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Jours tranquilles à Paris
11 juillet 2019

Benjamin Griveaux choisi par LRM pour mener les municipales à Paris

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Par Denis Cosnard

Fidèle d’Emmanuel Macron, l’ancien porte-parole du gouvernement va tenter de gagner Paris, une ville gérée par la gauche plurielle depuis dix-huit ans.

Cette fois, c’est officiel. Benjamin Griveaux sera bien la tête de liste de La République en marche (LRM) pour les prochaines élections municipales à Paris, en mars 2020. Sa mission : faire tomber les socialistes, au pouvoir depuis dix-huit ans, et permettre au parti présidentiel de s’enraciner durablement dans la première ville de France.

Ainsi en a décidé, mercredi 10 juillet au soir, le bureau exécutif de LRM, en suivant la recommandation émise dans l’après-midi par sa commission nationale d’investiture.

« Lors de son audition, Benjamin Griveaux est celui qui a le plus convaincu », a indiqué la commission, en évoquant « un diagnostic étoffé des attentes des Parisiens et Parisiennes, réalisé sur la base de rencontres et d’échanges avec plus de 1 000 personnes, conformément à l’ADN d’En marche et à ce que le mouvement attend de ses candidats ».

Cet adoubement de l’ancien porte-parole du gouvernement clôt une longue compétition interne. Pendant des mois, sept candidats ont fait campagne pour mener la future bataille dans la capitale. Fidèle compagnon de route d’Emmanuel Macron depuis 2015, Benjamin Griveaux a cependant toujours fait figure de favori, surtout à partir du moment où l’Elysée a accepté, fin mars, qu’il quitte le gouvernement pour se consacrer entièrement aux futures municipales. « Le président de la République trouve que Benjamin Griveaux est un bon candidat pour Paris », confiait alors un proche d’Emmanuel Macron.

Cette bénédiction officieuse a nourri des soupçons de verrouillage et une polémique sur le manque de démocratie interne au parti. Ses dirigeants n’avaient-ils pas promis de « faire de la politique autrement » ?

Ces dernières semaines, l’Elysée et LRM ont donc multiplié les signes pour montrer que les dés n’étaient pas pipés. Mardi, la commission d’investiture a accordé autant de temps à chacun des trois hommes restés en lice, tous députés : Benjamin Griveaux, Hugues Renson, un ancien chiraquien à la fibre sociale, et le mathématicien de centre gauche Cédric Villani.

Avant même l’annonce officielle, ce dernier a reconnu sa défaite dans un communiqué diffusé sur Twitter. « Ce qui était annoncé de longue date est désormais acquis : il est clair que je n’obtiendrai pas d’investiture de l’appareil de LRM », déplore-t-il.

La récente montée en puissance de Cédric Villani, rallié par ses ex-rivaux Mounir Mahjoubi et Anne Lebreton, n’a effectivement pas changé la donne : c’est bien le favori de l’Elysée qui a été choisi. Avec, devant lui, cinq défis pour parvenir à ses fins.

Recoudre les plaies. Pour l’emporter en 2020, Benjamin Griveaux doit commencer par pactiser avec ses concurrents de cette simili-primaire. Tous les candidats se sont certes engagés par écrit à soutenir celui qui serait investi et, dans les déclarations publiques, aucun mot trop violent n’a été proféré. Micros fermés, les rivaux et leurs entourages n’en ont pas moins glissé quelques formules assassines et peaux de banane.

Cédric Villani se montre clairement amer. « La décision de la commission est incompréhensible », se désole un de ses proches. Alain Richard, le coprésident de la commission, a appelé mercredi soir le candidat malheureux à « se reprendre ».

« L’été sera utile pour cicatriser tout cela », avance Pierre Auriacombe, un élu du 16e arrondissement rallié à M. Griveaux. Ce dernier a déjà des idées sur le rôle qu’il pourrait confier à chacun : M. Villani pourrait s’occuper du Grand Paris et devenir candidat dans le 14e arrondissement, M. Mahjoubi se charger des dossiers liés au numérique, Mme Lebreton des questions sociales, etc.

Organiser la campagne. Benjamin Griveaux a programmé de façon détaillée le démarrage de sa campagne. Une journée de séminaire est prévue avant les vacances pour mobiliser tous les cadres parisiens de LRM. Des mandataires financiers vont être désignés et un compte spécifique sera ouvert pour le 1er septembre. Budget prévu pour la campagne : 2,4 millions d’euros au maximum. « Il faut en lever la moitié auprès de tous ceux qui voudront nous faire des dons et emprunter l’autre », estime-t-il.

