Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
28 juin 2020

Le Brésil pourrait payer cher le vol de ses terres

Au Brésil, l’accaparement des terres ne date pas d’aujourd’hui. Les principales victimes sont les habitants de l’« Amazonie légale », une zone protégée par une loi fédérale de 1953 couvrant neuf États (voir infographie). Ce sont des terres publiques où indigènes : 23 % de ces terres amazoniennes sont des réserves où vivent 300 000 Indiens de 80 ethnies.

Un saccage qui s’accélère

Depuis l’élection de Jair Bolsonaro à la tête du Brésil en 2018, ce saccage des terres a empiré. Le président d’extrême droite veut régulariser les titres fonciers de terres acquises illégalement, en déboisant l’Amazonie. C’était sa promesse de campagne, faite aux industriels agricoles et miniers. Le projet de loi devait être voté le 20 mai par les députés. Il a été retiré de l’ordre du jour, après le scandale d’une vidéo clandestine, sur laquelle on entend le ministre de l’Environnement, Ricardo Salles, vouloir profiter de « l’opportunité du fait que la presse soit focalisée sur le coronavirus » pour « assouplir les règles ».

La proposition de loi, connue sous le nom de « PL da grilagem », n’a pas été abandonnée pour autant. Le « grilagem », déclinaison portugaise du mot « grillon »,fait référence à la technique utilisée par les premiers faussaires qui vieillissaient artificiellement les actes de propriété en les enfermant dans des boîtes où déféquaient des insectes…

Le recours aux grillons a cessé, mais le nom a perduré et l’appropriation de terres s’est perfectionnée, accélérée même, sous Bolsonaro. « Le Brésil a perdu 1,5 km² de forêt par heure en 2019, soit un peu plus qu’un terrain de football. Et 99 % de cette déforestation est illégale », selon l’étude de la plateforme scientifique MapBiomas, présentée vendredi.

« Si ce projet de loi Grilagem revient sur la table, il va amnistier des criminels, récompenser des bandits qui ont volé des terres publiques », assure Luiza Lima, porte-parole de Greenpeace Brésil.

Le tollé est international. Au Royaume-Uni, une quarantaine d’entreprises, dont Sainsbury, Tesco, et Marks & Spencer ont menacé de boycotter les produits brésiliens si les parlementaires ne rejetaient pas le projet de loi, le 20 mai. En Allemagne, l’ONG Campact a exigé son retrait pur et simple. Sa pétition a réuni 300 000 signatures en moins d’une semaine, le 14 juin, et le principe a reçu l’aval de deux grandes chaînes de distribution, Aldi Süd et Rewe.

Empêcher le bœuf ou le soja d’arriver dans l’UE

Le 19 juin, c’est le Parlement européen qui s’est saisi de la question. L’eurodéputée des Verts, Anna Cavazzini, a réclamé des « chaînes d’approvisionnement garanties sans déforestation ». La Commission n’y est pas opposée et réfléchirait à une « stratégie plus incisive », a indiqué le commissaire à l’Environnement, Virginijus Sinkevicius, pour empêcher les produits issus de la déforestation d’arriver dans l’UE, à commencer par le bœuf et le soja.

Il y a urgence. Peu d’Européens ont envie de ratifier le traité de libre-échange avec le Mercosur, alors que le Brésil de Bolsonaro domine le bloc sud-américain. Même les parlementaires très libéraux des Pays-Bas ont dit non, le 3 juin.

Publicité
Commentaires
Publicité