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Jours tranquilles à Paris
30 janvier 2020

Les Césars

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Nominations aux Césars : « J’accuse », « Les Misérables », « La Belle Epoque » et « Portrait de la jeune fille en feu » en tête

L’Académie, faisant avant tout droit à la qualité esthétique de son film « J’accuse », n’a pas cédé à la campagne de boycott qui accompagne Roman Polanski.

Au Fouquet’s, à 10 heures, à Paris, se tenait mercredi 29 janvier, en toute simplicité, la conférence de presse de la nomination des Césars 2020, dont la cérémonie aura lieu le vendredi 28 février. Mais il devient difficile pour un événement un tant soit peu exposé de passer à travers les mailles de la vigilance contemporaine, comme d’ailleurs de ses effets pervers qui consistent à créer de la polémique à tout bout de champ.

Le cinéma, avec ses ors et son entre-soi, échappe moins que tout autre à cette nouvelle règle. Régulièrement étrillés pour l’ennui qu’ils distillent, épinglés en 2017 sur la question d’une présidence contestée, celle, en l’occurrence, de Roman Polanski, les Césars ont ainsi d’ores et déjà été atteints par un premier « Scud », portant sur l’opacité de leur organisation et de leur fonctionnement, émanant de la corporation elle-même, en l’espèce la Société des réalisateurs de films (SRF).

Adressé le lundi 13 janvier, peu avant le « dîner des révélations », un communiqué dénonçait le refus de l’Académie d’entériner le choix des marraines – la romancière Virginie Despentes, la réalisatrice Claire Denis – fait par deux jeunes acteurs (Jean-Christophe Folly et Amadou Mbow). Excuses officielles immédiates, arguant d’un quiproquo, qui n’empêcha pourtant pas l’envoi, le 17 janvier, d’un second communiqué du Syndicat des producteurs indépendants (SPI) qui appelait l’Académie à « plus de transparence et de modernité », et renchérissait sur l’aspect « discriminatoire » du refus de ces parrainages.

La réponse d’Alain Terzian, président de l’Académie des Césars, ne se fit pas non plus attendre, menée cette fois sur un ton plus offensif.

Atmosphère touffue

C’est dire dans quelle atmosphère touffue se tenait, ce mercredi, la conférence de presse de l’annonce des nominations. Elle fut d’emblée apaisée par Alain Terzian dans un bref discours liminaire, qui prenait acte de la contestation et signifiait la volonté de l’Académie de s’engager à « élargir le conseil d’administration en le faisant voter par l’assemblée générale », d’œuvrer à « la modernisation et à la parité », tout en « retissant des liens entre les générations ». A la suite de ces vœux énoncés avec « détermination », la conférence de presse fut expédiée sans fioritures sous la preste conduite de la future maîtresse de cérémonie, Florence Foresti, au cours d’une lecture en mode mitraillette.

Peu de surprises ressortent de cette annonce, dont les grands gagnants sont J’accuse, de Roman Polanski, avec douze nominations, suivi des Misérables, de Ladj Ly, et de La Belle Epoque, conte mélancolique de Nicolas Bedos, avec onze nominations chacun, puis de Portrait de la jeune fille en feu, film-peinture de Céline Sciamma. A quelques encablures, Roubaix, une lumière, d’Arnaud Desplechin, ainsi que Grâce à Dieu, de François Ozon – deux beaux films d’auteur à tendance sociétale marquée –, ne perdent rien de leurs chances de décrocher du moins le titre de la meilleure réalisation et/ou du meilleur film.

De grands absents

Ce par quoi, évidemment, la polémique, brièvement chassée par la porte, se réintroduit céans par la fenêtre. Les membres de la corporation, droits dans leurs bottes et faisant avant tout droit à la grande qualité esthétique de J’accuse, film consacré à l’affaire Dreyfus, n’ont en effet pas cédé à la campagne d’accusations et de boycott qui accompagne désormais chacune des apparitions de Polanski ou d’un de ses films.

Les faits ne sont pourtant pas minces, puisqu’une nouvelle plainte pour viol avait été rendue publique peu avant la sortie du film. Il ne fait donc guère de doute que, à compter de cette conférence de presse, un nouveau mouvement de protestation s’engage. Interrogé à l’occasion de la conférence de presse, Alain Terzian a répliqué que les Césars ne sont « pas une instance qui doit avoir des positions morales ».

Du côté de ceux sans qui le cinéma se réduirait à pas grand-chose, à savoir les actrices et les acteurs, relevons les noms d’Adèle Haenel, Anaïs Demoustier, Eva Green ou Doria Tillier ; là ceux de Jean Dujardin, Roschdy Zem, Daniel Auteuil ou Vincent Cassel.

Relevons aussi, au passage, la haute tenue de la section documentaire avec, notamment, M, de Yolande Zauberman, 68, mon père et les clous, de Samuel Bigiaoui, La Cordillère des songes, de Patricio Guzman.

Protestons enfin pour les scandaleusement peu nommés, eu égard à leurs vertus, Jeanne, de Bruno Dumont, Alice et le maire, de Nicolas Pariser, et Proxima, d’Alice Winocour. Consignons enfin, pour la postérité, dans l’obituaire de rigueur, les noms de ces grands et regrettés absents que sont Quentin Dupieux pour Le Daim et Rebecca Zlotowski pour Une fille facile, deux des films les plus frais, intelligents et aériens de l’année 2019.

Jacques Mandelbaum

Les douze nominations aux Césars de « J’accuse » de Polanski ont fait réagir. La secrétaire d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, s’est interrogée mercredi sur RTL du « message qui est envoyé ». « Là, je crois que l’on ne respecte pas les femmes », a-t-elle ajouté, estimant que « manifestement, le cinéma n’a pas terminé sa révolution en ce qui concerne les violences sexistes et sexuelles ». « 12 nominations pour le film J’accuse de Polanski ! 12 comme le nombre de femmes qui l’accusent de viols ! Honte @Les Césars », a écrit sur Twitter l’association Osez le féminisme, avant d’appeler à manifester devant la salle Pleyel, où se tiendra, le 28 février, la cérémonie présidée par l’actrice Sandrine Kiberlain.

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