de notre première entrevue au cours de notre séance de shooting, il a remarqué que l’on avait le même appareil argentique : un Nikon F2 24 mm. Il s’en est tout de suite amusé et a voulu dans la foulée que je le mette en scène avec ! », explique-t-il. De cette rencontre naît une véritable complicité qui s’immortalisera désormais sur papier glacé.

 

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En sursis, Serge doit tenir tête à Gainsbarre. Il vient de signer Love on the beat, dix-septième opus enregistré à New York, qui deviendra en quelques mois son disque le plus vendu. L’homme à la tête de choux se perd dans l’abondance. Il accélère le rythme des concerts, en même temps que celui de ses toasts. Il doit apprendre à ralentir le tempo s’il ne veut pas être atteint de cécité, ou tout simplement s’éteindre à jamais. On sait ce qu’il adviendra. Entre deux shows, le poète prend plaisir à poser pour Pierre Terrasson, qui se souvient que « toute la vie de Serge Gainbsourg était une grande mise en scène, [qu']il n’avait aucun mal à se livrer devant l’objectif ». Une aubaine pour ce photographe, fils de directeur de l’opéra du Rhin, qui aime « trouver un climat particulier » pour ses clichés.

Comme lorsque ce dernier souhaite improviser une séance dans le commissariat d’Aubervilliers, « pour un faux interrogatoire : Serge Gainsbourg tenait absolument que la « Marianne » soit éclairée et trône au-dessus de lui. Voilà pourquoi son buste est surexposé par rapport au corps de Serge ». En 1985, c’est Catherine Deneuve qui avait prêté ses traits à la sculpture, symbole de la République française. Quatre ans plus tôt, le chanteur lui avait même signé un album entier : Souviens-toi de m’oublier. « Il tenait absolument à lui rendre un hommage dans cette série », témoigne encore l’auteur du cliché.

Pour les besoins de You’re Under Arrest, ultime album de l’artiste, il demande au photographe toute une série sur fond de vinyles, dans son studio. Serge pose, souriant, détendu et, évidemment, « Repetto à perpet ! » aux pieds. « Pendant que j’étais en train de le shooter, Serge m’arrêta brusquement. Il avait remarqué qu’il manquait deux dents à mon jeune assistant. Il lui dit : « P’tit gars tu ne peux pas rester comme ça ! ». Ça coûtait 10 000 francs à l’époque pour faire combler ces trous béants. Le gamin n’avait pas l’argent mais Serge, sans hésiter, lui signa un chèque avec pour seule consigne d’attester dans une lettre qu’il allait bien utiliser cette somme pour se les faire remplacer. Le jeune hésita longtemps pour déposer le chèque. Car une signature de Serge Gainsbourg, même sur un chèque, valait beaucoup plus cher que la somme inscrite. Mais il décida finalement de l’encaisser ».

Au fond de la galerie trônent quatre clichés de Vanessa Paradis, âgée alors à l’époque de seulement 15 ans. Pierre Terrasson fut en effet l’un des premiers à la mettre en scène à la lumière de son objectif de 1987 à 1989. Il suivra la Lolita « espiègle mais toujours très directive » dans ses moindres faits et gestes, de la plage de Sangatte, station balnéaire du Pas-de-Calais au tournage à Saint-Étienne du film réalisé par Jean-Claude Brisseau, Noce blanche en 1988. « J’ai finalement été son premier « amour » artistique avant qu’elle ne passe à Serge Gainsbourg, Lenny Kravitz, Johnny Depp, et quelques autres », s’amuse-t-il.

Exposition de Pierre Terrasson à l’Open Cage, 62 rue Rebeval 75019 Paris. Entrée libre.

À découvrir également : Gainsbarre, publié en 2011 aux Editions Premium, ouvrage regroupant les photographies souvent inédites de Pierre Terrasson avec des textes d’Alain Wodrascka et une préface de Dani.

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