Autre mission : sélectionner les 527 candidats des futures listes, en veillant aux équilibres politiques et à la parité femmes-hommes. La secrétaire d’Etat Marlène Schiappa, un des premiers soutiens de M. Griveaux, pourrait mener campagne dans le 14e arrondissement, mais pas en tête de liste. L’ancien porte-parole compte, pour sa part, être candidat « dans un arrondissement où il faut mouiller le maillot » pour l’emporter, le 12e ou le 15e par exemple.

L’été sera aussi mis à profit pour préparer une consultation des Parisiens, désormais un classique des campagnes de LRM. Celle-ci devrait avoir lieu en septembre, à la fois sur le terrain et au travers d’une plate-forme numérique. Objectif : tester les futures grandes mesures du programme électoral.

Faire rêver les Parisiens. A ce stade, en effet, M. Griveaux n’a évoqué que quelques idées : interdire les cars diesel dans Paris, ouvrir certains marchés le soir ou donner plus de pouvoir aux maires d’arrondissement. « Ils gèrent l’équivalent de grandes villes et n’ont pas les moyens d’acheter une balayeuse par an », souligne-t-il.

L’ancien socialiste a aussi beaucoup parlé d’écologie, pris sous l’angle de la santé : « Mon fils et ma fille de 5 et 7 ans ont fait des bronchites asthmatiques, bizarrement quelques jours avant le pic de pollution. » Il propose qu’à Paris les enfants bénéficient de trois examens de santé gratuits en cinq ans.

Benjamin Griveaux promet aussi d’être un maire attentif à l’exécution des décisions prises : « C’est là que le travail commence, il faut entrer dans les détails pour être sûr que les mesures annoncées changent vraiment la vie des gens. » Une façon de se démarquer d’Anne Hidalgo, accusée de multiplier les annonces sans lendemain. Mais tout cela ne constitue pas un programme complet, de nature à faire rêver les électeurs.

Corriger son image. La scène se déroule un après-midi de juin, à Montmartre. Benjamin Griveaux déambule sur la butte avec quelques militants. Soudain, un jeune homme assez agité se met à le suivre en l’invectivant : « Assassin ! Salaud ! Capitaliste ! » Il termine par l’injure suprême : « Macroniste ! » Le candidat se retourne : « Ça oui, j’accepte. »

En quelques années, l’ancien ministre a acquis une assez forte notoriété, mais à double tranchant : 43 % des Parisiens déclarent avoir une bonne opinion de lui, mais 35 % en ont une négative, selon un sondage IFOP réalisé du 8 au 10 juillet pour son rival Cédric Villani, une personnalité moins connue mais plus consensuelle.

Auprès de beaucoup, M. Griveaux donne l’image d’un homme cassant, sûr de lui, un de ces fidèles de Macron toujours prêts à donner des leçons dans un vocabulaire parfois abscons. Ce vendredi-là, en discutant avec des militants associatifs, il parle de « process », de « granularité de la data », de « goodwill réputationnel ». « Et vous avez votre roadmap ? », interroge-t-il. Pas membre de la « start-up nation » pour rien… « En réalité, pourtant, il n’est pas arrogant, assure un de ses soutiens, Eric Azières, élu UDI-MoDem du 14e arrondissement. La campagne devra gommer ce décalage entre ce qu’il est et l’image qu’il donne. »

Gagner Paris. A Paris, Emmanuel Macron et ses partisans ont obtenu d’excellents scores à la présidentielle, aux législatives puis aux récentes européennes, où la liste Renaissance est arrivée en tête dans seize arrondissements sur vingt.

Pour les municipales, LRM dispose à ce stade d’une longueur d’avance dans les sondages, face à une droite en miettes et une gauche plurielle moins puissante qu’elle ne l’a été.

L’enquête IFOP place les listes conduites par Benjamin Griveaux à 26 % des intentions de vote au premier tour. Celles d’Anne Hidalgo n’obtiendraient que 23 %, alors qu’elles avaient rassemblé 34 % des électeurs au premier tour en 2014. Le mode de scrutin très particulier, avec des listes différentes dans chacun des dix-sept secteurs de la capitale, la possibilité de triangulaires voire de quadrangulaires au second tour, puis une élection du maire par 163 grands électeurs, rend toutefois la suite difficile à prévoir.

Pour le candidat de LRM, « il faut un rassemblement large dès le premier tour ». Il aimerait en particulier trouver un accord à droite avec Pierre-Yves Bournazel, ce député de la majorité présidentielle qui entend, pour l’heure, faire campagne sous ses propres couleurs.

Dans le 18e, par exemple, « on prendrait des risques s’il y avait deux listes macronistes, l’une Griveaux et l’autre Bournazel », juge Félix Beppo, un élu de cet arrondissement de gauche. Méthodique, Benjamin Griveaux s’est donné jusqu’à la fin de l’automne pour régler ce sujet.

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