Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
10 avril 2020

Le Pérou lance le plan de soutien économique le plus ambitieux d’Amérique latine

perou30

Alors que les mesures de confinement se font plus drastiques, le gouvernement annonce que 12 % du PIB seront investis pour lutter contre l’épidémie.

C’est un plan économique « sans précédent, audacieux et responsable », à hauteur d’une crise « sans précédent », a affirmé la ministre de l’économie et des finances péruvienne, Maria Antonieta Alva, vendredi 3 avril, quelques jours après l’annonce par le chef de l’Etat, Martin Vizcarra, d’un ambitieux plan de relance de l’économie. Au total, 12 % du PIB, soit 26 milliards de dollars (environ 24 milliards d’euros), seront débloqués pour répondre à l’urgence sanitaire et redonner du souffle à une économie au point mort.

Alors que les projections de croissance étaient de l’ordre de 3 à 4 % pour 2020, avec la crise elles se sont effondrées. Les analystes prédisent que la croissance pourrait perdre jusqu’à deux points cette année.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Coronavirus : toute la planète cherche à acheter des masques de protection en Chine

Comme ailleurs dans le monde, le Pérou est confronté à l’épidémie de Covid-19, avec 2 281 cas confirmés et 83 morts selon le dernier bilan, dimanche 5 avril. Le président Vizcarra, qui a décrété très tôt l’état d’urgence – le 15 mars, quand moins d’une centaine de cas étaient répertoriés dans le pays –, a imposé un confinement drastique, la fermeture totale des frontières et un couvre-feu entre 18 heures et 5 heures du matin. Des mesures prolongées jusqu’au 12 avril avec des restrictions chaque fois plus fortes.

Depuis le 2 avril, des jours de sortie sont différenciés pour les hommes et les femmes, trois jours chacun, et interdiction de sortir pour tout le monde le dimanche. Une mesure surprenante – prise aussi au Panama –, justifiée par le fait de limiter l’affluence dans les rues et de simplifier les contrôles. L’économie, elle, est paralysée à hauteur de 70 % selon la Banque centrale péruvienne.

Plan en deux temps

Le plan de relance, salué par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, un organisme de l’ONU, est considéré comme le plus ambitieux du continent. Il se déroulera en deux temps. Une première phase dite « d’endiguement », avec une tranche de 8,5 milliards de dollars pour soutenir le système de santé et faire reculer l’épidémie. L’aide sera débloquée d’urgence alors que dans certaines régions, on manque de tout : équipements de protection, lits, personnel, respirateurs.

« Nous avons les épaules financières pour prendre ces mesures audacieuses », Maria Antonieta Alva, ministre de l’économie du Pérou

Le plan comprend aussi un soutien économique aux plus vulnérables ainsi qu’une aide aux petites et moyennes entreprises, pour lesquelles l’Etat s’est engagé à prendre en charge 35 % des salaires des employés touchant moins de 1 500 soles (400 euros) par mois.

Une autre enveloppe, de plusieurs milliards de dollars, est prévue pour l’après quarantaine – mi-avril, si la levée du confinement est confirmée – afin de réinjecter des liquidités dans l’économie à travers des aides aux entreprises et des investissements dans la dépense publique, sans plus de détail pour le moment.

« Nous avons les épaules financières pour prendre ces mesures audacieuses », a affirmé Mme Alva, la ministre de l’économie. Le Pérou affiche en effet une bonne santé économique, même s’il a enregistré en 2019 son taux de croissance le plus faible depuis une décennie avec 2,2 %. Mais la croissance est loin de profiter à tous les secteurs : 6 millions et demi de pauvres sont recensés, équivalant à 20,5 % de la population.

Le secteur du tourisme très touché

Pour les plus vulnérables, l’aide du gouvernement se traduit par un bono de 380 soles (100 euros) pour les quinze premiers jours de confinement, renouvelable en avril. Une aide qui concernera 2,8 millions de familles en situation de pauvreté et d’extrême pauvreté ainsi que 800 000 travailleurs indépendants, alors que 70 % de la population active péruvienne travaille dans le secteur informel. Beaucoup de ces travailleurs, qui subsistent au jour le jour, sans sécurité sociale ni retraite, continuent de sortir malgré les interdictions et les mesures de confinement car l’aide se fait attendre. Une moitié des bénéficiaires potentiels auraient reçu l’allocation d’urgence jusqu’à présent.

Par ailleurs, 8,5 milliards de crédits assurés par l’Etat seront destinés à 350 000 entreprises, dont 90 % de microentreprises de moins de dix salariés. Une garantie, selon le gouvernement, pour que les entreprises continuent de payer les salaires dans un pays où les allocations chômage n’existent pas.

Des centaines d’entreprises, notamment dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, ont annoncé il y a quelques jours qu’elles ne seraient pas en mesure de payer leurs employés. Elles souhaitent déclencher un mécanisme de « suspension de l’emploi », qui consiste à renvoyer chez eux leurs salariés sans rémunération pour cas de « force majeure », et ce, jusqu’à quatre-vingt-dix jours. Ce qui permet de les réintégrer ensuite, en évitant ainsi les licenciements.

Dans le secteur du tourisme (3,9 % du PIB), un des plus touchés par la crise, 30 000 personnes pourraient être « suspendues » sans solde d’ici à fin avril, selon la chambre du tourisme. Néanmoins la ministre du travail, Sylvia Caceres, réaffirmait dimanche 5 avril, jetant le trouble dans le secteur entrepreneurial, que ce mécanisme n’était pas autorisé pendant la quarantaine mais que d’autres mesures étaient à l’étude.

Amanda Chaparro(Lima, correspondance)

perou666

Publicité
Commentaires
Publicité