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Jours tranquilles à Paris
22 juillet 2020

Avec le plan de relance, Emmanuel Macron vante son action européenne

europe macron fier

Par Claire Gatinois, Audrey Tonnelier - Le Monde

« Ce n’est pas le contribuable français » qui remboursera la dette européenne émise en commun par les vingt-sept pays de l’Union, a assuré le chef de l’Etat mardi sur TF1.

Après les crises inédites accumulées depuis le début de son quinquennat, Emmanuel Macron pense, enfin, tenir « sa » victoire. Une victoire « historique » et européenne arrachée avec la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président du Conseil, Charles Michel, au terme de plus de 90 heures d’âpres négociations à Bruxelles pour s’accorder à vingt-sept sur un plan de relance de quelque 750 milliards d’euros, afin de relever l’économie de l’Union européenne (UE) après la pandémie de Covid-19. « C’est le moment le plus important de la vie de notre Europe depuis la création de l’euro, a assuré le chef d’Etat lors d’une courte interview au JT de 20 heures sur TF1, mardi 21 juillet. Je veux que nos concitoyens [en] mesurent l’importance. »

En intervenant de nouveau à la télévision, en pleine trêve estivale et seulement une semaine après son entretien du 14-Juillet, le président s’est attaché à inscrire cette annonce dans la continuité de son action européenne depuis le début du quinquennat. L’accord entre les Vingt-Sept est le fruit d’un « travail de trois ans entre la France et l’Allemagne » a vanté le locataire de l’Elysée, évoquant son discours de la Sorbonne, le 26 septembre 2017. Quelques mois après son élection, au sein de la prestigieuse université parisienne, « Macron l’Européen » avait affiché son ambition de bâtir une Europe « souveraine, unie, démocratique ». Il était temps, affirmait-il de penser l’Union, non plus seulement en termes économiques, mais aussi en termes de défense et de stratégie politique.

Une dette commune

« Nous nous sommes battus, mais nous l’avons », a insisté le président sur TF1, mardi. De fait, l’Europe, qui avait affiché ses divisions lors de la crise des dettes souveraines en 2010 menaçant la survie de la monnaie unique, et qui n’avait su faire montre de solidarité lors de la crise des migrants, s’accorde aujourd’hui sur un plan de relance d’une ampleur jamais vue, financé par une dette commune. Les Vingt-Sept, emmenés par le président français et la chancelière allemande, ont réussi à convaincre les pays « frugaux » pour ne pas dire « avares » (Pays-Bas, Autriche, Suède et Danemark) de s’engager dans le projet d’une Europe plus fédérale et plus intégrée.

Dans ce schéma, la France est le troisième pays bénéficiaire, derrière l’Italie et l’Espagne. « Nous toucherons 40 milliards d’euros », a précisé le chef de l’Etat. De quoi financer 40 % du plan de relance national. D’un montant total de 100 milliards d’euros sur deux ans, ce dernier doit être présenté en conseil des ministres le 24 août, a précisé Bruno Le Maire, le ministre de l’économie mardi matin, sur France info. Il financera des mesures pour « créer des emplois dans les secteurs industriels et écologiques », a précisé M. Macron, énumérant pêle-mêle « le soutien à nos entreprises, la relance des secteurs stratégiques, les politiques de santé » ou encore « la culture et la politique de l’éducation ».

Outre les volets formation des salariés, investissement industriel – d’une quarantaine de milliards d’euros – et transition écologique, ce plan français comprendra un volet solidarité qui représentera « près d’un quart des dépenses », avec notamment la hausse de l’allocation de rentrée pour un budget total de 500 millions d’euros, avait indiqué quelques heures plus tôt Bruno Le Maire.

Les 40 milliards issus des négociations européennes ne seront financés « ni par notre endettement ni par nos impôts », a promis Emmanuel Macron. « Ce n’est pas le contribuable français qui paiera », a-t-il pris soin de préciser. « L’Etat paiera en 2020, et dès 2021, l’Europe nous remboursera », a aussi assuré Bruno Le Maire.

Un impôt sur les grandes entreprises internationales

En revanche, l’UE va « lever un impôt sur les grandes entreprises internationales, parfois européennes, qui aujourd’hui ne sont pas assez sollicitées et qui vont payer progressivement cette dette par la fiscalité européenne que nous allons bâtir », a expliqué M. Macron. Pour rembourser la dette européenne, les Vingt-Sept comptent « créer des taxes sur le numérique », mais aussi mettre en place un « mécanisme européen de taxe carbone aux frontières » pour « éviter une concurrence déloyale ». Deux allusions à des projets fiscaux en cours de discussion au sein de la Commission, mais qui ne sont pas encore sur les rails à ce jour.

« Les 40 milliards d’euros [alloués à la France] sont des subventions, dont le remboursement sera intégré dans le budget européen à partir de 2027-2028, à travers la contribution nationale de chaque pays », précise-t-on à Bercy. Pour financer le reste du plan de relance français, « environ 35 milliards d’euros seront empruntés sur les marchés, et le reste financé par des opérateurs publics comme la Bpifrance ou la Caisse des dépôts », ajoute-t-on.

Emmanuel Macron peut, ainsi, se vanter d’avoir contribué à soulager la France mais aussi d’avoir redonné aux Français l’image d’une Europe protectrice. Il reste que ses ambitions déclinées lors du discours de la Sorbonne, sur la défense, la sécurité, la régulation d’une économie mondialisée, sont loin d’être atteintes. Pis, ce que le plan de relance offre d’un côté, il le reprend de l’autre. « Les “euphoriques” du jour se feront à coup sûr bien plus discrets lorsqu’il faudra expliquer les coupes substantielles dans la politique agricole, Erasmus ou encore les programmes de recherche et le quasi-abandon des ambitions en sécurité et défense », a affirmé sur Twitter l’eurodéputé (Les Républicains) Arnaud Danjean, coordinateur de la sécurité et la défense pour le Parti populaire européen (PPE), évoquant les « ambitions mortes-nées d’une autonomie stratégique européenne ».

Ainsi, le fonds de défense, réclamé par Paris, passe de 13 à 7 milliards d’euros. Et si Emmanuel Macron a pris soin de déminer, mardi soir, le sujet de la politique agricole commune, assurant que « les négociations ont permis de protéger le revenu de nos agriculteurs pendant sept ans », les sommes dédiées au programme Erasmus, à la recherche à l’espace et même à la santé seront, elles, bel et bien rognées.

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