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Jours tranquilles à Paris
1 février 2019

Affaire Benalla : en juillet, l’ex-chargé de mission se prévalait du soutien de Macron

Par Simon Piel - Le Monde

Selon « Mediapart », qui révèle plusieurs enregistrements, il a violé son contrôle judiciaire en rencontrant Vincent Crase, également mis en examen.

Plus les révélations médiatiques se succèdent, plus les raisons qui ont poussé Emmanuel Macron à protéger son ancien collaborateur Alexandre Benalla après son licenciement de l’Elysée intriguent.

Le président ignorait-il que l’ancien chargé de mission, fort de ses anciennes fonctions, mais toujours titulaires de passeports diplomatiques, fréquentait de nombreux intermédiaires actifs en Afrique pour développer ses propres affaires ? M. Macron savait-il que son ancien garde du corps se revendiquait ici et là du soutien de la présidence de la République pour avancer sur des sujets relativement éloignés de l’intérêt général ?

Plus grave encore, avait-il été informé qu’Alexandre Benalla et son ami Vincent Crase avaient noué des relations d’affaires – notamment avec un oligarque russe, soupçonné d’entretenir des liens avec le crime organisé – alors même qu’ils étaient encore en poste, comme l’a révélé, jeudi 31 janvier, le site Mediapart ?

Plus les révélations médiatiques se succèdent, plus il est permis de penser que le chef de l’Etat et une partie de l’équipe qui l’entoure actuellement a l’Elysée ont contribué à entretenir un lien avec M. Benalla après que celui-ci a été licencié et qu’il s’employait à profiter de son passage à la présidence pour développer ses activités privées.

Des affairistes à l’Elysée ?

Le site Mediapart a publié jeudi plusieurs enregistrements audio révélant notamment qu’Alexandre Benalla s’est intéressé de très près à un contrat noué par son ami Vincent Crase avec l’homme d’affaires russe Iskander Makhmudov, soupçonné d’être lié à la criminalité organisée. Le contrat prévoyait notamment la protection des biens immobiliers en France de l’oligarque, et de sa famille à Monaco.

Les révélations du Monde sur l’agissement du duo à l’occasion des manifestations du 1er-Mai – les deux hommes avaient alors procédé à des interpellations brutales de manifestants alors qu’ils étaient là sous le statut d’observateurs – ont mis en péril leurs affaires. La société Velours, qui avaient sous-traité le contrat à l’entreprise de Vincent Crase, baptisée Mars, dénonce le contrat.

« Là, il faut couper la branche, dit Alexandre Benalla à l’occasion d’une rencontre avec Vincent Crase le 26 juillet en violation de son contrôle judiciaire, selon les enregistrements de l’échange. Faut changer de portage, faut faire ce qu’on avait prévu de faire et transférer… (…) Faut que tu disparaisses de la boîte. (…) Donc faut qu’on trouve un mec… (…) Enfin j’ai une idée en tête, mais faut qu’on mette la boîte au nom d’un autre mec… Parce que sinon (…) ils vont faire des saisies conservatoires et ils vont mettre un stop à la boîte. » Y avait-il des affairistes à l’Elysée ?

Selon le site d’informations, Alexandre Benalla serait par ailleurs « personnellement impliqué dans ce contrat, y compris dans ses montages financiers ». Ce qui, si c’était confirmé, viendrait contredire les déclarations de l’intéressé devant la commission d’enquête sénatoriale. Il avait assuré que « jamais » il n’avait « contribué » à la « négociation » ou à la « conclusion » de ce contrat russe. S’il était établi qu’Alexandre Benalla avait menti devant la Haute Assemblée, il pourrait être poursuivi pour faux témoignage, une infraction passible de cinq années d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. « C’est une affaire très grave », a réagit le sénateur (PS) du Loiret Jean-Pierre Sueur après les révélations du Monde et de Mediapart.

Arrogance

Le sentiment d’impunité avec lequel M. Benalla a conduit ses affaires après son licenciement, tout comme l’arrogance avec laquelle il a répondu aux juges d’instruction chargés de l’enquête sur les brutalités qu’il a commises le 1er-Mai contre des manifestants à l’occasion des protestations contre la loi travail trouvent-ils leur explication dans la proximité qu’il a conservée avec le chef de l’Etat et ses plus proches collaborateurs ?

« Truc de dingue, le “patron”, hier soir il m’envoie un message, il me dit : “Tu vas les bouffer. T’es plus fort qu’eux, c’est pour ça que je t’avais auprès de moi” », expliquait M. Benalla à Vincent Crase le 26 juillet selon les enregistrements publiés par Mediapart.

L’Elysée a eu beau démentir le texto présidentiel, il est désormais établi, comme Le Monde l’a révélé, que plusieurs des collaborateurs d’Emmanuel Macron ont continué à voir Alexandre Benalla après son départ de l’Elysée. C’est le cas notamment d’Ismael Emelien, conseiller spécial, de Ludovic Chaker, rattaché à l’état-major particulier du président de la République, chargé des dossiers de renseignement et de lutte antiterroriste et de Paul Soler, officier des forces spéciales devenu lui aussi chargé de mission à l’état-major particulier.

Pour quelles raisons ? C’est l’une des nombreuses questions à laquelle l’Elysée se refuse encore aujourd’hui à répondre. Contactés, ni M. Benalla, ni son avocate Jacqueline Laffont n’ont donné suite aux sollicitations du Monde.

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