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Jours tranquilles à Paris
24 mai 2019

A son procès, Patrick Balkany fait celui de Didier Schuller

balkany54

Par Henri Seckel

Le tribunal correctionnel de Paris est revenu, mercredi, sur l’origine des poursuites pour « blanchiment » et « corruption » visant le maire de Levallois-Perret.

Le second « procès Balkany », celui pour « blanchiment de fraude fiscale » et « corruption », a démarré pour de bon, mercredi 22 mai, lorsque le président du tribunal, Benjamin Blanchet, est revenu six ans en arrière : « Nous allons évoquer l’origine du dossier. » Le 24 octobre 2013.

Entendu ce jour-là dans le cadre de l’enquête sur « l’affaire Karachi », Didier Schuller dévoile le patrimoine immobilier que son ancien allié Patrick Balkany cacherait au fisc : « Il aurait à sa disposition un palais à Marrakech [Maroc], une résidence de luxe à Saint-Martin [Antilles françaises], et l’usufruit du moulin de Giverny [Eure]. » Puis il ironise : « Je suis heureux de voir que ce que je pensais être du financement politique a pu profiter à d’autres fins, et sans doute personnelles. » Une enquête est ouverte.

Didier Schuller fut directeur général de l’office HLM des Hauts-de-Seine (1986-1994) quand Patrick Balkany en fut président (1983-1998). A l’époque, ce département en plein boom immobilier et aux mains du RPR était le théâtre de turpitudes politico-financières qui deviendront « l’affaire des HLM des Hauts-de-Seine » : certaines entreprises de BTP finançaient de manière occulte le parti, qui les favorisait en retour lors des marchés publics.

« Durant les années 1987 à 1994, a raconté Didier Schuller, j’ai effectué des voyages à l’étranger pour le compte de Patrick Balkany, et j’ai déposé des sommes d’argent en espèces dont j’évalue le montant global entre 7 millions et 10 millions de francs sur un compte à Zurich », dont les références, affirme-t-il, lui ont été données par M. Balkany. « A l’époque, Patrick Balkany était considéré comme le trésorier officieux du RPR. » Et M. Schuller l’accuse de s’être servi.

« M. Schuller est un mythomane de la pire espèce »

Le président Blanchet lit calmement ces mots accablants sans lesquels le procès Balkany n’aurait pas lieu. A la barre, le prévenu de 70 ans a retrouvé son aplomb après le choc du réquisitoire – quatre ans ferme avec mandat de dépôt – prononcé une semaine plus tôt lors du procès pour « fraude fiscale », et il peine à contenir sa colère : « Je voudrais vous dire que M. Schuller est un mythomane de la pire espèce. »

Il ne faudrait voir là que la « vengeance » de « quelqu’un qui n’a pas digéré que je lui aie pas donné l’investiture aux municipales de 2014 » – une blessure que Didier Schuller, battu cette année-là à Clichy-la-Garenne, n’a jamais cachée.

« De la part de Didier Schuller, rien ne m’étonne », poursuit le maire de Levallois-Perret, qui trouve en revanche « étonnant que la justice ait accordé autant d’importance à ses déclarations, connaissant le personnage. » Lequel fut le « fugitif le plus recherché de France » après l’affaire Maréchal en 1994, puis condamné lors du procès des HLM des Hauts-de-Seine en 2005. « Comme témoin de foi, monsieur le président, excusez-moi, mais on peut choisir mieux », s’agace Patrick Balkany, qui avait été, lui, relaxé dans l’affaire.

« Un tissu de mensonges éhontés »

Patrick Balkany répète que son argent en Suisse provenait d’un héritage paternel et de la revente de ses actions dans l’entreprise familiale, et que « depuis 36 ans [qu’il est] maire, [il n’a] jamais été accusé de corruption » – jusqu’à ce procès, donc, où il devra s’expliquer sur des faits datant de 2009.

« Ce que vous avez lu, c’est un tissu de mensonges éhontés, ajoute-t-il. Je ne regrette qu’une chose, c’est que le parquet n’ait pas cité Didier Schuller comme témoin, pour que je puisse le lui dire en face. » Lui-même s’est bien gardé de le faire, alors qu’il en avait le droit.

L’absence de Didier Schuller évite tout risque de pugilat, sur un sujet qui n’est pas essentiel. La 32e chambre correctionnelle n’est pas chargée de refaire le procès des HLM des Hauts-de-Seine, mais de juger, pour l’heure, des faits de « blanchiment de fraude fiscale » commis entre 2007 et 2014. Le président a brièvement évoqué, mercredi, les premiers mouvements d’argent suspects via des structures offshore. Sur le sujet, Patrick Balkany s’est montré bien moins vindicatif.

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