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Jours tranquilles à Paris
13 juin 2019

Greta - vu aujourd'hui

Synopsis

Quand Frances trouve un sac à main égaré dans le métro de New York, elle trouve naturel de le rapporter à sa propriétaire. C’est ainsi qu’elle rencontre Greta, veuve esseulée aussi excentrique que mystérieuse. L’une ne demandant qu’à se faire une amie et l’autre fragilisée par la mort récente de sa mère, les deux femmes vont vite se lier d’amitié comblant ainsi les manques de leurs existences. Mais Frances n’aurait-elle pas mordu trop vite à l’hameçon ?

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PAS GRAND-CHOSE À «GRETA»

Par Camille Nevers - LIBERATION

L’ennui procuré par ce jeu de piste hitchcockien vu et revu n’est compensé que par le génie trop solitaire d’Isabelle Huppert.

Greta (Isabelle Huppert), une ogresse à New York. Photo Metropolitan Filmexport  

Une femme, de dos, remonte un quai avec, niché sous le bras, son sac à main rigide - pardon, non, rémanence optique cinéphile, le sac, Greta ne l’a plus, l’ayant abandonné sur un siège du métro dans l’attente qu’une âme charitable le lui rapporte, à l’adresse indiquée sur la carte d’identité plastifiée glissée au milieu d’autres petites choses de sac de femme. Greta l’ogresse en Petit Poucet déploie ainsi son jeu de piste. A l’hameçon ne mordent curieusement que des jeunes filles. Admettons. Après quoi, le film ne sera plus qu’emprise, manip et perversité.

Après ce premier plan archi clignotant Marnie donc (comme un arbre de Noël qui aimerait se faire passer pour l’enseigne d’un spectacle sur Broadway), il s’exerce surtout dans l’heure et demie qui suit, de stress mécanique en réactions conditionnées, à être la copie couleur narrative de Psychose. Exception faite : pas de douche, pas de liquidation expresse de l’héroïne (Chloë Grace Moretz), et sans Norman Bates non plus puisque remplacé au débotté par… sa mère. Greta est ça très vite, Psychose revu et corrigé du point de vue de la mère tarée, en l’absence de sa progéniture disparue qu’elle a largement contribué à détruire. «Hitchcockerie» comme les années 80-90 en donnèrent à la pelle, et nantie d’un directeur photo dont l’élégance garce a consisté à soigner la lumière de ses décors de préférence à celle sur ses personnages, une chaise est mieux mise en valeur que chaque comédienne.

Faisons comme tout le monde pour tromper l’ennui du film : parlons d’Isabelle Huppert. Ce que Chabrol doit lui manquer, au moins autant qu’à nous, pour qu’elle donne ce que lui ne peut plus ni lui prendre ni lui rendre dans ce type de prestation tragico-pathétique, où elle ne peut plus compter que sur elle-même, trop seule, trop ouf, en roue libre ; il n’y a qu’une Breillat (Abus de faiblesse) ou un Verhoeven (Elle) pour savoir jouer encore à forces égales avec son magnétisme automate de brindille indestructible qui exige une acuité de regard aussi sûre que son intensité butée, sourire qui frise dans l’inexpressivité du masque. A défaut de regard enveloppant de cinéaste, et face à Chloë Grace Moretz au beau talent pâle et solide, il y avait quelque chose à jouer, proche de ce que travaille Killing Eve, série à cent coudées du film de Neil Jordan, à partir des carrures et émotivités opposées de Jodie Comer et Sandra Oh. Le film se contente de porter sur les nerfs, adieu Hitchcock, on se surprend à penser à Tex Avery et son running gag du marquage à la culotte - contre toute vraisemblance elle se tient là, partout - de Huppert façon Droopy, imperturbable dans son ubiquité quelconque. Elle est marrante.

Camille Nevers - LIBERATION

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